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Critique de babounette


Ivan Tourgueniev, Fumée (1867)

En 1867, Tourgueniev vit désormais à Baden-Baden ville d'eaux mondaine et internationale, où il a rejoint sa maîtresse Pauline Viardot (et le mari de celle-ci) qui y donne des cours de chant, et où séjourne une importante colonie russe. C'est là qu'il situe son bref roman.
Satire mordante de la bourgeoisie russe, Fumée (Дым), qui se décompose en trois périodes différentes, a provoqué l'indignation d'une partie du public et de la critique. La traduction française est du prince Augustin Galitzine, personnage «très catholique», qui a supprimé les passages «scabreux», rétablis ensuite à l'initiative de Mérimée.

Le projet de mariage de Litvinov et d'Irina, fille du prince Ossinine, se heurte au père de la jeune fille qui bien qu'à peu près ruiné et en disgrâce, rejette cette mésalliance. Invitée un jour au bal de la cour, Irina est remarquée par un jeune général riche et prétentieux, Ratmirov, inspiré par un personnage réel, et part avec lui en abandonnant son fiancé. C'est le premier temps, mais il ne sera révélé que plus tard, dans un retour en arrière du récit

Dix ans plus tard, à Baden-Baden, Litvinov attend l'arrivée de Tatiana, sa fiancée, qu'accompagne sa tante. Il y évite le contact avec ses compatriotes, nombreux au casino, et décrits comme fort superficiels dans une série d'épisodes secondaires. Un jour, il croise son ancien amour, Irina, qui brille au centre d'un petit groupe mondain de compatriotes, mais avec lesquels elle s'ennuie. Elle redécouvre en Litvinov un homme authentique et bon, et manoeuvre fort habilement pour le reconquérir en cachette de son mari. Litvinov sait qu'elle n'arrive pas à la cheville de Tatiana, mais ne peut résister à son charme, et décide d'abandonner sa fiancée comme lui-même avait été abandonné. le bon et lucide Potouguine, l'un des rares personnages positifs du roman, tente en vain de lui ouvrir les yeux, mais en vain. Il annonce qu'il en aime une autre à Tatiana, qui lui rend sa liberté avec beaucoup de noblesse d'esprit et de généreuse abnégation. La tante essaie encore de lui ouvrir les yeux («Il est temps encore»), mais toujours en vain. Litvinov, désormais libre, propose à Irina la fuite commune fort romantique qu'elle avait acceptée, mais elle tergiverse, n'ose plus fuir, et ne lui offre finalement, la mort dans l'âme, qu'une place d'amant secret, de N° 2. Il refuse et décide de repartir. Irina le rejoint sur le quai de la gare et le supplie de revenir, tandis que de son côté, il lui propose de monter dans le train avec lui. Chacun reste amoureux de l'autre, mais elle reste sur le quai, abandonnant Litvinov une seconde fois, de manière encore plus dramatique que la première, pour retourner auprès de son mari et de sa vie morne, rappelant l'épilogue des Trois Soeurs et d'Un mois à la campagne. le roman rappelle aussi Nuits blanches et Premier amour.

Litvinov est rentré en Russie où il gère son domaine, silencieux et solitaire. Il sait que Tatiana vit seule avec sa tante, et décide un jour de lui écrire. Elle l'invite, il se jette à ses pieds, et comme l'écrit Tourgueniev, «Le lecteur aura deviné la suite». Cette fin heureuse n'a été ajoutée qu'in extremis, car à côté de cette histoire d'amour qui finit bien, le roman est l'occasion d'une cruelle galerie de portraits où l'auteur brocarde à coeur joie les courtisans, les slavophiles réactionnaires, et en général toute la haute société et ses bavardages. «Fumées, fumées» répète à plusieurs reprises le héros.

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