Récits d'un chasseur

L'oeuvre phare de Tourguéniev dans laquelle celui-ci raconte à travers vingt-cinq récits distincts qui couvrent des épisodes marquants de la vie quotidienne à la fois des propriétaires terriens et des paysans asservis de 1840 à 1850 dans les régions de Toula, de Koursk et d'Orel. 5 ans lui furent nécessaires pour mener à bien ce travail de création basée sur une observation minutieuse des choses et des étres, ses contemporains qui va susciter la curiosité du monde entier. Les choses étant ici dame la nature. Comment associer le temporel à l'intemporel ? Tourguéniev est lui-même propriétaire terrien, constate la pente que prennent ses confrères à l'égard des paysans qui va glisser sensiblement vers la libération de ces derniers d'un joug quasiment féodal et anachronique. Tourguéniev va transcender ces stigmates d'un temps ancien et ainsi favoriser le processus de transformation. Soyons clairs, cet ordre ancien qui va être réformé sous Alexandre ll une décennie plus tard va connaître bien des résistances, des latences , des arbitrages répondant à un tropisme foncier accordant le beau rôle aux dominants. La volonté de l'Empire impérial russe sera faible ou en tout cas insuffisante et provoquera à terme la révolution, mais c'est tout de même la bagatelle de plus d'un demi-siècle qu'il faudra pour véritablement endiguer le phénomène. On ne va pas subséquemment ici traiter de l'illusion de cette révolution à venir qui est un autre sujet. La toile de fond de notre ami Tourguéniev dans son pavé romanesque de 700 pages est bien de s'inscrire délibérément dans ce mouvement social. Sa part sera d'autant plus significative pour en décrire les dessous qu'il est lui-même chasseur, la nature omniprésente est aussi son sujet ; les récits s'enfilent à ce rythme et vont enflammer l'intelligentsia russe. La parution du livre prendra effet alors que les épisodes le constituant n'auront pas atteint leur terme.

La face des propriétaires terriens ainsi décrite ne sera donc pas à leur avantage. Il n'y aura pas de pusillinanimité chez le célèbre auteur russe. Dès les premiers récits, la charge est violente, sans appel. le ton est donné, le constat presque scientifique est accablant ; et quoi de plus salopard qu'un intendant qui abuse du pouvoir qui lui est donné par le maître ou le régisseur pour châtier la gente paysanne !..on ne peut non plus ne pas mentionner le rôle odieux des serfs domestiques à l'égard de leurs frères non affranchis. L'étendue de ce que je pourrais en dire ici est incomplète, chaque récit, varié, apporte sa couleur locale ..

À lire impérativement pour s'imprégner de la vie à la campagne, surtout dans ses travers tragiques, qui forgeait les 9/10 eme de la société russe au milieu du 19 eme siècle.