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Critique de gabb


Whaou le chouette western que voilà !
Un vrai régal !

Dans la marmite bouillonnante du sieur Trevanian (qui apparemment n'est même pas un habitué du genre !), que des ingrédients de premier choix !
On a la petite bourgade poussiéreuse perdue dans les montagnes du Wyoming, la mine d'argent bientôt décrépite, le justicier mystérieux et son énorme fusil, le gros méchant vraiment méchant, la jeune vierge innocente, le saloon-hotel-tripot-bordel et ses prostituées au grand coeur, le détestable homme d'église (brillamment interperté ici par le révérend Hibbard, qui "à lui seul suffit à te faire regretter que l'arche de Noé ait pas coulé corps et biens !") et toute la galerie de personnages forts en gueule qu'on s'attend forcément à trouver dans un patelin de cet acabit : en bref il ne manque rien !
Tout ça mijote à parfaite température pendant 350 pages, l'impayable écrivain-cuistot ajoute ici une pincée d'ironie mordante, là une bonne louche de fusillades pétaradantes, il touille il touille, jongle habilement avec tous les codes du western ... et le résultat est absolument savoureux !

Et pourtant c'était pas gagné !
Faut dire qu'a priori, Twenty-Mile ne fait pas rêver...
Pour s'en convaincre, suffit d'écouter le bon B.J. Stone, ex-instituteur et doyen de la petite communauté : « la ville est moribonde. Ses habitants sont la lie de l'humanité : les paresseux, les poissards, les perdants, les perdus, les piteux, les péteux, les petits. Et là, je te fais que les P, nom de Dieu ! ».
The place NOT to be, quoi.

Eh ben contrairement à toute attente, ça le fait !
Ça le fait grave, même !
Oh qu'il fut bon d'arpenter "main street" sous un soleil de plomb, de palper l'atmosphère délétère qui règne dans ce bled en déclin, de renifler cette bonne odeur de poudre, de sentir la tempête se lever au loin, d'assister tremblant à l'arrivée en ville du vilain Lieder (j'avais rarement croisé un dingue aussi dingue !) et de ses tristes acolytes, et de voir enfin la résistance s'organiser jusqu'au règlement de compte final !

Et quel panard, surtout, de lire les mots fleuris que l'auteur met dans la bouche de ses personnages ! Les dialogues, nombreux et pleins d'humour, sont sans conteste l'un des gros points forts de ce roman (dont Sergio Leone ou Quentin Tarentino, par exemple, n'auraient sans doute rien trouvé à redire).

En fin d'ouvrage, Trevanian avoue s'être inspiré des mémoires d'un vieil épicier rencontré au hasard d'un vagabondage sur le flanc nord des Medicine Bow Mountains.
L'écrivain lui adresse les remerciements suivants, auxquels on ne peut que souscrire : "je lui suis reconnaissant d'avoir retranscrit les paroles des anciens verbatim, capturant ainsi les idiomes goûteux et les métaphores épaisses qui donnaient à la parlure de l'Ouest son inimitable piment avant qu'elle ne meure sous les coups de boutoir de l'anémique homogénéisation télévisuelle de notre culture."
J'aurais pas dit mieux.

Si t'es comme moi, ami lecteur, si t'aimes les bons, les brutes et les truands, les portraits un peu grand-guignolesques et les aventures trépidantes du grand Ouest (où affleurent quand même par moment des thématiques plus larges : étiolement du rêve américain, fin d'un certain âge d'or, replis identitaires et dérives du patriotisme à outrance), alors charge ton colt et remonte donc à ton tour la vieille voie ferrée jusqu'à Twenty-Mile, pour voir ce qu'il en reste.
Crois moi, tu ne seras pas déçu du voyage !
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