Ça ne marchera pas, me répliquait Lénine. La proportion des forces ne se présente pas ainsi. Voyons, comment feront-ils pour nous diriger du fond de la Russie ? Ça ne marchera pas… Nous sommes un centre stable, nous sommes idéologiquement plus forts, et c’est nous qui dirigerons d’ici.
— Alors, c’est la complète dictature de la rédaction ? demandai-je.
— Et qu’y voyez-vous de mal ? répliqua Lénine. C’est ainsi qu’il en doit être dans la présente situation.
La liaison avec la Russie était toute entre les mains de Lénine. C’était sa femme, Nadejda Konstantinovna Kroupskaïa, qui avait assumé le secrétariat de la rédaction. Elle était au centre de tout le travail d’organisation, recevait les camarades venus de loin, instruisait et accompagnait les partants, fixait les moyens de communication, les lieux de rendez-vous, écrivait les lettres, les chiffrait et les déchiffrait. Dans sa chambre, il y avait presque toujours une odeur de papier brûlé venant des lettres secrètes qu’elle chauffait au-dessus du poêle pour les lire. Et fréquemment elle se plaignait, avec sa douce insistance, de ne pas recevoir assez de lettres, ou de ce que l’on s’était trompé de chiffre, ou de ce que l’on avait écrit à l’encre sympathique de telle façon qu’une ligne grimpait sur l’autre, etc.
Il faut former le gouvernement. Nous sommes là quelques membres du comité central. Courte délibération dans un coin de la chambre.
- Comment l'appeler ? , pense tout haut Lénine. Surtout pas des ministres! Le titre est abject, il a traîné partout.
- On pourrait dire "commissaires", proposais-je; mais il y a beaucoup trop de commissaires à présent... Peut-être "haut-commissaires"... Non, "haut-commissaire" sonne mal... Et si on mettait: "commissaires du peuple" ?
-"Commissaires du peuple ?" Ma foi il me semble que ça pourrait aller... reprend Lénine. Et le gouvernement dans son ensemble ?
-Un soviet, bien entendu, un soviet... Le soviet des commissaires du peuple ? s'écrie Lénine. C'est parfait. Ça sent terriblement la révolution !...
(octobre 1917)
Le marxisme se considère comme l'expression consciente d'un processus historique inconscient.
En tout cas, les représentant de la réaction en Europe sont unanimes dans leurs conclusions: c'est Trotsky, et non pas Staline qui est pour eux le principal adversaire communiste.
... la botte souveraine de la réalité
On dit de l'enfance que c'est le temps le plus heureux d'une existence. En est-il toujours ainsi ? Non. Peu nombreux ceux dont l'enfance est heureuse. L'idéalisation de l'enfance a ses lettres d'origine dans la vieille littérature des privilégiés. Une enfance assurée de tout et, avec surcroît, une enfance sans nuage dans les familles héréditairement riches et instruites, toutes de caresses et de jeux, restait dans la mémoire comme une carrière inondée de soleil à l'orée du chemin de la vie. Les grands seigneurs en littérature ou les plébéiens qui chantèrent les grands seigneurs ont magnifié cette idée de l'enfance toute pénétrée d'esprit aristocratique. L'immense majorité des gens, si seulement ils jettent un coup d'oeil en arrière, aperçoivent au contraire une enfance sombre, mal nourrie, asservie. La vie porte ses coups sur les faibles, et qui donc est plus faible que les enfants ?...
« Le fond politique de la discussion est tellement couvert d'ordures que je n'envie pas l'historien qui plus tard voudra creuser jusque la racine des choses. » De la nouvelle politique économique, extrait.
« la révolution permanente contre le carnage permanent ! Telle est la lutte dont l'enjeu est le sort de l'humanité »
« Jamais on n’a autant menti qu’à l’époque de la « grande guerre émancipatrice ». Si le mensonge était un explosif, il ne serait resté de notre planète que des poussières bien longtemps avant le traité de Versailles.