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Critique de fuji


La bande à Bouboule n'était pas une illusion
La plume de Wendall Utroi a enfin trouvé son écrin aux éditions La Trace et j'en suis ravie. Une longue et belle collaboration qui commence avec ce livre, un livre majeur.
Ce roman sur fond historique a tout pout plaire, un rythme qui vous donne envie de tourner les pages, une écriture fluide et néanmoins nerveuse et cette incomparable façon de resituer une époque et de croquer de beaux portraits d'hommes et de femmes, le tout s'en faire la leçon, le lecteur garde toujours son libre arbitre.
Dans le Nord, l'année 1931 est une année charnière pour la classe de Monsieur Leblanc, un instituteur à l'ancienne qui instruit les jeunes têtes qui lui sont confiées mais qui va plus loin, en adulte conscient des difficultés du monde, il initie ses jeunes à la liberté de pensée et les exhorte à se bien comporter sans préjugés et avec l'esprit ouvert, la bienveillance n'est peut-être pas une option. L'année du certif' voit l'arrivée de Radek, jeune polonais ne parlant pas le français.
La guéguerre existante entre Gontran dit Bouboule à cause de son poids et qui achète l'amitié de ses camarades grâce à une distribution généreuse de bonbons, c'est le fils de l'épicière et Pierre le rêveur, Martin et Auguste qui a une soeur la superbe Eugénie va voler en éclats pour laisser la place à une solidarité qui se transformera en fraternité.
L'instituteur a chargé Pierre d'apprendre le français à Radek, ce dernier est intelligent, volontaire, altruiste mais il a aussi d'autres problèmes à gérer. Auguste aussi a des problèmes mais il a sa fierté et ne veux pas dire pourquoi il arrive tous les jours en retard à l'école. Il est donc puni chaque jour, une punition longue comme un jour sans pain.
Ce sont ces éléments qui vont servir de base à une leçon de vie, une façon pour l'instituteur de concrétiser son enseignement.
Grâce à Pierre, lui le rêveur, le neutre, certains diraient le pleutre qui va se poser les bonnes questions face à son attitude envers Radek, il va cheminer sur une prise de conscience qui va résoudre les problèmes de Radek et ceux d'Auguste et pour cela il va falloir s'investir sur le long terme.
Comme l'a écrit Christian Bobin : « La rencontre est le but et le sens d'une vie humaine. »
Mais à peine le certificat en poche, il faut trouver un métier ou plus rare faire des études.
Pour certains c'est plus compliqué mais finalement cela révèle aussi leur personnalité.
À peine le temps de grandir et la guerre est là.
Les bruits de bottes menacent ; les jeunes qui ont l'âge partent défendre leur pays, les plus jeunes sont menacés d'aller travailler en Allemagne.
Alors la bande à Bouboule va réagir à sa façon, pas question de travailler pour l'ennemi et ils n'ont pas de réseau pour entrer dans la résistance. Ils vont donc traverser la France pour un ailleurs qu'ils n'appréhendent pas car il est difficile d'imaginer ce qui va arriver.
C'est cette aventure que les lecteurs suivent avec passion.
Courage-lâcheté ne serait-ce pas les deux faces d'une même médaille ?
« —Donc t'as peur ! titilla le marchepied, heureux de sa répartie.
Radek resta les yeux rivés sur la route :
—Ouais ! Si tu veux !
—Sans rire ?
—Oui, c'est pas interdit que je sache ! Ça m'ennuierait qu'il vous arrive quelque chose, je ferais exactement pareil pour ma famille. Et comme j'aime vos têtes de fouines, eh bien, voilà ! »
Ils vont se retrouver dans le Vercors haut lieu de la Résistance. Mais en chemin ils vont vivre et affronter l'inimaginable, les personnalités vont se forger et se révéler.
Leur point de chute est la maison de la tante d'Eugénie.
Et notre auteur sait faire de magnifiques portraits de femmes qui n'ont rien à envier à ceux des hommes.
« Vous ne voyez les femmes que comme des demi-êtres, des personnes fragiles qui ont besoin de votre soutien, de votre approbation, de vos conseils, mais la guerre le prouve : nous sommes bel et bien des combattantes. »
Et c'est cette façon que Wendall Utroi a d'humaniser ses personnages de papier qui font que le lecteur vit les histoires qu'ils nous narrent comme s'il était acteur et que les personnages faisaient partie de sa famille ou de ses amis.
En lisant on est happé et le tour de force qu'en on aborde cette période sombre de l'Histoire c'est que la narration n'est jamais dans le jugement, elle courre et nous amène à réfléchir et non à juger.
Qu'aurions-nous fait ? Je crois que cette question est prégnante quand on analyse ce qu'il se passe aujourd'hui, cette haine déversée pour tout et rien, et l'absence d'interrogation et d'approfondissement sur les faits majeurs
Un roman d'une actualité brûlante.
Vous l'aurez compris j'ai adoré ce livre et j'espère si vous ne connaissez pas que vous aurez l'envie de découvrir.
©Chantal Lafon


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