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Critique de BlackKat


Alors… alors…

Le lac est la suite de Vongozero.

Nous avions laissé une dizaine de personnes en bout de course d'une fuite effrénée dans l'hiver russe devant le joug mortel d'une pandémie apocalyptique… Une fois « sauvés », la priorité est de survivre car un miracle n'existe pas pour récompenser ceux qui ont bravé la route, le froid et les dangers.

Le froid polaire est toujours là, la nourriture vient à manquer, la promiscuité entre les individus est lourde… que réserve le lendemain pour des citadins habitués au confort, perdus en pleine nature?

Après Vongozero, où tout est mouvement, action, confrontation, bataille pour un but bien précis – atteindre une île isolée de toute contamination -, Yana Vagner nous impose, dans l'hiver russe, un immobilisme glacé, un huis-clos étouffant, un dénuement d'un autre siècle, une fragilité déroutante.
L'instinct de survie annihile totalement les conventions sociales policées: l'être humain est à nu devant cette situation extrême et dévoile ses aspects les plus triviaux et sombres.
Il faut apprivoiser les fondamentaux de la vie: se nourrir, se protéger. Et le choc de se retour à l'essentiel plonge ce groupe de personnes dans un silence et une apathie mortifère.
Les événements sont étalés sur plusieurs mois, ponctués de quelques tragédies et de trop rares moments de répit, mais le tout s'étire dans une léthargie pesante et stérile.

L'auteur a le talent de traduire la psyché de ses personnages par les silences, les regards et les comportements de chacun, sans éprouver le besoin de se lancer dans de longs discours sur les effets de l'enfermement, de l'angoisse, de la terrible cohabitation humaine imposée. Loin de renforcer la cohésion du groupe, cette île détruit les liens possibles… Et quand les glaces du lac se fracassent pour laisser place au printemps, le soleil est loin de réchauffer et de réunir ces survivants…

Ce roman est une réussite totale du point de vue de l'étude de la nature humaine, des interactions au sein d'un groupe, des tensions psychologiques exacerbées par un huis-clos imposé et une situation extrême de survie. L'auteur a su créer davantage une ambiance et ainsi éviter le piège tentant de la décortication des esprits de chacun: elle suggère plus qu'elle ne décrit, elle laisse au lecteur le champ libre pour juger, prendre parti, appréhender l'étendue de l'étiolement de l'homme social vers l'homme brut de décoffrage.

Les descriptions de la nature russe sont magnifiques, forcément givrantes, et s'harmonisent idéalement avec ce sentiment de mort lente ou de folie inévitable. Car si la nature offre mille présents à qui sait la décrypter, elle est volontiers inhospitalière au possible à l'être humain ignorant et devenu inadapté au fil des siècles de modernité.

Toutefois, au contraire de Vongozero, je n'ai pas été autant captivée par cet épisode.
Tout au long de ma lecture, je trépignais avec l'envie de tous les secouer un peu, beaucoup…
Et la fin m'a laissée réellement une grande frustration, un goût d'inachevé, une conclusion un peu bâclée après tous ces mois d'engourdissement glacé, le destin des survivants restant dans l'inconnu, l'incertitude et les derniers événements n'ayant pas été, à mon sens, suffisamment exploités.

Malgré tout c'est une lecture passionnante et la plume de Yana Vagner est parfaitement bien maîtrisée! Mais… Vongozero a irrémédiablement ma préférence!
Lien : http://livrenvieblackkatsblo..
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