Il est difficile de réaliser que l'histoire est écrite par des gens d'aujourd'hui, difficile de comprendre que ce que recouvre le mot "maintenant" a changé, difficile d'admettre que les gens qui ont vécu autrefois ont, comme nous, accumulé les tentatives, les erreurs et les décisions délicates à prendre, dont certaines ont, comme pour nous, entraîné des peines et des souffrances. Difficile enfin d'accepter l'idée que ceux qui nous ont précédés ont été confrontés au chaos et à l'incompréhensibilité du réel, exactement comme nous le sommes aujourd'hui.
Nous faisons comme si nous voulions tout apprendre et tout comprendre du passé, mais en réalité, c'est nous-mêmes que nous contemplons.
Le silence qui entoure le cousin à la bombe m’inquiète. Les traces argentées que j’ai vu scintiller au soleil ces dernières semaines m’avaient donné le sentiment de jouir d’une vue d’ensemble. Lentement mais sûrement, des détails apparaissaient sur le blanc de la carte. Maintenant, la vacuité du paysage recommence à hanter mes pensées. D. dit que je ferais mieux de me concentrer sur la vie à naître que sur celle d’un mort. Mais je crois que je suis devenue incapable de les considérer isolément l’une de l’autre.
Mes recherches commencent à le fatiguer. On finit par se chamailler, et on en revient toujours au même point, D. dit que ce n’est qu’un nom, à quoi je réponds qu’un nom est toujours plus qu’un nom. La façon dont on appelle quelqu’un est un rappel, le premier et le plus important qu’on ne reçoive jamais.
Ce n’est qu’un mot, assène D.
C’est un repère.
Cela ne dit rien de la personne qu’il va devenir, réplique-t-il.
Cela dit tout de la personne que je veux qu’il devienne.
On joue ainsi au ping-pong, jusqu’au moment où D. lève les bras au ciel, comme s’il appelait à la rescousse une aide supérieure, et abandonne la partie en secouant la tête. Ce n’est pas qu’il me donne raison, mais il a lu quelque part ça ne sert à rien de discuter avec une femme enceinte.
- On ne rend absolument pas justice aux morts en racontant une histoire . Au contraire , je crois bien que c’est l’inverse.
Nous faisons comme si nous voulions tout apprendre ou tout comprendre du passé , mais ne réalité , c’est nous - mêmes que nous contemplons .
Mes yeux tombent sur une phrase : ´ D’abord il y a eu la guerre , ensuite il y a eu le récit de la guerre ´
Mais il est difficile de réaliser que l’histoire est écrite par des gens d’aujourd’hui , difficile de comprendre que ce que recouvre le mot ´ maintenant ´ a changé , difficile d’admettre que les gens qui ont vécu autrefois ont , comme nous , accumulé les tentatives , les erreurs et les décisions délicates à prendre , dont certaines ont , comme pour nous , entraîné des peines et des souffrances .Difficile enfin d'accepter l’idée que ceux qui nous ont précédés , ont été confrontés au chaos et à l’incompréhension du réel , exactement comme nous le sommes aujourd’hui.
Pour la première fois , j’entends à quel point ´ L’histoire avec un grand H ´ est comme un être vivant , quelqu’un envers qui on est redevable .