Citations sur Le soi hanté : Dissociation structurelle et traitement .. (103)
Les patients dissociatifs sont connus pour avoir de réelles difficultés à intégrer les informations qui mettent en cause leur vision du monde et qui créent une dissonance cognitive, ou qui suscitent des émotions douloureuses. Ils peuvent déformer les contenus, en raison de perceptions inexactes ou de croyances préréfléchies ; certaines parties peuvent aussi bloquer des informations. Pour cette raison, il est souvent utile de leur noter ou de leur enregistrer les renseignements essentiels, pour qu'ils puissent les emmener chez eux, s'ils pensent que cela peut leur servir. Parfois, il est utile de leur prescrire des lectures complémentaires ou d'autres tâches à faire à la maison. Le plus important est que le patient s'exerce ; la maîtrise vient de la répétition.
De façon générale, le patient doit comprendre que l'achèvement des actions restées non terminées est une tâche permanente de l'existence, y compris de la thérapie.
Le thérapeute doit savoir qu'une petite proportion de patients peut continuer de subir des maltraitances sans le lui dire. Ces patients sont en général gravement dissociatifs, avec des PAN [Personnalité Apparemment Normale] amnésiques des maltraitances ou qui ne réalisent pas, pour une raison ou une autre, qu'elles se poursuivent.
Quand le patient se sent accepté, soutenu, compris par le thérapeute, il est plus enclin à s'embarquer pour un voyage thérapeutique exigeant. Le partage des informations concernant le diagnostic et les points essentiels du traitement doivent amener le thérapeute à discuter : (1) les problèmes identifiés, et leur possible origine dans la dissociation structurelle d'origine traumatique ; (2) les forces et les faiblesses du patient : (3) la façon dont patient et thérapeute peuvent travailler au mieux ensemble, en « équipe thérapeutique », pour résoudre les problèmes identifiés ; et (4) la façon dont les parties dissociatives peuvent travailler ensemble et avec le thérapeute.
[...]
En revanche, refuser de partager les informations diagnostiques n'aide pas le patient qui essaye de comprendre les symptômes complexes et perturbants avec lesquels il vit. Malgré ses difficultés d'intégration, avec une aide adéquate du thérapeute, le patient peut trouver la force de réaliser graduellement la nature du diagnostic.
... de nombreux survivants ont été re-traumatisés par des thérapeutes qui avaient une compréhension inadéquate et des compétences insuffisantes pour traiter des difficultés complexes d'origine traumatique, qui ont des préjugés infondés à l'encontre des troubles dissociatifs, ou des réactions contre-transférentielles compliquées. Nous pensons que nombre de ces échecs thérapeutiques viennent de thérapeutes qui trouvent difficile de respecter le rythme du patient traumatisé, et ne considèrent pas toujours son histoire traumatique, son manque de compétences mentales ainsi que sa dissociation structurelle comme des éléments essentiels dans la planification d'un traitement orienté par phase.
Certains thérapeutes ont dit qu'essayer d'obtenir des réponses claires et succinctes de leurs patients dissociatifs ressemble à essayer de « rassembler des chats ». Au cours de l'évaluation initiale d'un patient traumatisé, il n'est pas rare que le thérapeute ait l'impression de « planer », d'avoir sommeil, d'être confus, étourdi ou distrait. Les thérapeutes ont décrit certaines e ces expériences déconcertantes : « C'est comme prendre un somnifère » ; « être hypnotisé » ; « se promener dans un espace plein de fumée et de miroirs » ; « avoir un pied en dehors de la réalité » ou « cesser brusquement de penser ». Le clinicien doit arriver à s'entraîner à rester à un niveau mental élevé, en maintenant un degré d'attention important.
Le traitement à recommander... consiste en la restauration de la [partie de la] personnalité « émotionnelle » privée de son caractère pathologique, égaré, incontrôlable et sa réunification avec la [partie de la] personnalité « apparemment normale. »
Myers observait que, lorsque cette réintégration s'est mise en place en thérapie,
il devient immédiatement évident que la [partie de la] personnalité apparemment normale était largement différente, tant au niveau de l'apparence physique et du comportement que sur le plan mental, de la personnalité complètement normale ainsi finalement obtenue.Les maux de tête et les rêves disparaissent ; même les réflexes peuvent changer ; et tous les symptômes hystériques [c'est-à-dire dissociatifs] sont bannis.
... un patient disait avec colère à son thérapeute : « Vous voulez me faire changer, comme ça je ne serai plus moi-même : vous ne m'acceptez pas comme je suis ! »
... beaucoup de parties dissociatives se redoutent, se méprisent ou se comprennent mal les unes les autres. Quand au cours de leurs interactions, elles expriment leurs émotions ou leurs pensées préréfléchies, il s'ensuit parfois des boucles de feedback négatif sans fin, qui peuvent finir par mener la personne à un épuisement post-traumatique.
Sally, une étudiante de troisième cycle souffrant de DDNOS [Trouble dissociatif non spécifié], entendait une voix critique qui la traitait d'imbécile chaque fois qu'elle essayait de finir d'écrire un difficile rapport de recherche. La PE [Personnalité Emotionnelle] à qui appartenait cette voix avait secrètement peur d'un échec (phobie de la prise saine de risques) et sabotait donc le travail de la PAN [Personnalité Apparemment Normale] de Sally. Quand la PAN entendait la voix de la PE, qui était devenue un stimulus conditionnel intéroceptif pour elle dans la mesure où elle renvoyait à une critique violente, son action substitutive préréfléchie était de se mettre à boire pour noyer cette voix en elle, avec pour résultat que Sally, ivre, ne finissait pas son rapport. Cette voix redoutée et méprisée revenait alors avec une violence renouvelée, pleine de rage contre l'échec de Sally qui éveillait en elle une honte massive. Plus la PAN de Sally entendait la voix, plus elle se sentait déprimée et nulle. Pour éviter ces sentiments, elle continuait à boire, ce qui menait à de nouvelles réprimandes internes de la PE. Sally fut finalement hospitalisée pour toxicomanie et tendances suicidaires.
Le stimulus neutre peut devenir (dés-)agréable par nature après une seule association avec le stimulus (dés-)agréable. Par exemple, une personne a du plaisir pendant un abus sexuel, le plaisir sexuel peut devenir pour elle aversif en soi.