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Critique de Presence


Ce tome fait suite à Entre filles (épisodes 32 à 36). Il contient les épisodes 37 à 42, initialement parus en 2005/2006. le scénario est de Brian K. Vaughan, les dessins de Pia Guerra (épisodes 37 à 39) et Goran Sudzuka (épisodes 40 à 42) avec un encage de José Marzan junior, une mise en couleurs de Zylonol, et des couvertures de Massimo Carnevale.

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Épisodes 37 à 39 - le bâtiment du capitaine Belleville fait escale dans le port de Melbourne. Yorick Brown réussit à convaincre l'agent 355 de profiter du temps de mouillage (avant de repartir pour le Japon) pour aller chercher des indices sur l'endroit où se trouve Beth Deville, sa fiancée. Dans la même ville se trouve Paloma West (une reporter pour le compte du journal "Monthly Visitor") demandant à toutes les femmes qu'elle interroge si elles ont vu un homme récemment, insinuant qu'elles peuvent enjoliver la vérité (= mentir, en bon français) du moment que cela donne une bonne histoire qui fera rêver les lectrices du journal. Elle finit par photographier Yorick nu de face.

Après avoir été pris en charge par la marine australienne, l'agent 355, Alison Mann et Yorick se retrouvent à Melbourne. Yorick peut enfin envisager de se mettre à la recherche de Beth Deville, sauf que les femmes qui l'entourent sont opposées à ce projet, d'autres sujets plus urgents réclamant leur présence au Japon. Dès le début de cette partie, le lecteur sent bien qu'il s'agira d'un rendez-vous manqué entre Beth et Yorick et que l'intérêt de ce passage est à chercher ailleurs.

Brian K. Vaughan annonce la couleur dès la première page avec cette journaliste interrogeant des femmes par le biais de questions très orientées (pour ne pas dire que la réponse souhaitée est incluse dans la question posée). Il y a donc une petite charge contre la presse à sensation, mais guère méchante. Vaughan se contente de répéter que la disparition des hommes n'équivaut pas à la disparition des défauts de l'humanité en tant que race, que la moitié femelle de la population est responsable des maux de l'humanité à part égale de la moitié mâle. Il y a même un passage fleurant bon le protectionnisme à base de racisme primaire, peu flatteur pour ces dames. le lecteur suit donc les aventures de Yorick et 355 dans la ville, pendant qu'Alison Mann s'offre une partie de cerf-volant. Vaughan n'oublie pas les références culturelles pointues : Marha Gelhorn, femme grand reporter du vingtième siècle (et troisième épouse d'Ernest Hemingway) et Erica Jong. L'agent 355 n'a pas oublié l'utilité de la Burqa et Yorick est toujours aussi pince-sans-rire avec une allusion sarcastique : "Abraham Lincoln avait un meilleur garde du corps" (pour l'explication en comics : The murder of Abraham Lincoln de Rick Geary). Enfin le lecteur a le droit à son quota d'action, depuis les coups poing, jusqu'aux coups de feu, en passant par la chute de hauteur.

Pia Guerra est toujours égale à elle-même avec des dessins très facilement assimilables; mais assez fades (avec une part de responsabilité plus ou moins grande imputable à José Marzan). Par contre ses dessins sont en parfaite adéquation avec le scénario dès qu'il s'agit de scènes dédiées aux relations inter individus. Vaughan en est à un point de son intrigue où la somme des épisodes précédents a abouti à dessiner un portrait nuancé des personnages principaux (au moins 355, Alison Mann et Yorick). Leurs attitudes physiques, leurs petits gestes et leur positionnement respectif l'un par rapport à l'autre transmettent plus d'information que les dialogues sur leur réel état d'esprit et sur leurs sentiments. Si le lecteur peut finir par se lasser de ces images trop propres sur elles, trop sages, parfois stéréotypées (par exemple la chute depuis le balcon), il se rend compte qu'elles étoffent le caractère des personnages de manière significative.

D'un côté, Vaughan s'offre une pause dans son intrigue, ce qui peut paraître comme une escale un peu longue à l'utilité limitée. de l'autre, il met en place des briques pour construire la suite de son récit et il offre de beaux moments d'intimité affective avec les personnages principaux, et même secondaires (ce moment d'une rare sensibilité quand une femme est surprise en train de se teindre les cheveux).

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Épisode 40 - À Cooksfield en Californie, Hero Brown retrouve l'autre Beth et lui remet une lettre de Yorick. Les 2 sont prises en otages par une bonne soeur et 2 gardes suisses, représentant le Vatican. Épisode 41 - Devant l'imminence d'une confrontation armée, l'agent 355 se souvient de son père, de l'agent qui l'a recrutée pour le Culper Ring, ainsi que de sa formation. Épisode 42 - le lecteur découvre où est né Esperluette, comment la ninja Toyota l'a trouvé et ce qu'il est devenu.

Brian K. Vaughan effectue une autre petite pause dans l'intrigue générale pour faire un point sur plusieurs personnages. Qu'est devenue Hero Brown ? La réponse permet également de prendre des nouvelles de Beth (la deuxième rencontrée dans l'histoire, pas Beth Deville), et de savoir comment a évolué l'état d'esprit d'Hero. Il développe ensuite les origines (ou les années formatives de 2 personnages : 355, puis Esperluette. Pour 355, le lecteur découvre des circonstances tragiques (il s'y attendait un peu) et trouve plus d'intérêt à la mécanique même de recrutement du Culper Ring. Les dessins de Sudzuka reproduisent fidèlement l'apparence de ceux de Guerra pour un résultat aussi fade (peut-être un peu plus de cadrages inclinés). L'origine d'Esperluette fournit un début de réponse potentielle aux raisons de sa survie. Les dessins de Sudzuka sont un peu plus personnels, en particulier en ce qui concerne les décors qui sont moins fades. D'un point de vue graphique, ce sont finalement les couvertures de Carnevale qui sont les plus intéressantes, avec une approche de la peinture qui peut rappeler celle de Dan Brereton.

Brian K. Vaughan restreint les références à la portion congrue (l'évocation de 1.000 machines écrire évoquant le mythe d'un millier de singes enfermés dans une pièce et occupés à taper sur des machines à écrire qui finiront, avec assez de temps, par recréer les oeuvres de Shakespeare). Il joue sur un nouveau registre d'humour avec les gardes suisses féminines et la conséquence "logique" de la volonté de perpétuer la papauté (logique poussée jusqu'à une extrémité absurde).

Étrangement, ces épisodes consacrés à 1 ou 2 personnages ne disposent pas de la même charge émotionnelle que les précédents, peut-être du fait d'interactions réduites. le sort de la race humaine continue d'être au centre des préoccupations dans le tome suivant : Monnaie de singe (épisodes 43 à 48).
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