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Critique de migdal


Interpellé par sa superbe couverture et conquis par le résumé de « L'enfant Rouge » je me suis plongé dans le témoignage de Jean Védrines qui, après avoir évoqué son grand père Jules mort aux commandes de son bimoteur en inaugurant la ligne Paris-Rome en 1919, raconte la vie de son père Henri, orphelin à 7 ans (1911-1995) qui fut secrétaire général de la CGT de la métallurgie puis député communiste de l'Allier de 1945 à 1958 et de 1968 à 1973.

Henri Védrines (un patronyme qui rime avec Lénine et Staline) est le seul communiste à avoir gagné une circonscription lors des législatives de 1968. Cet électricien est entré dans la légende comme meneur syndicaliste en 1936 puis comme résistant, prisonnier et déporté (1940-1945).

Son fils Jean grandit entouré des photos de Marcel Cachin, Maurice Thorez, Krouchtchev, Tito, découvre les locaux du Parti, et écoute religieusement les discussions des camarades. Avec un ami de son âge, il explore Montluçon et l'Allier, creuse l'histoire locale jusqu'à ses racines romaines et s'émerveille de l'architecture régionale.

En 1968, âgé d'une dizaine d'années, il accompagne ses parents durant un congés printanier qui les conduit à Nice où son père est convoqué par les instances du parti. En mai les « événements » l'enthousiasment ainsi que sa mère, pendant son père déprime … Jean découvre les fissures de la légende et comprend que l'allégorie « résistant, prisonnier et déporté » est remise en cause. Contestation qui ne va pas jusqu'à l'interroger sur le pacte germano soviétique de 1939.

L'histoire de cet enfant rouge m'a passionné car, né au Havre, municipalité communiste la plus importante d'Europe de l'ouest, je connais plusieurs camarades qui ont vécu des parcours comparables et ont progressivement perdu la foi communiste entre 1967 et 1990. Camarades qui passaient leurs étés dans des colonies de vacances en Crimée où, entre deux baignades, ils étaient endoctrinés par le parti et revenaient en récitant que le mur de Berlin avait pour but de ralentir l'exode des élites vers le paradis soviétique.

Mais Jean Védrines n'est pas seulement un « rouge » c'est un paysan « tricolore » (comme la couverture du livre) qui écoute et observe ses proches et nous transmet leur lumineux témoignage dans une langue émaillée d'expressions régionales qui m'ont rappelé « la mare au diable » et George Sand. Véritable poème en prose ce récit éblouit par la richesse de son lexique et la musicalité de ses phrases.

L'auteur conclut en confessant « Le père était l'homme de ses faiblesses et l'armée rouge n'avait pas voulu de lui. J'ai son chagrin maintenant ». Par delà ce chagrin, c'est un témoignage filial d'admiration que nous offre l'enfant rouge.

PS : sur mai 68 et le PC :
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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