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Critique de KrisPy


Quand on a 14 ans, comme à 17 chez Rimbaud, on n'est pas sérieux. Quand on est ado à Berlin Ouest, on fait n'importe quoi des fois, juste parce qu'on se sent vivant et invincible. Et ça les adultes ne s'en rappellent que quand ça les arrange, comment ils étaient eux aussi à 14 ans. Cette envie de bouffer le monde, de vivre libre, de faire des trucs "démonts", de parler un langage spéciale et marrant, car rire c'est important et évident, comme respirer, comme aimer. Mais ça déjà, ça devient un truc d'adulte, aimer...
On peut s'entrainer à faire l'adulte, faire semblant, mais c'est drôle un moment, comme d'aguicher les hommes et faire semblant d'être une femme qui connait les choses du sexe, ça va un moment. Heureusement on a que 14 ans, et sur la grande horloge, il nous reste encore pas mal de temps avant de sauter le pas.
Pour nous y aider on a le Lait de Tigre - un truc inventé par Jameelah, ou peut-être par Nini - un tiers lait, un tiers jus de fruit, un tiers Mariacron, cet alcool de vin allemand à 36°, et avec ça dans le bide toute la journée, on se sent bien, on se sent fortes pour faire nos conneries et pour en rigoler.
On se retrouve avec les autres au Planète, ou à l'aire de jeux, et on traine avec Amir, Jameelah, Nico, Lukas. Jameelah est amoureuse de Lukas, et Nini et Nico, ça pourrait se faire depuis le temps qu'ils se connaissent.
Et puis il y a le ténébreux Tarik, le grand-frère d'Amir, et Jasna, leur demi-soeur, qui veut trop faire la belle avec Dragan le serbe. Et ça ça plait pas à Tarik... Ils sont bosniaques eux.
Pour Jameelah et sa mère, réfugiées d'Irak, ça sent pas bon non plus : risque de retour au pays à cause de l'immigration.
Cet été est chaud, dans tous les sens du terme, et en plus, on devient adulte sans s'en apercevoir... c'est traitre, on voit rien venir, alors qu'on s'est préparé.

Lait de Tigre est un grand roman. On pense à tout un tas de livres et de films en le lisant - dans le désordre : Ghost World ; Cours Lola, cours ; Lila dit ça ; moi Christiane F. ; L'herbe bleue ; une pointe de John Fante, de Djian, de Bukowski même... -.
Ce récit, si vivant, si vibrant de jeunesse et de justesse m'a profondément émue.
Le style simple, presque enfantin, révèle et met en valeur un contenu très profond, avec une vision très universelle des choses.
C'est le récit d'une ado qui devient femme, mais aussi d'une génération qui a perdu ses illusions et ne croient plus en la logique des adultes, et qui se tourne vers des valeurs sûres comme l'amitié et la créativité pour réinventer un monde à sa mesure.
Je remercie chaleureusement Babelio et les éditions Belfond pour m'avoir fait découvrir ce livre et cette auteure.
Mention spéciale aussi pour la traductrice Mathilde Sobottke qui a su rendre plausibles et cohérents les jeux de mots de Nini et Jameelah.
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