Chaque soir, en ma petite méditation, ces images qui se succèdent : une flamme infime, vacillante et vive, qui devient feu pour s’emparer de mon corps, après ma mort, et le réduit en cendre ; puis cette cendre qui se diffuse, à tous vents, comme une semence, dans un champ, les montagnes, une savane, sous le pas tranquille d’un troupeau d’éléphants.
Et moi je soupire de soulagement, enfin affranchie de l’angoisse, n’ayant plus rien à craindre pour ce corps aujourd’hui si fragile, enfin soulagée de moi.
L’origine est toujours devant nous.
Mais ne se fait-on aussi soi-même, par les mythes qu'on se choisit, les romans qu'on lit et puis qu'on écrit, les histoires qu'on se raconte et celles qu'on finit par vivre ?
Cette intensité même que vous cherchez dans les produits, que jamais je ne tente de vous y faire seulement renoncer - mais plutôt de la situer ailleurs.
Mais quelle délivrance
que cette vacance
si vaste, éternelle
cette grande simplification
cette régression immense
nous ramenant à ce temps de l’enfance
où l’on ne savait pas
seulement parler
ni marcher
où l’on restait assis
toute la journée
à regarder
ce qui passe
un pigeon, un moineau
un lézard
attentif au ténu, au furtif
à s’en émerveiller
sans parler
du soleil qui se lève
ce temps où l’on vivait comme le soleil
dans une naissance sans cesse recommencée.
Maintenant je sais
que je ne te rencontrerai
que dans cette solitude
élargie, infinie
j’ai fini de le regretter
car qu’est-ce que l’amour
sinon une autre façon d’être seul
encore plus profondément
s’il est possible
plus radicalement
et à jamais.
L’autre comme horizon, qui recule à mesure qu’on s’avance.
L’autre comme asymptote, qu’on n’atteindrait qu’à l’infini.
Ces mots d’Ovide qui m’anéantirent : « vouloir n’est rien, c’est désirer qu’il faut » (L’art d’aimer). Entre vouloir et désirer : la place qu’on laisse à ce qui de l’autre échappe ? Serait-ce de ne pas la lui avoir faite, de trop vouloir, que si rarement j’éveillai le désir ?
En ne vous aimant jamais que lointains, difficiles d’accès, en faisant de vous des dieux, vous dirais-je d’emblée : « noli me tangere » - « je vous aime tellement que vous ne pourrez m’approcher » ?
Le psy comme simple passeur – Charon inversé qui tenterait de ramener de la mort vers la vie.