Après avoir survécu ou tsunami qui a détruit ma maison, à la peste qui a emporté ma famille, au camp de la mort qui a anéanti mon espoir, à la gamine innocente frappée par ma balle, je suis en phase terminale,
fichue, achevée. La question été si, mais quand.
– C’est ça, Cassie, pleure ! a-t-il répliqué d’un ton amer. Pleure, Cassie. Pleure pour elle. Pleure pour tous les enfants. Ils ne peuvent pas t’entendre, ni te voir, ni comprendre ta souffrance, mais chiale pour eux. Une larme pour chacun d’eux, vas-y, remplis ce putain d’océan de l’horreur, et pleure ! Tu sais que j’ai raison. Que je n’ai pas le choix ! Et que Ringer avait raison aussi. Tout ça, c’est une question de risque. Ça l’a toujours été. Et si une seule petite fille doit mourir pour que six personnes puissent vivre, alors ce sera le prix à payer. C’est le prix, Cassie !
- J'emmène Teacup et Poundcake. Toi, les autres. En faisant comme ça on double nos chances.
- Pourquoi s'arrêter à ça ? Je lui ai demandé. Pourquoi ne pas se séparer tous ? Nos chances seraient quadruplées.
- Sextuplées, m-a-t-elle corrigée.
- Bon, je ne suis pas un génie des maths, a dit Ben, mais je pense qu'en se séparant ainsi on fait exactement leur jeu. C'est ce qu'ils veulent : nous isoler, puis nous exterminer.
Il n'y a plus aucune limite entre nous. Aucune séparation. Le vide est rempli. Le néant, défié.
Les battements de nos coeur, le rythme de nos souffles, et les étoiles tournoyantes que nous ne pouvons voir, qui marquent le temps, mesurant les intervalles de plus en plus courts jusqu'à la fin de nous, de lui et de moi, et de tout le reste.
L'incertitude de mon expérience m'écrase. Je me noie dans une mer infinie. Je sombre lentement, le poids des profondeurs obscures m'entraînant vers le bas, forçant l'air hors de mes poumons, broyant mon cœur.