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Critique de HundredDreams


« Aucune souffrance n'est plus sacrée que celle qui par pudeur n'ose pas se manifester. »
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Après « 24 heures de la vie d'une femme », je suis toujours aussi conquise par la magnifique écriture, la justesse et la délicatesse de ses mots de Stefan Zweig, son style élégant qui met à nu les sentiments, les désirs et les pulsions, sans tomber dans la mièvrerie ou l'hypocrisie.
J'ai choisi le format audio pour ce roman et la magie a opéré. Je me suis laissée emporter par la beauté du texte. Zweig est un magicien. Avec quel talent il réussit à retranscrire les sentiments de ce jeune homme dévoré par une passion douloureuse et dévorante pour son vieux professeur.
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Ce roman est celui d'une rencontre, le genre de rencontre qui change toute une vie. Roland va découvrir le goût pour les études grâce à un professeur de littérature anglaise, passionné par les oeuvres de Shakespeare.
Habitant une petite chambre au-dessus de l'appartement de son professeur, le jeune homme va entrer rapidement dans l'intimité du couple, poussé par l'envie d'apprendre, mais aussi et surtout littéralement attiré vers cet homme âgé charismatique, comme un papillon de nuit attiré vers une flamme.
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La relation triangulaire qui va se former, Roland, le professeur et son épouse, est captivante.
L'histoire se met subtilement en place. L'évolution des sentiments est très bien décrite, l'atmosphère complexe et équivoque devient progressivement lourde, douloureuse. Une multitude de sentiments affluent, se bousculent et s'entrechoquent : fascination, attirance, tourment, tristesse, amour jusqu'à la souffrance, jalousie, honte, haine…
« C'est en vain que je cherchais à me tranquilliser : comme cousu dans le sac noir d'un cauchemar infrangible, je luttais de toutes mes forces pour trouver une explication et pour sortir de la confusion mystérieuse de ces sentiments contradictoires. »
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Stefan Zweig décrit Roland comme un jeune homme vulnérable, solitaire. Très vite assailli par des sentiments forts, étranges et ambigus pour son professeur devenu son mentor, son maître, l'auteur met en lumière avec justesse et précision le mal-être de cet étudiant face à cette attirance, à une époque où la tolérance n'était pas une vertu dont on pouvait se vanter.
« Près de lui je brûlais de souffrance et loin de lui, mon coeur se glaçait ; sans cesse, j'étais déçu par sa dissimulation sans qu'aucun signe vînt me rassurer, et le moindre hasard jetait en moi la confusion ! »
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L'intrigue monte en puissance, le jeu des mots, des regards et des gestes, créant une tension, composant un tableau du drame qui se joue. Malgré un récit très court, l'auteur réussit à nous faire entrer dans la tête du jeune homme, et on a l'impression de le connaître encore plus intimement que certains de nos proches. La fine étude psychologique de chaque personnage nous permet d'être au coeur de ses émotions et de ressentir son trouble, le contrôle de ses pulsions, ses peurs, sa honte, ...
Captivant jusqu'au dénouement final. Les dernières pages de cette nouvelle sont un vrai plaisir littéraire.
Le dernier paragraphe de cette nouvelle est un de mes passages préférés, mais je ne peux l'écrire sans vous révéler la fin de l'histoire. Vous le découvrirez en le lisant...
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Je suis impressionnée par la justesse des mots, à la fois humains, poétiques et profonds de l'auteur. Beaucoup de phrases du texte pourraient être de merveilleuses citations.
Comme « les 24 heures d'une femme », « La confusion des sentiments » est un magnifique roman, touchant et troublant.
Une oeuvre audacieuse qui aborde avec délicatesse le sujet de l'homosexualité.
Stefan Zweig est assurément un auteur à lire.
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