AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de NicolaK


Le printemps au Prater est la seconde nouvelle écrite par Zweig alors qu'il avait 19 ans. Elle arrive juste après Rêves oubliés. Oui, je lis les bibliographies dans l'ordre, même si je m'autopardonne de m'être tout d'abord jetée sur le joueur d'échecs.
Cette nouvelle est ancrée dans la vie autrichienne, le personnage principal du récit étant bien "Le Prater", une enclave de nature prise dans la ville, un endroit béni des dieux, surtout en cette saison à laquelle Zweig dédie un hymne païen : « Et le soleil déversait la splendeur de ses ors sur l'impérissable merveille de sa création – le printemps au Prater. »
"Le Prater est une grande étendue verte située entre le Danube et le canal du Danube. Il regroupe la Grande Roue, symbole de la ville avec ses 65 mètres de hauteur, une fête foraine permanente et un immense parc. le Prater tirerait son nom du mot pratum (du latin, « prairie »). D'aucuns disent que Prater viendrait plutôt de Brater, qui peut être traduit par « brochette » ou évoquer l'objet utilisé pour faire des grillades (en référence à la forme étirée du Prater). le Prater est en fait constitué de deux zones : un grand terrain d'attraction avec des manèges, des stands, des buvettes et des guinguettes ; c'est cette partie que les Viennois appellent d'ordinaire le WurstelpraterI (le mot apparaît une fois dans le texte) et où vont s'amuser, le soir, les deux amoureux de la nouvelle. le « Prater vert » lui est contigu : cette vaste zone de forêts et de prairies était autrefois une réserve de chasse, elle fut ouverte à la population par l'empereur Joseph II. C'est là que se rencontrent au début les deux jeunes gens et c'est cette partie qui donne son titre à la nouvelle."
Cet intermède culturel nous est offert par l'auteur de la préface. Rendons à César...
.
C'est jour de derby, tout le gratin est là, mais la jeune Lizzie, Lise pour les intimes et ceux qui la connaissaient avant son ascension sociale, courtisane de son état, se doit de s'y montrer. Las, la couturière n'a pas livré sa somptueuse robe.
Désireuse d'assister à l'événement coûte que coûte, elle déniche une robe modeste dans le fond de son placard et l'enfile pour assister à la fête incognito.
Ce faisant, elle redevient la jeune fille qu'elle était, dans toute sa simplicité, et croise un jeune étudiant, Hans. Ils tombent amoureux en un regard et Lizzie est à nouveau Lise, gaie, impétueuse, exubérante... tout ce qu'elle s'efforce d'enfouir depuis si longtemps qu'elle l'avait oublié.
Mais le fond a peu d'importance. L'histoire est banale et m'aurait probablement ennuyée si elle avait été narrée par tout autre que Stefan Zweig.
La magie réside dans son art de décrire ses personnages et les éléments du "décor" dans les moindres détails.
Il ne décrit aucune caractéristique physique évidente et à la fin du récit, on n'a qu'une très vague idée de leur apparence dans sa globalité. Non, ce qui nous est offert, ce sont les gestes et expressions : du corps, du visage, les éclairs qui passent fugacement dans un regard, une moue, un sourire, une main qui s'attarde avec grâce, une kyrielle de moments suspendus, comme autant d'images qui défilent en rafale sous nos yeux ébahis.
Encore une fois, j'ai été scotchée par les mots. Zweig se déguste. J'ai lu et relu cette nouvelle pour ne rater aucun détail, aucune tournure. Et pourtant, chaque fois j'en ai découvert d'autres.
Ce n'est pas facile de décrire des sensations aussi fortes. Émerveillement, frissons ? On éprouve parfois tant de choses qu'il faudrait inventer d'autres mots, moins galvaudés, trop faibles, pas assez précis. Et j'aime la précision et les nuances.
Je vais me fondre dans un autre récit et plonger encore avec délectation dans la richesse des phrases de cet auteur.
Commenter  J’apprécie          4131



Ont apprécié cette critique (38)voir plus




{* *}