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Critique de 5Arabella


Stefan Zweig envisage dès 1932 d'écrire un livre consacré à Érasme, mais ce n'est qu'en 1934 que le livre va finalement paraître. L'auteur évoque l'origine modeste d' Érasme, son entrée dans les ordres, malgré son peu de goût pour la vie monastique. Puis ses études, voyages, écrits. Mais l'essentiel va se situer dans son rapport à Luther et à la Réforme. Bien que ses idées aient ouvert la voie à Luther et au protestantisme, Érasme s'est toujours refusé à s'engager du côté des réformés. Zweig justifie cette position par le refus du fanatisme, qu' Érasme aurait voulu combattre de toutes ses forces, qu'il aurait considéré comme la source de tous les maux. Ce fanatisme, ce manque de tolérance était aussi bien présent dans l'Église catholique que chez Luther, et Érasme s'est opposé aux deux parties, en prônant un débat, des compromis, une reconnaissance des positions de l'autre.

En réalité, au-delà des données biographiques factuelles, Zweig semble projeter en Érasme beaucoup de ses propres préoccupations, il y a malgré toutes leurs différences, une sorte d'identification. le refus de prendre parti d‘Érasme est valorisée par Zweig  « L'intellectuel ne doit pas prendre parti, son domaine est l'équité, laquelle plane toujours au-dessus de la discorde ». C'est quelque part l'idéal de Zweig, à qui a aussi été reproché son manque d'engagement suffisamment affirmé contre le nazisme.

Le livre est donc autant une biographie qu'une profession de foi. Dans une figure d' Érasme quelque peu arrangée, Zweig exprime ses propres convictions, celui d'un homme de paix et de réflexion, opposé à la violence et à la pensée manichéenne. Tout en voyant les limites de la distanciation face aux événements, ne pas tenter de peser sur ce qui arrive, peut permettre au pire d'advenir.

C'est personnel et touchant compte tenu de l'histoire en cours au moment où Zweig écrit son livre. C'est quand même par moments un peu emphatique et chargé. Il y a comme une manque de distance entre le sujet du livre et l'écrivain, ce dernier exprimant un certain nombre de convictions personnelles par le biais du personnage dont il évoque la vie. Ce n'est donc sans doute pas le texte idéal pour connaître Érasme d'une manière factuellement juste et impartiale. Mais l'ouvrage pose des questions importantes, le rôle des intellectuels, surtout dans une période troublée, le sens de l'engagement, la place de la raison dans la marche de l'histoire.
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