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Critiques de Kurt Vonnegut (208)
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Le petit déjeuner des champions

Un bordel conceptuel, thématique et narratif complet, une œuvre clairement iconoclaste et punk, avec tout ce que ça suggère de transgressions pas toujours finaudes et de jusqu'au-boutisme un peu couillon par moments.

Mais au final, un bouquin satirique d'une grande force et d'une sincérité assez implacable.

Pas un bouquin pour tout le monde, clairement, mais si la longueur d'ondes est la bonne, l'essentiel passe avec plaisir, voire enthousiasme.
Lien : https://syndromequickson.com..
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Abattoir 5

J'ai eu du mal à me glisser dans le roman, mais cela en valait la peine.

Le voyage dans le temps et le côté science fiction du zoo des tralfamadoriens donnent un aspect décousu, déstructuré au récit, mais ce voyage en saut de puce dans la vie de billy pelegrin illustre bien l'incompréhension des choix humains.

Billy décrit sa vie avec détachement, et nous interroge sur les valeurs posées par sa société.



En quoi le passage à la douche du camp de prisonniers en Allemagne a plus de sens que celui au zoo extraterrestre ?

En quoi les morts du bombardement de Dresde entrent dans le récit héroïque des pays vainqueurs de la guerre ?



La vision du temps peut changer les perceptions. Inverser le sens de lecture du documentaire sur le bombardier le rend bien plus beau que l'original : démanteler des bombes et enfouir les matières premières plutôt que l'inverse..



Une fiction étrange mais captivante.
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Abattoir 5

Longtemps j’ai cru qu’il s’agissait d’un roman de Science-Fiction.

Tout part d’une histoire vraie, celle de l’auteur, un américain de la quatrième génération.

En décembre 1944 le soldat Vonnegut est fait prisonnier dans les Ardennes. Début 1945 il est à Dresde lors du fameux bombardement

Enfermé dans un abattoir, il survit aux bombes. Les jours suivant il creuse les décombres à la recherche de corps. Schlachthof-Fünf ! Un nom aboyé qui résonnera longtemps dans sa tête.

Roman du Trauma ?

Cette tragédie, Kurt Vonnegut ne parvient pas, même vingt ans après, à y retourner, fût-ce par écrit. Du moins pas en personne. Alors il s'invente un double, Billy Pèlerin.

Il va rôder autour de l'épicentre de la tragédie, il va tracer autour d'elle des cercles concentriques, mais sans jamais y pénétrer vraiment. Le livre s'achève alors que nous n'aurons même pas assisté à l'exécution de ce « pauvre Edgar Derby » fusillé pour une théière, dont l'annonce du triste sort est pourtant souvent rappelée.

Roman antimilitariste ?

Paru en pleine contestation de la guerre du Vietnam, ce récit, comme une histoire burlesque de la seconde guerre mondiale, éparpillé façon puzzle frappe certaines consciences américaines et occidentales. Les vétérans se reconnaissent dans son récit des atrocités de la guerre.

Parce qu’il serait irrespectueux à l’égard des soldats Américains morts, parce qu’il est « obscène » la contre-culture en fait un gourou.

Roman du temps ?

Le récit est soumis à un curieux effet de balancier qui rejette Billy Pèlerin dans le futur ou dans le passé aussitôt que le cours du récit l'amène trop près de la date fatidique.

Depuis son retour de Dresde, Billy Pilgrim est décroché du temps. À chaque fois il ignore sur quelle scène il débarque. Sa mémoire lui est inutile.

Quand le passé (la cause) et le futur (l’effet) n’existent pas, il n’y a plus de pourquoi.

Roman du tragique et de l’absurdité ?

La narration d’apparence aléatoire, qui fait s’entrechoquer scènes comiques, récits absurdes et anecdotes horribles, rythmée par la phrase concluant les paragraphes à chaque fois qu’ils évoquent un désastre : « C’est la vie » (« So It Goes »).

Ces trois mots scandent le roman à chaque page, comme un vers formulaire chez Homère.

Plutôt « ainsi “va” la vie », introduisant une dynamique là où nous sommes paralysés par l’impossible recours à la causalité.

Roman de Science-Fiction ?

Rien de bien SF dans ce récit, du moins de la SF « genrée »

Sinon l’introduction dans le parcours de Billy Pilgrim d’un épisode dans un zoo de la planète des Tralfamadoriens qui ont la particularité d’avoir une conception plus évoluée du temps, sautant d’une époque à une autre à tout moment, capacité appréciable pour supporter la condition de prisonnier de guerre, ou celle d’homme marié.

D’un récit qui commence par « Ecoutez, écoutez, Billy Pèlerin a décollé du temps » et qui finit sur trois notes d'oiseau : Cui-cui-cui ? », plein de bonnes idées, on pouvait attendre beaucoup.

Mais alors pourquoi me semble-t-il qu’il manque quelque chose pour en faire un chef d’œuvre.

Une absence de vie intérieure typiquement wiquipedienne ?



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Abattoir 5

Très loin de ce à quoi je m'attendais. Un livre un peu confus mais contenant de petits bijoux.

J'admets toutefois que je n'ai pas tout saisi et je m'en porte quand même très bien.

Je classe ce livre parmi ceux qui nécessitent une analyse ou un cours complet pour vraiment comprendre toutes ces nuances...
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Nuit mère (Nuit noire)

Cette pseudo autobiographie du personnage Howard W. Campbell s'articule tragi-comiquement entre différentes strates de mensonges. En premier lieu, le mensonge de convention propre à la fiction. Et puis au sein du récit, le mensonge relatif à l'activité de Campbell, à savoir sa participation à la propagande anglophone du régime nazi, qui le vit déclamer des discours spécieux et haineux à la radio. Mais tout cela n'aurait été de surcroît que la couverture d'un espion, chose ignorée de presque de tout le monde. L'écriture rétablirait alors la vérité… à moins qu'elle ne soit au contraire un redoublement du mensonge, celui d'un auteur désireux de se faire voir plus beau qu'il ne l'était.



Avec ce personnage, Vonnegut pose la question de la « schizophrénie » ordinaire de tous ceux qui participent de la machinerie totalitaire, entre banalité du mal et double pensée orwellienne. À bien des égards, Campbell est un double déformé d'Eichmann, auquel il se mesure dans un chapitre central du roman. Mais en ce qui concerne ses rapports au totalitarisme, son mal est-il « banal » ou bien pleinement conscient, comme il cherche à nous en convaincre (à s'en convaincre lui-même ?) tout au long de ces pages, d'une façon peut-être trop étayée pour être honnête ? Comment savoir si la personne la plus crédule dans tout cela n'est pas Campbell, qui croirait encore aux marraines bonnes fées, même dans un monde où Auschwitz existe ? L'ambivalence du héros se répercute également sur les personnages secondaires tels son ami George Kraft ou encore Resi, jeune soeur de sa femme disparue.



En apparence décousue, la narration est un savant mélange de prolepses et d'analepses, illustrant le déphasage d'un individu ayant depuis longtemps perdu toute illusion de contrôler son existence. À l'instar de Billy Pilgrim dans Abattoir 5, Campbell est « décollé dans le temps », habitant d'un « purgatoire » entre le mensonge et la mort, où les apparions de la vérité se font trop sibyllines pour être crues, ou trop cruelles pour être source de vie. La schizophrénie de Campbell lui fait jouer le double rôle de Cassandre et du Cheval de Troie (mais chez les nazis ou chez les américains ?). Et à travers ces pages, il semble finalement voyager jusqu'au bout de la nuit dans les ruines hantées de sa « nation de deux personnes », aux côtés d'une trace résiduelle (ou plutôt Resi duelle) de son amour. Seule la nuit originelle pourra confondre le réel et le double qui l'a remplacé.
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Le petit déjeuner des champions

De cette première rencontre avec Vonnegut j’en sort déroutée . Le moins qu’on puisse dire est qu’il ne manque pas d’imagination et son sens de la dérision est extrême, voir sans pitié 😁 dans sa satire sans concession de l’Amérique. Trump l’aurait sûrement mis en tôle en censurant ses livres 😁, mais comme ce dernier ne lit pas, et Vonnegut nous a quittés en 2007 , le problème n’a jamais existé.



Le sujet est la rencontre dévastatrice de deux personnages sortis tout droit du mythe américain. Dwayne Hoover, orphelin adopté devenu patron d’une concession Pontiac, mais aussi propriétaire d’hôtels, restaurants, station radio, club de golf….., noyé dans sa routine de gros propriétaire veuf à Midland City, perd lentement la raison. Kilgore Trout, auteur prolifique de romans de science-fiction dont l’œuvre est caviardée de pornographie pour être diffusée en sex-shop, est invité par son seul admirateur un certain Eliot Rosewater qu’il croit un ado à cause de son écriture 😊, au Festival d’Art de Midland City.

Le narrateur, Philboyd Studge ( alias Kurt Vonnegut 😊) raconte le cheminement des deux zozos comme s’il s’adressait à des extraterrestres, c’est à dire à nous 😁, avec plein de petits dessins primitifs pour nous faciliter ( en faites il s’adresse je pense plutôt au publique américain 😁) la compréhension des drôles de choses que l’on trouve sur la Terre.



La critique de Vonnegut de la société américaine est féroce.De leur mauvaises habitudes alimentaires ( le junk food, les quantités gargantuesques ingurgitées et gaspillées ) à leur fausse puritanisme, une société obscène qui exclue « l’obscénité » ou ce qu’elle prétend telle, de leur culte de la jouissance instantanée à leur ignorance décomplexée ( les livres sont utilisés comme papier de toilette ), de l’exploitation cruelle de l’homme par l’homme à leur système de sécurité social inexistant …..rien ne manque à cette satire mortelle que renforce le titre du livre. « Petit déjeuner des champions », une marque de céréales très fameuse aux États Unis, pays géré par la télévision et ses publicités . Or notre narrateur Studge nous avertit dans sa préface que cette honorable société n’en est pas pour autant le sponsor, ni que c’est une publicité pour eux en bien ou en mal 😊. Sex et Solitude traverse de bout en bout ce roman où l’égoïsme et l’abscence de compassion dans le cœur humain glacent . Quand à la fin du livre , bien qu’ annoncé dès le début de l’histoire est une grande surprise !



J’ai beaucoup aimé son sens de la dérision aux petites subtilités entre les lignes , son écriture sans fioritures ( lu en V.o.) , et la structure de son récit qui semble déjantée mais ne l’est pas, car Vonnegut lui-même y est présent incognito avec ses lunettes de soleil miroir qu’il porte jour et nuit 😎, en charge de l’opération créative 😁! J’ai terminé ce livre avec un grand sourire !
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Nuit mère (Nuit noire)

« Mon nom est Howard W. Campbell Jr. Je suis américain de naissance, nazi de réputation et apatride par inclination. » ● Nous lisons les mémoires fictifs de Howard W. Campbell qui est détenu dans une cellule de prison en Israël, attendant d’être jugé pour les crimes contre l’humanité qu’il a perpétrés pendant la Seconde Guerre mondiale. Il a en effet été un propagandiste nazi de premier plan à la radio à l’attention des Américains. (« J’ai gagné ma vie jusqu’à la fin de la guerre en 1945 comme auteur et radiodiffuseur de propagande nazie pour le monde anglophone. ») Mais il prétend qu’il était un agent américain infiltré parmi les nazis et clame donc son innocence. (« J’étais un agent américain tout au long de la guerre. Mes émissions transmettaient d’Allemagne des informations codées. ») Parviendra-t-il à nous convaincre – et à convaincre ses juges ? ● Tout au long du roman, le lecteur va hésiter entre croire Campbell ou ne pas le croire. Et même si ce qu’il raconte est vrai, qu’aurait-il fait, comme un de ses interlocuteurs lui demande, si l’Allemagne avait gagné la guerre ? Ne se serait-il pas rangé sans scrupules du côté du vainqueur ? Ne croyait-il pas, vraiment, aux ignominies qu’il racontait à la radio ? ● Le narrateur adopte un ton distancé, comme si tout cela ne comptait pas vraiment, ou plutôt comme s’il était revenu de tout… ● Même si c’est court, il y a des longueurs… Je n’ai pas vraiment accroché à ce récit déconcertant. Si l’on veut lire l’Holocauste du point de vue d’un nazi, il faut préférer l’œuvre majeure de Robert Merle, La mort est mon métier.
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Nuit mère (Nuit noire)

Kurt Vonnegut est un auteur que je ne connaissais absolument pas avant de me lancer dans le challenge Totem.

Cette histoire se base sur les confessions de Howard W. Campbell qui se défini comme « américain de naissance, nazi de réputation et apatride par inclination ». Au moment où il écrit ses confessions, il se trouve dans une geôle à Israël.

Cet homme que très vite on a envie de détester au vu de ses agissements et sympathies lors de la seconde guerre mondiale va se révéler bien plus complexe que l'on s'y attendait. Et ses révélations qu'il distille au fur et à mesure de l'avancée de ses confessions permettront de découvrir quelle était véritablement sa vie et qui se cache réellement derrière le masque de celui qu'on a envie d'appeler « une belle ordure ».

Même si les histoires sont vraiment loin d'être identiques, je n'ai pu m'empêcher de penser surtout au début de ma lecture à un roman De Robert merle qui m'avait beaucoup marquée : « La mort est mon métier «.

Un roman qui se lit rapidement, grâce à la plume de l'auteur. Je pense d'ailleurs ne pas m'en arrêter la et de continuer à découvrir son oeuvre...



Challenge ABC 2023/2024

Challenge Totem

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Le petit déjeuner des champions

Je ne savais pas à quoi m'attendre et j'ai été assez surprise par cette lecture.



Deux personnages suivent deux parcours de vie, et on sait dès le départ qu'ils vont finir par se rencontrer.



J'ai bien aimé le début, la présentation des personnages, les petits dessins qui émaillent le roman sont amusants. Et j'ai apprécié le style vif, percutant, plein d'humour.



Mais ensuite ça s'est corsé, l'action et les rebondissements n'avaient pas de sens. Les longueurs et les digressions sur des personnages annexes ont fini par me lasser et j'admets m'être forcée à lire jusqu'au bout, pour connaître le fin mot de l'histoire.



La fin est encore plus perchée que ce à quoi je m'attendais et elle met du temps à arriver. Elle est amenée de façon artificielle avec l'auteur qui s'intègre au roman, donnant des indications sur ce qui va se passer, digresse, puis nous ramène à l'action.



Les bons mots et les fulgurances sur la société sont noyés au milieu d'un récit qui est foutraque. C'est dommage parce qu'on passe à côté du propos de l'auteur sur l'Amérique, sur le rêve américain, sur le racisme et la condition des noirs.



Personnellement, j'aime les romans structurés et moins déjantés. Je suppose que ça plaira à ceux qui apprécient les OLNI (Objets Littéraires Non Identifiés).
Lien : https://telmalitteratures.bl..
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Abattoir 5

"Abattoir 5 ou la Croisade des enfants" est un roman de science-fiction écrit par l'auteur américain Kurt Vonnegut dans les années 60.

Le thème central s’articule autour des horreurs de la guerre, en particulier la Seconde Guerre mondiale et le bombardement de Dresde. Avec sa cruauté et ses absurdités, en particulier celle de la bureaucratie militaire.

Un personnage central, Billy Pilgrim, qui surprend par…sa passivité. Et par sa perception du temps.

On saute d’époque en époque, passé, présent, futur se mélangent.

Ce roman fut salué par sa structure narrative innovante

Moi, elle m’a surprise. Mais j’ai apprécié la réflexion induite par sa lecture et la façon d’aborder les traumatismes de la guerre.

L’auteur a puisé dans sa propre expérience ces éléments. Sa biographie indique qu’il a été fait prisonnier en 1944, transféré à Dresde où il travailla dans un abattoir. Il a survécu au bombardement de la ville en février 45, qui fut un véritable pilonnage systématique.

Un ton surréaliste, un récit absurde pour des temps absurdes ; qui permet d’éviter de sombrer dans l’effroi ; mais qui peut surprendre et dérouter.



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Tremblement de temps

« Tremblement de Temps » est un ovni littéraire. Les amateurs de science-fiction seront certainement déconcertés, car nous nous trouvons ici entre autobiographie — une succession d'anecdotes plus ou moins loufoques et réelles — et des récits tirés de l'imagination de l'auteur : de petits canevas de romans ou de nouvelles dispersés ici et là. L'humour est omniprésent, tout comme une nostalgie malicieuse à laquelle personne n'échappe en approchant du point final. Ce roman est une merveille.
Lien : https://bw.heraut.eu/user/Ba..
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Le petit déjeuner des champions

Il y a quelques années, ma lecture du roman « Abattoir 5 » de Kurt Vonnegut m'avait enthousiasmée. J'avais trouvé ce texte absolument remarquable, brillant, tant sur la forme que sur le fond. Pourtant, depuis je ne m'étais pas attelée à une autre lecture de Vonnegut. Je m'y colle enfin avec « le breakfast du champion ».



Je n'étais pas peu fière, à l'époque de ma lecture d'«Abattoir 5 », d'avoir réussi à proposer un petit résumé de ce roman pourtant déstructuré et inclassable. Je ne vais pas réitérer l'exploit avec « le breakfast du champion ». Ce bouquin est impossible à résumer. Il y a bien un fil narratif mais le récit part dans tellement de directions et utilise des procédés narratifs tellement originaux qu'il serait réducteur de tenter de limiter le roman de Vonnegut à cette intrigue.

Le ton d'«Abattoir 5 » était plutôt sombre, difficile d'évoquer Dresde massacrée en se prêtant à la rigolade. Le ton du « Breakfast du champion » est nettement plus léger, même si l'auteur se sert de son récit pour pointer du doigt les travers de l'Amérique. Mais il le fait avec une ironie, un cynisme et un humour qui rendent cette lecture très drôle.

Mais le plus remarquable dans ce texte, c'est l'audace dont fait preuve Vonnegut. L'auteur se permet toutes les fantaisies narratives, c'est bien simple je n'avais jamais lu quelque chose comme ça. Non seulement le fil narratif est très ténu mais en plus on en connait les tenants et les aboutissants depuis le départ. Ensuite, Vonnegut s'attache à ne respecter aucune des règles qui régissent l'écriture de récits. le voyage du héros et le monomythe, très peu pour Vonnegut, il dynamite les conventions littéraires. Ainsi, il va s'amuser à se perdre dans des détails, rappelant au lecteur ce qu'est une cigogne par exemple, va parsemer son récit de petits dessins qui n'apportent rien à l'intrigue, va décrire la taille du pénis de chaque personnage masculin, va dire que ce qu'il a raconté quelques pages auparavant n'est pas très crédible, etc… Vonnegut se permet aussi l'audace suprême de se placer lui-même dans le récit, mais d'une façon totalement inédite. Le récit va plus loin que la classique mise en abyme, je trouve qu'on se rapproche plus de ce qu'au cinéma on appelle « briser le 4ème mur » sauf que là l'auteur ne s'adresse pas seulement à son lecteur mais aussi à ses personnages. Cela donne l'impression que l'auteur s'adresse aux personnages du roman qu'il est en train d'écrire au moment même où il le fait, comme si ce roman n'avait presque pas d'existence et était une sorte d'entité mouvante, informelle. Ce livre est tout simplement dingue.



Cette seconde lecture de Vonnegut m'a réjouie. J'ai adoré me faire promener par l'auteur dans ce récit satirique où l'absurde le dispute à l'audace formelle. Evidemment, je lirai d'autres bouquins du Monsieur.

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Dieu vous bénisse, monsieur Rosewater

Je n'ai pas réussi à rentrer dans ce roman. Je n'ai pas vu où l'auteur voulait en venir malgré des personnages décalés comme je les aime. L'histoire est restée bien trop confuse pour moi et j'avoue avoir complètement perdu pied dans la généalogie des Rosewater.
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Abattoir 5

Un de mes livres de chevet. Initialement publié dans J'ai lu, science-fiction, je l'avais au départ dérobé au rayon occasion de Gibert Jeune Place St-Michel (mais c'est prescrit depuis très très longtemps !), je ne lisais que de la SF à l'époque, mais c'est bien autre chose. Je l'ai lu en français, en anglais, puis de nouveau en français dans cette nouvelle traduction que j'ai regrettée ("so it goes" qui ponctue les réflexions du héros, initialement traduit par "c'est la vie" devient "ainsi vont les choses", bof !).

Donc, ce sont les pérégrinations d'un anti-héros américain dans le temps et dans l'espace. Il se fait kidnapper par des aliens pour s'accoupler à une actrice porno dans un zoo extraterrestre, il raconte une vie minable en Amérique, mais surtout (et c'est autobiographique), il raconte son expérience de la seconde guerre mondiale, en particulier, lors des bombardements de Dresde quand il est prisonnier de guerre dans le fameux "abattoir 5" qui donne le titre au bouquin où il rencontrera un psychopathe du nom de Paul Lazzaro qui le poursuivra des années plus tard. Et là, on touche au chef d'œuvre avec une écriture précise et pleine de dérision.

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Le berceau du chat





« Rien dans ce livre n’est vrai ».



C’est l'incipit de cet excellent livre décapant et pessimiste de l’auteur d’Abattoir 5 (dont j’ai lu de magnifiques critiques enthousiastes sur Babelio) publié en 1963, soit deux ans avant Abattoir 5.



Un livre qui est découpé en parties très courtes (il y en a 127 au total!) et débute comme une chronique à l’humour impassible, aux situations absurdes, et aux personnages improbables. Mais progressivement le lecteur découvre derrière ce récit loufoque, une critique acerbe de la bêtise humaine, de l’absurdité de la guerre, du mensonge des religions, bref de toutes ces inventions que l’homme a faites pour se donner l’illusion de son pouvoir, de son sentiment d’être un « élu », de sa vie après la mort, de la supériorité de son groupe, quel qu’il soit, sur les autres groupes humains, bref de tous ces mensonges que l’homme a créés pour justifier ses actions, et pour donner du sens à sa vie, de ces illusions dont le jeu de ficelle qu’est le berceau du chat est le symbole.



Le narrateur est Jonas, journaliste qui projette d’écrire un livre sur ce que faisait le Docteur Hoenicker, le père de la bombe atomique, ainsi que sa famille, le jour où la première bombe entraîna la destruction complète d’Hiroshima.

Son enquête va le conduire vers le laboratoire où travaillait Hoenicker, puis à la rencontre de ses enfants, Newt, Angela et Franck. Il obtiendra des réponses un peu étranges des deux premiers, puis, partira vers une République « bananière » des Caraïbes, la République de San Lorenzo, où Franck Hoenicker est devenu l’adjoint du Président « Papa » Manzano, un Dictateur d’opérette, dont le principal intérêt pour Jonas est qu’il a une fille adoptive superbe.

Dans cette île, une religion nouvelle a été inventée par un certain Bokonon. Elle est interdite par le Dictateur, et ses adeptes persécutés.

Les préceptes des « Livres de Bokonon », cités par le narrateur, font faire un contrepoint permanent au récit. Ce sont parfois de petits poèmes rimés et loufoques. Ils font d’abord sourire ou même rire par leur humour absurde, mais très vite, le lecteur réalise que l’auteur nous fait une critique acerbe de la bêtise et du mensonge des humains, des religions, des guerres, et de sa conviction du caractère inéluctable de la fin de l’humanité.

Ainsi cette phrase qui est terrible et d’actualité, en ces temps d’emballement du dérèglement climatique, et de guerres absurdes et meurtrières:

"Et je me rappelai le Quatorzième Livre de Bokonon, que j’avais lu intégralement la veille. Le Quatorzième Livre est intitulé « Existe-t-il, pour un Homme Réfléchi, une Seule Raison d’Espérer en l’Humanité sur Terre, Compte Tenu de l’Expérience du Dernier Million d’Années ? »

Le Quatorzième Livre n’est pas long à lire. Il consiste en un seul mot : « Non. »"



La suite des aventures fait intervenir une autre découverte du Docteur Hoenicker, la glace-9 (que possèdent les enfants du savant), et qui transforme en glace incroyablement dure tout ce avec lequel elle rentre en contact.



Et l’issue brutale et apocalyptique de cette fable n’est finalement qu’une image de ce qui attend notre humanité, à part qu’avec l’effet de serre, ce sera un peu plus long.

Le livre se conclut par les dernières lignes que Bokonon a rédigé pour terminer ces « Livres », en fait totalement anti-religieux , impitoyables pour la bêtise humaine, et pour « Qui vous savez », ah, oui, vous savez, celui dont on dit « Notre Père, qui êtes aux Cieux…. »



«Si j'étais plus jeune, j'écrirais une histoire de la bêtise humaine ; et je monterais jusqu'au sommet du mont McCabe, où je m'allongerais sur le dos avec mon histoire en guise d'oreiller ; et je prendrais par terre un peu du poison bleuâtre qui transforme les hommes en statues ; et je me transformerais en un gisant au sourire sardonique, un pied de nez dressé vers Qui-vous-savez. »



Voilà un livre qui pousse la caricature jusqu’à l’absurde, mais si, comme l’écrit Vonnegut en préambule, « Dans ce livre rien n’est vrai », la folie des humains et leurs mensonges religieux, politiques, racistes, etc.. sont bien réels.



Et dernière remarque, l’humour parfois avec de gros sabots, lui, est inénarrable, il faut lire le livre pour le goûter…ou pas. Moi, j’ai aimé, mais je conçois que ça ne plaise pas à tout le monde.







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Nuit mère (Nuit noire)

Est-ce que je m'attendais à être déstabilisée par ce roman ? Peut-être ! C'est pour ça que je voulais le lire ! Mais aussi parce qu'il y a longtemps que je veux lire Kurt Vonnegut. J'aime ce qui est inhabituel et là, on est servi. Tout d'abord, les chapitres très très courts sont au nombre de 45, pour 215 pages.

L'humour est grinçant, voire loufoque, j'ai adoré !



Howard W. Campbell Jr. attend dans sa cellule de Jérusalem d'être jugé pour crime de guerre, car connu pour avoir été le propagandiste de radio le plus zélé du régime nazi.

Américain de naissance, immigré en Allemagne durant l'enfance, il y reste à l'âge adulte, épouse une allemande et devient plus nazi que les nazis.

Mais au fond, est-ce la vérité ? Lui, prétend que non, qu'il était un agent double.



Chapitre après chapitre je me suis délectée de ce récit à l'humour caustique et de ces faux-semblants. Car tout le problème avec un agent double, un menteur ou un manipulateur, ce qui revient au même, est de savoir à quel moment il dit la vérité et quand il ment. Il raconte sa vie, la guerre, l'antisémitisme, l'Allemagne. Il y a une forme de cynisme dans la narration des événements de cette époque sinistre, qui vire au jubilatoire car traités sur le mode de l'humour noir, et ça j'adore ! Par exemple l'histoire du chien de Resi, alors que j'aime les chiens... mais la chute m'a fait rire. Pourtant ça a été une réalité pendant la guerre.



Tout le long du roman, au fil des événements de sa vie, on a l'impression qu'il a été agent double sans le savoir, ou alors vrai américain patriote et faux nazi, ou sympathisant nazi et traître à sa patrie, ou homme aux personnalités multiples, ou imbécile heureux mais ça c'est pas sûr, tout ça dans une espèce de schizophrénie qui l'arrange bien... ou pas. Tout dans l'histoire tend à noyer le poisson. En fait, de nombreuses fois je me suis dit "ce mec est dingue, complètement ravagé".



Ce roman dit des choses de cette guerre et de ses idéologies nauséabondes, sur un ton qui paraît léger, pratiquement toujours caustique et ironique. J'ai bien kiffé !!
Lien : https://mechantdobby.over-bl..
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Abattoir 5

Cela aurait pu me plaire, cela aurait du me plaire. Mais j'ai abandonné ma lecture à la centième page. Cela ne m'arrive quasiment jamais, parce que lorsque cela ne me plait pas, je lis en diagonale, je saute des lignes, voire des pages, mais je vais jusqu'au bout. Là, je préfère le laisser de côté et le reprendre dans quelques mois ou quelques années, peut-être que ce n'est pas le bon moment.

J'ai aimé l'écriture, les parties du récit ancrées dans le réel.

Mais même si j'en comprend la finalité ( l'absurdité et les traumatismes de la guerre), les parties sur les sauts temporels m'ont paru trop obscurs pour que j'en saisisse la symbolique ou alors il aurait fallu que l'humour y soit plus présent

Bref une déception, mais plus liée à mon incapacité à apprécier ce roman qu'à la valeur du roman en lui même.

C'est la vie.
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Abattoir 5

Abattoir 5 fait partie de l'étrange catégorie des romans qui sont à la fois excellents et pénibles à lire.



La raison étant qu'il s'agit (à ma connaissance) du premier roman à explorer une conception téléologique du temps plutôt que linéaire. Cette idée sera reprise pour le Docteur Manhattan dans Watchmen, ou dans la nouvelle "L'Histoire de ta Vie" de Ted Chiang (qui est adaptée dans le film Arrival de Denis Villeneuve).



Donc ici, l'histoire est racontée pêle-mêle, en fonction du moment que le protagoniste choisit de vivre ou de revivre. Les paragraphes passent d'une temporalité à l'autre, parfois en plein milieu de l'action. Ça rend la lecture complexe et parfois frustrante. Par chance, le talent de l'auteur nous empêche de nous demander constamment où est-ce que nous en sommes.



L'histoire en tant que telle implique un enlèvement extraterrestre qui change la perception du temps du protagoniste. Le roman peut donc se lire comme un livre de SF, ou bien comme un roman réaliste, parce qu'il est fort possible de comprendre les évènements comme le fruit de la folie d'un personnage qui a vécu la Deuxième guerre mondiale, un accident d'avion et la perte de sa femme.



Billy, c'est son nom, est un adolescent américain envoyé au front à la Bataille des Ardennes. Il est capturé par les Allemands et envoyé dans un camp de détention à Dresde. Il y est prisonnier lors des bombardements des Alliés qui ont détruit la ville.



Tout cela, ce sont des éléments biographiques de la vie de Vonnegut, qui s'est même glissé comme personnage dans le roman le temps de quelques lignes écrites au "Je". L'auteur est l'un des sept prisonniers américains qui ont survécu au bombardement qui, à l'époque où il écrivait le livre, dénombrait environ 150 000 morts de civils : deux fois Hiroshima. Tout cela pour rien. Dresde était le quartier général de la Croix-Rouge en Allemagne. La ville comportait des réfugiés, des prisonniers de guerre et des soldats blessés. Vonnegut y a survécu en se cachant dans le 3e sous-sol de l'Abattoir 5, qui donne son titre au roman.



Tout cela explique pourquoi ce livre, publié en 1969, est devenu une œuvre phare de la contre-culture du mouvement contre la guerre du Vietnam. Le sous-titre du livre est d'ailleurs : "La Croisade des Enfants". C'est un livre pacifiste, qui raconte l'absurdité de la guerre. Et sa narration complètement éclatée et ses concepts de SF ne pouvaient que plaire au public friand de LSD et d'ésotérisme New Age.



C'était d'ailleurs le bouquin préféré des Grateful Dead, et son adaptation cinématographique a remporté la statuette à Cannes en 1972.
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Nuit mère (Nuit noire)

Roman paru en 1961



Le narrateur, Howard Campbell, nous fait revivre, avec différents aller-retours entre 1930 et 1961, son passé d'espion (ou d'espion potentiel : on ne saura pas le fin mot de l'histoire)

Il est né aux États Unis, lorsqu'il a une dizaine d'années, ses parents déménagent en Allemagne. Jeune adulte il assiste au début de la guerre : il anime une émission de radio. Est il un sympathisant nazi ou est il un espion américain se faisant passer pour un nazi ?

En tout cas il fuit l'Allemagne en 1945, les américains ayant « choisi avoir eu connaissance de ses agissements… »

C'est un roman très bien écrit où le lecteur se fait « promener » par le narrateur . Est il sincère ? pourquoi est il dans une geôle en Israél ? Qui a trahi qui ? Qui est Helga la jolie épouse de Howard Campbell ?
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Abattoir 5

Troisième lecture, mais je vais être honnête : tout comme les deux dernières fois (quand j'avais 16 ans et quand j'en avais 51), ce livre ne m'a pas vraiment captivé, le ton est trop cynique pour moi et le bombardement d'absurdismes trop grand. Mais si vous démêlez tout et que vous le remettez en place, alors c'est un roman assez impressionnant. Et pas si simple à situer, même s'il est rangé dans des catégories comme la science-fiction, l'absurde ou le roman (anti-)guerre (je ne pense que ce soit vraiment un roman anti-guerre). Et, bien sûr, c'est tout cela, mais après la troisième lecture de ce livre, il m'est clair que c'est essentiellement un roman philosophique.



Par exemple, il y a une vision très spécifique et ingénieuse du temps. Pour cela, les Tralfamadoriens, entre autres, sont mis en scène : ils ne connaissent pas le temps linéaire (un instant après l'autre), mais voient tout d'un coup d'œil, du début à la fin ; un peu comme Dieu selon Augustin dans ses Confessiones. La causalité est une notion qui n'est tout simplement pas pertinente : « Les Terriens sont les grands explicateurs, expliquant pourquoi cet événement est structuré tel qu'il est, indiquant comment d'autres événements peuvent être atteints ou évités. Je suis un Tralfamadorien et je vois toute l'éternité comme vous verriez une chaîne des Rocky Mountains. L'éternité est l'éternité. Cela ne change pas. Il ne se prête pas à des avertissements ou des explications. Ça existe. Regardez-le instant après instant et vous verrez que nous sommes tous, comme je l'ai déjà dit, des insectes dans l'ambre."



Cette façon « divine » de regarder imprègne tout ce roman. Ainsi, le passage clé pour comprendre Abattoir 5 me semble donc être celui-ci, où le Tralfamadorien parle des livres qu'il a lus : "chaque bouquet de symboles est un message bref et urgent - décrivant une situation, une scène. Nous Tralfamadoriens les lisons tous en même temps, pas les uns après les autres. Il n'y a pas de relation particulière entre tous les messages, si ce n'est que l'auteur les a choisis avec soin, pour que, vus tous ensemble, ils produisent une image de la vie belle et surprenante et profonde. Il n'y a pas de début, pas de milieu, pas de fin, pas de suspense, pas de morale, pas de causes, pas d'effets. Ce que nous aimons dans nos livres, ce sont les profondeurs de nombreux moments merveilleux vus en même temps.



Eh bien, je pense que c'est comme ça qu'il faut lire ce livre de Vonnegut : toutes ces bribes d'histoires absurdes (dans le présent, dans le passé, dans le futur, à Dresde, aux États-Unis, sur la planète des Tralfamadoriens...) ensemble, et alors vous obtenez cette "profondeur de ces nombreux moments merveilleux".



Cela fait de ce roman un postmoderne par excellence. Et cela est mieux illustré dans la grande scène dans laquelle Billy voit un documentaire de guerre à l'envers. Non seulement ce livre est postmoderne, mais dans la mesure où les États-Unis personnifient la modernité, ce roman est également anti-américain de part en part : Billy est un anti-héros, la vie est absurde (la guerre et l'héroïsme étant la quintessence de l'absurde), la gérabilité et la malléabilité de la vie et de la réalité sont des illusions. Et central et plus fondamental : la notion de libre arbitre est une illusion absolue, car tout est comme il est, « ainsi vont les choses ». Et tout cela est servi par Vonnegut dans une sauce d'humour sec.



Vu sous cet angle, ce livre semble assez impressionnant. Mais je vais le répéter : ça ne m'a toujours pas plu. Peut-être suis-je encore trop coincé dans (l'illusion) du modernisme ?
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