Le prince Adréïn s'ennuyait. Cet adolescent aux cheveux bruns et courts, aux yeux marron clair, soigné, athlétique, le visage agréable, bien que bougon, rêvait d'aventures mais se morfondait sur un trône pourtant confortable. Depuis un long moment, presque l’éternité, il patientait dans cette salle au dallage de marbre blanc veiné et aux murs du triste gris de la pierre brute que des tentures de rouge et de bleu égayaient et réchauffaient. Les vitres des quatre fenêtres monumentales se paraient de reflets avec la nuit tombante. Un domestique avait allumé les bougies garnissant les lustres et les flammes grignotaient paisiblement la cire. À l’image de ce lieu, sa vie ne comportait ni surprise ni mystère. La coutume et les lois et même ses sujets régissaient son existence, laquelle ronronnait de l’assommant train-train quotidien. Parfois, un événement imprévu ou exceptionnel venait troubler l’écoulement invariable de ses journées, mais il ne le concernait pas ou ne l’intéressait pas, ou le distrayait trop fugacement. Quant à l’ennui, il accentuait ce sentiment de subir sa destinée alors qu’il aspirait à l’inventer.
- Où est l'origine ? l'interrogea-t-il. Où sont mes réponses?
- Il n'y a qu'une seule question et une seule réponse, la Source, et tu viens te fondre en elle.