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Critiques de Alice Miller (76)
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Notre corps ne ment jamais

Alice Miller, (1923 -2010), n'a pas reçu ses doctorats en psychologie, philosophie et sociologie dans une pochette surprise, c'est le moins qu'on puisse dire. Et pour la psychologie de comptoir, vous n'aurez qu'à repasser à la prochaine tournée!

Après avoir exercé son métier de psychothérapeute, la grande dame s' est tournée vers l'écriture pour témoigner de ses recherches sur l'enfance maltraitée.

Dans cet ouvrage, bien étayé par des exemples pris dans la littérature: Dostoïvski, Tchekov, Kafka, Nietzsche, Schiller, Virginia Woolf, Arhur Rimbaud,Mishima, Proust, et James Joyce rien que du beau linge, Alice nous démontre magistralement comment la maltraitance refoulée peut conduire à la maladie, voire à la mort en deux- deux. Même une sublimation de leurs douleurs d'enfance à travers l'art ne pourra empêcher la plupart d'entre-eux d'échapper à une mort prématurée car ils n'ont jamais pu ou voulu porter à leur conscience les maltraitances qu'ils avaient subi en leurs vertes années.

On ne mord point la main qui vous a élevé! Alice Miller donne un grand coup de pied dans la fourmilière et remet en question nos conditionnements moraux et religieux en dénonçant les effets pervers du Quatrième Commandement: "Tu honoreras ton père et ta mère. " En effet, vouloir pardonner à tout prix serait délétère, seules la colère et la haine permettraient à une victime de retrouver dignité et santé dans le respect de soi!

Un ouvrage décapant qui dame le pion à Freud et tant d'autres thérapeutes qui pensant bien faire ont toujours voulu ménager la chèvre et le chou en orientant leurs patients vers le pardon. Alice Miller, elle, ouvre la voie vers l'espoir et la guérison dans le respect de soi et l'attention que l'on se doit.

Etre adulte c'est se libérer du chantage affectif exercé par nos parents et refuser d'être les enfants rêvés. Si nous cherchons à oublier nous pourrons toujours compter sur notre corps pour nous rappeler à l'ordre, parfois très chèrement!

Le corps a ses raisons que la raison ne connaît pas...
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Notre corps ne ment jamais

Alice Miller regrette sincèrement que le 4e Commandement du père Moïse soit porté en si haute estime dans notre société laïque (LOL). La schizophrénie ayant encore de beaux jours devant nous, beaucoup ne connaissent plus ce 4e Commandement bien que tout le monde considère qu’il va de soi de le respecter. Je vous le rappelle au cas où : « Tes père et mère honoreras, afin de vivre longuement ». On ne va pas s’attarder sur l’étrange chantage affectif contenu dans ce commandement mais on va plutôt se demander s’il est vrai qu’en se forçant à aimer daron et daronne, on évitera d’attraper les lèpres, dartres et autres maladies de peau qui sont amèrement condamnées dans le Lévitique. Il semblerait bien plutôt que ce soit le contraire. Véridique : Alice nous évoque le cas d’une femme ravagée par un eczéma des parties génitales, miraculeusement guérie lorsqu’elle reconnaît enfin qu’elle haït ce père qui l’a violée pendant son enfance et qu’elle ne lui pardonnera jamais. Qu’il crève en enfer. C’est comme Virginia Woolf, toute son enfance violée par ses demi-frères. Elle croit avoir enfin réussi à dépasser ce traumatisme en découvrant Freud qui raconte que nombre de souvenirs chez l’adulte dérivent surtout de fantasmes et réussira encore à vivoter quelques années dans la dépression, jusqu’à ce qu’elle saute dans une rivière et crève misérablement.





Etre gentil avec les cons, pardonner à ses tortionnaires, croire qu’on pourra se délester des offenses qui nous ont été faites en les oubliant, c’est continuer l’œuvre de la maltraitance. Puissance trois : maltraitant de soi-même car on continue à mal se considérer ; maltraitant des vieux parce qu’on pense les faire crever de culpabilité en faisant genre qu’on les aime malgré leurs conneries ; maltraitant de la vérité parce qu’on veut cacher que nos bonnes intentions apparentes cachent des étrons sanglants qui daubent la mort. Dommage qu’on ne s’en rende pas compte. Souvent, en grandissant, on continuera à rechercher des gens qui ressemblent à nos premiers tortionnaires, espérant qu’à travers eux, on obtiendra ce qui avait fait défaut dans la première relation. Voilà comment on crève à petit feu.





Troquez le pardon contre la haine (de toute façon, la haine affirmée ne dure jamais très longtemps tant elle est jouissive, et on finit par aimer celui qu’on haït ouvertement). Apprenez à devenir des huîtres visqueuses, à chialer si vous le voulez, à vous répandre de façon dégueulasse, plutôt qu’à frimer en disant que vous êtes inébranlable et que vous en avez connu, des histoires pas drôles. Nietzsche avait raison de dire que « ce qui ne tue pas rend plus fort », seulement que même dans son cas, ça ne s’est pas vérifié. Ici, la vraie force c’est d’emmerder profondément ses tortionnaires, de leur couper l’herbe sous le pied en leur montrant que nous pouvons exister sans la dépendance négative qu’ils ont cherché à créer en nous.





Ouais, ce n’est pas le père ni la mère qu’on devrait glorifier, c’est l’enfant à venir. Malheureusement, c’est souvent le contraire qui se produit. On croit avoir surmonté ses blessures en honorant la mère ou le père salauds et on ne se rend même pas compte qu’on les inflige de même à ses propres gosses, parce qu’il faut bien que ça sorte quand même par un canal. Alice propose de briser la malédiction.





Contrairement à ce que les esprits paresseux aimeraient bien penser, Alice ne recommande pas la haine aveugle et inconséquente. Y en a qui auront peu morflé et qui n’en voudront pas à leurs darons, soit qu’ils aient réussi à les comprendre vraiment avec le temps, soit qu’ils aient effectivement peu souffert de leurs carences. Alice recommande moins de tuer le lien réel avec les vieux que de tuer l’incompréhension et les manques qui le parcourent et qui le rendent mortifère. Tuez les darons aveugles pour faire naître les parents illuminés.

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Notre corps ne ment jamais

Quel livre pour finir l’année ! A travers la vie de personnes célèbres, l’auteure démontre que le déni des sentiments attaque le corps inexorablement. Il n’est pas évident de parler, de résumer ou même de donner un avis sur cet ouvrage sans se dévoiler, ce qui peut s’avérer gênant surtout à cette époque de l’année où les gens n’ont pas envie de voir le malheur mais plutôt de faire la fête. Il y a des évènements qui percutent et créent le chaos dans une vie bien réglée par le 4ème commandement : tu honoreras ton père et ta mère. Puis les problèmes de santé arrivent, se succèdent sans que l’on fasse le rapport, du moins au début. Et puis une bouffée de haine en trop et l’enfant qui sommeille en toi a le déclic. Bref, on ne choisis pas ce livre par hasard. Je pense qu’il faut être concerné, malheureusement. Ici, nous somme loin de la pensée positive moderne où du moment que tu ne vois plus tes problèmes tu n’en as plus : souris et la vie te sourira même si ton corps pourrit de douleurs et de souffrance refoulées, même si tu en meurs, du coup, avant tes parents. Bien au contraire. Il faut écouter ses sentiments et son corps. Trouver de l’écoute également, une simple écoute qui ne juge pas et ne te donne pas de conseils. Et devenir adulte. Se libérer de cette contrainte, de cette culpabilité, de cette soumission. Et si on ne le fait pas pour soi-même, il faut le faire pour nos enfants car la maltraitante se transmet de génération en génération d’une façon ou d’une autre. Le lien est fait avec la dépresson chronique et les différentes dépendances à l'alcool et la drogue.



Je rajouterai d’un point de vue personnel que la société peut prendre le relais pour les personnes âgées et qu’il existe beaucoup de moyens et de dispositifs pour s’occuper de ses parents… de loin, en se préservant de cette haine.



Un livre qui fait du bien.
Lien : http://pyrouette.canalblog.c..
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C'est pour ton bien

Si je dis qu'Alice Miller m'a sauvée, certains penseront que j'exagère. Et pourtant, c'est le cas.

Si seulement tous les psychanalystes, psychologues et psychiatres pouvaient la lire, se remettre en cause en suivant sa ligne de conduite, et ainsi aider des milliers de gens à comprendre d'où vient leur violence intérieure, ce serait le paradis.

Mais nous sommes loin du compte, l'être humain préfère dans le fond s'aveugler et continuer à reproduire les erreurs de leurs soit disant si sages ancêtres...

C'est comme ça... Hélas.
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L'avenir du drame de l'enfant doué

J'ai été cet enfant "hyper-adapté" au monde des adultes, enfouissant ses souffrances au plus profond, dont parle A. Miller dans ce livre, et comme de bien entendu, tout ça a fini par une très grosse dépression post-natale à la naissance de mon aînée....

Et les livres d'A. Miller m'ont "sauvée" (associés à 8 ans de thérapies intensives, mais rares sont les psys qui acceptent de tout entendre et de ne pas prêcher pardon et réconciliation)...

Dans un style simple et accessible à tous, une des grandes qualités d'A. Miller, ce livre répond à des questions intéressantes, comme pourquoi les psy deviennent psy? A quoi sert l'analyse? Pourquoi ceux qui ont "tout pour être heureux" ne le sont pas? (LA grande question que je me posais en boucle au début de ma dépression, quand je ne savais même pas encore que c'était une dépression...)
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Chemins de vie

C'est un ouvrage dans lequel la psychanalyste raconte 7 parcours différents, et ajoute aussi des réflexions

- Comment fonctionnent les dictateurs et les gourous?

- Comment naît la haine?

Ces questionnements qui se concentrent sur une quarantaine de pages uniquement auraient mérité un développement plus important.

Par ailleurs, l'auteur construit son livre uniquement sur les maltraitances physiques infligées aux enfants, pas un mot sur la violence verbale...

C'était la première fois que je lisais un livre de cette spécialiste et je reste sur ma faim, et même sérieusement en retrait par rapport à certaines de ces idées, bien que n'étant pas psychanalyste... Si Hitler, Staline et Mao (entre autres) ont eu des pères violents qui leurs ont distribué fessées ou même raclées, je ne suis pas cette violence physique explique en grande partie, et excuse encore moins, le fait qu'ils sont devenus des dictateurs ayant commis des génocides. Comme quoi, il est bon dans bon nombre de disciplines d'étudier plusieurs sources, afin justement de ne pas être "gouroutisé"!

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Notre corps ne ment jamais

Pour A. Miller, quiconque n’a pas reçu l’amour, la protection, l’écoute, la gentillesse, la compréhension, le respect durant son enfance aspirera sa vie entière à assouvir ses premiers besoins vitaux auprès d’autres personnes. Mais avec l’âge, il devient de plus en plus difficile de combler ce manque auprès d’autrui, et beaucoup finissent par projeter ce besoin sur leurs enfants et petits-enfants. C’est pourquoi il ne faut pas refouler les sentiments négatifs que nous inspirent nos parents, car nous les exprimerons malgré nous, de façon inconsciente et contre les mauvaises personnes (enfants et partenaires) qui paieront le prix de la maltraitance de nos parents. Nous reproduisons sur eux le mal subi, en faisant d’eux des exutoires, des cibles de nos projections, de nos frustrations et besoins inassouvis. Nous mettons sur leurs petites épaules cette mission impossible de nous sauver de notre passé. Et ainsi de suite de génération en génération, nos enfants reproduisent le même mécanisme malsain sur leurs enfants ...

Quand nous ne projetons pas ce manque sur nos enfants, nous cherchons à nous créer des centres de pouvoir, de nous mettre en position de force pour contraindre nos subordonnés à nous manifester le respect et l’admiration dont nous avons été privés enfants.

En milieu politique, le pouvoir absolu détenu par ces anciens enfants maltraités a des conséquences catastrophiques, naissent alors des criminels et dictateurs assoiffés de pouvoir et de reconnaissance, lesquels perpétuent des actes cruels à répétition qui les sortent momentanément de cette ancienne situation infantile d’impuissance, de maltraitance. Les exemples qu'elle donne de Patrice Alègre et Saddam Hussein illustrent bien ce propos.

Ceux qui ne dirigent pas cette rage refoulée envers les autres la dirige vers eux-mêmes grâce à une nourriture de substitution (alcool, drogue, boulimie, anorexie, sur-médication, maladies, allergies, suicide, etc). Les plus brillants d’entre ces enfants finissent par exorciser, pour la plupart inconsciemment, leur mal être dans la littérature et les beaux-arts, mais en déconnectant et dissociant totalement leur oeuvre de leur vie. Ils se mettent ainsi en totale contradiction avec le savoir de leur corps, qui refuse lui de se déconnecter du passé. Ils sont sujets à plusieurs maladies et symptômes révélateurs de la nature du mal, symptômes qui restent négligés et incompris. Car le corps n’adhère pas à la morale, et s’exprime dans le langage des maladies. Ces êtres brillants ont tous eu une mauvaise santé et sont tous morts jeunes : Dostoïevski, Tchekhov, Kafka, Nietzsche, Proust, Schiller, Virginia Woolf, Arthur Rimbaud, Mishima.

Pour A. Miller, nul besoin de se venger de ses parents et de se montrer cruel avec eux pour en sortir, il suffit d’en prendre conscience et regarder la réalité de leur nature et de leurs mauvais traitements en face, sans refoulement, avec l’aide d’un allié proche, engagé, empathique et lucide, pour réconcilier et guérir l’enfant qui est en nous. Il faut aussi observer le langage de son corps, se fier à ses messages pour trouver la bonne distance émotionnelle, affective ou physique à mettre entre nous et eux. Il faut s’autoriser ces ressentis négatifs, cette honnêteté avec soi-même. Il faut se rendre compte de notre supposée affection malsaine et feinte car fabriquée de toutes pièces sur commande des bons sentiments qu'on essaie de s'imposer, pour chasser les mauvais, les vrais, qui nous assaillent, et pour rester en accord avec la morale et les valeurs du 4ème commandemant universellement admis : “tu honoreras tes parents”. Aussi négatifs soient-ils, il faut laisser émerger ses sentiments, au risque de les projeter sur nos enfants ou sur des innocents.
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Le drame de l'enfant doué

Dans une mise au point écrite en 1991, Alice Miller explique s’être séparée de la psychanalyse depuis l’écriture de ce livre (publié en 1979 en Allemagne je crois).

Cependant, pour la suite, il ne s’agit pas d’une réédition, l’essentiel du propos restant valable.





Dans la première partie, « le drame de l’enfant doué », Alice Miller explique comment les enfants, doués de sensibilité et d’intelligence (mais pas forcément surdoués), vont se soumettre à leur mère (ou à tout autre personne qui leur « sert » de mère) afin de ne pas perdre son amour.

Pour faire face au sentiment d’abandon, l’enfant développe, parfois, une personnalité fictive (le faux-soi, selon Winnicott), qui correspond aux attentes des parents. Le vrai-soi est profondément enfoui, grâce au déni de ce phénomène.

L’analyse permet de faire le deuil de cette enfance idéalisée qui n’a donc pas eu lieu.



« C’est alors que, dans l’analyse, au-delà de tous les exploits, se réveille le petit enfant solitaire et qu’il demande : « Que se serait-il passé si je m’étais montré méchant, laid, coléreux, jaloux, paresseux, sale et puant ? Que serait-il alors advenu de votre amour ? Et pourtant, tout cela je l’étais aussi. Plutôt que celui que j’étais vraiment, n’était-ce pas celui que je feignais d’être que vous aimiez – cet enfant sage, compréhensif et sur qui l’on pouvait compter, cet enfant agréable, plein d’empathie et de compréhension, qui, en fait, n’était pas un enfant ? Qu’est-il advenu de mon enfance ? Me l’a-t-on volée ? Je ne pourrai jamais la rattraper. J’ai été dès le début un petit adulte. A-t-on tout simplement abusé de mes qualités ? »





Une deuxième partie traite de « La dépression et la grandiosité : deux formes parentes du trouble narcissique ».

Il s’agit surtout de personnes qui ont besoin de tout réussir, d’avoir plein de qualités. Ce n’est pas forcément pour écraser les autres, même si cela peut être le ressenti de l’entourage, mais parce que ces personnes s’imaginent que sans ces qualités, elles ne seraient pas aimées.

C’est cela qui est appelé « grandiosité » et qui alterne souvent, par phases, avec des moments de dépression, plus ou moins intenses.



La troisième partie : « Du mépris », traite plutôt de la manière dont nous répondons aux attentes ou aux réactions de nos enfants. Ne réagit-on pas parfois de manière blessante, humiliante, méprisante ? Sans même s’en rendre compte, parce qu’on reproduit la façon dont on a fait avec nous, parce que cela se passe comme ça dans la société…





Intéressant, bien qu’un peu trop technique pour moi dans les termes employés. J’espère ne pas avoir déformé le propos du livre ici.

En tout cas, il permet à coup sûr de s’interroger sur l’éducation que l’on donne à nos enfants, sur celle qu’on a reçue aussi.

C’est un peu flippant de se demander ce que l’on a mis de côté de notre enfance, ce que l’on a enfoui éventuellement. Est-ce utile de s’interroger plus sur la question ou pas ?



Par contre, je pense que c’est forcément utile, comme livre, pour mieux comprendre les enfants et les adolescents à travers les rapports qu’ils ont à leurs parents et donc pour envisager une meilleure communication avec eux.







Linda Lemay est une belle chansonnière, c’est drôle et bien vu, à écouter pour rire mais pas que… :



« […]

J'm'appelle Alphonse, c'est mon prénom

C'est mon problème, faut que j'm'adapte

Mais je vous jure qu'une vie c'est long

Affublé d'un tel handicap



Je n'ai pas eu de fils encore

Mais s'il faut que Dieu m'en donne un

Je l'appellerai Alphonse junior

Juste pour me venger sur quelqu'un »



(extrait de « Alphonse » de Linda Lemay : https://www.youtube.com/watch?v=I2MIyBnIgoE)

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Abattre le mur du silence

- Tiens Thomas, tu as un Alex P. en 6ème. Moi, en 4ème, j’ai un Alexandre P. Ils sont cousins ?

- Ah, ben non, Alex est le petit frère d’Alexandre.

- Hein ? Quoi ? Pas possible !

- Ah, si ! Bah quand tu vois le grand, tu comprends qu’ils aient été déçus. Quoique à moins de trois ans, ça devait pas encore trop se voir, qu’il était raté Alexandre.

- T’es horrible ! Arrête…

- Euh, t’es sûre que c’est moi qui suis horrible… C’est que des blagues hein… des sales blagues mais comme on dit « mieux vaut en rire qu’en pleurer », parce qu’il y a de quoi en pleurer parfois…

- Et s’ils en avaient un troisième, tu crois qu’ils l’appelleraient comment ? Al ?







Alice Miller parle ici, en 1991, des mauvais traitements que nous nous voyons infliger enfant, qu’ils soient physiques ou psychologiques et que nous refoulons.

Elle explique que ce refoulement est une question de survie, enfant, car nous ne saurions faire face à un tel traumatisme à ce moment-là, étant entièrement dépendants de nos parents.

Elle donne en exemple sa propre enfance où sa mère passait des journées entières sans lui adresser la parole, pour prouver son pouvoir absolue sur elle et la contraindre ainsi à l’obéissance.



Alice Miller explique qu’une fois à l’âge adulte, ce refoulement ne nous permet pas de nous débarrasser de la colère et de la haine accumulée, et que celles-ci se reportent alors sur nos propres enfants, de manière inconsciente.

Selon elle, il est donc nécessaire d’abattre le mur du silence construit pour cacher les traumatismes de notre enfance, avec l’aide de témoins lucides, afin de s’en libérer et d’éviter de perpétuer les actes de violence sous couverts d’éducation, de religion, voire de science.



Alice Miller critique dans son livre les psychothérapeutes, en particulier les psychanalystes. Elle a quitté en 1988 la Société psychanalytique helvétique et l’Association psychanalytique internationale.

Elle cite Freud, Jung, Adler comme étant à l’origine de théories erronées, présentant par exemple la méchanceté comme innée chez l’être humain, méchanceté qu’il est donc nécessaire de dompter.

Les psychothérapeutes prônent donc le pardon et l’oubli quant aux mauvais traitements de l’enfance.



Il en est de même de la religion, qui présente le mal comme faisant partie de l’homme, et non comme une conséquence de son vécu.



Et plus récemment, certains adeptes de ce genre de théories se reportent sur la science, cherchant à justifier la méchanceté, la violence, la délinquance par une prédisposition génétique.





Alice Miller évoque dans ce livre les conséquences de ces mauvais traitements infligés aux enfants et de leur non prise en compte, de leur refoulement à l’âge adulte.

Les guerres, les tyrans, dictateurs, sont d’abord des enfants victimes de mauvais traitements, qui n’ont pas su ou pas voulu devenir autre chose à l’âge adulte.

Elle donne en exemple Hitler et Ceaucescu.



Alice Miller mentionne aussi les attaques contre le droit à l’avortement. Elle indique que tous les enfants gravement maltraités sont des enfants non désirés.



Alice Miller cite une méthode permettant de donner accès à son histoire personnelle de manière progressive et non traumatisante : la méthode Stettbacher.

Cependant, elle ne décrit pas cette méthode ici. Il semble donc que pour être renseignée sur le sujet, il faut lire « Quand la souffrance a un sens », paru en 1991 également.



Pour elle, il est indispensable et prioritaire de lutter contre les violences subies par les enfants, car le fait que celles-ci soient reconnues comme des crimes (comme en Suède), même s’il ne permet pas l’abandon de toute violence, permet aux enfants de rompre le déni de ces mauvais traitements et de moins en faire subir eux-mêmes à leurs propres enfants, améliorant la situation petit à petit, au fil des générations.





Elle dénonce le fait de demander de pardonner à ses parents et prône plutôt l’expression d’une haine maîtrisée.





Malheureusement, au contact des adolescents, trop souvent l’on pressent que ces mauvais traitements sont fréquents.

Que de fois l’envie me prend de crier à ces gens « non, il n’est sûrement pas né comme ça », le comme ça étant tour à tour « fainéant », « immature », voire même « nul », « intenable ».

Et à entendre ce qui est dit, comme l’on craint tout ce qui n’est pas dit…



Et après la lecture de ce livre, il persiste la grande et angoissante question :

« Suis-je concernée personnellement par tout cela, c’est-à-dire ai-je des raisons de refoulement dans mon enfance et donc dois-je m’inquiéter et me préoccuper de cela davantage ? »







Evidemment, ce qui me trotte dans la tête en écrivant la critique, tout à fait adapté finalement, surtout en revoyant cet excellent clip :



“We don't need no education.

We don't need no thought control.

No dark sarcasm in the classroom.

Teacher leave the kids alone !

Hey teacher leave the kids alone !



All in all you're just another brick in the wall.

All in all you're just another brick in the wall !

[…]”



(extrait de “Another brick in the wall, The Pink Floyd :

http://www.youtube.com/watch?v=YR5ApYxkU-U)

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Notre corps ne ment jamais

Je viens de finir la lecture de ce livre reçu à mon anniversaire et lu d'une traite, "Notre corps ne ment jamais", d'Alice Miller.



J'ai connu cette auteur lorsque j'ai découvert la violence éducative ordinaire. J'ai commencé par lire "C'est pour ton bien. racines de la violence dans l'éducation de l'enfant", où il est question de la pédagogie noire, et de l'analyse de l'enfance et du sombre destin de trois personnages: Adolf Hitler, Christiane F (droguée, prostituée) et Jurgen Bartsch.



Ce livre a été une révélation dans ma vie, une bombe atomique, une prise de conscience. Il y a un avant et un après Alice Miller. J'ai cependant du mal à le conseiller à tout un chacun car c'est un livre complexe dont la lecture est difficile. C'est un livre philosophique. Il m'a permis de me poser des questions, de découvrir un monde inconnu et de mettre du sens à ce qui restait d'incohérence dans ma volonté d'éduquer mes enfants du mieux que je le pouvais.



Ce nouveau livre que je viens de finir est beaucoup plus accessible. Le vocabulaire est simple, les constructions de phrases sont fluides. Il se lit facilement, et peut être lu par des personnes qui ne connaissent rien encore sur ce sujet.



Mais attention, ce livre dérange (comme tous ses livres d'ailleurs). Alice Miller s'attaque à un dogme, à un tabou. Elle remet en cause "le précepte universellement accepté "Tu honoreras ton père et ta mère", qui est aussi le Quatrième Commandement du Décalogue." Elle explique comment notre corps garde en mémoire les souffrances de notre enfance qu'il nous a fallu réprimer au nom de l'éducation, comment ce même corps une fois devenu adulte se trouve en prise avec notre Esprit qui lui a verrouillé les souffrances de l'enfance pour ne pas perdre l'amour de nos parents ou nous retrouver abandonner. Notre Esprit a assimilé le "c'est pour ton bien" brandi par nos éducateurs quand notre corps a gardé souvenir de la souffrance.



Je ne sais pas bien comment expliquer la pensée si complexe et si évidente d'Alice Miller, si cohérente qu'elle permet d'assembler toutes les pièces du puzzle de la transmission de la violence de génération en génération.



J'ai beau être familiarisée avec les théories de l'auteur et les avoir intégrées et digérées, ce livre m'a moi aussi dérangée. L'aplomb avec lequel elle condamne ce Quatrième Commandement continue de se heurter à ma résistance. C'est un mécanisme de défense impressionant qui agit en nous...



Voici quelques extraits de ce livre remuant. Si vous n'avez jamais lu Alice Miller, je vous encourage à y regarder de plus près, au moins une fois. C'est perturbant, mais ça brise bien des dogmes et ça fait reflechir. Et surtout, ça ouvre une porte à l'enfant qu'on a été et ça aide à devenir adulte et responsable de son propre chemin. http://www.alice-miller.com/index_fr.php



"Mon corps n'est pas influençable. Il connait parfaitement ma vérité, bien mieux que mon Moi conscient. il sait, dans les moindres détails, tout ce que j'ai enduré. Il ne me permet pas de me voiler la face sous prétexte de respecter les conventions sociales."



"Une fois que nous aurons appris à vivre avec nos sentiments au lieu de les combattre, les manifestations de notre corps ne nous apparaîtront plus comme une menace, mais comme de salutaires rappels de notre histoire"



"Des relations qui ne reposent que sur une communication faussée par la présence d'un masque ne peuvent se transformer, elles restent ce qu'elles ont toujours été: une pseudo-communication. Une vraie relation n'est possible que lorsqu'on parvient des deux côtés à s'autoriser ses sentiments, à les vivre et à les exprimer sans crainte."



"Il ne s'agit pas de condamner en bloc les parents, mais de se placer du point de vue de l'enfant souffrant et qui n'a pas droit à la parole, de renoncer à un attachement que je qualifie de destructeur. Celui-ci se compose, comme je l'ai déjà dit plus haut, d'un mélange de gratitude, de pitié, de refoulement, d'enjolivement de la réalité, ainsi que de nombreuses attentes, toujours vaines et vouées à le rester."



"Vous détournez les yeux, vous pensez que je suis folle. Ca me fait mal, bien sûr, mais être des vôtres serait bien pire. Si je suis folle, c'est à ma manière: je me suis écartée de vous parce que je refuse de m'adapter à vous et de trahir mon être. je veux savoir qui je suis, pourquoi je suis venue au monde, pourquoi à cette époque, pourquoi en Allemagne du Sud, pourquoi dans cette famille, avec des parents qui ne comprennent rien à mon caractère et ne peuvent m'accepter."



"Quand j'appelle maltraitance ces blessures invisibles, je trouve le plus souvent en face de moi résistance et indignation ouverte. Je peux parfaitement comprendre ses sentiments, parce que je les ai longtemps partagés. Autrefois, j'aurais protesté violemment si quelqu'un m'avait dit que j'avais été une enfant maltraitée. C'est seulement maintenant, grâce à mes rêves, grâce à ma peinture et bien évidemment grâce aux messages de mon corps, que je sais avec certitude qu'enfant, il m'a fallu endurer pendant des années des lésions psychiques dont, adulte, je n'ai pendant très longtemps pas voulu prendre conscience. Comme tant d'autres, je me disais: "Moi? mais je n'ai jamais été battue. Les quelques tapes que j'ai reçues, ça n'a pratiquement aucune importance. Et puis ma mère s'est donnée tant de mal pour moi."



Mais justement, il ne faut pas oublier que les graves séquelles laissées par les blessures précoces résultent de la minimisation des souffrances de l'enfant et du déni de leur signification. Tout adulte peut facilement s'imaginer la frayeur et l'humiliation qu'il ressentirait s'il se trouvait soudain agressé par un géant furieux huit fois plus grand que lui. Mais quand il s'agit d'un petite enfant, nous considérons qu'il ne ressent pas la même chose."(...) Les parents pensent que les tapes ne font aucun mal, qu'elles sont juste un moyen de transmettre des valeurs bien précises aux enfants, et l'enfant reprend cela à son compte. Certains d'entre eux apprennent même à en rire et à utiliser leur connaissance intime de l'humiliation et de l'avilissement pour railleur leur douleur. Une fois adultes, ils s'accrochent à cette raillerie, ils sont fiers de leur cynisme, ils en font même de la littérature, comme nous pouvons le voir chez James Joyce... S'ils en viennent à connaître angoisse ou dépression, ce que le refoulement des sentiments vrais rend inévitable, ils trouvent facilement des médecins pour les soulager un temps à l'aide de médicaments. C'est ainsi qu'ils peuvent tranquillement préserver leur auto-ironie, cette arme éprouvée contre tous les sentiments qui repontent du passé. Par là-même, ils se conforment également aux exigences de la société, qui tient la protection des parents pour un précepte majeur."
Lien : http://www.uneautreecole.can..
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C'est pour ton bien

Dans un témoignage nommé « Le vrai drame de l’enfant doué », Martin Miller règle ses comptes avec sa mère. Il lui reproche d’avoir écrit des bouquins où elle prône une certaine forme d’éducation bienveillante alors que lui-même n’a jamais pu en profiter. C’est assez ironique mais il est rare de pouvoir développer certaines idées sans en chier, sans s’être senti tenaillé par la contradiction entre le vrai et l’idéal. Remontons un peu le temps.





L’enfance d’Alice Miller a été particulièrement traumatisante. Née au sein d’une famille juive en Pologne, elle s’échappe du ghetto où elle a toujours vécu à l’âge de 17 ans pour séjourner dans la partie aryenne de Varsovie. Elle change alors de nom et prend une identité polonaise pour cacher ses origines. Elle réussit à sauver quelques membres de sa famille en leur donnant de faux passeports. Sa jeunesse se déroule dans la crainte d’être démasquée, trahie et déportée. Cette crainte ne l’a ensuite jamais quittée et elle a érigé un mur de silence pour se protéger. Les questionnements de son fils, témoins de sa curiosité naturelle, auraient sans doute pu être attendrissants pour une autre femme mais pour elle, ils prirent la forme d’attaques. Martin avait beau être son fils, il ressemblait aussi à tous les persécuteurs auxquels elle avait essayé d’échapper.





C’est bien de ce sujet dont parle ici Miller : de la manière dont la violence se transmet de génération en génération faute de pouvoir être dite. La violence est aussi transmise par la société et son système de dressage et de répression des besoins fondamentaux de tendresse. Cette violence est toutefois considérée comme secondaire puisque si un foyer aimant permet de guérir ces blessures, elles ne deviendront pas dévastatrices et permettront de conserver la foi. La promesse d’un amour inconditionnel semble fondamentale. Quels adultes sont toutefois encore assez disponibles pour ne pas voir s’interférer entre eux et leurs enfants les séquelles d’anciens traumatismes ou la pression sociale à devenir quelqu’un, en compensation de frustrations et d’humiliations anciennes ?





Miller considère que « l’individu n’est pas en mesure de retrouver en lui-même sans aide extérieure les traces de cette répression ». Elle propose donc la psychanalyse pour revenir à la source de cette violence originelle : « C’est comme un homme à qui l’on aurait imprimé une marque dans le dos et qui, sans l’aide d’un miroir, ne pourrait jamais la découvrir. La situation analytique est une de celles qui présentent cette sorte de miroir ». Il s’agit de permettre la représentation mentale de la violence ou du manque d’amour éprouvés, pour que l’émotion qui lui est liée remonte en surface. Il s’agit de rompre la malédiction de la transmission de la douleur psychique qui, lorsqu’elle n’est pas reconnue, demande à se trouver une nouvelle victime qui, à son tour, devra en trouver une autre, lorsqu’elle ne se retourne pas, parfois, directement contre soi-même.





« Comme nous l’avons dit à plusieurs reprises, ce n’est pas le traumatisme en lui-même qui rend malade mais le désespoir total, inconscient et refoulé de ne pouvoir s’exprimer au sujet de ce que l’on a subi, de n’avoir pas le droit de manifester de sentiments de colère, d’humiliation, de désespoir, d’impuissance ni de tristesse, ni même le droit de les vivre ».





Alexander Lowen, le disciple de Reich, reconnaissait aussi que la plupart des dépressions étaient causées par une intériorisation intense des émotions destructrices, si bien que lorsqu’il demandait à ses patients de défoncer un fauteuil avec une raquette de tennis, ils se trouvaient comme deux ronds de flan osant à peine tapoter le tissu du bout du tamis. L’objectif que vise Miller comme tant d’autres n’a pas seulement une portée individuelle : en restituant à l’individu la capacité de se révolter contre ce qui suscite chez lui de la colère ou de la tristesse, on peut espérer qu’on parviendra petit à petit à désamorcer la puissance totalitaire des institutions.





« Le drame de l’individu bien élevé réside dans le fait qu’une fois adulte il ne peut pas savoir ce qui lui a été fait, ni ce qu’il fait lui-même, s’il ne s’en est pas aperçu tant qu’il était enfant. Des foules d’institution en profitent et en particulier les régimes totalitaires. »





Finalement, Martin n’a peut-être pas bien lu les bouquins de sa mère. Il semble en effet qu’elle ne se propose pas vraiment de décrire l’éducation idéale (trois boulots impossibles selon Freud : éduquer, gouverner, psychanalyser) mais plutôt les moyens d’en exorciser les scories. Avec la parution de son bouquin dénonciateur, en exprimant toute sa rancœur, Martin n’a finalement fait que suivre les préceptes de sa petite maman.

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Le drame de l'enfant doué

"Le drame de l'enfant doué" est un livre pertinent pour qui cherche à comprendre les souffrances psychologiques et les problèmes affectifs qu'il vit. Dans ce livre, court, concis et facile d'accès, Alice Miller nous fait bien prendre conscience des souffrances et des refoulements qui ont jalonné fondamentalement notre enfance. Elle expose intelligemment comment nos parents ont perpétué la ou les souffrances qu'ils ont vécu en nous en accablant. Malheureusement, la dépendance et le besoin l'affection dont tout enfant a besoin, l'empêche de prendre conscience et de se révolter contre ces actions et l'amène à les refouler. Ce refoulement devra être affronté et les émotions d'alors vécues pleinement pour que s'opère un détachement.



Je pense que tout le monde devrait lire, un jour, ce livre ou un autre de ce type afin d'avoir conscience de ce qu'il réprime et d'éviter de le transférer sur les autres qui l'entourent ou, pire, sur ses enfants.
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Le drame de l'enfant doué

Pour réussir à être soi-même, il ne faut pas avoir peur de nos émotions et sentiments. L'important n'est pas nécessairement de les vivres ou d'en faire quelque chose, mais simplement de les ressentir et de leur permettre d'exister.

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La connaissance interdite

Ce livre d’Alice Miller reprend les thèmes abordés dans « L’enfant sous terreur » et dans « C’est pour ton bien ».





Les enfants qui subissent de mauvais traitements refoulent leur colère et leur souffrance, pour « sauvegarder l’innocence de leurs parents ».



Pour cela ils s’appuient sur des « théories-boucliers », portées par la société, présentant l’enfant comme méchant, « un être mauvais qu’il faut éduquer au bien ».



Ce mensonge, couvert par la pédagogie et la société, est à la source des déviances qui se développent à l’âge adulte et de la reproduction des mauvais traitements sur les enfants de la génération suivante.



Pour sortir de ce schéma, il faut un « témoin éclairé », qui permet de dire et de vivre les souffrances supportées dans l’enfance, afin de ne pas se venger (inconsciemment) de cette souffrance sur d’autres personnes.





Cet ouvrage m’a semblé assez clair et accessible.

Je ne crois pas qu’il apporte beaucoup plus que les précédents du point de vue des idées, cependant, c’est expliqué de manière forcément un peu différente et je n’en regrette pas la lecture car, à force d’explications, je commence à comprendre, et le sujet m’intéresse.





Alice Miller va loin dans ses théories, elle parle souvent de torture au sein des familles. D’où l’impression que peu de gens, peu de familles sont concernés par ces « usages ».

Mais il faut bien constater que le bénéfice du doute profite plus souvent aux parents qu’aux enfants dans ce genre de cas.



Je pense à la « grande affaire » de pédophilie qui avait tourné court pour devenir « l’affaire du juge »…

Un ou deux ans après, une des familles initialement accusée puis blanchie avait été accusée de mauvais traitement sur leurs enfants. Ces gens avaient expliqué que rester agenouillé des heures sur le manche d’un balai faisait partie de l’éducation qu’ils donnaient à leurs enfants…



Je pense à quelques adolescents que je fréquente, enfin retirés de leurs familles, me demandant combien d’autres vivent leur souffrance silencieusement.





Je pense à N. qui reste dans sa famille, parce qu’il ne « subit pas de violence et qu’il y a de l’amour dans sa famille ».

N. aura une piètre image de l’amour, lui qui a eu des poux puis la gale, qui a raté des mois de scolarité mettant bout à bout toutes ses absences, deux mois l’année dernière quand sa mère refusait d’ouvrir sa porte à l’assistante sociale et que, celle-ci ne pouvant pas voir N., commençait à craindre pour sa santé.

N. aujourd’hui est revenu au collège, il mange seul à la cantine, se réfugie au CDI à ses moments perdu, et quittera notre beau collège les poches vides diplôme.

Et on ira encore lui reprocher de ne pas avoir été méritant en fournissant les efforts qui lui auraient permis de sortir de sa situation sociale de merde…





Nous aurions du mérite, nous-mêmes, davantage épargnés, à avoir un regard plus attentif, des sentiments bienveillants et des idées plus fraternelles envers ces enfants ou ces jeunes dépassés à l’aube mauvaise de leur vie.







Pour l’ambiance :



« A 15 ans du matin

J’ai pris par un drôle de chemin

Des épines plein les bras

J’me suis troué la peau mille fois

A 18 ans du matin

J’étais dans un sale pétrin

Jouant du poing d’la chignole

D’la cambriole, du vol de bagnole



Ça fait du temps maintenant

Inexorablement passe le temps qui tue les enfants

[…] »



(extrait de « 15 ans du matin », dans l’album « La marmaille nue » de Mano Solo :

https://www.youtube.com/watch?v=33HrC9WcpmI&index=4&list=RDS_nP0M7oTCw )

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C'est pour ton bien

Ce livre, et tous ceux d'Alice Miller, ont été salvateurs. Je les recommande à tous ceux issus d'une famille toxique, dysfonctionnelle...peu importe la dénomination : si vous sentez un malaise, un décalage, des frictions insolvables, des violences physsiques ou verbales dans vos familles, lisez-le !

Ce livre m'a permis de prendre du recul sur ma famille, de me déculpabiliser et de me rendre compte que ces schémas négatifs existent, malheureusement. Et de ne pas reproduire le même schéma auprès de ma fille, ce même schéma qui est reproduit depuis des générations.
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C'est pour ton bien

Dans une première partie, Alice Miller décrit la « pédagogie noire » et ses conséquences.

Elle cite beaucoup d’extraits de livres sur l’éducation des enfants de la deuxième moitié du 19ème siècle.

Ces livres préconisaient de se faire respecter de l’enfant, de lutter très tôt, dès les premiers mois de sa vie, contre sa nature capricieuse, indolente, quitte à user de châtiments corporels.





Je ne résiste pas à l’envie de vous livrer l’extrait suivant, que je ne saurais vous situer précisément dans le temps, entre 1850 et 1950.

Il s’agit d’un père, troublé d’avoir battu son enfant, qui va chercher réconfort auprès du pasteur. Celui-ci lui dit :



« […] Et vous avez également eu raison de donner une bonne correction à ce petit cabochar. Dans six mois d’ici, il ne l’aura pas oublié. Si vous ne l’aviez frappé que très légèrement, non seulement cela n’aurait servi à rien pour cette fois, mais par la suite, il vous aurait fallu toujours le battre, et l’enfant se serait habitué aux coups de sorte qu’à la fin ils lui auraient été complètement indifférents. C’est comme cela qu’en général les enfants se moquent complètement d’être battus par leurs mères ; c’est que celles-ci n’ont pas le courage de frapper assez fort. […] »





Bien sûr, il ne faut pas oublier d’indiquer à l’enfant qu’il ne doit pas se plaindre du traitement subi, il ne doit même pas être malheureux puisque : c’est pour son bien.



L’enfant, qui ne peut pas perdre l’amour de ses parents, perçu comme vital pour lui, va non seulement se plier aux exigences de ses parents, mais en plus intégrer le système d’éducation qu’il a reçu comme étant le bon système d’éducation. Il va nier sa souffrance, voire oublier complètement les mauvais traitements subis, dans un déni qui lui permet dans un premier temps de survivre.







Dans une deuxième partie, Alice Miller donne trois exemples pour illustrer le fait que cette façon de ne pas respecter les enfants est à l’origine selon elle de la délinquance, des crimes, des guerres et du terrorisme.



On y apprend l’enfance de Christiane F. qui a écrit « Moi, Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée… » , d’Hitler et d’un homme arrêté à 24 ans pour avoir tué des enfants d’une manière horrible.





Il est marquant que les biographes de Hitler minimisent les violences qu’il a subies étant enfant. Ils les justifient même prétendant qu’Hitler était naturellement mauvais.



Et reviens donc la question de l’inné et de l’acquis dans le caractère de l’enfant.







Et même lorsque l’on met de côté les violences physiques, on ne peut que s’interroger sur les humiliations que l’on fait subir, souvent involontairement, à son enfant.

Par manque de temps, par manque de patience, par manque d’envie de me remettre en question, de me poser des questions sur mon enfance et mes acquis, combien de fois me suis-je comporté de manière autoritaire sans aucune raison valable ?







Dans une dernière partie, heureusement, Alice Miller précise que le plus important n’est pas la souffrance vécue dans l’enfance, mais le droit et la possibilité de l’exprimer.



Elle revient sur la notion de culpabilité, inutile et contre-productive selon elle, puisque cette culpabilité se transmet alors à l’enfant.



Elle propose donc dans la prise de conscience des violences (physiques ou psychiques) que l’on a vécues, de faire le deuil de l’enfance heureuse et des parents parfaits que l’on s’est imaginé.







Un peu répétitif, un peu compliqué à lire à mon goût, ce livre me semble néanmoins permettre une prise de conscience.

Au-delà d’une réflexion utile à la vie en commun avec mes propres enfants, il m’incite à penser que l’amour ne s’impose pas, que le respect ne se décrète pas, que l’expression de la colère est bénéfique…

Toutes choses utiles dans les relations avec des adolescents pour qui ces questions sont sensibles.











Une « fable » en musique (et accompagnée du cri des porcs…) :



« L'éducation du corps des porcs

Se fait souvent un peu à tort

Par tradition, au fond des ports

Ce sont de grands hommes gras et forts

Parlant avec l'accent du nord

[…]

C'était un soir de pleine lune

La mer dressée bavait l'écume

Un homme aperçu dans la brume

Sa femme dansant dans la boue brune

Elle était nue et sur la plage

Trois jeunes garçons d'assez jeune âge

Dans un joyeux dévergondage

Se régalaient d'un tas d'outrages

La femme et eux faisaient ménage

Et le mari cria de rage

Brandissant sa main en battoir

Et s'élança sûr de les voir

La lune préférant ne rien voir

S'était cachée dans la nuit noire

Et l'homme fourbu de désespoir

Aveuglement criait victoire

La boue, le sang firent marécage

Et l'homme fourbu tomba en nage

C'est bien plus tard au p'tit matin

Qu'on aperçut au pied d'un porc

L'homme piétiné, raide et bien mort

A ses côtés trois pièces d'étain

A l'effigie des trois gamins

[…]

Proposez-leur un autre sort

Vous serez déçu peut-être à tort

Car ces jeunes gens coucheraient dehors

Pour préserver ce droit du corps

Ce privilège des gens du nord

L'éducation du corps des porcs »



(extrait de « L’éducation du corps des porcs » des Ogres de Barback :

https://www.youtube.com/watch?v=lEiy31Zoxwc )



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L'enfant sous terreur

Alice Miller défend la thèse selon laquelle nous avons subi des traumatismes dans notre enfance, particulièrement dans notre petite enfance, plus ou moins selon les personnes (idéalement pas du tout).





Elle revient sur les principes de la « pédagogie noire », pédagogie appliquée au dix-neuvième siècle et dans la première moitié du vingtième siècle. Celle-ci a laissé des traces aujourd’hui encore.



Par tradition, l’enfant est un être méchant et coupable qu’il faut éduquer, par les coups éventuellement (voir à ce sujet le livre d’Alice Miller « c’est pour ton bien », dans lequel elle cite des passages de ces livres de pédagogie dans lesquels il est indiqué comment taper son enfant, assez fort et assez longtemps…).





Les « mauvais traitements », volontaires ou non (c’est-à-dire les coups, les humiliations morales, les séparations, l’exploitation des dons aussi) provoquent de la colère, de la peur, de la tristesse chez l’enfant.



Ces sentiments, l’enfant doit les maîtriser, les garder pour soi, les étouffer, afin de garder la chose la plus précieuse pour lui : l’amour de ses parents.



Cette lutte contre ses sentiments peut l’amener à un véritable déni des traumatismes vécus, qui pourra faire de lui quelqu’un de névrosé, qui lui fera peut-être reproduire les traumatismes subis sur d’autres personnes, ses enfants en particulier.



En effet, au moment où certaines situations apparaissent lors de l’éducation d’un enfant, cela engendre chez son parent une confrontation inconsciente avec ses traumatismes enfouis, avec ses sentiments refoulés, ceci induisant un mécanisme de reproduction.





L’éducation autoritaire n’est pas la seule mise en cause ici. L’éducation antiautoritaire est autant montrée du doigt lorsqu’elle n’est pas menée dans le respect de l’enfant.

L’absence de soin, l’éducation dans laquelle les sentiments et donc la réflexion de l’enfant est niée, sont aussi des formes de violence perpétuées sur l’enfant.







Bien sûr, rien n’est irrémédiable.

Selon Alice Miller, c’est l’existence d’un « témoin lucide » qui peut permettre de « vivre sa haine » non exprimée dans son enfance, afin de la dépasser et de « faire le deuil » de son enfance.

L’enfance est souvent une période sublimée par les souvenirs et accepter qu’elle n’ait pas été parfaite, qu’elle n’ait même pas été si chouette que ça finalement, permettrait de ne pas reproduire certains comportements néfastes sur ses propres enfants.







Une aide fréquemment cherchée étant la psychanalyse, Alice Miller dénonce la culpabilité que celle-ci fait porter sur l’enfant lorsqu’elle soutient la théorie des pulsions chez l’enfant.



Freud a d’abord reconnu la réalité des traumatismes sexuels chez l’enfant, en 1897, avant de développer la théorie des pulsions, dont le fameux complexe d’Œdipe et « l’envie du pénis » chez la femme.

Alice Miller réfute totalement ces théories.







Les exemples qu’elle donne pour illustrer ses propos sont bien souvent des exemples de « cas extrêmes », mais on peut aisément penser que la majorité des gens sont concernés à des degrés moindres.



Elle donne aussi des exemples dans la littérature, en interprétant à sa manière l’œuvre de Kafka, entre autres.





Puisque l’on parle ici de littérature, il est intéressant de s’interroger sur la signification de certains contes pour enfants.



Quel message reçoit l’enfant à l’écoute du Petit Poucet ?

On risque de m’abandonner pour que papa maman puisse acheter de la viande à la boucherie ?

De quoi développer la culpabilité concernant les difficultés des parents…



Et à la lecture du Petit Chaperon Rouge ?

Maman sait que la forêt est dangereuse puisqu’elle me met en garde contre le loup, mais elle m’y envoie quand même. Lorsque je suis attaqué, c’est donc que je n’ai pas su me protéger ?

De quoi développer la culpabilité concernant les mauvais traitements reçus…





Heureusement, de nos jours, les livres proposent des tas d’histoires super chouettes et pas culpabilisantes du tout pour les enfants, des super princesses qui veulent pas de jolies robes ou qui se permettent de dire « je veux/je veux pas »…











Bon, pour se détendre, prenons un petit air de violence sur fond de comptine (là aussi, il y aurait beaucoup à dire…) :



« Puis il allait au cabaret

Puis il allait au cabaret

Sa petite goutte il buvait

Sa petite goutte il buvait.

Il la buvait si juste

Qu'il n'y'avait rien d' plus juste.

Il la buvait tout dret,

Pas plus qu'il n'en fallait.



Quant à la maison il rentrait

Quant à la maison il rentrait

Sa petite femme il battait

Sa petite femme il battait.

Il la battait si juste

Qu'il n'y'avait rien d' plus juste.

Il la battait tout dret,

Pas plus qu'il n'en fallait.

[…] »



Extrait de « Il était un p’tit cordonnier », chanson enfantine.

Vous pouvez la voir chantée par Dorothée en 1986, qui chante cela avec le sourire… :

https://www.youtube.com/watch?v=Ijfq0KWaNUI





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Le drame de l'enfant doué

Alice Miller n'avait pas encore rompu avec la psychanalyse quand elle a écrit ce livre, mais il contient déjà les prémices de ses théories sur la pédagogie noire et ses méfaits.

Pour ma part je l'ai trouvé d'occasion il y a plusieurs années, je ne sais pas s'il est re-édité maintenant.

Mais, comme tous les livres d'Alice Miller, c'est à lire pour mieux se comprendre quand on se sent, comme cela a été mon cas, "alien" en ce bas monde.
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C'est pour ton bien

C'est le livre d'Alice Miller que j'ai préféré et j'ai été particulièrement marquée par la description de cercles vicieux de violences au fur et à mesure des générations, très bien illustré avec le cas d'Hitler et la non remise en question de l'autorité paternelle-divine-de l'état. Cette soumission à la figure d'autorité au niveau de la famille, de la culture, du pays est un schéma qui se reproduit au travers des structures et des groupes (réduits comme la famille ou très important comme la nation).



Si le sujet vous intéresse vous pouvez peut aussi compléter la lecture de ce livre par:

Des livres d'Alice Miller

Oui, la nature humaine est bonne! d'Olivier Maurel

www.alice-miller.com

www.oveo.org (Observatoire Violence Educative Ordinaire)

www.nifesseesnitapes.org

etc.
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L'enfant sous terreur

Voir aussi C'est pour ton bien : ce sont les 2 volets d'une même oeuvre à lire absolument pour une thérapie personnelle. Ma bible à moi.
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