Un bon mensonge est un mensonge que l’on construit avec patience, persévérance et régularité. C’est un édifice que l’on élève pierre après pierre, couche après couche, et où le plus petit détail a toujours son importance. Négligez ne serait-ce qu’une infime faille dans ses fondations, la plus petite irrégularité dans le mortier qui lui permet de faire tenir l’ensemble, et tout s’effondrera au moindre courant d’air.
Evidemment, il y aura toujours quelqu’un pour souffler dessus et chercher à le faire tomber. Un menteur de talent ne pourra donc pas se contenter de déformer, maquiller, ou encore travestir la vérité, il devra la réécrire entièrement. La modeler à coup de bistouri jusqu’à parvenir à métamorphoser cette première version de la réalité en profondeur, et donner au mensonge plus de consistance qu’à cette vérité qu’il souhaite remplacer. Le menteur ne doit pas seulement convaincre le reste du monde, il doit être le premier à croire sincèrement à ses fables. Et pour construire un mensonge de cette envergure, il faut du temps. Beaucoup de temps.
Pour Rozen, il avait fallu neuf ans. Neuf longues années de chantier pour remodeler intégralement son identité, jusqu’à tromper tous les regards qui s’étaient posés sur elle depuis ses onze ans(..)
Tout le monde peut avoir l’air aimable dans les meilleures conditions. C’est dans les pires que tu verras le vrai visage des gens.