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Critiques de Annick Le Scoëzec Masson (21)
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Bréchéliant

Bréchéliant est une fable où l’auteur s’est aventuré vers le mythe originel, la forêt du secret, l’eau de la légende vive. Car l’ » amour de loin » des troubadours ou de Lancelot du Lac est une habile métaphore, non seulement de la lecture, ce périple immobile, mais de la nature même du désir, qui est toujours un au-delà, toujours sur l’autre rive, de l’autre côté de la glace, dans une attente qui signe conjointement l’exacerbation et l’abolition du temps. À l’image de l’errance infinie du Chevalier, ou de la veille interminable de la Dame de la plus haute tour, dont nous trouvons dans ces pages une nouvelle incarnation émouvante.

L’intrigue de Bréchéliant est aux antipodes d’une histoire qui se conterait – et se compterait – en quelques mots. La trame, nous le disions, est tout entière dans le décor même de la chronique, dans les bornes milliaires de la vie quotidienne aux jours lointains d’Excalibur et de la dormition du roi Arthur. Paradoxalement, l’atmosphère fait songer à l’un des récits les plus contemporains de Julien Gracq, Un balcon en forêt (1958), pendant la « drôle de guerre ». Dans l’incertitude et l’indécision qui marquèrent le préambule de la Seconde Guerre mondiale. On observe (on s’observe) et on attend. Comme l’oreille musicale guette le retour du leit-motiv. Le blockhaus – nouvelle métamorphose du château fort – est l’armure et le belvédère. Le havre aussi, où les yeux et le cœur couvent leurs songes, caressent leurs évasions. La durée prend une autre substance, comme un tapis de feuilles qui s’épaissit jour après jour. Et comme une lande s’abandonne au regard, sommeilleuse.

Dans Bréchéliant, le lecteur retrouvera toute la densité littéraire, et la diversité d’Annick Le Scoëzec Masson. Dans une langue tantôt rêveuse et chatoyante, tantôt terrienne et savoureuse, toujours allusive à ce point de fuite du temps et de l’espace qui est le champ de notre mémoire et le terreau de nos désirs – dont l’origine remonte à l’étoile, justement, le sidus, la constellation sidérante. Écoutons la conteuse nous convier à l’assemblée des elfes, dans la clairière des géants d’écorce et de mousse, autour du feu de joie qui renaît chaque nuit. Écoutons la nostalgie et le vouloir, le passé et le futur qui trouvent leur lieu de rendez-vous, aurait dit Carlos Fuentes, dans la « consécration de l’instant, scellée par la fable des origines ». Oui, pour toujours et à jamais, il était une fois...

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Brouillard sur le pavillon haut

Ce livre est une merveille, un bijou. 36 poèmes écrits par Annick Le Scoëzec Masson et illustrés par elle de dessins à l'encre et de calligraphies. Les textes eux-mêmes paraissent des architectures ; centrés sur la page, ils ressemblent à des colonnes de kanjis ou à des pagodes.





Ils nous plongent dans un univers hors du temps, quelque part en Chine : on devient un voyageur qui chemine sur un sentier, dans les montagnes, on entend le vent, on voit les fleurs, les arbres, les oiseaux et les papillons tout autour. Ce recueil de poésie est d'une grande sensualité. Il évoque les estampes qui semblent se manifester devant nos yeux au fur et à mesure de la lecture, nous faisant entrer par les mots dans les paysages. Quelle belle écriture, quelle pureté, quelle délicatesse, quelle simplicité profonde !





Je suis ébahie par ce livre que j'ai reçu grâce à Masse critique, une splendide découverte !

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Bréchéliant

Ce roman est comme une tapisserie de haute lice dont la chaîne serait l'histoire de la dame, recluse dans la tour d'un château breton depuis le départ de son seigneur aux Croisades, avec, pour seules compagnes, sa lectrice, Ariane, qui l'initie à la poésie occitane et à l'amour courtois, et sa belle-sœur, confidente, amie et complice d'un terrible secret qui l'empêche de trouver le repos de l'âme et rend vain les élans mystiques qui occupent son esprit tourmenté. La seconde partie du cadre est, bien sûr, occupée par l'arrivée d'un étrange naufragé qui rompt un équilibre précaire, accélère et dénoue le drame déjà en germe dans le huis clos de la première partie.

Quant à la trame de cette tapisserie à laquelle je me plais de comparer Bréchéliant, elle serait composée d'une multitude de références culturelles et littéraires, d'allusions aux usages et traditions de Bretagne, de légendes et de poèmes qui tiennent du monde celte aussi bien que de la lointaine Occitanie. L'ensemble donne un entrelacs de fils, merveilleusement servi par une langue fine et ciselée qui a su créer une atmosphère de mystère et de langueur et suggère le passage des saisons et la profondeur de la terre de Brocéliande, avec ses êtres énigmatiques, ses secrets maléfiques et la rumeur infinie de l'océan en toile de fond.

En outre, comme une tapisserie a besoin d'être admirée à plusieurs reprises et vue de loin et de près pour pouvoir être appréhendée dans toute sa richesse, ce roman gagne à être lu plusieurs fois, la première lecture vous entraîne dans un monde étrange et déroutant de mélancolie, d'inquiétude, et de cruauté, les suivantes éclairent certaines énigmes, répondent au fur et à mesure aux questions posées par le déroulement du drame et permettent de méditer sur quelques sujets choisi, tel celui de « l'amour de loin » au cœur des échanges entre la dame et sa lectrice.

Bref un beau roman, un petit bijou à garder précieusement.

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Bréchéliant

"Bréchéliant" est un récit poétique qui tente de recréer l'épaisseur du temps médiéval perçu depuis l'intimité de l'univers féminin. Il ne faut pas y rechercher les ingrédients et les ressorts de la "fantasy". C'est un roman de la solitude et de l'attente, habitées par les errances du sentiment. Les légendes de Brocéliande constituent le cadre imaginaire, la matière où s'inscrit cette attente, loin du vaste monde, de son écume, de son bruit et de sa fureur...

Rien n’est évident dans “Bréchéliant”. Tout est allusif, feutré, à lire entre les lignes, mais néanmoins violent : le Val sans retour où la fée Viviane enfermait les amants infidèles et les condamnait à errer pour l’éternité, la fontaine de Barenton et son perron d’où jaillissait le feu quand on y jetait de l’eau, les démons “korriganes” qui venaient hanter les âmes… La forêt toute proche est, dit-on, hantée. "Bréchéliant" bruisse de ces voix multiples qui en colportent l'effroi. On ne sait quelle forme y prend le risque, mais on s’y risque sûrement au péril de sa vie . Car on y meurt, dit-on, à moins que l'on y trouve la révélation, la découverte d’une autre dimension de l'existence, tellement forte que l'aventure valait bien que l'on s'y hasardât… Et puis, il y a le croisement de toutes ces formes “d’amour de loin” mises à l'honneur par la lyrique des troubadours… Quand la tradition occitane rejoint celle des chevaliers d'Arthur...

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Bréchéliant

Bréchéliant ne m'a pas vraiment passionnée. J'ai d'abord pensé qu'il s'agissait d'un conte merveilleux sur la Matière de Bretagne, ce dont je me réjouissais, mais il n'en est rien.

En fait, il ne se passe quasiment rien, hormis dans les dernières pages. On suit une Dame, qui vit recluse depuis le départ de son mari, parti embrasser la chevalerie. Elle se consacre à la religion et n'accepte pour seule compagnie qu'Ariane, qui lui lit des contes, et Violaine, sa belle-soeur.

L'arrivée d'un étranger retrouvé à moitié mort va rompre cet équilibre.

Ce texte s'inscrit dans la lignée de l'Amor de Lonh de Jaufré de Rudel. L'écriture est très soignée, très poétique, et si je lui trouve cette qualité, je regrette aussi certains passages un peu brouillons.

Une découverte intéressante, pour laquelle je remercie Babelio et les éditions Garamond!
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Brouillard sur le pavillon haut

Dimanche, 4h du mat'. Insomnie. Je fais bouillir de l'eau, saisi un livre. Tiens, pourquoi pas ce recueil de poèmes d'inspiration chinoise que je viens de recevoir ? Je choisis ce thé jaune que j'aime tant, Huo Shan Huang Ya. J'en garnis généreusement la théière noire en terre crue qui contraste avec la tasse de porcelaine blanche déposée juste à son côté. Yin et Yang... L'eau est chaude. J'arrose délicatement les feuilles. En quelques brefs instants la liqueur est versée dans la tasse. Je m'installe.



"L'épaisseur de bruits ordinaires" forme un silence rassurant. Déjà les mots résonnent en moi...



Je ne dormais ni ne veillais,

suspendu le moi qui songe

à autre chose que soi-même,

et ne se rappelle plus quoi.





Temps suspendu de la poésie, le temps vivant et calme du thé. Dans les voiles légers de la nuit , je vois le temps. Passé, présent, à venir. Je vois tous les temps dans cet instant...



Je voyais la ronde

des poussières sous mes doigts,

pensais :

"Si tu sais regarder

à l'intérieur,

c'est tout le paysage

qui s'élargit

aux quatre coins des perspectives.

Le passé est là tout entier

qui se dépose autour de toi,

chaque particule,

l'éclat d'une vie qui

passa la frontière invisible

en un lointain jadis.

Le monde est en train de passer en toi.





Echos. Le thé s’écoule en moi. Les pages entre mes doigts. Evocation de l'arbre, de la vie... de ce qui nous relie dans l'éternité et dans l'éphémère. Impermanence. Transformation.



quand l'arbre s'introduisait dans la chambre,

poussant ses branches jusqu'à nous toucher,

et que j'ouvrais le livre



Ces feuilles de thé, hier arbre, sont aujourd'hui liqueur qui abreuve mon corps et mon cœur. Ces feuilles de papier entre mes mains, hier arbre, sont aujourd'hui des pages qui portent ces mots, instantanés de vie et paysages révélés. Intériorité et monde extérieur unis.



Des paroles fracassantes

traceraient sur les pages

la pureté des leurs signes,

se formeraient des paysages,

ondoiements

intacts et anciens.

Une bulle de silence heureux

alors

s’évaderait par la fenêtre.



La fenêtre est ouverte. Le silence est feutré. Je feuillette ce livre "quand, entre les lignes, ces voix..." Ces voies venues de Chine. Celle des peintures de style chinois, signées de l'auteur, qui illustrent cet ouvrage. Celle des sinogrammes qui en ponctuent les pages. Celle de la poésie des lettrés dont ces poèmes sont imprégnés. Celle de la calligraphie dont en voici l'esprit :



Du pavillon où nous arrivions,

il ne restait plus,

à pinceau levé,

qu'un seul trait,

ébauché

comme on fait un signe.





Des voix venues de Chine, des voies qui n'en font qu'une. Unies en un trait de pinceaux. Cette voie, la Voie, sagesse fondatrice de la pensée chinoise. C'est en suivant cette voie que nous pénétrons enfin dans le pavillon chinois.



Les tasses de thé se suivent et ne se ressemblent pas. Les pages se tournent dans des songes d'ailleurs. Le thé et les mots réunis me transportent. Cette poésie m'accompagne jusqu'au petit matin. Les premières lueurs du jour me découvrent rêveuse dans les brouillards de Chine. Ce brouillard qui couvrent les jardins de thé des hautes montagnes. Ce poétique "Brouillard sur le Pavillon Haut".



[...] les brouillards, les murmures

qui hantent là-haut,

tout en haut sur les sommets,

ledit Pavillon Haut.



C'est grâce à l'opération "Masse critique" que j'ai reçu ce livre. Merci à la maison d'édition et à Babelio pour cette charmante découverte. Je suis ravie. Un seul regret, les peintures ne sont vraiment pas mises en valeur.




Lien : http://the-tea-cha.blogspot...
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Bréchéliant

J'ai aimé cet univers étrange, fantastique et mystique. Le regard de deux femmes ravivé par l'arrivée de l'inconnu, la part laissée belle à l'imagination avec tous les personnages qui gravitent autour des deux châtelaines. Et la forêt présente, un peu enchantée. Et ce langage fleuri qui sent bon les onguents, et le froufrou des soieries, le tout teinté de mélancolie.
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Suite indienne, poèmes

Suite indienne est un voyage à travers l'Inde avec Bombay pour première étape .

Ce périple s'ouvre sur l'irruption des pèlerins , « se sentir emporté sans le vouloir » le ton est donné ,à « Bonbay où tout est gris » .

Voyage presque photographique , les images fusent s’enchaînent , dans une hâte qui ne ressemble pas à celle nos villages endormis .

Cette superpositions fatigue quelquefois on voudrait se poser ,ne plus ressentir ce fourmillement de pas « l'empreinte aérienne d'une marche ...les engelures , les crevasses , les œdèmes , et dans l'éther desséché la silhouette pénitente d'une femme .

Puis le voyage sait quitter la périphérie , les hordes de chiens , retrouver des visages , la dormeuse , le danseur , la veuve , l'urgence de témoigner est moins forte plus nonchalante le style aussi change .

La langue de Scoêzec cherche alors le rythme du Haïku « dans cette orgie de blancheur je me suis assise  »

La poésie s'installe avec plus de tendresse pour ces figures ancestrales , et dans une supplique elle leur parle «  fais jouer le cercle de tes bras ,attise autour de ton buste les brasiers qui consument ta virilité  »

la suite indienne imprégnée du passé Jaipur , Orchchâ , sillonne une route étrange , c'est l'Inde peuplée d'ombres « Elle s’appelait Châlurata peut être , lorsque bercée par son chant , elle s'endort dans l'ombre projetée de son éternité  » .

« Pourquoi chercher à retenir mon âme » ce dernier chant est un adieu à ces lieus , ce sont les mots choisis par Annick le Scoëzec pour nous laisser en attente en suspend d'une suite possible .

Très beaux textes parfois difficiles , hachés et faussement décousus , ils invitent à ressentir ce voyage par tous nos sens sans juger , sans interpréter juste regarder vivre l'Inde .

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Les Amours de Râdhâ

Au hasard de la dernière opération Masse critique, j'ai vu arriver, il y a une quinzaine de jours, cet ouvrage. Que les éditions Garamond et Babelio soient remerciés car je n'avais encore rien eu de tel entre les mains.



Je vais lourdement insister et me répéter mais les auteurs, Frédéric LIGIER, agrégé de musique, et Annick LE SOEZEC MASSON, agrégée d'espagnol et romancière, nous livrent un opus inattendu.



Comment vous le définir ? Avec certitude, je dirai que c'est un recueil... oui mais de quoi ? Un recueil de partitions musicales, de textes poétiques et d'illustrations. Le tout étant inspiré de miniatures de l'Ecole de Kangra.



L'ensemble prend des airs savants mais vous "conte" les amours de la gopi Râdhâ aimée puis délaissée par son amant Krishna. Ce récit est issu de L'Ode au divin Vacher (XII ème siècle) composée par le poète bengali Jayadeva, ; ce long poème est souvent comparé au Cantique des Cantiques et on nous rappelle, dans la préface, que c'est un chaînon essentiel de la littérature sanskrite.



Pour faire simple, quand bien même la préface s'est avérée essentielle pour introduire l'ouvrage et la situation, j'affirme que les textes poétiques et les miniatures se suffisent, tant ils nous apportent émotions, jolie langue, cris d'amours, de déceptions, dépaysement et enchantement aussi. Les origines lointaines ( dans le temps et dans l'espace) du sujet le rende un peu opaque parfois mais il émane de cet ouvrage de la chaleur, de la poésie, du rêve et un grand quelque chose qui vous transporte, vous apaise et vous extrait immédiatement du réel et surtout du quotidien.



Je regrette de ne pas être du tout compétente pour évoquer les partitions rassemblées dès le début de l'ouvrage mais je gage qu'elles sont à l'avenant.



En toute honnêteté, je n'aurais jamais spontanément acheté ce livre car, ce que l'on découvre tout d'abord en le feuilletant, ce sont des partitions. J'aurais donc raté quelque chose.



Dernier commentaire : le texte poétique, je le répète, se suffit à lui même et j'ai lu ce recueil très vite et spontanément à haute voix sans m'en rendre compte. Le verbe employé se prête, selon moi, à la lecture à haute voix juste pour le plaisir des mots et des sons aussi.



Finalement, j'ai fait un beau voyage dans le temps et dans l'espace. Je serais bien curieuse d'entendre comme se déploient les petites notes que je vois encore sauter sur les partitions.



Encore merci aux éditions Garamond et à Babelio.
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Suite indienne, poèmes

" Suite indienne "est un recueil de poésie relatant un voyage dans le nord de l'Inde. Chaque poème est l’occasion d'éclairer de manière très photographique

les pérégrinations de l’auteur.

D’une écriture alerte et musicale Annick Le Scoezec Masson restitue avec infiniment de sensibilité les instantanées poétiques que lui évoquent se formidable pays.

L’on peut juste regretter l'uniformité du ton qui nuit à l'intérêt constant du livre. Néanmoins, c’est une charmante découverte en ce qui me concerne.
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Méconnu du public français, Ramón del Valle-Inclán fait, en Espagne, l’objet d’une reconnaissance toujours plus approfondie le plaçant au panthéon des lettres hispaniques. Rénovateur des formes dramaturgiques et du langage théâtral dans les années vingt, à l’instar d’un Brecht ou d’un Pirandello, Valle-Inclán fut aussi un grand prosateur et un poète en quête de spiritualité. Passionné de politique, il se livra également à une critique impitoyable de la vie de son temps.



Ce « Qui suis-je ? » Valle-Inclán retrace le parcours intellectuel d’un artiste hors norme et présente les multiples facettes d’une œuvre abondante, complexe et en constante évolution. Ancrée dans une terre ancestrale, riche en légendes, la Galice, mais aussi dans le Madrid 1900 et celui des années vingt et trente, à la veille de la guerre civile, sans oublier l’Amérique de l’ancien empire colonial et ses tyrans d’opérette (Tirano Banderas, 1926), cette œuvre se signale par une écriture exigeante, traversée de préoccupations avant-gardistes. Des Sonates, quatre courts récits poétiques, à La Guerre carliste, trilogie romanesque, des Comédies barbares, trilogie dramatique galicienne, à Lumières de bohème, pièce madrilène qui fonde l’esthétique propre de Valle-Inclán, sans oublier Carnaval de Mars, satire d’une armée caricaturale, l’éventail de la création valleinclanesque ne cesse de déployer les aspects foisonnants d’une vision magistrale à (re)découvrir. Elle culmine avec l’entreprise de L’Arène ibérique, trilogie romanesque inachevée, synthèse de la réflexion esthétique, historique et idéologique de l’écrivain.

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Brouillard sur le pavillon haut

Dans la préface à l’un de ses derniers écrits, Le Studio de l’inutilité (2012), Simon Leys nous rappelle que, dans la Chine classique, « les lettrés, les poètes et les artistes avaient l’habitude de donner des noms évocateurs ou inspirés à leurs résidences, ermitages, studios ou ateliers ». En fait, précise-t-il, bien souvent ils n’avaient rien de tout cela, mais l’essentiel était « la réalité du Nom » -- et la réalité de l’écrit. J’en vois une remarquable illustration dans le nouveau livre de poèmes publié par Annick Le Scoëzec Masson : Brouillard sur le Pavillon Haut (Paris, Garamond, 2015).

A partir d’une poignée d’idéogrammes, de quelques détails de la peinture chinoise traditionnelle ou de quelques scènes évoquées par des poètes ou des conteurs de ces dynasties qui ont sédimenté nos mémoires, Annick Le Scoëzec Masson fait vivre – ou revivre : c’est tout un – sous nos yeux tout un monde peuplé de personnages légèrement décalés, d’animaux étranges et familiers, d’objets, de couleurs, de lunes et de brumes. Et les silhouettes immatérielles, les contours délavés des montagnes, des saules, les bruissements de la rivière sont aussi présents, tout à coup, que le tumulte et le brassage des « foules hagardes » qui saturent la chronique de nos temps insatiables. Sans bruit, l’auteur poursuit sa quête d’un autre temps, celui que nous laisse entrevoir et chérir



une maison simple, un écritoire,

un peu de vin, du riz,

le pinceau levé sur la page...



Après les miniatures mogholes de Suite indienne (2001), Annick Le Scoëzec Masson nous offre, avec son Brouillard sur le Pavillon Haut, quelques séquences chinoises de la meilleure veine qui nous invitent à flâner dans « un jardin d’iris et de pluie », en compagnie « des amis partis », à suivre, « au flanc des montagnes grasses », le sentier qui s’estompe et reluit au loin, et revient toujours au détour de nos souvenirs.


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Mélancolie au Sud

Un roman d’apprentissage qui se situe dans les années 1960 est déjà tout un paradoxe. La génération des Teenagers (comme on disait alors) à Rochefort et dans les Charentes profondes comme dans le reste de la France et dans une partie considérable de l’Occident, ne se contentait plus de ruer dans les brancards – jeunesse oblige -, elle était bien décidée à déboulonner le cocher. Le contexte de Mélancolie au Sud, le premier roman d’Annick Le Scoëzec Masson, est celui des révoltes de la jeunesse en Mai 1968, qui se sont répandues de l’Allemagne aux Etats-Unis et au Japon, de la France au Mexique.



Bien sûr, dans une ville comme Rochefort, bastion de la royauté française, maintenant à l’écart des grands axes, les événements contemporains résonnent de façon plus lointaine, comme à travers un tamis. Une des qualités du livre d’Annick Le Scoëzec Masson, écrit dans une langue riche et ouvragée, toute en nuances et en demi-teintes, est de faire sentir au lecteur, au point de lui faire partager, la tension entre les deux «histoires » en présence : d’une part, la déferlante moderne contre les interdits, les tabous, le pouvoir et l’autorité au sens large ; de l’autre, une intangible et infrangible lenteur provinciale qui amortit le choc des siècles comme l’entrechoc des passions, des idées ou des modes. Les personnages de Mélancolie au Sud sont à la croisée des temps, au carrefour de ce réseau de contradictions, d’oppositions violentes ou larvées, conscientes ou confuses.



La romancière nous restitue fidèlement, avec humour et tendresse, Rochefort et ses demoiselles rose bonbon – à l’époque d’un film vraiment original -, mais aussi la Charente indolente, la mer qui a laissé Brouage s’enliser dans les terres, ou la Côte Sauvage qui n’avait pas volé son nom (gare à ceux qui oublient la marée), ou le Martrou et son vieux pont transbordeur : frisson garanti, pas besoin des montagnes russes ni du parc d’attractions américain, à l’âge de James Dean et de La Fureur de vivre…

En même temps, l’Histoire (avec son grand H) s’est figée dans la vase, au milieu de rien. Les bassins de radoub de la cité de Colbert et de Vauban sont vides depuis longtemps et, pour l’heure, c’est la base d’aviation qui est menacée, en attendant d’autres « plans de restructuration », d’autres saignées. Restent l’ennui, la torpeur, la résignation – ou les chimères.



Grâce aux origines de certains personnages, Annick Le Scoëzec Masson montre habilement comment l’histoire ancienne (Maria Mancini, la promise du Roi, abandonnée à Brouage, désormais ville fantôme, comme Maillezais et le spectre d’Agrippa d’Aubigné) se lit en surimpression de l’histoire immédiate, ou récente : les Français d’Algérie, à la décolonisation, abandonnés par la métropole, revenus au pays dans l’ignorance générale, voire dans l’universel soupçon… Alors, au milieu des rituels de l’adolescence urbaine, bientôt blasée ou rangée de toutes les façons, comment résister à l’attrait du Marin de Rochefort ?

Le Marin semble échapper aux contingences spatio-temporelles. Il n’a pas de lieu, pas de racines – aux yeux des autres, en tout cas. Ne dit-on pas qu’il est « sans attaches » ? Il incarne à merveille l’Ailleurs (« A beau mentir qui vient de loin ») et une apparente liberté, surtout s’il a vingt ans – et vous aussi.



Parallèlement, le Marin partage avec T. E. Lawrence, dans La Matrice, la paradoxale, implacable solitude de l’uniforme. Ainsi quand Laurence d’Arabie (comme nous l’appelons), jeune aspirant aviateur dans la R.A.F., notait : « Pour les types de l’Armée, il n’y a pas d’hommes sur la Terre, rien que d’autres types de l’Armée. […] nous sommes vraiment en marge ». Voilà, sans doute, ce qui a séduit Hiasmine, le personnage central de Mélancolie au Sud : le charme de l’inconnu, joint à la liberté du Grand Large, dissimulant, mais pas toujours (et l’art d’Annick Le Scoëzec Masson est de le faire transparaître çà et là), la blessure inguérissable, la douleur des déracinés. C’est là que le particulier rejoint l’universel – et que la littérature se fond dans l’histoire qu’elle transcende et rachète.








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Esplanade avenue

Un traducteur français de Faulkner, dans une scène qui se passe à La Nouvelle-Orléans, traduit littéralement une phrase qui nous vaut cette perle : « un Noir venait de débarquer d’Alger »... En fait, il s’agit du quartier d’Algiers, de l’autre côté du Mississippi, pour lequel et à partir duquel on prend le bac, à l’instar de ce Noir. Bien sûr, si ce quartier néo-orléanais s’appelle Algiers, c’est parce que les esclaves, jadis, y débarquaient, venant d’Afrique du Nord où les barbaresques organisaient ou facilitaient leur traite. Cette petite méprise (les realia sont une des bêtes noires de la traduction), ce télescopage pourrait servir d’introduction au personnage principal du roman d’Annick Le Scoëzec Masson, Esplanade Avenue, le protagoniste qui porte le nom de Marvillèse, dans un mélange d’espagnol et de français (où l’on retrouve maravilla, la merveille). Et le lecteur se rappellera que La Nouvelle-Orléans fut également une possession espagnole, comme en témoignent notamment ses grilles de fer forgé, ses balcons et galeries de bois, ses carreaux de faïence, ainsi que son hôtel de ville qui porte encore le nom de Cabildo (« conseil communal »).



Eugène Marvillèse condense toutes ces appartenances, y compris l’Afrique du Nord où il naquit à l’époque de la « présence française ». Et nous apprenons qu’il était peintre, tout comme son contemporain Degas, qui séjourna lui aussi à La Nouvelle-Orléans : on y visite aujourd’hui une maison qui appartenait à sa famille et qui se trouve, précisément, sur Esplanade Avenue, la perle du « Quartier français ». Degas, c’est l’âge d’or de la peinture moderne en France : l’impressionnisme et les nombreux courants qui rivalisent et se relancent à la charnière des XIXe et XXe siècles.



Que faisait Marvillèse dans cette ville à la fois mythique et sulfureuse, aristocratique et crépusculaire, peu après l’époque où y vécut un écrivain aux multiples appartenances, lui aussi, le Gréco-Irlandais (et bientôt Japonais) Lafcadio Hearn ? C’est la question que se posent deux autres personnages du roman d’Annick Le Scoëzec Masson, Gwen et sa compagne Miette. Et ceux-là sont nos contemporains, au tournant des XXe et XXIe siècles, à la veille de l’an 2000. Le nom même de Gwen (tout comme le patronyme de l’auteur) ouvre encore sur d’autres horizons : la Bretagne. Car Esplanade Avenue n’est pas seulement un roman de la grande ville (le Paris du Vieux Monde fin-de-siècle et la métropole du Sud des États-Unis en déshérence), mais un livre ancré dans la campagne de France, dans sa rudesse comme dans ses légendes, dans son âpreté comme dans la douceur de sa patine et des fruits d’arrière-saison. L’auteur excelle dans ces évocations du terroir, aussi bien de la forêt du roi Arthur que des bayous et des paluds de Louisiane. Le livre se construit ainsi dans l’alternance, dans un chassé-croisé d’une fin de siècle à l’autre. Avec toujours, comme point de fuite, l’énigme de Marvillèse et de son grand amour, Aube, qui le conduisit finalement à s’embarquer pour les Amériques. Avec, toujours, cette composante trouble - et périlleuse, comme la navigation sur le Mississippi - du servage et de la ségrégation [...].

Certes, cela ne doit pas nous faire oublier les noms du tracé (au cordeau) du French Quarter (la rue Royale, la rue de Chartres - avec son hôtel Richelieu - et la rue de Toulouse, la rue Bourbon et la rue Dauphine), avec les fleurs de lys et les boutiques à l’ancienne, avec les réverbères et les restaurants d’autrefois où les clients, de nos jours encore, veillent à soigner leur mise, avec le jazz qui déferle sur les trottoirs et devant Preservation Hall (le temple de Satchmo), les bars et cabarets où le nom d’une boisson, à lui seul, résume le topo : Hurricane, l’ouragan, mais cette altérité, à laquelle renvoie par excellence la guerre de sécession, la violence larvée, en sourdine, ou aveuglante est toujours là, jusque dans l’air que l’on respire sur Jackson Square, devant la cathédrale Saint-Louis et la petite allée contiguë, ombragée, où habita le jeune Faulkner : Les Palmiers sauvages... En deux minutes de marche, vous passez de Magazine Avenue (qui pourrait se trouver sur les hauteurs de Beverly Hills), avec ses résidences cossues, ses colonnades et frontons immaculés, ses jardins luxuriants, à une artère au nom indien, imprononçable, qui se termine en taudis, en terrains vagues, en voitures borgnes, en misère et trafics de junkies : « Trois hommes ivres ou drogués nous croisent en titubant avec des éclats de rire. On dirait les zombis loqueteux du cimetière Saint-Louis. [...] Au carrefour, la vieille Chevrolet s’est arrêtée. Elle a marqué le stop, me dit Gwen, mais moi je vois bien qu’il n’y a rien et qu’elle reste quand même sans bouger. Je vois bien, moi, qu’ils nous attendent. [...] Et s’ils sortent sans crier gare, s’ils nous prennent en tenaille, ces malabars, et qu’ils nous font la peau ? S’ils nous dévalisent en s’en vont peinards avec nos papiers, qui nous retrouvera ? Derrière, les animaux du terrain vague ont disparu... » Cet extrait du chapitre X, au milieu du roman, nous montre comment tout, là-bas, peut basculer dans son contraire, en un clin d’œil. Comme dans une page de Sanctuaire ou de Lumière d’août [...].



C’est dire l’épaisseur géographique et historique de ce roman très dense. Et c’est toute l’ambiguïté de l’Esplanade Avenue : d’un côté, l’esplanade est un lieu dégagé d’où l’on découvre un ensemble (et l’avenue s’ouvre, large, devant nous) ; de l’autre, les pièces de cet ensemble sont entourées de futaies, de murs ou de clôtures ; secrètes, fermées au regard ; l’histoire, en partant, a fermé à double tour et jeté la clef.



À l’image de Gwen et de Miette, nous pénétrons graduellement - au gré de promenades, de conversations, de correspondances échangées - dans un monde qui ressemble au nôtre, parfois, ou qui lui est profondément étranger. L’éloignement dans l’espace se double de ruptures temporelles, et l’art de la romancière est de tendre d’invisibles fils pour relever des pans de vie : de destinées [...].



Face à Marvillèse le métèque, le sans-grade, Aube de Kervadeuc et son frère incarnent la vieille aristocratie (terrienne) finissante, tout comme Félicienne la Normande, ou Soisig la Bretonne - au domaine du Harvouët, dans la forêt de Brocéliande - incarnent toutes les servantes, gouvernantes et bonnes de jadis, et comme la jeune Parisienne originaire du Nord, Fleur Versache, vendeuse dans un grand magasin, illustre la nouvelle dynamique sociale qui porte ou secoue la France 1900, la prétendue « Belle époque »...

Le chapitre IX où Fleur Versache vient en aide à Marvillèse au bord du suicide est sans conteste un des plus attachants et des plus aboutis – tant par sa mise en scène que par son style - du roman d’Annick Le Scoëzec Masson. Sa restitution du Paris des dernières calèches et des omnibus tirés par les chevaux, à l’heure de l’Exposition universelle du tournant de siècle - avec les trottoirs roulants de la « Fée Électricité » - est aussi prenante que ses évocations du clair-obscur dans la forêt bretonne, ou des méandres ténébreux, tissés de cris et de frôlements, dans la selve louisianaise.

Il y a donc deux histoires dans ce livre : celle qui s’écrit sous nos yeux, en devenir même ; et l’histoire au passé, qui s’achève avec les bruits de bottes que le protagoniste de Thomas Mann, Hans Castorp, entend confusément lorsqu’il redescend de La Montagne magique pour se jeter dans la mêlée de 1914.



En alternance, sur un mode moins tragique, le lecteur découvrira, chemin faisant, La Nouvelle-Orléans à l’aube du second millénaire, dans la rue du marché français, par exemple, avec ses huîtres (plates et douces) et son poisson-chat - que l’on vous sert, de succulente façon, à l’hôtel Monteleone, une des adresses préférées de Tennessee Williams ou de Truman Capote -, et les spécialités créoles, aussi corsées que colorées, du restaurant Tujague.



Car l’art de vivre et la cuisine occupent aussi leur place, toute leur place, dans ce roman des deux mondes et des trois temps. L’auteur nous en donne à cœur-joie, de la gastronomie sans complexe, des mets les plus simples aux préparations les plus délicates, aux recettes rares, aux ingrédients barbares... C’était encore plus vrai quand Paris était « la capitale du XIXe siècle » (Baudelaire) et la « capitale des peuples » (Victor Hugo). Notre cicerone n’est autre que le baron de Kervadeuc, décadent à souhait, haut en couleur comme un personnage de Barbey, qui connaît comme sa poche les dernières brasseries en vogue, comme les dernières guinguettes où l’on peut encore souper entre milords et gourgandines. Mais il sait (ou plutôt, il sent) combien ces jours-là sont comptés. À l’égal de Marvillèse - le roturier, le rapin sans le sou, l’obscur -, Kervadeuc, le dernier des barons, sait bien que l’Europe « aux anciens parapets » jette ses derniers feux, ses dernières forces, brûle ses derniers vaisseaux avant le cataclysme qui se trame dans l’ombre. Dans Esplanade Avenue, le destin de l’Europe comme du sud des États-Unis, d’un millénaire à l’autre, d’un château l’autre, est suspendu à un fil.



Que découvrent donc Miette et Gwen tout au bout de leur quête ? Ils cherchent un tableau, le grand œuvre de Marvillèse, un portrait... Certes, ils sont tout occupés par le contenu de vieilles lettres, par des allusions voilées, des lambeaux de confessions. Mais ils vont, comme il se doit, trouver autre chose, cela même qu’aura induit le chemin parcouru ensemble : le croisement et l’assomption de leurs propres destins, la rencontre des origines, comme une tête s’abandonne sur une épaule au gré d’un banc sur la rive, et qu’une mèche nous frôle la joue dans une brise de juin qui danse en janvier. Et le Sud, à l’instant, loin des guerres, du vacarme et des chemins fangeux, en est transfiguré
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Suite indienne, poèmes

Suite indienne est un petit voyage poétique à travers l'Inde.

Première étape, Bombay, sa foule, ses mendiants, ses tas d'immondices, ses fouilleurs de poubelles, ses taudis, ses gratte-ciels, là un temple jaïn, sa Tour du Silence haut-lieu de la religion pârsi, son front de mer, la Porte de l'Inde. Où richesse côtoie intimement la misère et la ruralité la modernité.

Puis direction Aurangabad et sa route jusqu'à Ellorâ.

Route vers le nord et le Rajasthan, ses miniaturistes aux personnages s'animant pour nous souffler dans l'oreille un passé lointain. Rajasthan des couleurs, son désert du Thar, Udaipur et Jaipur.

Et ainsi, bout à bout, un merveilleux voyage, entre rêve et réalité. Car faut se laisser flotter avec "Suite indienne".
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Les Amours de Râdhâ

Les Amours de Râdhâ s'inscrit librement dans la tradition poétique de la Gitâ Govinda. La gardienne de troupeau, la gopî Râdhâ, est torturée par le départ de Krishna, qui est à la fois son amant volage et l'incarnation de l'absolu divin. Elle erre dans la forêt, en proie aux mille souffrances d'un lieu sauvage, mais aussi dans la ville où elle doit affronter les médisances, écartelée entre le souvenir lancinant des instants passés aux côtés de son aimé et l'incertitude de le revoir un jour. Le texte s'efforce ainsi de retrouver le lyrisme du poème indien, les élans du cœur, l'expression de l'irréparable douleur qu'engendre le caractère changeant de toute relation. Il veille aussi à traduire la musicalité du chant original.
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Bréchéliant

Heureuse sélectionnée à la dernière Masse Critique, j'ai reçu ce court roman des éditions Garamond. Merci à eux et à Babelio pour ce moment de lecture.

Dans un château, en lisière de forêt de Bréchéliant, vit une Dame qui se meurt d'ennui. Son mari est parti faire Croisade, et elle ne tolère pour seule compagnie qu'une conteuse, Ariane, et sa belle-sœur, Violaine, avec qui elle partage un lourd secret.

L'arrivée au château d'un naufragé retrouvé pour mort, va quelque peu bousculer tout ce petit monde.



C'est un récit à la mode moyenâgeuse, qui nous conte la vie recluse d'une Dame qui aurait préféré se consacrer à Dieu. L'écriture s'apparente à celle des écrits de cette époque, et l'ambiance se veut emprunte de légendes, celles qui animent la forêt de Brocéliande. Que sont ces petits papillons qui brillent dans la nuit et semblent plus apparentés à des petits hommes volants, pourquoi la forêt est-elle interdite à la jeune Onenne, gardienne d'oies ? Et d'où vient ce naufrage, que lui est-il arrivé pour qu'il garde les yeux ouverts mais vides, sans jamais parler ? Il n'y a pas vraiment d'éléments fantastiques, mais plutôt une ambiance un peu fantasmagorique. La première partie a peu d'entrain, soyons honnête et il faut vite passer la seconde partie pour que l'histoire s'enclenche réellement. La première partie dresse le décor, la seconde l'explore. La fin reste énigmatique, à dessein je pense, pour nourrir cette ambiance mystérieuse qui, comme toute légende, n'a pas d'explications. Elle est tragique à souhait, typique des romans de l'époque. La Dame cherche à connaître l'Amour, qu'il soit d'ordre divin ou humain, ne serait-ce que pour se tirer de cet ennui mortel.

Ce roman est une découverte qui ne laisse pas indifférent. Je suis contente d'avoir pu le lire, pour voir autre chose que ce que je lis habituellement. Mais je suis également contente qu'il n'ait pas été plus long. Le mystère n'est pas trop épineux, et même si rien n'est vraiment clair sur la fin, on ne ressent pas pour autant de frustration et l'on comble aisément les points obscures. Quant à l'écriture, cela nous permet également de nous frotter à un style différent, ce qui n'est pas plus mal et divertit totalement l'esprit.

À découvrir, pourquoi pas, comme une curiosité.
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Bréchéliant

Dans un premier temps, je tenais à remercier Babelio ainsi que les éditions Garamond pour la confiance qu’ils ont placé en moi.



C’est un roman qui est loin d’être épais, seulement quatre-vingt-cinq pages, on pourrait se dire que c’est court, mais personnellement, cela m’a paru très long, du moins pour la première partie qui couvre la moitié du livre.

Le début présente les lieux et les personnages, il ne s’y passe rien. On découvre la châtelaine de Tréhogonteuc qui est de santé fragile, mais reprend des forces quand une conteuse, Ariane, est embauchée pour lui tenir compagnie. Elles vivent au château avec Violaine, belle-sœur de la maîtresse des lieux, et tous deux attendent le retour du Seigneur, parti en Croisade, il me semble.

Cela bouge un peu plus dans la deuxième partie lorsqu’un jeune garçon naufragé est trouvé et hébergé au château – alors je résume grandement, et n’en révélerai pas davantage.



Le récit m’a particulièrement ennuyée, du moins pour la première moitié. La seconde est plus intéressante et s’est lu très vite. Avec le résumé, je m’attendais à ce que cela tourne autour des légendes celtiques surtout avec une conteuse parmi les personnages : on pouvait espérer découvrir ou redécouvrir quelques fables ; ce ne fut pas le cas… ou alors c’était trop brouillon pour que cela me parle.



J’ai adoré la plume de l’auteure, elle écrit vraiment très bien et a beaucoup de style. Si l’histoire manquait de cadence, ce n’est pas le cas de la narration qui est aussi rythmée que chantante. C’est vraiment une lecture à faire à voix haute et j’y ai pris énormément de plaisir quand je le faisais, alors que j’avais du mal à avancer et à conserver ma concentration en lisant dans ma tête.



Pour le coup, mon avis est assez mitigé : une intrigue ennuyeuse et inexistante mais un discours intéressant et plaisant. Pourtant, cela m’a plus ou moins laissée indifférente.
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Les Amours de Râdhâ

"Les amours de Râdhâ" raconte l'amour passionné, partagé puis déçu, que Râdhâ éprouve pour le dieu Krishna. Le rapprochement avec le "Cantique des cantiques est évident, bien qu'il s'agisse d'une histoire bien particulière, beaucoup plus amère puisque Krishna délaissera sa bien-aimée.



A partir de cette histoire, le pianiste Frédéric Ligier et la poétesse Annick le Scoezec Masson rassemblent deux œuvres originales. N'étant pas pianiste, je n'ai pas pu apprécier à leur juste valeur les harmonies de Frédéric Ligier mais j'ai beaucoup apprécié le poème. Ce long texte, en vers libres, est admirable par sa musicalité et les nombreuses figures antithétiques qui soulignent dès le départ la difficulté de la relation amoureuse (« Oh, mon Divin, se peut-il/ qu'en cet instant qui est tout,/ tu puisses ce vide/ creuser en moi,/ une âpre saveur de mort ? »). Râdhâ et Krishna dialoguent, se cherchent, ne se comprennent pas ou plus. Au-delà de ce couple particulier, c'est l'histoire de tous les couples qui s'écrit dans ce texte, du regret des passions finies et de la souffrance sans fin éprouvée – jusqu'à la joie d'avoir gouté au dépassement de soi. Ne reste qu'un semblant de rêve, mais très palpable, très vif : « Non, au grand jamais,/ non, je n'ai point, comme vous dites, rêvé !/ Car mon rêve est plus vrai/ que les murs de votres réalité ».



J'ai également beaucoup apprécié la qualité de la préface, qui nous permet de mieux situer le texte original dans l'histoire artistique et littéraire indienne et de comprendre son influence.



Les peintures et sculptures ayant inspiré l'écriture du poème et la composition musicale sont reproduites dans le livre.
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De l’année du Désastre de Cuba (1898) à celle où éclate la Guerre civile espagnole (1936), la courte et intense existence de Federico García Lorca s’inscrit en des temps marqués par l’effervescence politique et une prodigieuse créativité dans les arts. Né à Fuente Vaqueros, près de Grenade, ami de Manuel de Falla, Salvador Dalí et Luis Buñuel, Lorca meurt précocement, assassiné au début du conflit. D’une extraordinaire originalité, son œuvre, poésie et théâtre, se nourrit du mythe et des avant-gardes. Relevant d’une forme de retour à la veine populaire, et d’engagements propres au surréalisme, elle a tôt fait de le propulser sur le devant de la scène littéraire espagnole et latino-américaine. Sa mort brutale émeut une communauté internationale pour laquelle il devient un symbole. Après le Romancero gitan, et Poète à New York, fruit de son observation lucide et hallucinée de la réalité du monde moderne, son écriture s’oriente tout spécialement vers le théâtre. Composée à la fin de sa vie, la trilogie andalouse Noces de sang, Yerma et La Maison de Bernarda Alba révèle, de manière magistrale, le talent de celui qui sut allier à la justesse de l’analyse sociale, le sens de la tragédie et un lyrisme flamboyant, attaché à dépeindre la pulsion érotique et son implacable foudroiement. L’errance amoureuse et ses déchirements habitent également les vers de son ultime recueil, de publication posthume, Sonnets de l’amour obscur, qu’avait précédé le Divan du Tamarit. Par sa thématique et son jeu métaphorique, le dernier ouvrage de Lorca renouvelle la grande tradition de la poésie baroque hispanique.

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