une enquête de Anne-Sophie Malice pour l' ACTU-tv du 23 octobre 2011 sur la romancière Annie Préaux, Grand Prix du Hainaut et le Centre Culturel "La Maison d'Anna" qu'elle anime à Eugies, près de Mons
Mais j’avance à pas feutrés sur ces éponges à chagrin qui, au fond de moi, restent gonflés de leur eau salée-sucrée malgré le sécheresse apparente de mes silences
J’écris parce que je cherche, parce que je veux garder une trace, parce que j’éprouve une sorte de soulagement lorsque l’écran s’allume, parce que c’est une porte qui s’ouvre sur les jours perdus
J'aime ma solitude , cet espace tranquille où je peux être moi sans témoin . Moi , avec mes nostalgies , mes renoncements , mes compromissions .
Si tu te demandes où tu veux vivre, demandes toi si c'est là que tu pourrais mourir.
Comment peut-on ne rien deviner parfois des tourments des autres, tout particulièrement de ceux qu'on aime ?
Le silence, plus qu'une armure, est un duvet protecteur, apparemment léger, flou, aérien. Un nuage de plumes sous lequel il arrive qu'on étouffe, qu'on ait besoin de hurler, tout en sachant qu'une petite étiquette avec tête de mort l'interdit formellement.
J’aime ma solitude, cet espace tranquille où je peux être moi sans témoin. Moi, avec mes nostalgies, mes renoncements, mes compromissions.
Aujourd'hui, je sais que j'ai eu raison de ne pas abandonner mon métier d'enseignant. Je suis sans doute naïf, mais je crois que c'est un métier important et que j'y ai ma place, malgré mes inquiétudes toujours prêtes à renaître, comme des plantes vivaces.
Même si je ne suis pas un enseignant aussi performant que je le voudrais, loin de là, ce métier a du sens pour moi.
Du sens.
Il suffit peut-être d'un lieu en retrait, d'un ermitage au fond d'un paysage inattendu, d'un livre étrange, pour voir venir quelque chose qui ressemble à une paix hypnotique. A petit pas.
A tout petit pas.
La guerre civile fait rage en Syrie. Des milliers de réfugiés marchent sur la route de la frontière turque. Des journalistes les filment. Aujourd’hui ce sont ceux-là. Hier, c’étaient des Libyens, des Afghans, des Africains en pagaille, des Tchétchènes, des Kosovars…Avant-hier…Un siècle de guerres diverses après la « der des ders » m’envoie ses flots de sang et de souffrances à la figure. Dans quelques dizaines d’années, d’autres diront : un siècle de violences et d’atrocités après 40-45 et le génocide des Juifs, des Tsiganes, des Tutsis… L’Historie m’écœure : sa redondance, l’aveuglement de chacun, mon indifférence de spectatrice ou en tout cas le sentiment qui me permet de respirer, de manger, de savourer un fruit ou un verre de vin, pendant qu’ailleurs des gens fuient, sont emmenés, assassinés, découpés en morceaux.
Je n’en peux plus.