Audrey Chevalier

Katerine était une jeune fille violée et violentée dans sa jeunesse, elle se servait de ce passé comme d'un tremplin pour exorciser son enfance. Elle avait passé son adolescence à avoir peur de tout après ces abus sexuels. Toute à ces pensées, la jeune femme réalisa que la situation partait d'elle ! La culpabilité l’étreignit jusque dans ses tripes, elle s'en voulait d'avoir créé un monstre.
Sasha augmenta le son de la radio pour éviter d’entendre résonner les pensées de sa captive.
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Personne ne pourrait gâcher ce moment tant attendu, pas même son alter ego. Elle arriva à Trois-Rives avant l’heure du dîner. Elle se gara en biais de la station-service du village. Il y avait un garage désuet attenant à la bâtisse. Elle s’installa confortablement dans son siège pour attendre de repérer les hommes visés.

Stan ne se serait jamais fait prendre si ce n'avait été que de lui, car il était méticuleux dans les détails. Be-noît, Paul et Charlie étaient responsables de son échec, cette femme était son calvaire… comment ferait-il sans sa jambe !? Sa vie ne valait plus rien maintenant. Son erreur lui aura coûté sa jambe, son ego et sa liberté, tout ça pour une pétasse aussi débile que lui ! Il aurait valu mieux qu'il meure sur cette planche de bois. Il s’emprisonna dans ses pensées tout le long de son voyage vers l’hôpital.
Benoît était encore inconscient lors de son transport, mais il n’échapperait pas à la justice lui non plus. Son corps brûlé et coupé serait la conséquence pénible de son sadisme. Il détesterait Stan pour le reste de sa misérable vie.

Katerine avait été jugée non criminellement responsable pour cause de santé mentale. Le trouble dissociatif de l’identité était un diagnostic peu connu dans le milieu psychiatrique et encore moins au niveau de la justice au Québec.
Il ne faisait aucun doute que Katerine était atteinte de ce mal. Il était le résultat des abus sexuels vécus dans sa jeunesse et ce fameux mois de juin 2013. Donc, sa condamnation avait été suspendue jusqu’à ce qu’elle soit en mesure de subir son procès. Elle avait été référée à l’institut de psychiatrie légale Philippe-Pinel pour y être soumise aux différentes évaluations nécessaires pour déterminer sa culpabilité en toute conscience.

Elle fit preuve d’ingéniosité dans la fabrication d’une attelle pour pénis ainsi que d’une plaque presse-testicules. Elle avait vu ces outils de torture sur un site de BDSM6. C’était une souffrance parmi tant d’autres qui attendaient les quatre hommes.
Elle jouissait d’avance des supplices qu’elle leur in-fligerait : ils payeraient cher pour avoir mutilé le seul corps dont elle disposait. Sasha allait dépenser des milliers de dollars pour des opérations afin de faire disparaître les cicatrices. Malgré tout, lorsqu’elle se regardait dans le miroir, elle trouvait que ces cicatrices en forme de sourire sur son visage lui donnaient un style particulier.

Donc, aux grands maux, les grands remèdes. En dix-huit ans de carrière, jamais il n’avait eu recours à une assistante pour faire le lien avec une victime.
Ce dossier lui tenait à cœur, il n’arrivait pas à concevoir l’enfer qu’avait subi cette jeune femme. De plus, cette dernière était seule au monde depuis le décès tragique de ses parents. À part une bonne amie du nom d’Annie, il n’y avait personne qui voulait retrouver ses agresseurs autant que lui. Robert avait tenu sa main glacée tous les jours. Il avait ainsi passé des nuits à son chevet à prier pour sa survie. S’il avait eu le pouvoir d’ab-sorber sa douleur, il l’aurait fait sans hésiter.

Il se vengeait en silence sur les animaux errants du coin. Il les torturait jusqu’à sentir la vie quitter leur corps et il restait de longues heures assis et perdu dans ses pensées à ressasser la satisfaction res-sentie pendant ces brefs moments.
Il détestait viscéralement sa mère pour lui avoir donné cette vie de merde.
Stan vécut ce calvaire quotidien pendant une dizaine d’années avant sa prise de conscience. À l’adolescence, il n’avait jamais eu d’attirance sexuelle envers les femmes ni cherché à éveiller leur attention. Cependant, une garce du village voisin avait voulu le dépuceler dans un cabanon en échange d'alcool à boire.

Son travail était synonyme de performance, mais même là, ça lui glissait des doigts. Myriam devait se trouver un autre mentor pour la guider. Il avait toujours été un inspecteur droit et loyal, mais maintenant que entêtement le poussait vers l’illégalité, il faisait face à un précipice. Il ne pourrait plus reculer après.
Il se dit qu'il était préférable d’attendre un peu avant de faire un faux pas qu’il regretterait. Il continua à boire jusqu’à ce que le sommeil s'empare de lui. L’insomnie l’avait tellement fait souffrir dans la dernière année que l’épuisement gagna contre sa volonté.
 
 
 
 

Ben s’était confié à Stan à propos de l’envie qui l’obsédait de faire des lacé-
rations sur quelqu’un. Il rêvait d’assouvir ses fantasmes sur la peau tendre d’une femme.
Ben avait une belle gueule qui attirait celles-ci comme des aimants. Maintenant âgé de vingt-neuf ans, il enchaînait les insatisfaisantes aventures d'un soir. Il vénérait Stan comme un dieu. Ce dernier avait un ascendant énorme sur lui. Le tueur avait formé et moulé Benoît à sa guise pour l’utiliser comme un pantin. La manipulation était une facette de la personnalité de Stan que les gens ne soupçonnaient pas. Il était passé maître en la matière.

Il analysa les personnalités et l’efficacité de chacune, mais son choix était déjà fait : Myriam Brisson. Il avait eu la chance de la voir en action sur le terrain : son professionnalisme et l’empathie dont elle faisait preuve avec les victimes étaient ses forces. Une approche comme la sienne serait idéale avec Katerine. Il souhaitait qu’elle accepte de se joindre à lui pour résoudre ce crime et qu’elle n’ait pas pris d’autres engagements ailleurs.
Donc, ce fut le seul nom qu'il mit dans son rapport de fin de journée à son lieutenant. Les dés étaient lancés, il ne restait qu"à attendre 21 octobre 2013.

Elle avait hâte que ses plans se concrétisent, mais elle devait être patiente pour que les étapes s’emboîtent à la perfection. Au moins, son téléphone au lieutenant avait porté ses fruits : elle avait enfin la paix ! Plus de surveillance, d’appels ou de visites inopportunes. À son grand plaisir, ils avaient classé l’affaire comme non résolue.
Sasha utiliserait ses nouveaux gadgets pour fabriquer quelques éléments de son cru. À cet instant, elle fut envahie par les fantasmes meurtriers qui l’obsédaient à un tel niveau qu'elle s’appuya sur l’étagère pour reprendre son souffle.