Citations de Christina Dalcher (136)
Elle sombre dans le sommeil, ce glorieux ailleurs où plus rien ne peut vous faire de mal.
You can’t protest what you don’t see.
Le paysage qui défile évolue, la campagne se mue en banlieue. Toutes ces maisons sont comme des petites prisons composées de cellules en forme de cuisine, de buanderie ou de chambre à coucher. Les mots de Morgan me reviennent, ses arguments tout fait sur combien les choses étaient mieux avant, il y a longtemps, lorsque les hommes travaillaient et que les femmes restaient dans la sphère privée, à cuisiner, laver, élever.
Je ne crois pas que j'aurais pu anticiper ce qui surviendrait. Personne n'aurait pu.
"Vous voyez, voilà pourquoi l'ancienne méthode ne marchait pas. Il avait toujours quelque chose. Toujours un gamin malade, ou un spectacle de fin d'année, ou des douleurs menstruelles, ou un congé maternité. Toujours quelque chose."
J'ouvre la bouche, mais pas pour parler. Juste parce que ma mâchoire se décroche d'incrédulité.
J'ai attendu. Tout s'est à peu près passé comme l'avait prévu Jacky. Voire pire. Ils sont venus à nous par des biais tellement variés, et si tranquillement, que l'on n'a jamais eu la possibilité de former les rangs.
Une chose que j'ai apprise de Jacky : tu ne peux pas t'opposer est-ce que tu ne vois pas venir.
« La femme a été divinement désignée gardienne du foyer. À elle de prendre conscience que sa position de femme et de mère, d’ange du foyer, digne d’une reine, représente la tâche la plus sacrée, la plus responsable qui puisse être assignée aux mortels … »
Nous passons notre temps à classer, catégoriser et imaginer des moyens pour nous diviser en groupes, rejouant encore le rituel du cours de sport au collège. "Je le choisis lui, mais pas elle".
Il y a toujours un dernier ou une dernière; un individu qui reste au fond du seau, que personne n'a choisi.
Il y a des barreaux aux fenêtres.
D’après mon expérience, les barreaux ont deux fonctions. Soit ils empêchent les gens d’entrer, soit ils les empêchent de sortir. Je me demande, tandis qu’une sensation de malaise s’installe au creux de mon estomac, à quoi servent les nôtres.
Que feriez- vous pour échapper au naufrage de votre mariage et donner à vos filles une chance de s'en sortir? Seriez-vous prête à payer? A vous passer du confort d'un foyer? A mentir, tromper, voler? Je me suis déjà posée ces questions; je ne pense pas être la seule.
[...] Surtout, j'aime regarder les femmes d'ici. Elles parlent avec leurs mains, leur corps, leur âme. Et elles chantent.
Surtout, j'aime regarder les femmes d'ici. Elles parlent avec leurs mains, leur corps, leur âme. Et elles chantent.
Si tu t’inquiètes pour Morgan, rassure-toi. C’est un idiot, il ne pense qu’à lui, et c’est un mec. Il ne reconnaîtrait même pas un orgasme s’il en voyait un.
Vous voyez, voilà pourquoi l’ancienne méthode ne marchait pas. Il y avait toujours quelque chose. Toujours un gamin malade, ou un spectacle de fin d’année, ou des douleurs menstruelles, ou un congé maternité. Toujours quelque chose.”
J’ouvre la bouche, mais pas pour parler. Juste parce que ma mâchoire se décroche d’incrédulité
Steven, désormais embarqué dans une mission désespérée pour retrouver sa Julia, se bagarrait encore avec ses tables de multiplication lorsque Delilah Ray est venue à la maison pour présenter ses plans pour mon jardin. Le premier président noir avait récupéré les clés de la Maison-Blanche, et Mme Ray était en pleine forme, elle parlait politique, espoir et combien "il était temps, ma chère, de remettre ce pays sur de bons rails". Elle m'appelait toujours "ma chère", avec cette tendresse qu'y associent les gens du Sud.
Jusqu'à ce qu'elle ait son attaque.
C'était arrivé peu de temps avant que le président plein d'espoir transmettre les clés à un nouveau président, que Mme Ray n'aurait jamais appelé "mon cher", ni qualifié de prometteur, de charismatique, ou de quoi que ce soit de positif dans son riche vocabulaire.
pp.339-340
Il y avait une fille dans ma résidence universitaire , cinquième porte à gauche après la mienne, qui avait les yeux d'Anna. On aurait dit que les muscles qui les entouraient étaient toujours immobiles, qu'ils ne se contractaient jamais pour accompagner le sourire qu'elle nous renvoyait quand on lui demandait comment elle allait, si elle se sentait mieux ce matin, si elle avait envie de parler. Je me rappelle encore ses yeux quand on a retrouvé son corps, des yeux noirs comme des puits, des flaques de café. Si vous voulez savoir à quoi ressemble la dépression, tout ce que vous avez à faire, c'est regarder au fond des yeux d'une personne dépressive.
p.59
De sa main libre, Thomas fait apparaître une petite clé. On dirait une clé d'ascenseur, l'un de ces bidules a bout rond qui ne semblent pas avoir d'autre raison d'être que les serrures d'ascenseur. Un outil qui me rappelle d'autre petites inventions saugrenues : l'ouvre-boîte, le zesteur à citron, la cuillère à glace. Des bidules qui n'ont qu'une seule et unique fonction. On en possède tellement... D'où est ce que sortent toutes ces conneries ?
...
Elles sont inutiles, encombrent le fond des tiroirs de cuisine ; on pensait qu'on en aurait forcement besoin, et on ne s'en sert jamais. Voilà ce qui me passe par la tête quand Thomas me libère avec son équivalent high-tech de l'ouvre-boîte.
Page 71
-Patrick est gentil, ça ne compte pas ?
- Pas à mes yeux.
Lorsque j'ai soutenu ma thèse et que Patrick a commencé son internat, nous nous sommes mariés. J'ai invité Jackie, j'espérais vraiment qu'elle viendrait.
Elle n'est pas venue.
Peut-être n'aurais-je pas dû venir non plus.
« Il y a toujours quelqu’un qui t’attrape, chérie. Toujours. Tôt ou tard, tu fais une connerie. » (p. 266)
Seuls les êtres humains possèdent un langage.
On ne naît monstre. On le devient, morceau par morceau, membre par membre, création artificielle d’hommes fous qui, à l’image du malavisé Frankenstein, pensent toujours tout savoir mieux que les autres.