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Citations de Daniella Pinkstein (17)


La "précarité de l'emploi" rajoutait un piment exquis à la féconde propension humaine aux paradis postiches. Survivre par des veules compromis, des soumissions inquiètes, survivre par paliers, pour descendre sous des eaux sans vie ni jour - et demeurer inébranlable dans l'espoir d'une promotion.
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Le futur ! Le visage d'Emma avait tourné au crayeux comme sous une couche de poussière. Rien qu'elle ne pût décrire de ses yeux neufs, rien qu'elle ne pût détailler de ses yeux perdus, rien si ce n'est ce temps sans aiguille, qui tournait sans jamais donner l'heure.
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Personne au fond n'avait compris pourquoi les juifs étaient revenus. Morts et quelques vivants. Certains, comme mon père qui ne cachait pas sa franche répugnance, interprétèrent leur retour comme une perfidie de plus, mais la plupart obstruèrent leur porte, par crainte de la vengeance imminente des gazés, brûlés, noyés, disséqués. A la vitesse d'une superstition, ils se mirent à prier en cachette. Pour ne pas soigner au grand jour les plaies du dernier supplicié, l'Europe, encore parmi les décombres, se ravisa. Brandissant un nouveau sacre païen, elle devint sceptique.
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Il fallait, sans tomber, cheminer entre les perspectives.
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Pendant ce temps, pour nous, jeunes femmes aux penchants gravides, l'histoire nous fertilisait d'une chrysalide morte figée au centre d'un utérus vorace. Chaque soupir qui écartait nos lèvres étroites donnait à ce ventre en gésine l'illusion d'une croissance éternelle d'où, un jour, au rebord de nos bouches, apparaîtraient des ailes. Mais la chrysalide restait froide. Combien d'étreintes, combien d'oublis fallait-il traverser, sans entendre une fois le froissement léger du papillon !
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Pères maudits ! Que de bruit, de chaos, de chemins de traverse pour vous éviter. Vous étiez ces individus perdus dans la houle, balancés par les courants destructeurs de l'Histoire. Que pouvions-nous sauver ? Une civilisation ?
Enfants couards, nous avons préféré à vos présages la camelote au sommet de sa perfection technique. A vitesse irrésistiblement plus véloce, nous avançons ignares dans la nuit, tremblant devant l'inconnu, mais défiant son immanence.
Eux, qui ne se détournaient point, nous contemplent aujourd'hui sidérés devant une si vulgaire déchéance qu'une cacophonie d'insatiables jactances recouvre de son néant - ces aînés déchus pour moins qu'un plat de lentilles.
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Si sous cette vaste forêt, il n'y avait eu qu'un souffle familier, je n'aurai rien distingué des ombres qui traversaient tes mains. Pas la moindre résonance n'aurait transmis à ton corps leurs chants. Mais j'avais si peur, et il faut bien faire quelque chose, n'est-ce pas, quand la peur vous oppresse. L'épouvante de me dissiper à jamais dans l'immuable transparence si je ne t'arrachais pas à ce vent, à ce frémissement sinistre, fut telle que je t'ai empoigné. Comme un géant sorti des eaux. Je t'ai amené à la terre, à l'intérieur de moi, au centre de l'entaille, de cet espace vacant dans lequel s'engouffrait alors, en désordre, l'Europe, la nuit, le mensonge, l'espoir et son irrépressible contraire. Si tout ce tourbillon, si cette forêt n'avait pas été là, oui, je suis sûre que je me tiendrais encore debout, debout parmi ceux qui péniblement prétendre avancer.
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Il lui saisit le stylo des mains, le tourna entre ses doigts et, avant de le lui rendre, dans un sourire de débauché, se baissa à son oreille et chuchota presque à l'intérieur de son conduit auditif.
Quelques mots, oui seulement quelques mots, ma belle Emma. Et à cette seconde qui a ouvert tout l'univers, j'ai su, mon Emma, que tu étais morte.
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J'ai collé la plume à ma peau. A son contact glacé, tout l'Est européen s'est affalé sur moi, dans la vacuité banale du pétillement insouciant d'un écoulement de douche.
(...)
Antiques, tels des colosses de sel, combien d'autres encore, aux visions hallucinées, avaient porté, sans tapage ni sanglot, le chant des vivants ?
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Elle avait cru longtemps pouvoir rétablir le sens des montres et rendre à ce qui lui avait été ravi un rire intrus au milieu d'une morne assemblée d'hommes qui attendaient, bileux, les lendemains de l'histoire.
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Les femmes creusées, bombées, courbées puis étendues, s'étaient tenues, bras ballants en bord de route, tandis que le tonnerre avançait, un tonnerre d'hommes puissants ou humiliés mais rarement couchés. N'est-ce pourtant pas dans cette position que l'on rêvait le mieux ?
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… toutes les appétences transhumaient, avec furie, entre ses mains.
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Nous étions immenses, comme les premiers hommes, nous étions de vieux égarés, pour qui Dieu, en consolation de leur grand âge, avait fait don d’enfants au regard froid.
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Ton visage était sans faille, il n’en émanait rien d’autre que toi.
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Pour ne rien laisser paraître, Emma achetait chaque mois une perruque noire sensiblement plus longue. […] Chaque déguisement creusait en elle des cavités, à l’instar de ces grottes artificielles européennes, au vague à l’âme romantique, saturées d’ornements – fontaines et nymphes en fausses pierreries. Les jeudis se poursuivaient. Nélia avait approfondi son regard d’un épais trait de khôl noir, Kevin ordonnait à l’avance des ballons selon leur taille, bulles d’air dont il ne se laissait pas. […] Ogre miniature et dément, il fixait à défaut de l’objectif tous les autres ballons qu’il rêvait encore à ordonner.
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Attendre pour défaire le nœud qui enserrait ses cheveux, les perdre au-dessus d’une table de café dans le reflet clair d’un homme qui s’avance. A la minute précise, elle s’écartait du bureau d’une foulée rapide et cadencée, chaque pas contenant sa destinée. Mehdi la suivait de près et se dirigeait à grandes enjambées vers le métro, sa sacoche noire pendouillant comme s’il prenait la fuite. […] A quelques mètres de la station, elle se cachait dans le renforcement d’une impasse et le regardait, haletant, s’engouffrer dans une bouche plus grande que la sienne.
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Je marchais, clandestine, délestée d’identités cornées, je crois n’avoir jamais été si pleine de ce monde léger qui, devant mon innocence retrouvée, brillait dans chaque menue étincelle. […] L’histoire, mes suis-je dit, ce n’est que des mots, une narration qui passe d’un homme à l’autre, sans consistance ni sens, quel que soit le nombre de morts, et, me disais-je encore, la vie trouvera toujours à l’élever à de plus folles auteurs.
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