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Critiques de Elizabeth Breitweiser (67)
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Fondu au noir

Sous le pavé, le panard !



Tu aimes les ambiances polar, version années 40, et tu prises la mussecu au plus haut point, alors ce volume avoisinant le demi-quintal devrait trouver grâce à tes yeux élitistes et tes biceps atrophiés.



Fondu au noir, scénarisé par Ed Brubaker, crayonné par Sean Phillips et colorisé par Elizabeth Breitweiser (ce qui nous change un peu de Donald Cardwell et de Roger Harth, soi dit en passant, sans animosité aucune) possède véritablement toutes les caractéristiques du must-have.



Un contexte politique délicat, le maccartysme.

Une industrie intrigante, Hollywood.

Des personnages torturés, qui par sa quête de vérité, qui par la réussite à tout crin, qui par sa soif de vengeance, qui saura qui saura qui...



Un coup de crayon old-school, des planches aussi cafardeuses que l'intrigue qui paradoxalement nous électrise, le tout au service d'un scénario hyper visuel qui se prêterait parfaitement sur grand écran format Imax, son Dolby Atmos, Fondu au Noir, le bien nommé, n'est que manipulation et désillusion saupoudré d'un brin de violence, parfois alcoolisée, souvent punitive. Bigre, l'enthousiasmant programme que voilà.



Deux scénaristes à la ramasse.

La disparition douteuse d'une starlette en devenir.

Le train de la bonne humeur et de la gaudriole est lancé, puissant, dévastateur, aussi addictif et étourdissant que l'alcool millésimé qui coule ici à flot histoire d'oublier la vacuité d'existences en perdition.



Le parfait rendu de la tension régnant au sein d'un studio aux abois associé aux vélléités souvent pathétiques de jeunes actrices avides de reconnaissance participe à ce climat anxiogène et dramatique qui nimbe cette oeuvre magistrale de son préambule à son épilogue.

Niveau personnages, il y en aura pour tout le monde et toutes les bourses. du naïf au rebelle en passant par l'homme de main détestable et le big boss manipulateur, des personnalités aussi diverses que variées illuminent ce récit en lui conférant une dramaturgie qui ne se dément jamais.



Excepté un tarif quelque peu consistant, 40 euros, nan j'déconne, 39,95 euros seulement, aucune raison pour que ce pavé de noirceur désabusée ne trouve un large écho.

Ajouter à cela moult illustrations de couverture histoire de faire durer le plaisir et c'est le coeur gros mais cependant empli d'une joie ineffable que l'on referme ce petit bijou, véritable hommage de genre, heureux d'avoir tutoyé le bonheur pendant quelques heures...



Merci à Babelio et aux éditions Delcourt pour l'acquisition de ce pur joyau !
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Fondu au noir

"Ce sont toujours les petits riens qui rouvrent les portes de l'oubli. Les détails... Un rouge à lèvres évoque un sourire... Le sourire une voix... Puis un visage...

Et d'un coup, Charlie comprend chez qui il vient de se réveiller juste avant de la trouver morte sur le sol du living."



Le fondu de l’âge d’or du cinéma que je suis ne pouvait pas passer à côté de ce monumental roman graphique.



Dans une ambiance polar qui m’a rappelé L.A. Confidential de James Ellroy, se croisent stars, starlettes, professionnels du cinéma, pourris et les rôles sont parfois étonnamment interchangeables surtout en pleine chasse aux sorcières.



Quand Charlie Parrish, scénariste sur le déclin, se réveille dans une baignoire, il n’a plus beaucoup de souvenirs de la veille. Ah si, des brumes de son esprit émerge le souvenir d’une danseuse et d’une pipe dans un dressing ! Mais, quand dans la pièce d’à côté, il découvre le cadavre de son amie Valérie Sommers, la star du studio qui l’emploie, c’est la douche froide. Qu’a-t-il bien pu se passer ici la veille ?



Comprenant qu’il pourrait facilement se faire broyer par le studio, Charlie va tenter de remonter le fil de cette funeste nuit…



Une histoire envoutante comme un bon roman noir et difficile à lâcher qui rappelle la toute-puissance des studios de l’époque sur leurs employés, stars ou simples gratte-papiers. A travers certains personnages secondaires, on s’amusera de retrouver l’ombre de vedettes de l’époque comme James Dean ou Montgomery Clift.



Une plongée en eaux troubles dans cette usine à rêve qui peut très facilement transformer votre vie en cauchemar.



Fondu au noir…

Scénario : Ed Brubaker

Dessin : Sean Phillips

Couleur : Elizabeth Breitweiser



The End




Lien : http://bouquins-de-poches-en..
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Fondu au noir

Il y a une quinzaine d'années je m'étais prise de passion pour James Ellroy et j'avais dévoré pas mal de ses romans. Ce que j'appréciais tout particulièrement dans les œuvres de l'auteur c'était le soin particulier apporté au contexte, à l'arrière-fond de l'intrigue. Bien souvent, cette toile de fond emmenait le lecteur du côté sombre d'Hollywood. Si j'évoque Ellroy et ses évocations des turpitudes du show-business de l'âge d'or d'Hollywood c'est que la lecture de "Fondu au noir" m'a beaucoup fait penser à cet aspect des romans d'Ellroy.



Dans "fondu au noir" c'est comme si l'arrière-fond des romans d'Ellroy prenait ici la place centrale. Le monde du cinéma des années 40 n'est pas ici une simple toile de fond mais le cœur du récit. Quand on aime le cinéma américain de cette période, la plongée dans cet univers est passionnante. Le contexte est bien rendu, les références nombreuses, l'immersion est vraiment très réussie. En revanche, l'intrigue autour du meurtre d'une jeune actrice qui constitue le cœur du récit m'a moins emballée. Cette histoire est intéressante et on a envie de découvrir la vérité mais j'ai trouvé que l'intrigue n'était pas très bien menée, inutilement alambiquée et ce qui marche en roman chez Ellroy, des intrigues touffues à multiples ramifications, ne fonctionne pas aussi bien en B.D.



J'ai tout de même passé un bon moment de lecture. "Fondu au noir" est un sacré morceau de B.D qui reste agréable à lire et beau visuellement. Même si ce sont les turpitudes du Hollywood de l'âge d'or qui sont ici dépeintes, paradoxalement "fondu au noir" est aussi un bel hommage au cinéma américain des années 40.

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Kill or be killed, tome 1

Je viens de prendre conscience que je n'avais jamais critiqué ce petit bijou de comic indépendant américain.



La base est simple : Un adolescent en mal de vivre se voit annoncé par un démon, lors d'un délire, qu'il doit tuer une personne par mois, faute de quoi il mourra.



Il passe le premier mois à se dire que ce n'était qu'un rêve, mais plus la date d'échéance approche, plus il doute. Il passe donc à l'acte, mais sur quelqu'un qui le mérite.



Il décide donc, pour les mois qui suivent, de devenir un superhéros. Ou quelque chose du genre. Tant qu'à tuer des gens, il trouvera ceux qui le méritent. Sauf que voilà, contrairement aux comics de superhéros, dans la vraie vie, il n'y a pas de super criminels qui nous sautent dessus en menaçant une centaine d'innocents à chaque coin de rue.



Devrait-il baisser ses critères?



(J'ai lu l'entièreté, ça ne devient que meilleur au fil des tomes, et le finale est surprenante et intéressante.)
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Fondu au noir

Ce comics de plus de 300 pages vous entraîne dans une enquête à la fin de l'âge d'or de Hollywood. Charlie est un scénariste sur le déclin et traumatisé par la guerre. Un matin, après une soirée des plus alcoolisées, il se réveille et découvre à ses côtés le corps sans vie d'une actrice, visiblement assassinée. Celle-ci qui était une star adulée du grand public était surtout son amie, voir bien plus que cela… Que s'est-il passé cette nuit-là ? La version officielle est celle du suicide mais Charlie sait qu'il n'en est rien. Il va mener sa propre enquête pour tenter de découvrir la vérité… mais il plongera alors dans la noirceur du milieu du cinéma.



Excellent polar dans une ambiance de film noir, parfaitement adapté au contexte de l'histoire, qui vous tiendra en haleine jusqu'à la dernière page.
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Fondu au noir

C’est encore à cause du blog "Actu du noir" que j’ai découvert ce comics et une fois de plus, je dois dire merci à Jean-Marc pour le bon tuyau (je vais devoir l’appeler Jean-Marc-Les-Bons-Tuyaux maintenant).



Hollywood, 1948.



L’envers du décor, comme dans "La vallée des poupées"…



Vous imaginez bien qu’on va oublier le strass et les paillettes pour plonger dans les alcools forts, les coups de pute, le chantage et on va même ajouter la chasse aux Rouges.



Pour certains paranos, la chasse aux communistes était l’activité principale, la seule chose qui valait la peine que l’on traque.



Le cinéma et la littérature ont payé un lourd tribu à cette chasse aux sorcières, des acteurs, producteurs, auteurs,… s’étant retrouvé sur la liste noire (pour des rouges… le rouge et le noir ?), bien souvent sur dénonciation.



Ne jugeons pas trop vite les dénonciateurs, ce comics nous démontre (pour ceux qui ne le sauraient pas encore) que l’on n’a pas toujours le choix de fermer sa gueule.



Le corps sans vie d’une star de cinéma est retrouvé, elle a été assassinée mais on fait passer son meurtre pour un suicide et hop, affaire bouclée. Sauf pour Charlie Parrish qui n’y croit pas une seule seconde.



Ce comics noir, c’est une enquête brumeuse, un retour en arrière dans les souvenirs imbibés d’alcool de Charlie, scénariste incapable d’écrire une ligne depuis son retour de la guerre. Charlie, c’est le gars sympa, le copain des filles, celui qui a failli gagner un Oscar pour un de ses scénarios, celui qui est revenu de la guerre avec des horreurs plein la tête.



Charlie n’est pas le seul à être torturé, tout le monde a ses petits secrets, certains ont les moyens de les garder sous une chape de plomb, d’autres non et sont victime de chantage. La chasse aux Rouges se fait à n’importe quel prix et ceux qui chassent les sorcières ne regardent pas à la casse.



Les dessins sont excellents, sombres, réalistes, old school et on se surprend à faire des parallèles entre les vedettes croisées dans les pages et celles de la réalité.



Ce comics, c’est aussi de la politique avec le maccartysme et de l’intrigue avec Hollywood et mes magouilles de producteurs pour tenir leurs vedettes, faire le ménage quand ça dérape…



C’est intriguant, mystérieux et glaçant de regarder derrière le décor pour y voir les coulisses. On devrait fermer les yeux mais c’est plus fort que nous, on zieute et on les ouvre bien grand.



Hollywood ne sort pas grandi de ces pages, mais nous savions depuis longtemps que ce n’était pas le monde des Bisounours caracolant sur des arc-en-ciel, bouffant des papillons et chiant des petits poneys. Ou était-ce le contraire ?



Anybref, toi qui pousses la porte des studios de cinéma, respire un grand coup, rase les murs, ne cherche pas à devenir une vedette et si tu peux, fuis, pauvre fou (folle).



Mais avant de foutre ton camp avec tes jambes à ton cou, prends la peine d’ouvrir et de lire ce comics qui t’en donnera pour ton argent niveau enquête alambiquée où tu ne sauras plus très bien qui est coupable, qui est innocent et si les hypothèses sont bien les bonnes… Dans la vraie vie, il reste toujours des zones d’ombre, des non-dits, des mystères pas tout à fait résolus.



Un comics épais comme un café noir et lourd, mais il vaut bien une luxation du poignet !



PS : les personnages de « La vallée des poupées » sont des anges à côté de ceux qui gravitent dans ce comics…



PS 2 : Merci à Jean-Marc de m’avoir donné envie de découvrir ce comics (ce n’est pas le premier, j’ai une ardoise chez lui comme c’est pas possible !!).


Lien : https://thecanniballecteur.w..
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Fondu au noir

Hollywood, 1948. Le scénariste Charlie Parrish se réveille dans une baignoire après une nuit de beuverie. A ses cotés se trouve le corps sans vie de Valeria Sommers, LA star du studio pour lequel il travaille. Constatant que la jeune femme a été étranglée et n’ayant aucun souvenir des heures précédentes, il s’enfuit sans demander son reste. Apprenant que le meurtre a été maquillé en suicide par ses patrons pour éviter un scandale, Charlie essaie de recoller les pièces du puzzle pour comprendre ce qu’il s’est passé au cours de la funeste soirée. Ce faisant, il met le doigt dans un engrenage qui risque de le broyer sans la moindre pitié.



Un noir serré, amer, sans un gramme de sucre. Il faut s’accrocher au départ pour s’y retrouver dans la foultitude de personnages (merci le trombinoscope présent au début de l’album !) mais une fois les repères trouvés, on se régale de bout en bout. L’atmosphère pesante de l’industrie du cinéma de la fin des années 40 avec ses stars ingérables, ses producteurs véreux et ses scénaristes alcooliques est rendue à la perfection. La dimension politique (chasse aux sorcières communistes dans tous les studios d’Hollywood) est un élément majeur de l’intrigue. Manipulation, corruption, règlements de comptes et secrets inavouables rythment une histoire sans temps mort aux nombreux rebondissements.



Les personnages ont tous une vraie densité, leur évolution psychologique est extrêmement crédible et leurs relations particulièrement travaillées. Un vrai plaisir de se plonger dans ce polar poisseux à souhait, porté par les dessins aussi sombres que réalistes d’un Sean Phillips au sommet de son art. Bars miteux à peine éclairés, femmes fatales en robe fourreau, tapis rouge, chapeau en feutre, verre de whisky dans une main et cigarette dans l’autre, l’ambiance de l’époque, digne d’un roman de Raymond Chandler ou de Ross MacDonald, fascine autant qu’elle effraie.



Un album diaboliquement vénéneux à la mécanique sans faille. Efficace et addictif.
Lien : http://litterature-a-blog.bl..
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Outcast, tome 6 : Invasion

Ce tome fait suite à Outcast, tome 5 : Une nouvelle voie (épisodes 25 à 30) qu'il faut avoir lu avant. Il contient les épisodes 31 à 36, initialement parus en 2017/2018, écrits par Robert Kirkman, dessinés et encrés par Paul Azaceta, et mis en couleurs par Elizabeth Breitweiser.



Dans la petite ville de Rome en Virginie, Kelly vient réveiller son père Rowland Tusk, encore allongé dans son lit. Une fois lavé et habillé, il descend dans la cuisine retrouver son épouse Mona, sa fille Kelly et son fils Donald. Ce dernier a l'air déprimé : il va encore se retrouver petit nouveau dans une classe avec que des enfants qu'il ne connaît pas. Son père lui demande de faire cet effort à nouveau, tout l'assurant qu'il ne tardera pas à se faire de nouveaux copains. Il dépose ses enfants à l'école, et crie bien fort qu'il aime son fils, alors que celui-ci rentre dans l'école, pour que tous les autres enfants l'entendent. Cela fait sourire une maman à côté. Il en profite pour lui demander si la conseillère d'éducation Megan Holt est toujours dans cet établissement. La réponse est négative. Puis Rowland Tusk remonte en voiture et va amener des paquets de nourriture au révérend Elijah qui a remplacé le révérend John Anderson. Il lui indique qu'il va l'aider dans sa distribution aux personnes nécessiteuses. Premier arrêt : une vieille dame Mildred qui se déclare fort satisfaite de son arrivée, parce que sa relation avec Sydney, son prédécesseur, était difficile.



Puis Rowland Tusk se rend au commissariat où il est reçu par le nouveau shérif Ross qui a remplacé Brian Giles. Il lui explique qu'il doit retrouver Kyle Barnes au plus vite et il s'agit d'un ordre. Un policier entre dans le bureau sans prévenir : un des leurs s'est échappé et s'est réfugié dans une grange dont le propriétaire les a appelés. Ross se lève immédiatement pour y aller : Tusk lui fait comprendre qu'il les accompagne, et que ce n'est pas une question pour demander la permission. Sur place, il demande au fermier de lui apporter une couverture, et il entre le premier pour maîtriser le forcené, en demandant aux policiers de l'attraper s'il tente de s'échapper. De con côté, Kyle Barnes découvre que tout un camp s'est installé autour de la grange dans laquelle le révérend John Anderson célèbre la messe. Il demande des explications parce qu'un tel rassemblement va attirer l'attention à très court terme, faisant courir le risque d'être capturé à sa femme et sa fille. Le révérend et Simon essayent de le calmer. De leur côté, Rowland Tusk et le révérend Elijah interviennent dans une maison pour un autre cas de forcené.



À la fin du tome précédent, les auteurs introduisaient un nouveau personnage sortant de nulle part et visiblement très influent, voire investi d'une autorité certaine parmi la communauté traquant les proscrits. Le premier épisode de ce tome permet de faire connaissance avec ce bel afro-américain : individu à forte carrure, musclé sans exagération, avec une belle prestance et une réelle assurance de quelqu'un qui sait ce qu'il fait. Robert Kirkman est un maître dans la création de personnages terrifiant et crédible. Rowland Tusk n'est pas Negan, mais il en impose. Son assurance ne s'exprime pas de manière grossière, mais le lecteur voit que lorsqu'il parle, les autres l'écoutent et obéissent : ils filent droit. Il faut dire que lorsque Tusk perd son calme, ce n'est pas beau avoir avec une séquence éprouvante de châtiment corporel. Rien de gore mais l'artiste montre la souffrance de l'incompétent qui subit la mutilation, et la rage froide qui habite Rowland : un moment mangé par les ombres, et pourtant à l'intensité insoutenable. Son langage corporel montre un individu habitué à utiliser sa stature pour intimider son interlocuteur par sa taille et par la menace sous-jacente de l'utilisation de la force physique, sans pour autant passer à l'acte systématiquement. Dessinateur & artiste racontent l'histoire en étant en parfaitement phase : il suffit de regarder la manière dont Rowland devient menaçant sans s'en rendre compte, face à son épouse qui lui fait rappel calmement ses devoirs de père, ou lorsqu'il sourit en énonçant des menaces ignobles en s'adressant à Megan Holt.



Le lecteur ressent le magnétisme de Rowland Tusk ainsi que son caractère implacable et sa détermination inébranlable de mener à bien sa mission : capturer Kyle Barnes, et tant pis pour tous ceux qui se trouvent intentionnellement ou non sur son chemin. L'intrigue franchit un palier. Côté Barnes, l'intrigue franchit également un palier avec l'installation de cette communauté ne permettant plus de rester au niveau de discrétion nécessaire pour ne pas être repéré. Kirkman ouvre le récit à des personnes venant de l'extérieur : c'était le cas avec Simon, encore plus avec Rowland Tusk, et encore plus avec le fils du révérend John Anderson. Le conflit entre les 2 factions est inéluctable et il n'est plus très loin en termes d'épisodes. Bien sûr, le lecteur s'est progressivement habitué aux dessins un peu secs et à la mise en couleurs assez sombre. Mais il constate également que Paul Azaceta semble plus à l'aise, avec des pages plus fluides et des dessins plus naturels, moins maniérés, tout en conservant les caractéristiques de départ : encrage et zones de noir appuyés, visages et silhouettes un peu sculptées, sans adoucissement des contours par des arrondis. Les images conservent leur aspect brut de décoffrage, évoquant une vie proche du milieu naturel, sans apprêts.



Elizabeth Breitweiser semble elle aussi plus à l'aise, avec une approche plus personnalisée pour complémenter les dessins, au point que le lecteur puisse ne pas s'en apercevoir. Elle apporte ainsi des éléments très discrets comme un motif de papier peint, ou la silhouette des arbres en fond de case, nourrissant la case, sans se faire remarquer, les traits encrés restant au premier plan. Plus que dans les tomes précédents, le lecteur est absorbé par la narration visuelle, sans moment où l'immersion se retrouve rompue par une expression de visage trop appuyée, ou un décor semblant artificiel ou en carton-pâte. Le jeu des acteurs est naturaliste au point d'en devenir évident, tant il exprime l'état d'esprit de chaque personnage en fonction de sa morphologie, de sa position sociale, de son âge, de son activité. Il suffit de regarder les personnes plus âgées comme Mildred ou John Anderson pour voir que leurs gestes sont plus mesurés que ceux des personnages plus jeunes. L'artiste conçoit des plans de prise de vue spécifiques pour chaque séquence, avec une utilisation plus limitée et plus pertinente des cases en insert. Le lecteur ressent la bienveillance qui règne entre les membres de la famille Tusk lors du petit déjeuner dans la cuisine, la brutalité sans pitié de Tusk en train de mutiler un individu, la déstabilisation de Kyle Barnes découvrant le campement à côté de la grange et les activités très ordinaires des personnes (très belle utilisation de cases en insert), l'ébahissement de Barnes quand les paroissiens s'agenouillent devant lui, l'indignation révoltée de Barnes face aux policiers, etc. Paul Azaceta réalise des planches avec une apparence austère, et une grande sensibilité.



De son côté, Robert Kirkman donne l'impression d'avoir enfin installé assez d'éléments de l'intrigue pour pouvoir développer un propos plus riche. Certes, au premier niveau, cela reste une histoire de possession, avec les bons d'un côté (Kyle Barnes et les autres), et les méchants de l'autre (Rowland Tusk et les autres), avec la lumière qui s'oppose aux ténèbres. Mais de l'autre, le lecteur ressent de la sympathie pour Tusk, malgré son comportement monstrueux, et le plaisir qu'il prend à imposer sa volonté en manipulant les autres (parfois en usant de sa force, mais en dernier recours). C'est un homme avec une belle prestance, intelligent, et qui obtient des résultats, qui agit pour le bien de sa communauté. En face, le scénariste joue avec d'autres conventions. Kyle est de plus en plus sympathique parce que finalement il avait raison depuis le départ, mais en même temps, il se montre égoïste en souhaitant assurer la sécurité de sa femme et sa fille quitte à rejeter des dizaines de personnes, violent en exorcisant les possédés qui se retrouvent dans un état végétatif ensuite. En plus il n'a pas été un bon père de famille comme l'a été Rowland. Kirkman continue à jouer avec les conventions dans la dernière séquence. La communauté du révérend John Anderson se défend, ce qui occasionne la mort des policiers qui intervenaient. Impossible de ne pas penser à un assaut donné sur une secte réfugiée dans une ferme, comme par exemple celle des davidiens et le siège de Waco au Texas en 1993, avec l'intervention du FBI… sauf que le scénariste inverse le résultat, incriminant la communauté qui, vue de l'extérieur, donne effectivement l'impression d'une secte dangereuse.



Arrivé au sixième tome de la série, le lecteur reste dubitatif de cette lutte d'entités de lumière contre des entités des ténèbres, au travers d'êtres humains vivants dans la petite ville de Rome en Virginie Occidentale, avec des dessins un peu frustes, mais bien sombres. Peut-être que le déclic s'est déjà produit dans un tome précédent, sinon celui-ci donne l'impression que les différentes composantes révèlent enfin leur potentialité. Paul Azaceta réalise des pages plus efficaces, plus convaincantes, plus expressives, et toujours aussi personnelles. La situation des personnages est arrivée à un point critique, et le scénariste ouvre l'horizon avec des conséquences qui dépassent la petite ville de Rome, des personnages fascinants, à la fois clairement affiliés au bien ou au mal, à la fois échappant à cette dichotomie, générant une étrange résonnance avec des drames inoubliables.
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Outcast, tome 5 : Une nouvelle voie

Ce tome fait suite à Outcast, tome 4 : Sous l'aile du Diable (épisodes 19 à 24) qu'il faut avoir lu avant. Il comprend les épisodes 25 à 30, initialement parus en 2017, écrits par Robert Kirkman, dessinés et encrés par Paul Azaceta, et mis en couleurs par Elizabeth Breitweiser.



Quelque part dans une région rurale de la Virginie, Amber, une enfant, se réveille dans une voiture, à côté de sa mère Allison, sur la banquette arrière. Elle aperçoit les arbres sans feuilles par la vitre. Elle demande à sa mère si c'est vrai qu'elles vont habiter avec Kyle Barnes, son père, l'ex-mari d'Allison. Sur le siège passager, Kyle se retourne pour répondre que oui, et Allison confirme. La voiture est conduite par Brian Giles, le shérif du patelin. Ils arrivent à une maison dans les bois, mais il y a déjà une voiture garée devant. Kyle et Brian descendent de voiture, en indiquant aux passagères de rester dans le véhicule. Ils découvrent le révérend John Anderson une pelle à la main, ayant creusé un trou d'une vingtaine de centimètres de profondeur en forme de tombe. Étendu sur le sol se trouve un cadavre éventré. Le shérif se met à vomir. Dans la petite ville, un homme d'une cinquantaine d'années, capuche sur la tête, parcourt la rue commerçante et sourit aux habitants qu'ils croisent.



Devant la maison isolée, Kyle Barnes demande au révérend : que s'est-il passé ? John Anderson indique qu'il n'a pas eu d'autre choix. Barnes lui rétorque qu'il est en train de parler d'un meurtre. Le révérend répond que l'homme à terre avait été corrompu par le mal absolu, que ce n'était plus un homme, qu'il était en train de pourrir de l'intérieur, il suffit d'ailleurs de regarder ses entrailles. Il termine en indiquant qu'il a eu le dessus grâce à Dieu. Allison interpelle son ex-mari pour lui dire qu'elle ne peut pas rester là, et leur fille Amber encore moins. Le shérif accepte de lui donner les clés de la voiture, et ils s'en vont. Mais Kyle découvre que le réservoir est quasiment vide. Il va falloir s'arrêter pour faire le plein à une station-service proche de la ville, où ils risquent d'être reconnus. Effectivement, alors qu'Allison fait le plein, une voiture de police s'arrête devant leur véhicule, les empêchant de repartir. Le policier en descend indiquant à Kyle qu'il va devoir le suivre. Les autres personnes présentes commencent à se rapprocher, encerclant de fait Kyle, son ex-femme et sa fille. L'homme avec la capuche, une barbe fournie avec des mèches blanches, s'avance en indiquant qu'il a des plans pour Kyle, sous-entendant que le policier ne peut donc pas l'arrêter. Il se rapproche du policier dont il serre la gorge avec sa main. Un étrange phénomène se produit. Kyle Barnes, Allison Barnes, et les badauds présents marquent un temps d'arrêt ne sachant pas trop comment interpréter ce phénomène, comment y réagir.



C'est reparti : Kyle Barnes avec ses talents particuliers continue d'essayer de retrouver une position stable pour s'opposer aux individus de son patelin qui semblent avoir tous été corrompus par une mystérieuse force de nature surnaturelle. Le lecteur retrouve les éléments de genre présents dès le début du récrit : la petite ville éloignée de tout où tout le monde connaît tout le monde, l'environnement rural essentiellement sous la forme d'une forêt pas très dense aux arbres dépouillés car en hiver, les distances à parcourir en voiture, cette force maléfique qui habite la plupart des gens autour de Kyle Barnes, cette capacité de Kyle, mal maitrisée à neutraliser cette force chez un individu. Azaceta réalise toujours des dessins descriptifs, avec un bon niveau de détails, une approche très pragmatique pour rendre la banalité des individus et l'ordinaire bon marché des maisons et de leurs meubles, avec un trait de contour non lissé qui participe à l'apparence non apprêtée, nature et même un peu rude des personnages et des environnements. Il rend les ambiances de certaines scènes plus sombres, en augmentant l'épaisseur des traits d'encrage, avec des aplats de noir aux formes irrégulières qui semblent manger une partie des formes. De tome en tome, la mise en couleurs d'Elizabeth Breitweiser se fait de plus en plus personnelle. Elle a développé une palette de couleurs très particulières pour la série, avec des bleu-vert, des violets, des oranges, qui donnent une identité visuelle spécifique, et qui contribuent à laisser penser qu'il y a effectivement des énergies invisibles à l'œuvre.



D'un autre côté, cette identité très forte de la série ne suffit pas pour insuffler de la personnalité aux protagonistes ou pour rendre l'intrigue plus mystérieuse. Les dessins donnent l'impression de montrer des personnages banals, plausibles comme habitants d'une petite ville rurale. Azaceta & Breitweiser savent rendre inquiétants des individus qui pourraient être des voisins, avec une morphologie aussi oubliable que leur visage, ou que leurs tenues vestimentaires sans relief, avant tout pragmatique. Malgré sa chemise tâchée de sang, le révérend John Anderson est plus pitoyable qu'inquiétant. Il fait peine à voir à s'escrimer à creuser une tombe, et il fait pitié à essayer de se justifier d'avoir massacré un homme âgé. Lorsque Kyle Barnes doit se battre avec ses poings, il est hésitant, malhabile, même après avoir été formé par Simon. Ce dernier est plus assuré dans ses attaques, mais il est visible qu'il fatigue, qu'il n'est pas un combattant professionnel, qu'il ne dispose plus de la fougue de la jeunesse, et qu'il ne fonce pas, qu'il avance plus par obstination que grâce à une force musculaire imposante. À l'opposé, le révérend fait presque peur avec sa foi chevillée au corps. Pas facile de se positionner pour savoir s'il s'agit de convictions religieuses, ou si le fanatisme aveugle n'est pas loin. Les événements surviennent parfois de manière arbitraire : bien sûr il fallait qu'il y ait beaucoup de monde à la station-service, bien sûr il fallait que Simon intervienne juste à ce moment-là. Bien sûr, il se devait d'y avoir une petite communauté autonome non loin de la maison isolée qui sert de refuge à la famille Barnes et au révérend. Le savoir-faire narratif des auteurs fait que ces épisodes se lisent facilement, avec une ambiance pesante bien adaptée, mais le lecteur a dû mal à s'impliquer dans ces personnages superficiels, dans ces situations convenues, dans ce récit de genre trop plat.



Mais quand même, il s'agit d'une série de Robert Kirkman, l'auteur d'Invincible, et The Walking Dead. En arrivant à la fin du premier tiers du récit, le lecteur découvre le dialogue entre Kyle et Simon : il est à nouveau question des origines de ces entités corruptrices maléfiques, des ténèbres et de la lumière. Le discours est générique et peut potentiellement s'appliquer à plein de choses. Le lecteur se souvient qu'il en allait de même avec les zombies : pas d'explication sur leur origine, pas de métaphore claire et forte, juste une présence horrifique. Potentiellement, ce mal qui ronge les braves citoyens doit également pouvoir s'envisager comme un symbole u une allégorie. Les zombies avaient détruit la société et contraignaient les humains restant à reconsidérer la nature de la société, à passer par les différentes étapes nécessaires pour en reconstruire une en partant de zéro. Mark Grayson débutait comme un superhéros classique, mettant un terme à un supercriminel après l'autre en tapant dessus, tout en apprenant que ces solutions en force ne résolvaient pas grand-chose. Le lecteur se dit qu'il doit être possible de considérer ce phénomène de ténèbres maléfiques et de lumière sous un autre angle. Cette explication sur les ténèbres et la lumière est à la fois manichéenne et à la fois les composantes différentes d'une dualité, qui sont opposées et peut-être complémentaires. Dans l'exposé de Simon, il apparaît que les ténèbres ont besoin de la lumière, qu'elles s'en nourrissent. En revanche, il ne dit rien d'une éventuelle réciproque.



Avec cette image en tête des ténèbres aspirant les forces de la lumière, le lecteur se dit que cette histoire d'individus possédés pourrait se lire comme des individus animés de mauvaises intentions profitant de personnes animées de bonnes intentions, des individus déséquilibrés ou en souffrance vampirisant des personnes mieux équilibrées. Il est difficile également de faire abstraction de la présence du révérend John Anderson qui apporte une touche religieuse, et plutôt morale, orientant l'image de la capacité de Kyle Barnes et des autres proscrits (Outcast) vers des personnes capables de détecter des individus toxiques pour la société ou pour les autres êtres humains. Avec ces idées en tête, le lecteur se dit qu'il est possible de voir Kyle et les autres comme un groupe dépositaire de valeurs morales positives faisant front contre un groupe ou des groupes fonctionnant sur la base de valeurs négatives. Mais par la suite du récit, il ne trouve rien qui vienne étayer ces suppositions. En fait les dépositaires des ténèbres fonctionnent également comme un groupe avec une forme d'entraide. Il n'y a qu'avec l'arrivée de Rowland que leur recours à la violence comme forme de coercion est affirmé comme un mode de fonctionnement normal. Mais cela renvoie alors au comportement du révérend Anderson qui a également fait usage de la violence pour neutraliser un adversaire. Décidément il ne reste que la dynamique de l'intrigue que l'on peut tenir comme acquis : un petit groupe d'individus capables d'exorciser le plus grand nombre, ce qui ramène le récit à un niveau basique.



Robert Kirkman, Paul Azaceta et Elizabeth Breitweiser continuent de raconter les déboires de Kyle Barnes, individu capable d'exorciser des gens possédés par de mystérieuses ténèbres, associé à un révérend qui semble avoir dépassé les bornes, contre une populace inquiétante, porteuse d'une menace diffuse. La narration visuelle est prenante et inquiétante à souhait, sèche et sans fard. L'histoire se laisse lire, assez basique, mais recelant des passages qui laissent supposer qu'il y a bien plus que la simple intrigue.
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Criminal, tome 7 : Au mauvais endroit



Été 1979, Tracy se retrouve sur les routes avec son père violent et alcoolique. À devoir conduire pour lui, à changer les plaques, à être témoins de meurtres, à se retrouver seul de très long moment et au final à se démerder pour se nourrir car son père ne rentre pas, où ne lui offrent pas de bons repas.

À travers ce road trip entre père et fils, on comprend mieux pourquoi Tracy pensait que son jeune frère avait vécu une meilleure vie que lui en restant seul avec sa mère.



Seule échappatoire pour ce jeune enfant rentré trop vite dans ce monde d'adultes, est de lire les bandes dessinées. Là, au moins même s'il y a de la violence, c'est le bon côté qui gagne contre le mauvais... Car Tracy est hélas du mauvais côté par son père. On ne choisit pas sa famille, mais on peut choisir ses lectures. 📖



Côté dessin, les expressions faciales sont très bien réussites. Que ça soit la surprise, la peur, la lassitude de Tracy Lawless face aux mauvaises actions de son géniteur de père ainsi que les expressions de ce dernier dans ses côtés assez psychopathes de truands.
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Kill or be killed, tome 1

Ce tome est le premier d'une série indépendante de toute autre. Il contient les épisodes 1 à 4, initialement parus en 2016, écrits par Ed Brubaker, dessinés et encrés par Sean Phillips, avec une mise en couleurs réalisée par Elizabeth Breitweiser. Ces créateurs sont également les auteurs des extraordinaires séries Fatale, Tome 1 : La mort aux trousses et Fondu au noir.



Au temps présent, Dylan (un jeune homme) est en train d'exterminer de la racaille avec son fusil à pompe. Dans un immeuble, il abat un homme à bout portant dans une salle de bain, puis un deuxième dans le salon. Il tire ensuite froidement et méthodiquement sur 2 autres qui viennent de sortir de l'ascenseur. Pendant ce temps-là, sa voix intérieure semble s'adresser à un interlocuteur invisible, évoquant la facilité avec laquelle il est devenu un tueur, la litanie des crimes grands et petits évoqués tous les jours aux informations, le fait qu'un psychopathe est devenu président et que l'avidité mène le monde. Il se fait prendre par surprise par un agresseur, se défend tout en continuant de penser aux individus qui vivent dans ce monde de manière passive en se gavant de divertissement à la télévision. Mais il se reprend en se disant qu'il n'a pas commencé son histoire par le début, et qu'il lui faut revenir en arrière, peut-être un soir de nouvel an 7 ans plutôt quand des mecs ont importuné sa copine de l'époque dans un bus et qu'il n'avait pas la carrure suffisante pour répondre. Ou alors peut-être le jour où il a fait une tentative de suicide en se jetant depuis le toit de son immeuble, après avoir fait une autre tentative aux médicaments quelques années plutôt.



Dylan finit par se concentrer sur quelques semaines auparavant. Il vit alors en colocation avec Mason. Ce dernier fréquente assidument Kira qui leur rend régulièrement visite et qui passe tout aussi régulièrement la nuit avec Mason dans sa chambre. Elle a également été la meilleure amie de Dylan. Puis un soir, il y a un mois, alors que Mason est sorti chercher des pizzas, Kira est venu s'installer sur les genoux de Dylan et l'a fougueusement embrassé, mais elle s'est séparée de lui dès qu'elle a entendu Mason revenir. C'est ce soir-là que Dylan s'est jeté dans le vide du septième étage, malade de solitude. À peine s'est-il élancé qu'il a regretté son geste. Il a miraculeusement survécu à sa chute. Le soir même, il voit l'apparition d'une créature surnaturelle dans sa chambre qui le malmène et qui lui explique que le prix à payer pour sa vie sauve est de tuer une personne par mois.



Après la lecture de Fatale et de The fade out (et avant des séries Cirminal et Incognito), le lecteur est prêt à accorder aveuglément sa confiance à ces auteurs. Il sait qu'ils vont réaliser un nouveau récit qui s'inscrira dans la veine du roman noir, avec certainement des éléments d'un autre genre (superhéros pour Incognito) et des hommages à une époque (les années d'après-guerre à Hollywood pour The fade out). S'il n'a rien lu de tout ça, il est vraisemblable qu'il est venu à cette nouvelle série sur la foi de la renommée des auteurs, ou pour la couverture saisissante.



Le lecteur découvre des pages très organiques dans leur apparence, avec une mise en couleurs étonnante. Elizabeth Breitweiser utilise une approche essentiellement naturaliste, mais avec un parti pris artistique. Dès la première case, le lecteur peut voir que la coloriste ne se contente pas de rendre compte des couleurs de manière réaliste. Pour cette première case, elle complète aussi le dessin avec un arrière-plan évoquant l'ombre portée de la fenêtre. Sean Phillips s'investit fortement dans les décors, mais quand il estime que la case a plus d'impact sans (à de rares occasions), Breitweiser vient la compléter soit en évoquant le décor, soit en réalisant un camaïeu reflétant l'état d'esprit ou l'émotion des personnages. La complémentarité est si naturelle que le lecteur peut ne pas s'en apercevoir s'il n'y prête pas attention. De même qu'il peut ne pas remarques certaines teintes inattendues, dont un orange vif pour aux moments les plus violents et brutaux. Le travail de la coloriste est remarquable en plusieurs points. Elle rehausse le relief des surfaces, mais sans utiliser de lissage dans les dégradés de teinte, plutôt avec des surfaces irrégulières qui évitent une impression d'embellissement de la réalité, ou d'enjolivement. La plupart du temps, elle utilise surtout des teintes ternes et un peu sombres pour rendre compte d'un quotidien pas folichon, sans être morbide ou désespéré pour autant. Par contraste, la luminosité de Kira ressort, comme si son entrain apportait de la lumière dans le quotidien de Dylan. Elle effectue également un travail remarquable pour rendre compte de la luminosité si particulière de la neige. Elle sait utiliser les effets spéciaux de l'infographie à bon escient, en l'occurrence pour apporter une vie surnaturelle aux peintures du père de Dylan.



Il faut que le lecteur fasse un effort pour dissocier les traits encrés de Sean Phillips, de leur mise en couleurs afin de se rendre compte de leurs qualités. L'approche de l'artiste s'inscrit dans une veine réaliste, mais là encore avec une intention consciente de ne pas l'enjoliver. Il mélange dans ses cases des traits fins pour une partie des contours, et des traits plus épais pour rendre compte de l'irrégularité de ces contours, des ombres portées, avec des aplats de noir irréguliers. Ses personnages présentent une morphologie normale, sans excès de muscle, et s'habillent avec des tenues ordinaires, variées, et adaptées à leur occupation et aux conditions climatiques, ainsi qu'à leur position sociale et leurs revenus. Les expressions des visages sont variées et font apparaître des émotions nuancées et des états d'esprit complexes. Elles sont mesurées, ne marquant fortement le visage que lors des moments de stress intense, comme lors des affrontements physiques, des prises de risques ou des mises en danger.



Sean Phillips met en œuvre la même approche graphique pour rendre compte des différents environnements dans lesquels se déroule le récit. Le lecteur peut se projeter sans difficulté aux côtés de Dylan qu'il se trouve dans cet immeuble où il fait un carnage, assis à une table dans une bibliothèque municipale, aux côtés de sa copine dans les rues New York, dans la petite chambre de son appartement, dans les couloirs d'un hôpital en attendant de régler sa note, ou au volant de sa voiture. L'objectif du dessinateur n'est pas d'en mettre plein la vue au lecteur, mais d'inscrire le récit dans un quotidien banal et normal. S'il y est sensible, le lecteur peut quand même remarquer la vue panoramique sur les immeubles depuis le toit, la belle verrière d'une terrasse, le pavillon de banlieue ordinaire où habite la mère de Dylan, l'urbanisme authentique des rues New York sous la neige, la foule dans les couloirs du métro, l'aménagement intérieure d'une rame de métro déserte, etc. L'aspect ordinaire et banal des différents lieux est l'aboutissement d'une réflexion graphique sophistiquée, à l'opposé d'une paresse picturale ou d'un manque de compétence.



S'il se limite à la dimension graphique de la narration, le lecteur peut facilement se laisser tromper par son apparente innocuité. Mais sa lecture lui montre qu'elle n'est pas synonyme de fadeur et encore moins de vacuité. En fait toutes les scènes semblent aller de soi et couler de source, alors que l'intrigue raconte des événements sortant pour le moins de l'ordinaire. Cependant, Ed Brubaker fait preuve de la même adresse narrative, pour présenter son histoire comme allant de soi, n'ayant finalement rien de si extraordinaire que ça. Dylan n'est qu'un jeune individu désabusé comme les tous ceux écœurés par l'état du monde, scandalisé par les injustices, dégoûtés par l'impunité et le laxisme, déjà résignés à cet ordre des choses inique et indigne. Sa tentative de suicide raté lui fait prendre conscience qu'il n'a aucune envie de mourir, mais aussi que chaque jour compte. Il décide donc de faire quelque chose, de prendre les choses en main, et d'éliminer quelques nuisibles de la société. Le scénariste montre comment il se procure une arme à feu qui ne peut pas être tracée (ce n'est pas si compliqué que ça) et comment il choisit ses cibles. Ce dernier point s'avère plus compliqué, car Dylan veut avoir la certitude qu'il ne commet pas d'erreur, qu'il assassine bien des individus nocifs pour la société, coupables de crimes graves. Finalement tout cela est bien logique et légitime.



C'est toute la force de la narration du scénariste que de rendre plausible et normal le comportement de son personnage principal. Il apparaît dès le début qu'il se livre à une étude de caractère. Toutes les séquences mettent en scène Dylan et la moitié comporte les commentaires de sa voix intérieure, soit sous forme de cellule de texte, soit sous la forme de courts paragraphes dans une colonne, les dessins occupant l'autre moitié de la page également dans une colonne. La scène d'ouverture alpague tout de suite le lecteur avec cette tuerie méthodique de sang-froid, avec sa violence et sa brutalité. L'intrigue est mise sur les rails avec un individu qui va prendre la loi entre ses mains pour éliminer les éléments nocifs de la société. Le lecteur tombe toutefois sur des éléments inattendus comme la tentative de suicide, ou un conte extrait de Les mille et une nuits, ou encore une référence à Frantz Kafka et une autre à Vladimir Nabokov. Il est pris à contre-pied quand le surnaturel fait irruption, à la fois sous la forme d'un spectre se manifestant directement et seulement à Dylan, à la fois par les peintures du père de Dylan. Ed Brubaker maintient l'incertitude quant à la réalité de cet élément surnaturel, laissant le lecteur choisir s'il doit le prendre au premier degré (il y a déjà eu des éléments surnaturels dans les séries précédentes du duo Brubaker & Phillips) ou s'il s'agit d'une métaphore du désordre mental de Dylan (au vu de ses actes, ce ne serait pas si étonnant).



De séquence en séquence, les auteurs dessinent le portrait d'un jeune homme avec un vision égocentrique du monde, absorbé par ses propres réflexions, convaincu de son inutilité, cherchant un but. Mais il est également possible d'y voir une histoire d'amour, un récit cathartique (un gentil jeune homme normal éliminant les immondes criminels), un questionnement sur l'absurdité de l'existence et ses étranges bizarreries, à ce titre l'adolescence de Kira confrontée aux pratiques échangistes de sa mère décroche le pompon. Sous des dehors de thriller et de justice expéditive, Ed Brubaler regarde la vie d'un drôle d'air, son personnage faisant bon usage de sa propension à l'introspection.



Décidément, le lecteur en vient à se demander si le duo Ed Brubaker & Sean Phillips peut rater une histoire. Ils continuer d'évoluer dans le genre du polar, avec une touche de surnaturel (peut-être) utilisant les conventions du genre pour servir leur récit, jouant avec la violence, à la fois pour ce qu'elle a de cathartique, mais sans édulcorer sa brutalité écœurante, emmenant le lecteur dans la logique d'un jeune homme bien parti.
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Kill or be killed, tome 1

Bon sang, que c'est bon, une vraie bouffée d'air frais dans le paysage du comics ! Laissez de côté les culottes et capes en tous genres et embarquez avec le duo survitaminé, je nomme, Brubaker au scénario (dont la réputation n'est plus à faire et qui ici est en grande forme) et Phillips aux dessins. Les deux compères ayant déjà collaboré sur l'éminente série Criminal, ils remettent ici le couvert avec un run rondement mené grâce à un rythme soutenu et des protagonistes diablement bien écrits, le tout dans une ambiance crasseuse comme on les aime.



Oubliez donc les Marvel édulcorés un instant et plongez dans cette spirale infernale, véritable chute libre dans les viles abysses de cette société déshumanisée où chacun est écorché par cette diatribe sous acide. Vous l'aurez compris, la noirceur est au rendez-vous, mais jamais de manière gratuite, bien au contraire. Les bas-fonds et travers de notre société moderne aliénée par la violence sont subtilement mis en exergue et même, ironie ou pas allez savoir, sublimés le plus souvent par les mirifiques colorisations édulcorées de Breitweiser.



Une fois ce premier tome dévoré une seule pensée occupera votre esprit : vite, la suite.
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Criminal, tome 7 : Au mauvais endroit

Ce tome fait suite à Criminal, Tome 6 : Le dernier des innocents qu'il n'est pas nécessaire d'avoir lu avant. Il contient les épisodes Criminal: The Special Edition + Criminal: Tenth Anniversary Special Edition Magazine, respectivement parus en 2015 et 2016, écrits par Ed Brubaker, dessinés et encrés par Sean Phillips, avec une mise en couleurs d'Elizabeth Breitweiser.



Wrong time (40 pages) - En mars 1976, Teeg Lawless est en prison. Il a été incarcéré pour bagarre dans une bar. Une histoire stupide : il venait de participer à une attaque de fourgon blindé, qui avait réussi, et il attendait que les jours passent pour aller au rendez-vous afin de récupérer sa part du butin. En attendant il était allé écluser quelques gorgeons avec un autre braqueur, et l'alcool aidant, cela avait dégénéré en dispute débile dont il ne se souvenait même pas du pourquoi. En prison, un autre détenu vient le trouver pour lui dire que monsieur G. souhaite avoir un entretien avec lui. Ça ne présage pas de bon moment, alors que Teeg tuait le temps en lisant un comics mettant en scène un barbare (Zangar the Savage) sauvant une pauvre sorcière sans défense (Ravena)



Wrong place (56 pages) - À l'été 1979, Teeg Lawless a emmené son fils Tracy pour une virée à travers la campagne. Visiblement il recherche une femme de petite ville en petite ville, une dénommée Lana. Teeg se sert de son fils pour faire le guet, faire des petites courses, et changer des plaques minéralogiques. Tracy a dégoté un comics qui met en scène un loup-garou pratiquant le kung-fu. Dans le patelin suivant, Tegg Lawless disparaît pendant plusieurs jours, laissant son fils (à peine adolescent) se débrouiller tout seul dans une chambre de motel. Tracy se met à la recherche d'une boutique de comics, il y a fait la connaissance de Gabby une demoiselle assez débrouillarde.



Dès le début, le lecteur reconnaît tout de suite le nom de famille Lawless, c'est celui du protagoniste principal du tome 2 de la série Criminal : Criminal, Tome 2 : Impitoyable. Il n'est pas besoin de l'avoir lu pour apprécier cette histoire en 2 parties. Le principe de la série Criminal est de rendre hommage aux différents sous-genres du polar, par le biais d'histoires complètes en 1 tome, avec des personnages qui se croisent d'un tome à l'autre. Ce nouveau tome ne déroge pas à la règle. La première partie permet de découvrir le paternel de Tracy Lawless, et s'inscrit dans le genre du polar de prison. Teeg Lawless est en cabane, et il se rend compte qu'il est sous le coup d'une prime pour son décès rapide.



La survie de Teeg Lawless dépend de sa capacité à voir les coups venir, et à frapper plus vite et plus fort que les autres. Les dessins de Sean Phillips sont charbonneux à souhait, montrant un univers carcéral plongé dans une demi pénombre du fait d'un éclairage insuffisant. Il prend le temps de donner corps aux décors : barreaux de cellule, radiateurs en fonte, revêtement rugueux de la cour de la prison (qui fait mal quand on tombe fortement dessus, peut-être un peu aidé), étonnante librairie de fortune dans la prison (tenue par un détenu qui sort de l'ordinaire), appartement minable, etc. Comme à son habitude, il croque des trognes peu avenantes à ses personnages, fortement marquées par l'encrage, avec des expressions qui font peur, montrant des individus habités par une forme de sauvagerie indomptée, incompatible avec une vie en société et en bonne intelligence. Il décrit une violence sèche, des actes brutaux qui ont pour but de faire mal du premier coup, sans remord, car il s'agit d'une question de vie ou de mort. Lors d'une séquence, un individu subit une altération de sa perception, à cause de l'ingestion d'un acide lysergique, à son insu. L'artiste s'amuse à tordre toutes les formes pour rendre compte de l'effet psychotrope, et Elizabeth Breitweiser s'amuse bien avec les couleurs pour une ambiance psychédélique. Ils trouvent le juste milieu pour rendre compte de l'impression de flottement et d'hallucinations, tout en faisant en sorte que le lecteur puisse rattacher ces délires à la réalité, du grand art.



Dans la deuxième partie, Ed Brubaker rend hommage à une autre forme de polar : la recherche d'un individu installé quelque part dans une petite ville. Il ne s'agit pas vraiment d'un road-trip parce que le récit ne se focalise pas sur l'ambiance dans la voiture, entre le père et le fils, ou sur les paysages, ou sur une forme de progression psychologique au fil des rencontres. Il ne s'agit pas vraiment d'une enquête à proprement parler puisque les indices arrivent régulièrement pour faire progresser la recherche. Il s'agit plus de montrer la relation entre Teeg et Tracy, et entre Tracy et Gabby (la jeune adolescente).



À nouveau, Sean Phillips est impeccable : reconstitution d'une Amérique impersonnelle, avec des stations-service, des pavillons bon marché, des boutiques improbables (le magasin de comics et sa pagaille), de supermarchés déprimants, de motels tous semblables. Teeg Lawless est montré comme un individu violent, sournois, imprévisible, peu préoccupé par le sort de son fils (ces émotions se lisent sur son visage). De page en page, le lecteur sent le respect de Tracy pour son père se muer en mépris, au vu de la manière dont il le regarde. L'artiste donne vie à des enfants ayant une vraie morphologie d'enfants (pas des adultes miniatures), avec des expressions franches comme des enfants, mais aussi des moues plus adultes. En particulier, le lecteur peut constater que Tracy imite déjà les expressions condescendantes de son père, qui ne respirent pas forcément un haut degré d'intelligence. Elizabeth Breitweiser habille les dessins avec des couleurs cafardeuses rendant compte d'une réalité qui n'a rien de riante ou de plaisante, sans sombrer non plus dans une ambiance dépressive.



Cette deuxième partie met plus en avant la lecture des comics. Le lecteur constate que Tracy a développé le même goût que son père pour cette forme de divertissement, ce qui établit un trait d'union entre le fils et le père, mais aussi entre Tracy et le lecteur. Il observe également que Tracy est un lecteur plus exigeant qui ne se contente pas d'histoires innocentes pour enfants. Par contre, Tracy ne se comporte pas comme un collectionneur, car il recherche activement d'autres numéros de cette incroyable série avec un loup-garou pratiquant le kung-fu, mais seulement pour les lire, pas pour thésauriser. Le lecteur apprécie également la description de la boutique artisanale, car il n'existait pas de réseau de distribution en librairies spécialisées, juste des boutiques mal éclairées, avec des trucs et des machins, et des comics en ordre dispersé, tenues par des néo babas à l'hygiène corporelle douteuse.



Dans la première partie, Sean Phillips illustre donc un comics dans le comics qui est un hommage au comics de Conan le barbare, et plus spécifiquement à la série The Savage Sword of Conan. Il continue de dessiner comme à son habitude, donnant une apparence réaliste et adulte aux personnages, sans exagération romantique pour ce barbare et cette sorcière. En particulier, quand Zangar fait usage de son épée, elle tranche dans la tripaille, avec une dimension gore assumée, et un peu second degré. L'artiste n'essaye de dessiner à la manière de John Buscema, il ne parodie pas Conan dessiné par lui. Le lecteur à l'œil exercé remarque le temps d'une case, un encrage évoquant Alfredo Alcala, avec des petits traits en croisillon pour figurer une texture. Il peut aussi déceler l'influence de Tony DeZuniga dans certaines cases. Les auteurs rendent donc un hommage pince-sans-rire, avec une petite dose de sarcasme, aux épisodes plus adultes de Savage Sword (le titre complet de ce numéro était d'ailleurs Savage Sword of Criminal).



De la même manière, les comics dans le comics de la deuxième partie sont un hommage à deux séries de Doug Moench : Werewolf by night (Jack Russell) dessiné par Don Perlin, et Shang-Chi: Master of kung-fu dessiné par Paul Gulacy. En observant les dessins, le lecteur y reconnaît plus l'influence de Don Perlin (teintée d'un soupçon de John Romita senior pour le personnage féminin) que celle de Gulacy. Ces 2 comics dans le comics procurent également un plaisir de lecture, pour le côté barbare tout en force de Zangar, et pour le côté plus parodique de Fang (le loup-garou).



Le lecteur est tenté de rechercher plus que ce premier niveau de lecture dans ces hommages. Il peut voir dans Zangar, une image déformée et exagérée de Teeg Lawless, se conduisant selon son bon plaisir, imposant sa volonté par la force. Mais le rôle de la sorcière n'a pas de transposition évidente dans le monde réel, si ce n'est peut-être l'appât du gain. Il semble alors que l'aventure de Zangar ne soit qu'une illustration déformée de la résistance physique de Teeg Lawless, et de sa détermination à atteindre un but, indépendamment des cadavres qu'il laisse derrière lui. La deuxième partie peut s'interpréter plus facilement, Tracy se projetant dans Fang, se représentant comme le héros de sa propre vie, avec le prix à payer (comme Fang) de ne pouvoir s'attacher à une compagne au risque de la voir mourir.



C'est un grand plaisir de retrouver l'univers de Criminal, et le lecteur ne boude pas son plaisir à replonger dans la vie pleine de turpitudes de ce petit criminel (on sent bien qu'il ne fera jamais un gros coup) et de son fils, emmené sur la même route que son père, et prenant modèle sur le seul adulte qu'il côtoie. Il prend également plaisir à retrouver les dessins rugueux et râpeux de Sean Phillips, donnant corps à cet univers sombre où les individus sont destinés à souffrir de leur condition sociale, et de leur culture étriquée. Le lecteur de comics de longue date apprécie ces hommages à Savage Sword of Conan et Doug Moench, même s'il n'est pas bien sûr d'avoir saisi l'intention des auteurs avec ces comics dans le comics.
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Outcast, tome 7 : L'emprise des ténèbres

Ce tome fait suite à Outcast T06: Invasion (épisodes 31 à 36) qu'il faut avoir lu avant. Il comprend les épisodes 37 à 42, initialement parus en 2019, écrits par Robert Kirkman, dessinés et encrés par Paul Azaceta, et mis en couleurs par Elizabeth Breitweiser.



Un jeune homme barbu marche sur les trottoirs d'une petite ville de province. Il caresse la tête d'un chien attaché à l'extérieur, en passant Il entre dans le diner de la ville et s'installe à une table. La serveuse vient lui verser une tasse de café et lui demande s'il vient travailler à la mine. Non, il ne fait que passer. Il indique qu'il se prénomme Simon et qu'il est content de faire la connaissance de Sarah, le prénom sur le badge de la serveuse. Il commande des œufs brouillés et du bacon. Il lui demande si elle pourrait lui faire visiter la ville après son service. Elle sourit. En sortant le soir, il neige. Une femme essaye de changer son pneu crevé avec ses deux jeunes enfants en train de la regarder faire. Elle ne s'en sort pas avec le cric. Il propose de l'aider, et Sarah indique qu'il est inoffensif pour rassurer la mère de famille. Un an plus tard, Sarah accouche de leur fils, Kyle, sous le regard enamouré de Simon. De temps à autre, elle remarque un air de tristesse sur le visage de Simon : dans ces cas-là, il lui répond qu'il n'avait jamais imaginé qu'il pourrait avoir une vie de famille épanouie comme celle-là. Mais un soir en rentrant de nuit, après avoir acheté un jouet pour l'anniversaire de son fils, il se fait agresser dans une ruelle mal éclairée, un homme costaud le frappant à la tête avec une barre de métal.



À Rome quelque part en Virginie Occidentale, la situation ne va pas en s'améliorant. La communauté réunie autour du révérend John Anderson est toujours réfugiée dans son campement, entouré d'une haute palissade avec des barbelés au sommet, les forces de police en gardant les issues. Rowland Tusk essaye de reprendre pied face aux accusations d'incompétence proférées par Angelica, une haute responsable dans l'organisation dont il fait partie. Elle se montre mécontente du fait que l'attaque de la communauté du révérend a donné lieu à des reportages sur les réseaux télévisés nationaux, attirant ainsi l'attention de manière irrémédiable. Elle connaît bien ceux qu'elle a sous les yeux dans cette salle, ainsi que leur réelle compétence : Todd Stone, Olive Morgan, Alice Nichols, Greta Coleman, et même Rowland Tusk. Elle attend d'eux qu'ils reprennent le dessus sur la communauté du révérend et sur Kyle Barnes, afin que la Fusion ne soit pas compromise. Pendant ce temps-là, le révérend John Anderson s'adresse à sa congrégation réunie dans l'église de fortune, pour les rassurer sur les épreuves à venir. Après la cérémonie, il va trouver Logan Ross, resté assis sur une chaise, alors que tous les autres sont partis. Puis, il reçoit Kyle Barnes qui vient s'inquiéter des questions logistiques pour nourrir une telle communauté.



La fin du tome précédent montrait un événement d'une ampleur telle qu'il avait effectivement un retentissement à l'échelle nationale dans les informations. Le lecteur sent bien que les individus assimilés à la communauté des Ténèbres commencent à sentir leur temps compté avant la Fusion, et que cela les oblige à agir. De l'autre côté, les proscrits ne sont toujours pas très nombreux, et ils ne résisteront pas à un assaut en règle. Mais avant de revenir au temps présent de son récit, le scénariste consacre un épisode au passé d'un personnage, de la même manière qu'il l'avait fait dans le tome précédent avec l'épisode 31 consacré à Rowland Tusk. Ici, l'épisode 37 est consacré à Simon Barnes, et donc le doute est levé quant à savoir s'il s'agit bien du père de Kyle ou non. Les auteurs le montrent plus jeune, sans attache, arrivant dans une ville et recommençant sa vie à zéro. Le lecteur sourit en voyant que déjà à cette époque, Simon souriait aux personnes qu'il rencontrait, comme il l'a fait à Rome en arrivant dans le tome précédent. Les gros plans sur les personnages donnent l'impression de traits plus grossiers, comme si Azaceta dessinait un peu plus vite avec une plume ou un pinceau (vraisemblablement infographique) plus gros, pour une spontanéité plus immédiate, mais un rendu parfois un peu brut. Pour autant, cela n'obère en rien l'empathie générée par les dessins, et le lecteur ressent le contentement inespéré de Simon, sa rage à devoir se défendre contre son agresseur, son renoncement déchirant à sa famille. Azaceta maîtrise de mieux en mieux les cases en insert pour un effet plus naturel, plus parlant et plus pertinent. Le lecteur découvre donc une partie du passé du mystérieux Simon et constate avec effarement que son fils a répété un schéma de vie très similaire, presque identique, soumis aux conséquences incontrôlables de posséder son pouvoir de lumière.



Le lecteur est donc ravi que Simon Barnes soit devenu un personnage plus incarné, plutôt que d'être resté à l'état d'artifice narratif bien pratique, à l'instar de Rowland Tusk. Il est tout aussi content de retrouver le temps présent du récit pour découvrir de ce qu'il advient de la communauté du révérend John Anderson, et des développements dans la progression inéluctable du conflit à venir. En fait, le lecteur se rend vite compte que son intérêt pour la progression de l'intrigue est secondaire par rapport à celle pour les personnages. Il est un peu désarçonné par le fait que Rowland Tusk ait si vite perdu de sa superbe et qu'il devient craintif devant Angelica, une nouvelle venue mystérieuse, imposant une autorité menaçante, exactement comme Rowland dans le tome précédent. Il reconnaît bien là le savoir-faire incroyable du scénariste puisqu'il se retrouve à prendre fait et cause pour Rowland face à Angelica, alors que cet homme se montre sans pitié pour neutraliser Kyle Barnes, exerçant une pression psychologique sadique, usant de chantage, et n'hésitant pas à faire usage de la force en mettant à profit sa carrure impressionnante. Il finit par se demander s'il doit s'attendre à ce que Kirkman réussisse à établir un même degré d'ambivalence pour Angelica. Il apprécie de retrouver les autres personnages. Kyle Barnes dont l'assurance fluctue continuellement en fonction de ses petites victoires, et la survenance de situations encore plus confuses et dangereuses, Azaceta montrant bien ses états d'esprit passant de la confiance en soi, à la colère, à l'étonnement de l'individu dépassé par les événements, au réconfort apporté par une parole de sa femme Allison le rassérénant. Le révérend John Anderson et sa confiance inébranlable dans sa foi et la bonté du Seigneur, ainsi que sa franchise quant à la marque du diable qu'il porte sur sa poitrine, là encore les dessins font apparaître les émotions correspondantes. Emily la directrice d'école, et son calme professionnel pour répondre aux questions d'Angelica. Malgré la distribution nombreuse, le lecteur se souvient aisément et immédiatement de chaque personnage, de son positionnement social et de son caractère.



Du coup, le lecteur ne s'offusque pas que la situation de la communauté du révérend ne progresse pas rapidement, et que le récit s'attarde à suivre chaque individu, leurs actions n'étant pas coordonnées, étant guidées par des intérêts personnels, sollicitude pour un proche, ou influence manifeste de Rowland Tusk, ou des autres habitants de la ville. Cela peut donner une impression de confusion ou au moins de désordre entre les atermoiements de certains, et l'arrivée providentielle d'autres proscrits dont l'attention a été attirée par les spots d'information sur le siège de la communauté du révérend. Oui, d'un côté c'est bien pratique pour faire augmenter le nombre de proscrits dotés de pouvoir, juste comme les tenants des Ténèbres s'apprêtent à réaliser une attaque en masse. Mais d'un autre côté, c'est logique que la visibilité accrue de la situation attire des individus des deux bords.



Le lecteur se trouve donc embarqué dans cette zone rurale, avec les dessins à l'apparence un peu fruste, pour un contact un peu rude avec les personnages et les environnements, comme si les campagnards étaient forcément moins sophistiqués que les citadins, plus nature. Il est possible aussi d'y voir des émotions moins apprêtées parce que plus intenses, le conflit imminent pesant lourdement sur l'esprit de chacun. Il constate les différents courants à l'œuvre dans cette situation. La volonté dirigiste d'Angelica et Rowland Tusk se retrouve confronté au désordre des proscrits et de ceux qui les entourent, un étrange constat opposant une forme ordonnée de communauté à des élans du cœur d'individus agissant isolément. Mais dans le même, les motivations profondes de Rowland s'avèrent dictées par l'amour et par une forme d'altruisme alors que celles de Kyle apparaissent comme égoïstes, alors que lui aussi souhaite protéger sa famille. Le scénariste a l'art et la manière pour souffler le chaud et le froid, et introduire de l'ambivalence dans une confrontation qui semble pourtant s'apparenter au bien contre le mal. Les exorcismes sont toujours aussi brutaux, au risque et péril des possédés, et ils font peser un poids terrible sur les proscrits, en particulier ceux qui sont mineurs. Alors même que la guerre semble être celle de la lumière contre les ténèbres, les individus des deux camps souffrent et en payent le prix, l'enjeu étant le même dans les deux camps, à savoir survivre. De ce point de vue, cette série continue d'être très déroutante : une dynamique manichéenne du bien (la lumière) contre le mal (les ténèbres), mais une réalité complexe pour les individus qui ne maîtrisent pas la situation d'un bord comme de l'autre, et des conséquences néfastes dans les deux camps, ce en quoi réside la véritable horreur du récit.



Avec le tome précédent, les auteurs semblaient parvenus à un point de non-retour pour les personnages et la situation, mais aussi à une phase où le récit devenait plus prenant au premier degré, et plus riche en termes d'interprétations. Ce septième tome confirme le franchissement de ce palier, avec une histoire de plus en plus haletante, des personnages de plus en plus incarnés et une narration visuelle de plus en plus organique.
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Kill or be killed, tome 1

Rare sont les comics où je mets 4 étoiles. Il faut vraiment que cela me plaise. Je suis tombé sous le charme malsain de cette oeuvre assez introspective qui met en avant un jeune homme mal dans sa peau qui bascule dans l'horreur du métier de tueur. Il croit faire un pacte avec le diable suite à une tentative de suicide avortée. Est-ce seulement la réalité ? La fin de ce premier tome sera assez glaçante.



Oui, je mets 4 étoiles quand une oeuvre le mérite. Je n'ai pas eu besoin de me forcer pour le lire. J'ai éprouvé du plaisir à la lecture car c'est très bien réalisé dans un genre polar sombre. Il y a toute une immersion qui se fait et qui est progressive. Bref, il y a une intelligence dans la mise en oeuvre de ce scénario.



En conclusion, une vraie tuerie.
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Kill or be killed, tome 1

Si le début du comics nous montre une personne sûre d’elle, qui enchaîne sans problème apparent les meurtres, on repart rapidement en arrière pour savoir comment on en est arrivé là et on fait la connaissance de Dylan, toujours étudiant malgré son âge, qui vit en colocation avec un pote à lui qui sort avec sa meilleure amie dont il est clairement amoureux et qui se rend compte que sa vie est quand même plutôt ratée.

C’est au moment où il rate son suicide qu’il se rend compte qu’il n’a finalement plus envie de mourir et c’est aussi le moment où un démon lui apparaît pour lui dire que s’il ne tue pas quelqu’un, lui-même va mourir.



On vit donc avec lui ses hésitations, son incrédulité et je dois dire que, malgré tous ses défauts, c’est un personnage très crédible que j’ai beaucoup apprécié.

A ses côtés, sa meilleure amie Kira est aussi quelqu’un que j’ai bien aimée, bien que son comportement puisse paraître par moment détestable.



On est dans un univers sombre, avec un personnage déprimé et suicidaire qui traîne autour de lui des questionnements pertinents sur la justice et la méchanceté.

En contraste, la luminosité de Kira est presque agressive et les couleurs du comics le rendent particulièrement bien.

On peut aussi se poser la question de la réalité de ce que traverse Dylan, si la mission que lui donne le démon n’est finalement pas une excuse pour qu’il puisse enfin se sortir de son quotidien dans lequel il se trouve enfermé.

C’est un très bon premier tome, qui intrigue et qui interroge, et le fait que la série soit finie en quatre tomes donne envie de s’impliquer pour découvrir le fin mot de cette histoire.
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Fondu au noir

Ce pavé de 400 pages reprend les douze épisodes de « The Fade Out », la dernière saga en date des auteurs de « Criminal », « Fatale » et « Incognito » : le scénariste Ed Brubaker et le dessinateur Sean Phillips.



Le récit se déroule en 1948 à Hollywood, au lendemain de la seconde guerre mondiale et en pleine période du Mac Carthysme. L’histoire débute dans un des bungalows de Studio City, où Charlie Parish, scénariste en manque d’inspiration, se réveille dans la baignoire avec une sacrée gueule de bois. A quelques mètres de lui, gît le corps sans vie de Valeria Sommers, la star du film dont il écrit le scénario. Lorsqu’il découvre que le crime a visiblement été camouflé en suicide, il cherche à découvrir toute la vérité sur ce drame…



Ed Brubaker était déjà une référence au niveau du polar noir, mais en nous plongeant dans les coulisses d’Hollywood en compagnie d’un héros qui s’attaque à ce monstre du cinéma tout en affrontant ses propres démons, il démontre une nouvelle fois tout son talent. Usant d’une narration en voix-off dont il a le secret, il nous plonge au cœur de ce monde beaucoup moins glamour que prévu, au plus près d’un personnage principal délicieusement tourmenté.



Au-delà de l’enquête policière, Ed Brubaker lève donc le voile sur univers sombre, gangrené par l’alcool, le sexe, la corruption et les jeux de pouvoir, où les femmes ne disposent pas encore du hashtag « metoo » et où de nombreux auteurs sont victimes de la chasse aux sorcières communistes. Le tout étant rehaussé par le dessin expert d’un Sean Phillips au sommet de son art et par la colorisation experte d’Elisabeth Breitweiser, je ne peux que vous conseillez vivement ce roman graphique que vous retrouverez d’ailleurs au sommet mon Top comics de l’année !
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Fondu au noir

Hollywood, au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale.



Charlie Parish est scénariste. Depuis qu’il est revenu du front, Charlie n’est plus le même. Une part de lui-même est resté là-bas, incapable d’accepter les horreurs dont il a été témoin… incapable d’imaginer un lendemain à sa vie. Auteur renommé, il a déjà écrit les scénarii de plusieurs films et a été récompensé pour cela. Mais c’était avant la guerre… Depuis, il est incapable d’écrire plus de deux mots d’affilée. Ses textes, c’est Gil qui les écrit. Gil Mason est celui grâce à qui il est entré dans le métier, celui qui lui a tout appris. Mais Gil est communiste et depuis la terrible « chasse aux sorcières » cet homme est devenu un paria dans le microcosme d’Hollywood. Les deux amis se sont mis d’accord : Gil écrit les textes et Charlie les signe. Leurs faiblesses font leur force.

Leur fragile équilibre est quotidiennement mis à mal par leurs frasques d’ivrognes. Tous deux ont déjà sombré depuis longtemps dans l’alcool et le décès soudain d’une jeune actrice en pleine ascension, Valeria Sommers, est le grain de sable qui va gripper la machine. Val était l’actrice principale du dernier film de Charlie et sa mort survient pendant le tournage du film. Charlie est le premier à découvrir le corps de Val ; lorsqu’il découvre des traces de strangulation sur le cou de sa collègue (et compagne), il prend peur et quitte précipitamment les lieux du crime. Le problème, c’est que Charlie n’est pas fichu de se rappeler ce qui s’est passé durant la soirée.

L’intrigue est riche, très riche. Dans un contexte social délétère de chasse aux sorcières, de faux-semblants, de profit et d’industrie cinématographique, ce thriller psychologique prend plaisir à torturer son personnage principal. Ce dernier, un homme brisé par son expérience au front, lutte chaque jour pour garder un semblant de dignité et sauver les apparences. Mais derrière le masque, il n’a plus de libre-arbitre, plus d’ambitions [... lire la chronique intégrale sur le site : https://chezmo.wordpress.com/2018/01/17/fondu-au-noir-brubaker-phillips/]
Lien : https://chezmo.wordpress.com..
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Kill or be killed, tome 1

Jusqu'à lire Fondu au Noir (The Fade Out) il y a peu, je n'avais jamais véritablement accroché à la plume de Brubaker. Et puis est venu Fondu au Noir et la grosse impression alors laissée. 2 mois plus tard, je vois passer un post Insta du super compte la_galaxy_du_comics et je ne me retiens pas de lui demander quel est son comics préféré du duo Brubaker/Phillips. La question est vite répondue: Kill or be Killed (sans oublier Criminal). Parfait, c'est noté !



Et que vois-je peu après dans les rayons de ma bibliothèque favorite (le Sapin Vert à Bischheim si jamais il y a des Alsaciens par ici) ? Les 4 tomes de Kill or be Killed natürlich !



Cela raconté, on peut passer à la phase présentation de l'œuvre. Juste après The Fade Out, KobK (chez Image Comics) est sorti aux US sur une base mensuelle entre 2016 et 2018. Le tout pour 20 épisodes. En France, Delcourt les a sorti en 4 tomes, sur l'année 2018 et début 2019.



Bon, on sent un peu le côté comics mensuel avec l'effet "que va-t-il se passer après ?" mais ça reste fin et pas abusé comme on peut souvent le voir. Mais ces sorties mensuelles ont par contre un effet que j'ai moins apprécié, à savoir de légères redondances dans la narration. Mais bon, il est facile dépasser ça pour se concentrer sur tout ce qui fait la force de ce comics : la profondeur des personnages, de leurs histoires personnelles, une romance très attachante et réaliste, ou encore la violence très réelle et sans le côté cliché ou même glamour qu'on peut voir parfois.



Sinon, c'est toujours assez fascinant les histoires de self-made justicier (car oui on est là-dessus). Ici, pas d'histoire classique de vengeance à la Punisher, mais quelque chose de plus complexe avec l'exploration de thèmes autour du mal-être sociétal ou des blessures familiales. Le tout accompagné d'une puissance narrative intéressante et d'une jolie profondeur scénaristique.



Malgré ça, je pense que ce comics aurait eu plus de force et d'impact s'il avait été conçu en mode one-shot. Mais peu importe, il est aussi très bien comme ça. Et puis finalement, ce format lui donne un petit charme.



En tout cas, on pourra dire que j'ai bien fait de suivre les conseils avisés du propriétaire de ce compte Insta, puisque j'ai enchaîné (dévoré même) les 4 tomes sur une petite journée.



Je mettrai donc un 8,5, et je pense bien les rajouter un jour à ma collection perso 📚



Prochaine lecture du duo : les Criminal
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Fondu au noir

Jusqu'à présent, je n'avais jamais tout à fait accroché aux lectures du duo Brubaker/Philips. Elles ont pu être tantôt agréables (Pulp) tantôt plutôt cool (Un été criminel). Mais là, on est sur autre chose, là on est sur du très lourd !



A travers ce gros et joli pavé de 400 pages, Ed Brubaker et son acolyte préféré nous emmènent dans le Hollywood d'après-guerre (fin 40's). L'époque de Clark Gable (seul vrai acteur faisant un mini passage dans le livre), de Cary Grant, Audrey Hepburn ou autres James Stewart. L'époque aussi du maccarthysme et de la chasse aux sorcières. Et enfin, une drôle d'époque pour les femmes du milieu (et d'autres aussi…) pour qui les choses n'étaient pas rose tous les jours…



On rentre dans le bain dès l'introduction, avec Brubaker nous racontant son oncle, un scénariste très réputé durant la golden area d'Hollywood. On y apprend qu'à cette époque, il y avait la liste des 10 d'Hollywood: 10 personnalités du cinéma blacklistées car accusées de pencher côté bolchevico-gaucho. Encore une fois, drôle d'époque, je ne comprendrai vraiment jamais le discours du "c'était mieux avant" 😁



En tout cas, voir Brubaker raconter comment son oncle et tante se retrouvent d'une certaine façon mêlés à tout ça, m'a immédiatement rappelé Jason Aaron qui fait la même chose (mais avec son cousin) à la fin de The Other Side. Deux histoires de famille qui ont inspiré les auteurs, pour deux réussites littéraires.



Car oui, The Fade Out (titre VO) est une franche réussite. On se retrouve dès les premières pages happé par ce monde clinquant, flamboyant mais aussi nauséabond. On suit rapidement une multitude de personnages mais c'est fluide et toutes ces personnes croisées ou rencontrées par le protagoniste (un scénariste impliqué dans la chasse aux sorcière tiens tiens) profitent toutes (ou quasi) d'un super caracter design.



Et que dire de l'intrigue ? Quand on est fan comme moi de polar noir, c'est un vrai régal. Rien de trop téléphoné ni de trop conventionnel. Alors, ca reste tout de même assez classique dans l'approche, mais la profondeur des personnages et de l'intrigue nous plonge dans un monde dont on ne ressortira que quelques minutes après avoir tourné les dernières pages.



Et c'est alors, en fin de lecture, que j'ai tout de suite pensé à l'excellent film de Robert Altman sur les vices d'Hollywood avec le génial Tim Robbins en tête d'affiche, The Player. Si l'occasion s'en fait, ne surtout pas se priver de le regarder.



Prochaine lecture du duo: les Sleeper ou les Kill or Be Killed

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