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Critiques de Felipe Hernandez (11)
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Virtual

Jacob, expert cryptographie élabore les portraits- robots des suspects à la police criminelle. Un psychiatre consulté dans son adolescence lui a diagnostiqué une apophénie: il peut voir des plans et une cohérence là où la plupart des gens ne voient qu'anarchie. Comment expliquer la nature des altérations dont souffre sa perception de la réalité ? Est-ce un don ou un trouble profond ? Comment le vérifier ? D'autant plus qu'un crime atroce vient d'être commis, et le portrait robot qu'il esquisse de la victime ne lui est pas inconnue. Un mot « Zairaz » laissé sur les lieux du crime que lui seul a pu percevoir grâce à son don va le rendre encore plus perplexe alors que surgit dans sa poche un objet mystérieux , une manifestation de l'irrationnel qui va l'entraîner dans la spirale d'une inquiétante infiltration du réel par le virtuel…..Élusions/ objets migrés/ registres d'Akkash/ avatars / vies antérieures/ un GPS mémoire du futur/ une chanson qui ouvre un trou dans l'espace ?……Un jeu face à l'Inconnu , un Inconnu très en avance sur nous, simples mortels. Et si notre monde même était en voie de devenir un jeu virtuel, vu que l'homme commence à perdre le contrôle sur les intelligences artificielles qu'il créait ? La preuve, « Facebook files : Dans des documents internes de l'entreprise, ses ingénieurs avouent leur incompréhension face à un code informatique aux effets imprévus, qui fait du réseau social une machine complexe, difficile à maîtriser »( le Monde 26/10/2021).



Chez Fernandez rien n'est jamais dans les normes, tout est en marge ou hors des règles habituelles. C'est une littérature dense , labyrinthique et , où on s'enfonce peu à peu à la suite d'un personnage qui lui-même pris au dépourvu, pris de vertige devient captif d'une spirale où tout est suspect. C'est à la fois délicieux et angoissant car la tension est toujours élevée, et on n'a aucune idée d'où on n'en sortira. Ici le sujet traité est d'autant plus angoissant que ça traite de mondes virtuels et des trappes de l'informatique quantique, dont les références de base est notre Terre , « ..curieux que dans Terra personne ne se demande pourquoi il n'y a pas eu une seule révolution qui se termine bien. Pourquoi tout est-il pathétique et injuste ? Pourquoi même les idées intelligentes et mesurées sont-elles toujours dégradées et utilisées par des démons pour faire le contraire ? …Terra n'est rien de plus qu'un jeu et un laboratoire pour nous. Comment pourrait être réelle une chose aussi chaotique et aussi stupide ? » . Un livre complexe à double fond, voir triple, où le virtuel en altérant nos perceptions de « la réalité » change les donnes d'un monde et de ses valeurs considérés comme acquises. Les limites de la raison imprécises effacent les frontières entre le bon sens et la folie, à mesure que les mesures de la loi se font plus étroites……absolument déroutant. Fernandez joue avec nous lecteurs. Un jeu où il nous donne de nombreux indices qu'il faut suivre attentivement pour trouver la sortie, si sortie existe 😁, vu que les univers virtuels et le réel s'emboîtent comme des poupées matriochkas , « Il se peut qu'Akkash soit le monde réel et notre réalité un jeu …. ». Il brouille encore plus les frontières entre virtuel et réel insérant entre les lignes les vérités de notre monde réel , comme l'insatiable désir de pouvoir de l'homme, sa nature poreuse à la corruption , et s'arrête sur les notions de vivre, réalité, vérité . Qu'est-ce-qu'elles signifient finalement ? Est-ce uniquement une question de perspective ? Pas toujours facile de suivre ses argumentations et ses univers mathématiquement possible aux références réelles et expliquées en notes de bas de page . Un challenge formidable d'un auteur espagnol formidable, peu connu sur Babelio, dont je conseille fortement aussi ses deux autres romans, « La Partition » et « La Dette ». Un écrivain et un livre passionnant !





« Nous pouvons traquer le trafic de données dans le cyberspace mais pas dans le monde réel , c'est logique…. »

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Eden

Kafka et la tour de Babel

Un livre bien étrange, insaisissable, à la « morale » pas tout à fait claire…

Une ville tentaculaire, aux milles langues et visages, dans un futur indéterminé, low-tech (il va falloir s’habituer à ces projections comme nettement plus crédibles que les traditionnelles prospectives ultra-technologiques, n’en déplaisent aux nombreux fans de SF avec vaisseaux et trucs qui pètent dans tous les sens…).

Une administration toute puissante et sans visage.

La ponctualité comme valeur cardinale.

Plus une seule machine.

Et cette tour gigantesque au milieu de la ville, en construction depuis des générations, sans que l’on se souvienne de son utilité, mais dont l’érection prévaut à toute chose.

Le héros, un traducteur surdoué, au prise avec la féroce absurdité du pouvoir administratif.

Une sorcière* (voir deux), et le désir charnel inassouvi.

La parabole de la pomme de la connaissance, au sein du jardin d’Eden.

Une lecture mâchoire serrée, avec l’irruption tardive de la violence comme solution.

Une écriture belle et efficace, beaucoup d’idées géniales, mais de vives réserves sur le fond, surtout après avoir autant souffert avec le héros… peut-être pour justifier la folie de l’Homme… ne le conduisant autre part que nulle part…

Le genre de livre qui remue…



*navré julspirit, je m’absoudrai par un atelier d’éducation populaire…



P.S. : Merci à Bookycooky pour la découverte de cet auteur



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La partition

Ça commence comme ça. Un jour comme un autre, la tasse de café fumante à portée de main, vous avez un nouveau message dans votre boîte de réception. Idil, puisque c'est elle, vous propose la lecture d'un ouvrage dont elle regrette le peu de publicité et sur lequel elle semble attendre vos mots comme d'autres les bons offices d'un tailleur méritant. Il y a dans son invite quelque chose de gourmand et de comminatoire à la fois qui vous intrigue. Et comme vous l'avez entraînée un peu malgré elle dans une lecture qui n'aura pas eu l'heur de l'enchanter complètement, vous vous résolvez, amusée, à relever le gant. C'est ainsi que La Partition est entrée dans votre vie.



José Medir souffre d'hyperacousie. Comprenez qu'il entend chaque son, chaque trépidation, chaque vibration comme si elle devait prendre une importance singulière. Que chaque murmure, chaque onde à peine émise lui parvient au coeur du cerveau à la manière d'un impératif. Et que ces perceptions inouïes dessinent en lui un chaos sonore fait de superpositions successives, d'échos n'en finissant pas de se répondre et de mourir, auquel pas une de ses cellules n'est dispensée de rendre des comptes. Sa vie est un enfer insensé et tonitruant qui prend des allures dantesques lorsque, en sus de tout cela, se déploie la migraine. Car alors, ce sont des vagues de couleurs ou de formes, des hallucinations sonores ressemblant à des prémonitions, l'abolition des frontières de temps et d'espace en un remugle informe, un vertige au sein duquel l'existence de José n'est condensée que dans la douleur qui le transperce, une digestion du monde dont procèdent et où se perdent ses sens monstrueusement exacerbés. Déchainement absurde d'une tempête intérieure mettant bas tout repère. Vous compatissez d'autant de que tout ceci vous est très familier.



Doté d'une oreille absolue, de quelques talents en composition, José espère alternativement trouver son salut dans le silence ou dans l'orchestration qui domestiquerait cette violence, lui donnerait une perspective, transformerait ces bruits obsédant en musique. Parfois, dans la compagnie de ceux qu'il aime, il s'apaise au contact de leurs bruits, de la vibration particulière qu'émet leur corps au bercement duquel il peut alors s'apaiser, sombrer. Ainsi de Julia, la jeune femme dont il partage la vie.



Quelque part en Espagne, dans un temps indéterminé mais pas si lointain, voici donc José, professeur de piano pour quelques heures et quelques sous, ruiné par un père désormais défunt, écorché vif sans grandes perspectives ni grands desseins.



Vous voilà prête. L'incipit à présent : « Sans son extrême sensibilité aux bruits, José Medir n'aurait pas été pris dans les filets de Ricardo Nubla. En réalité, tous les événements de sa vie avaient été déterminés par un sentiment d'impuissance face au chaos sonore qui l'environnait. Et Ricardo Nubla n'était qu'un élément de cette réalité hostile qu'il avait tenté sans succès de considérer comme de la musique. »



Parfois, les notations musicales sont comparées dans ce livre à une toile d'araignée. L'image vaut pour l'ensemble du roman et le dispositif qu'il tisse autour de la mouche que vous êtes. En deux lignes, vous avez tout. José et Nubla. le pacte faustien qui les liera et la raison fondamentale qui y présidera. Ambitionner de faire du chaos de la musique.



La mise en place se fait in medias res : José se dirige vers la maison des Broch où il donne ses cours et trouve une chambre silencieuse dans laquelle se reprendre et composer un peu. Arrivé aux abords de la propriété, il se fait sauvagement mordre à la main par Néron, le chien de la famille. Néron l'incendiaire. Cela comptera et inscrit déjà sa petite musique dans votre inconscient de lectrice.



Mais ne vous laissez pas emporter dès à présent par ces chants tentateurs, restez donc encore un peu dans la rationalité des faits avérés et l'exposition objective de la situation. José donne des cours de musique aux filles Broch. Leur mère, Greta, fait des recherches sur un compositeur contemporain de Bach qui serait parvenu à transcrire l'ensemble des sons en musique. Leur père, Ernesto, est dangereusement ombrageux. Autoritaire, alcoolique, joueur et, partant, en phase de ruiner les siens.



Et Nubla ? C'est le directeur du Conservatoire où José a fait ses études. Un homme dont il n'avait pas compris le pouvoir avant d'entendre pour la première fois « la voix modulée, charnelle et riche de secrètes vibrations ». A l'entendre, José sait que Nubla est bien cet homme à la morale peu sûre, aux intentions secrètes et efficaces, cet homme dont le réseau d'influence dépasse de très loin le seul conservatoire pour tisser sa toile dans les larges cercles de chefs d'orchestre, interprètes mondialement reconnus, compositeurs de renommée internationale. Aujourd'hui gérant de l'Auditorium de la ville, Nubla en fait la programmation, fait et défait les réputations, les places dans les choeurs. Dans le petit monde de la musique, Nubla est un redoutable démiurge.



Il semblerait qu'il s'attache pour le moment à Irene, une amie d'enfance de José dont la beauté physique complète admirablement la voix idéale. Irene est la perfection faite femme, la perfection faite son. Et lorsque José la revoit après des années, dans l'ombre menaçante de Nubla qui peut tout, elle mène une carrière prometteuse de soliste. Ca ne durera pas.



Irene a pour frère Gregorio, le meilleur ami de José dont ce dernier n'a pourtant plus de nouvelles depuis deux ans. Silence inquiétant et énigmatique. Acculée, Irene ne voudra jamais rien dire. Il serait en voyage. Il serait indisponible. Il ne voudrait voir personne. Silence, obscurité et mystère.



Voilà, le paysage se dessine et vous êtes prise dans ses lignes. Reste le pacte. Nubla convoque José et, manifestant une connaissance quasi surnaturelle de sa situation financière, sentimentale, de chacune de ses habitudes. Omniscient. Ce serait facile de résister, rien n'est encore lié. Mais Nubla est un être magnétique. Puissant et déterminé.



« Il s'agit de composer une oeuvre, déclara-t-il. Mais pas n'importe quelle oeuvre, bien sûr, plutôt une sorte de portrait musical. » José n'est pas sûr de comprendre mais décèle derrière la commande une faiblesse de Nubla. C'est ce qui le perdra : cette aspiration à se confronter à la puissance magistrale pour en exhiber la fêlure. Reste que nous n'y sommes pas. Pour le moment, il s'agit d'expliciter. « Je crois que tu n'as pas compris. Il ne s'agit pas de simple représentation. Je parle de l'âme des choses. Je parle d'exprimer l'âme d'un être à travers la musique. – C'est très parlant, dit José. C'est là la prétention de tout musicien. – Tu ne comprends toujours pas. Je parle de mémoire et d'immortalité. La musique et ses rythmes sont le squelette même de la mémoire. Si quelqu'un avait assez de clairvoyance et de talent pour appréhender le rythme d'un être et le transformer en harmonie, il transformerait cet être en musique. »



Et voilà. C'est scellé. Chercher à rendre l'être de Nubla dans une composition qui le saisisse et lui confère une immortalité. Faire s'abolir le temps, l'espace et les limites du corps pour rendre l'être dans l'harmonie d'une phrase musicale l'essentialisant. le défi a trop à voir avec les hallucinations de José dans les moments où l'hyperacousie le martyrise, va trop chercher du côté du pouvoir et de la transfiguration du périssable en éternité pour que José veuille même s'y opposer. Sa résistance sera d'un autre ordre. Durant tout le temps où Nubla le contraindra à composer, José cherchera à honorer le contrat au plus près de sa vérité, quoi que celle-ci expose de médiocre ou d'honteux chez son commanditaire. La vérité n'a rien d'une hagiographie.



Les semaines passent. le roman tisse sa toile autour de José. Les personnes dont il est proche subissent l'influence maléfique de Nubla sans qu'il soit jamais possible de réduire leurs attitudes à cette seule présence. Impalpable, obstinée, la volonté de Nubla orchestre le monde de José, transformant Julia, Irene et les autres en utilités, souillant leur être au nom d'anciennes douleurs, faisant de leur présent des réminiscences qui ne concernent que lui. Par quels ressorts est animé ce marionnettiste virtuose ? Voilà la question à laquelle José est sommé de répondre. Dans une urgence scandée par le rythme des catastrophes et des ravages qui s'additionnent. Dans le sacrifice tragique et mirobolant de tout ce qui n'est pas l'avènement de cette composition.



C'est donc une enquête que La Partition, une course effrénée dans un labyrinthe dont les parois sont faites de passé et de présent, de chair à vif. Ponctuée d'incendies, de rendez-vous au milieu de la nuit, de péripéties incessantes, de révélations aux conséquences sanglantes, c'est une fresque très cinématographique, hallucinante et dangereuse qui obsède le lecteur et ne le lâche pas.



« Il reprit son travail en redoublant de courage. Il posa à nouveau ses doigts sur les touches de piano et, très doucement, comme s'il craignait que les sons puissent se retourner une nouvelle fois contre lui, il pénétra dans le labyrinthe tissé par cette phrase inconsciente dans laquelle il devinait déjà le souffle de Nubla. Sa propre notion de la course du temps changea et, en un certain point, il eut l'impression que son existence à Punta Negra s'écoulait du futur vers le passé comme si ses actes, ainsi que la musique qu'il écrivait, n'étaient que des fragments arrachés à un temps parfaitement immuable. (…) car chaque note renfermait en elle la semence du moment où elle avait été écrite et ces moments-là continueraient à croître à l'intérieur de lui comme les plantes d'un jardin sauvage, jusqu'à ce qu'il ait terminé sa composition. »



Dans certaines lectures, on devine les amis qui s'en enchanteront. Vous pouvez tous lire la Partition, bien entendu. Mais sans doute Chrystèle, Caroline, Sandrine, Nico, Doriane, ce cher Pat y seront emportés plus que quiconque. Berni, s'il accepte le sort tragique des quelques héroïnes de ce sombre roman, pourra s'y perdre aussi. Anna ? Anna, peut-être, enfiévrée alors par la composition du livre, l'envie de surplomber enfin ces vagues puissantes de désir et de mort, d'en tirer quelque chose qui fasse sens. Attention toutefois, pour Anna et Nico au moins, il y a des chiens. Et des combats.



Voilà, vous avez répondu à l'appel d'Idil. Après vous y être perdue, entraînée par la puissante attraction de ses phrases et de son rythme, être un peu agacée parfois par le systématisme de certains de ses procédés, vous avez livré ici quelque chose en hommage à ce roman brillant et habile qui, vous l'espérez, trouvera grâce à ces quelques mots, de nouveaux lecteurs à hanter.

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La Dette

Un roman terrible, kafkaïen,une métaphore de l'aliénation de l'obsession.L'homme parfait qui veut un monde parfait sombre très vite dans la déchéance.
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La partition

Voilà, je viens de terminer ce livre qui m'a été conseillé par Bookycooky.



Il est étonnant qu'un auteur contemporain au souffle aussi puissant (Felipe Hernandez est né à Barcelone en 1960) ne soit pas plus souvent évoqué : les oeuvres ont du mal à traverser les frontières, surtout les oeuvres exigeantes.



Le puissant directeur de l'auditorium de Santa Ana et propriétaire d'Arcangel, terrain boisé en bord de mer, Nubla, confie à un jeune musicien, José, la composition d'une partition. Au fil de leurs rencontres, les exigences du maître d'oeuvre se font de plus en plus nébuleuses (Nubia signifie "nuageux") et capricieuses, jusqu'à devenir inquiétantes.



José est en proie à de violentes migraines qui s'annoncent par des auras semblables à des états de transe, au cours desquels les sons subissent une distorsion cyclonesque : dans la furie de ses orages intérieurs, José compose dans un état hallucinatoire presque continuel tandis que son monde s'effrite autour de lui : ses amours de défont, son meilleur ami disparaît, un garde-chasse incendiaire dresseur de chiens de combat fait régner la terreur.



Les personnages du livre sont tous marqués par un destin qui les livre à la souffrance et à la descente aux enfers. José est aspiré par un vortex destructeur qui le blesse dans sa chair et absorbe son énergie créative : parviendra-t-il à mener à bien la mission qui lui a été confiée par un Nubla de plus en plus incontrôlable ?



Les deux thèmes majeurs du roman, la création artistique et la recherche de l'immortalité, s'entrecroisent avec maestria.



Felipe Hernandez livre de magnifiques méditations sur la condition humaine ; tous les personnages et les évènements s'y correspondent avec une amplitude et une imagination diabolique... car le défrichage de terres artistiques inexplorées comporte d'épouvantable dangers pour le corps, l'esprit et l'âme. L'artiste risque tout bonnement de disparaître dans une brèche métaphysique où temps, espace et sons se tressent en une corde sanglante qui pend sur l'abime.



Et si tous les personnages de ce récit de titan n'étaient qu'une seule et même personne : le découvreur de terres inconnues ?



"La partition" est fortement apparentée au Faust I de Goethe et au Docteur Faustus de Thomas Mann.





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Virtual

Un roman exigeant qui m'a donné le vertige face à tant de maestria. Des mondes imbriqués l'un dans l'autre, on passe et repasse du réel au virtuel, et du virtuel au réel, tant et si bien que le lecteur, tout comme Jacob, ne sait plus bien où est le vrai.



C'est mon 2ème roman de cet auteur, après Partition, et toujours autant d'intelligence chez Hernandez. Un vrai plaisir de lecture, mais qui peut

demander du temps et de l'énergie. Normalement, si vous lisez cette critique, ce n'est pas le hasard... Vous devriez donc être parfaitement armés pour l'aventure Virtual... Ce ne sera qu'une question de tempo!
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La Dette

Encore un beau roman métaphysique de Felipe Hernandez que j'ai lu quasiment d'une traite dans le week-end.



A travers les allégories des dettes d'argent et de l'usure, l'auteur traite du souvenir et de la culpabilité.



Comme dans "la partition", les personnages peuvent être interprétés comme le déploiement des diverses consciences qui s'agitent en nous : le prêteur, l'usurier, l'endetté, le repenti, le justicier, l'homme de main, l'aveugle, le mafieux, le Christ.



La subjectivité est soumise aux flux de souvenirs incertains et l'identité du sujet se dérobe.



Las de suivre les allées et venues des millions de fourmis qu'il a créées, Dieu tombe malade.
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La partition

Livre lu calmement sur quelques jours avec un grand plaisir.



Alors certains veulent résumer l'univers à une équation, dans ce livre, les protagonistes de ce roman tentent plutôt de traduire la vie d'une personne sur une partition musicale. Traduire des émotions, un parcours de vie, une personnalité à travers une phrase sonore, voilà qui est intéressant, et sans doute plus facile si on est doté d'une oreille absolue comme le héros José.



Si la composition musicale (et même artistique au sens large) est un thème majeur, ce livre ne peut se résumer à cela. Il comporte des intrigues, de la violence, de l'amour... bref un cocktail que j'ai trouvé bien dosé.



Dans ce livre, José souffre de migraine avec aura... cela m'a interpellé étant moi même migraineux, et neurologue spécialisé en céphalées! Je suis quasi convaincu que l'auteur est lui même migraineux car il traduit bien la violence de la douleur ainsi que l'aura visuelle en tant que telle. Je trouve peut être qu'il a tendance à déformer l'aura (un comble!) sous le prisme artistique, quasi à l'idéaliser (les hallucinations visuelles migraineuses induisent parfois chez José une certaine vision de sa composition musicale), alors que le pauvre gars devrait être malade comme un chien dans son lit:) En lisant cela, je me disais : mais prends un antalgique bon sang! Va voir un neurologue! Essaie au moins quelque chose au lieu de rester prostré des heures voire des jours.



Vous l'aurez compris, la migraine est également importante dans ce livre!
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La Dette

Ceci est déjà le 3ème roman de cet auteur espagnol que je lis, après La Partition et Virtual.



Et je peux continuer à proclamer combien je l'apprécie!



La seule critique du livre sur Babelio est de Bookycooky qui m'a déjà fait découvrir tant de livres... Et je dois bien avouer qu'elle a tapé dans le mille en y trouvant du Kafka.



Une dette sans fin avec une spirale de soumission volontaire, de volonté d'amener les autres à la perfection, une mémoire phénoménale, tant de raison menant finalement à la folie, à moins que cette folie ne soit l'élément déclencheur initial? Comme souvent chez Felipe Hernandez, toutes les clés ne sont pas dévoilées, nous laissant interpréter comme bon nous semble ce qui est en filigrane.



Une lecture très fluide qui participe pour beaucoup au plaisir de ce livre (ce n'était pas forcément le cas des 2 autres romans de l'auteur que j'ai déjà lus).
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Virtual

Après plusieurs mois à avoir lorgné dessus, je me suis finalement décidé, un jour, en le trouvant en rayon dans une superbe librairie. Etait-ce le fruit de l'attente, d'avoir convoité ce livre pendant si longtemps, ou la force propre du livre qui se manifestait à son toucher? Je ne sais pas. Mais dès que j'ai senti son poids dans mes mains, j'ai ressenti quelque chose de fort, comme si quelque chose me transperçait...

J'ai depuis quelque temps maintenant une grande appétence pour les auteur.es hispaniques (Eva Baltasar, Miquel de Palol, Jaume Cabré en tête), et découvrir un nouvel écrivain est toujours un moment particulier dans la vie d'un lecteur, surtout si celui-ci s'inscrit dans un processus plus vaste, et encore plus s'il vous procure une décharge étrange lors de sa rencontre.



Que dire de Virtual? On pourrait en dire beaucoup, on pourrait se perdre en résumé, en conjectures, en analyses. Mais je préfère vous partager seulement mes ressentis sensoriels à sa lecture.



'Virtual' est un roman très déstabilisant. Et j'aime ce genre de roman! Ici, il ne faut pas voir le terme 'déstabilisant' pour son aspect négatif : vos fondations ne vont pas s'écrouler, rassurez-vous. Mais vous le savez aussi bien que moi, un lecteur, même ouvert à la discussion avec ses proches, aux conseils de son libraire préféré, ou aux recommandations médiatiques, s'enferme un peu dans ses choix de lecture. Son 'horizon d'attente' ne change que très peu, car on choisi souvent ses livres en fonction de critères récurrents et de plus en plus fins avec le temps : la maison d'édition, l'auteur, les thématiques, les enjeux etc. C'était mon cas pour ce livre : j'adore ce que publient les éditions Verdier, l'un des joyaux de notre édition française ; je m'intéresse à la littérature espagnole ; et d'après la quatrième de couverture, ce roman semble mêler des éléments de science-fiction (altération de la réalité) et de thriller psychologique (chasse à l'homme) ; enfin, c'est un joli pavé. Et bien malgré ça, j'ai été pris à la gorge, sans m'y attendre, car ce que j'ai lu a dépassé vraiment toutes mes attentes.



'Virtual' est un piège, une toile d'araignée qui se referme petit à petit sur vous, subrepticement. A sa lecture, j'ai ressenti les mêmes émotions, extrêmement fortes, qu'à la lecture du chef-d'oeuvre 'Vilnius Poker' de Ricardas Gavelis. 'Virtual' a quelque chose d'angoissant, mais au sens métaphysique. Felipe Hernandez est un sacré auteur pour réussir à transmettre cette peur du vertige, car c'est l'inconnu qui vous saute à la gueule dans ce livre. Ici le lecteur ne suit pas Jacob Sender, non, il est projeté en lui, tout comme Jacob va être projeté, recraché, puis absorbé dans ce monde virtuel : le lecteur est assailli d'une délicieuse anxiété, car nous lisons pour ça, pour vivre des choses incroyables et imprévisibles. 'Virtual' est de ces roman labyrinthique qui vous font perdre pied avec la réalité.



Vous l'aurez compris, j'ai adoré ce roman. Je le chérie pour m'avoir poussé dans mes retranchements et fait ressentir plusieurs fois un vertige métaphysique, m'ouvrir à des questionnements nouveaux. C'est un grand livre, essayons de le mettre entre quelques bonnes mains pour qu'il vive.
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Virtual

Et si la Terre était un refuge pour psychopathes, un endroit virtuel où exercer leurs vices et cynismes ? Virtual roman diablement intelligent, documenté assez pour jouer sur le langage de ses références, s'empare des probables et possibles pour nous entraîner dans des plurivers (une série d'univers parallèles mathématiquement possibles) ouverts par des élusions, des failles dans le temps et la continuité de soi. Felipe Hernandez happe son lecteur dans un jeu de doubles, entre ressemblances et dissemblances, entre jeux vidéos et énigmes métaphysiques, entre déchiffrement et ignorance.
Lien : https://viduite.wordpress.co..
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