Citations de Flore Vesco (275)
Adrian releva la tête et la regarda. Elle se perdit dans ses yeux : embrumés, lointains, libérés, enivrés, incroyables. Il laissa retomber sa tête sur l'oreiller.
- Tout de même, répondit-il. On ne sait jamais. N'hésitez pas à... continuer à chercher... par là... à explorer... plus avant.
Il n'avait même pas relevé le "milord" narquois.
Alors Salima explora plus avant.
-Et le petit pois ?
-Le petit pois, voyons ! Vous pensez bien qu’il n’y en avait pas plus que de citrouilles et de haricots magiques. Ou de bébés qui germent dans les roses et les choux. Cette manie de masquer la réalité derrière des légumes ! Ma douce, le conte du petit pois sous le matelas, c’est une soupe qu’on fait avaler aux fillettes innocentes.
Serrée contre lui, Sadima lui conte les hauts et bas de sa journée. Ils discutent longuement, bouche contre bouche. Elle trouve plus facile de se confier quand le souffle des mots n'a aucun chemin à faire, et se dépose directement entre les lèvres de son confident.
Contre toute attente, Louis Pasteur faisait un thé tout à fait buvable et était capable de mener une conversation normale. Constance lui demanda des nouvelles de son père et se fit décrire leur vie dans le Jura. Louis parla de son enfance. Constance retint qu'il avait commencé très tôt à mélanger différents produits chimiques, et qu'il avait troué, brûlé, taché ou fait exploser une grande partie du mobilier familial dès son plus jeune âge.
– À dix ans, j'ai formulé ma plus grande déduction scientifique : le résultat de toute expérience, c'est que celle-ci met toujours votre maman très en colère.
– Ah ! En ce cas, prenez donc une tranche de rôti froid.
– Non merci. Les lipides sont oxydés, et la polymérisation des glucides est trop prononcée, comme en atteste la dose importante de mélanoïdine.
– Pardon ?
Cette fois, Constance ne suivait plus.
– Il est trop cuit, traduisit Louis avec un clin d'œil.
– Ah oui ! Vous avez raison. Et dites-moi, monsieur Pasteur, comment se portent vos parents ? interrogea Constance, qui se demandait jusqu'où le jeune homme pouvait tenir ce type de conversation.
– Admirablement, je vous remercie. Ils maintiennent tous deux une parfaite homéostasie. Leurs systèmes nerveux autonomes, leurs systèmes endocriniens et humoraux, leurs rythmes cardiaques et ventilatoires, leurs miction et sudation, et leurs pressions artérielles, sont tous parfaitement régulés.
Laissez les jeunes filles danser et, parées ou dévoilées, circuler dans la cité, ou bien il pourrait vous en coûter.
Cette prochaine encontre lui donnait bien du tracassin. Et pourtant, au fond d'elle-même, elle se réjouissait d'y aller. L'envie de revoir l'étrange démon, le défi et le désir d'en découdre, la faisait vibrer.
Il ramassa la mèche de cheveux de Mirella, que le tout premier rat avait sectionné. Il l'a pris entre ses doigts. Dans sa paume, une flammèche bleue apparut. Les cheveux se tressèrent et s'enroulèrent autour de son poignet.
Peest la trouva ravissante.
Il se félicitait de l'avoir épargnée.
Elle s'avança, l'œil au guet, le nez au vent et l'oreille aux écoutes. Elle marchait prudemment, afin de ne point poser son pied nu sur un rat ou la main d'un cadavre.
Elle craignait que, n'obéissant pas à la cloche, le bourgmestre, délirant de soif, les fasse pendre, maintenant ou plus tard, s'ils réchappaient à l'épidémie.
Il est des vérités sur l'amour, sur les nuits des jeunes filles et ce qu'elles font en leur lit, qu'on apprend en grandissant. Ce sont ces secrets que je m'en vais vous conter. Aussi, tendez une oreille attentive, et ne m'interrompez plus !
Je reconnais... que je suis parfois un peu fermée. Comme une huître.
Il en allait des filles comme des bagages : moins elles prenaient de place, et plus elles seraient faciles à caser.
Si vous étiez une femme, même fortunée, vous seriez encore prisonnière, forcée de coucher dans le lit d'un homme qu'on aurait choisi pour vous...
« Sadima n’avait pas envie de lui ouvrir sa coquille. Mais cet œil désirant et nacré lui plaisait. Elle ne fit entrer que ce regard qu’il lui avait lancé. Elle referma, se replia sur elle-même, et rêva de cette œillade. Elle se la raconta encore et encore, la rejoua, la façonna à sa guise. C’était comme un grain de sable qu’elle tournait et retournait pour le lisser. Elle polissait la perle et la peau lisse s’arrondissait. L’amoureux la regardait, son œil luisait, la perle brillait. Une tension impérieuse enflait en elle. La perle pulsait comme un point, en suspension… Maintenant Sadima connaissait cette ponctuation. Elle savait se mener jusqu’au point d’exclamation, lancer le sort qui laisse le corps content. Elle avait trouvé son pouvoir. Sa jouissance était une puissance. »
* A une drôle de magie d'or...
Autour de Sadima, ce n'étaient que boucles d'oreilles, colliers, diadèmes, bagues, brocarts, chaînettes, ceinturons, sautoirs, broches, épingles à cheveux, médaillons, boutons de manchettes, chevalières, breloques, barrettes, camées, pendants, rivières, montures de monocles, gourmettes, pendentifs, tous brillants d'un éclat doré.
Adrian se pencha et discuta avec sa peau. La pointe de sa langue bavarda avec le creux de la clavicule. Il causa de tout et de rien avec le cou. Il pressa son visage contre ses genoux et récita un poème à l'intérieur des cuisses.
" Drôle de lord, drôle de lord, drôle de lord ", pensa-t-elle encore. A tant la répéter, elle réalisa que cette pensée était un palindrome : la formule se lisait dans les deux sens. Est-ce qu'elle était d'autant plus vraie ?