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Citations de Flore Vesco (267)


Il serait tellement dommage de te gâcher... tu es une belle opportunité de déranger ce monde où les riches se gavent de ce que produisent les pauvres. Jusqu'à présent, j'ai donné à des ogres les moyens de prendre leur revanche. Certes, c'était amusant... mais une ogresse ! Voilà qui est encore mieux. Les femmes ont un héritage de souffrances qui, à lui seul, justifierait qu'elles se mettent toutes à engloutir ceux qui les brident. Je voudrais faire de toi une jolie petite ogrionne, une belle enfant à pleines dents, qui avale les idiots qui croient lui barrer le chemin.
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"Il etait une fois un bûcheron et une bûcheronne qui avaient sept enfants, tous garçons. Ils étaient fort pauvres, et leurs sept enfants les incommodaient beaucoup. Ce qui les chagrinait encore c'est que le plus jeune était fort délicat et ne disait mot. Il était fort petit, et, quand..."
La bonne femme s'interrompit :
-Mais qu'est-ce que ces niaiseries ?
Elle feuilleta plus avant, le nez froncé. Les enfants espéraient qu'elle reprendrait la lecture...
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Je savais que les contes disent quelque vérité, et qu'une histoire peut être changée.
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- Et votre Perrault, il peut ranger sa plume délicate, qui s'offense de la chair et du sang. Qu'il ravale ses moralités, son désir d'éduquer les marmots et de recadrer les filles. Dans ma chanson, il y aura des larmes, de la bile, des méchancetés et des enfants crus. Ça ne vous apprendra rien du tout, quà trouiller. Mon récit ne sort pas d'un beau livre illustré, mais de mes boyaux : alors vous pensez bien qu'il ne fait pas joli sur le papier.
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Qui serait aussi méchant ? La fatigue nous fait perdre la tête. Nous ne voulons plus penser à tout cela. Dormons. Oublions. Ce soir de mauvais rêves viendront.
Sommes-nous bien bêtes ? Ou sommes-nous des bêtes ?
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Nous n’avons pas peur. Nous venons de manger du loup.
Il y a en nous une bête sauvage. Comme elle, nous avons les dents
acérées, les griffes prêtes à déchirer. Ah! qu’on essaye de jouer
avec nous au plus faim… ce soir, nous sommes invincibles.
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Je n’aurais jamais dû faire sauter la serrure de ce coffret. J’ai ouvert une porte vers l’extérieur. Désormais les enfants ont les yeux songeurs, leurs pensées vagabondent vers les mondes inconnus au-delà de nos palissades, où pousse une végétation mystérieuse, où courent des créatures jamais vues.
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Les femmes ont un héritage de souffrances qui, à lui seul, justifierait qu'elles se mettent toutes à engloutir ceux qui les brident.
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Les gamins sont cruels, surtout quand ils sentent qu'un des leurs est différent.
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D'abord, pour le hors-d'œuvre, une cassoulaitue
Et, en guise d'entrée, une bonne escargaufre.

Nous dégustons après une haricotelette
Suivie de l'entremets: de la confiturbot.

Enfin, pour le dessert, croquons des jambonbons
Ou, si vous préférez, des camemberlingots !

Ces mets seraient parfaits pour nos bouches jumelles. Ils sonnent délicieusement. Allons ! Jouer avec la faim nous a fait du bien. Tous ces mots ont roulé sur nos langues, nous ont occupé la bouche. Pour un temps, du moins. (p.33)
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Le gui est parasite. Il choisit un arbre, s'y installe, et en absorbe la sève.
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Avant, nos histoires d'amour étaient rêvées. Des monstres forts et soyeux nous serraient dans leurs bras. Aujourd'hui, rien n'a changé. Nous rêvons encore. Et les monstres, finalement, sont moins doux que ce que nous pensions.
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Un conte pour point de départ, et pas n'importe lequel, celui du Petit Poucet. Comment est née cette idée de roman ?
- Comme pour mes précédentes réécritures, je pars d'un élément qui, dans le conte initial, m'interpelle. Dans Le Petit Poucet, je trouve fascinante la symétrie entre les deux familles : en lisière de la forêt, deux parents qui n'arrivent pas à nourrir leurs sept garçons. Au cœur de la forêt, une autre famille pareillement composée, sauf que les garçons sont des filles, et que les humains sont des ogres. Il y avait là de quoi jouer... Et puis, dans Le Petit Poucet, il y a cette scène centrale du conte, à peine esquissée et pourtant terrible, digne des Atrides et de toute notre culture antique pleine de cannibalisme : le moment où le père mange ses filles. Elle s'incarne, pour moi, dans la merveilleuse gravure de Gustave Doré. Le père, sans le savoir, met le couteau sous la gorge de sa progéniture. Les fillettes ont l'innocence des enfants endormis. Mais leurs bonnes joues, et les petits os qu'elles tiennent serrés dans leurs poings, nous rappellent qu'elles ne sont pas totalement inoffensives... Cette scène est incroyable, et bien sûr, le conte ne s'attarde pas dessus. Il m'a semblé intéressant de vraiment l'exploiter : poser les bases pour la faire doucement venir, la raconter, et dire l'après.

Vous présentez un thème fort. questionné par les générations actuelles : l'emprise du patriarcat, et ici, sa mise en place avec l'arrivée des six frères du Petit Poucet, qui peu à peu régentent la maison. Mais pourquoi donc les filles s'y plient-elle si facilement ? Pourtant, et heureusement, elles ne sont pas aussi dupes que ça...
- Ça ne saute pas aux yeux, mais je crois que le thème du patriarcat est latent dans le conte initial. Pour que le Petit Poucet et ses six frères échappent à la fringale de l'ogre, il fallait nécessairement que ce dernier ait sept enfants. Mais quel besoin que ce soient des filles ? Sept petits ogrions auraient aussi bien fait l'affaire... or Perrault a choisi une sororité. Je ne crois pas que ce soit anodin. Dans le conte, les sept filles sont dévorées, et on passe à la suite. Dans mon histoire... vous verrez. J'aimais l'idée de rappeler qu'il y a toutes sortes de monstres. Les contes sont moralisateurs, ils peignent de grands méchants parfaitement odieux et des héros impeccablement droits. J'espère être sortie de cette dichotomie.

Il y a aussi la question du sauvage, de l'organique, du souterrain, Désir féminin, menstrues, chair ingérée, digérée... Vos romans explorent souvent les tréfonds, ce qu'il y a de plus secret. Comme les contes, finalement ?
- Oui, exactement ! Les contes, dans leurs versions oralisées, celles qu'on se racontait dans les campagnes et que Perrault et d'autres ont ensuite rapportées par écrit, étaient à la fois très sombres et très près des réalités du corps.
Le Petit Chaperon Rouge mange une soupe faite du sang de sa grand-mère, la Belle au bois dormant se réveille enceinte... Perrault a pas mal épuré les versions paysannes, et Disney a poursuivi ce mouvement d'enjolivement. Mais je crois qu'on ne peut pas totalement faire disparaître ces épisodes violents et organiques, ils sont dissimulés dans les contes qu'on se raconte aujourd'hui, on les devine dans ce père qui va perdre ses enfants en forêt, ou cet autre qui mange ses filles, même si Perrault passe vite dessus. Il me plaît d'aller déterrer tout ça. Et de chercher les mots pour en parler ! Ce n'est pas facile... Ce roman-ci parle de tripes et de menstrues, et c'était clairement un nouveau défi stylistique !

Ce roman est une expérience de lecture extraordinaire. C'est un livre choral, où ceux qui parlent ne sont pas forcément qui l'on croit qu'ils sont. Pourquoi ce choix ? Comment gérer, en tant qu'autrice, autant de “voix” sans que ce soit exhaustif ou fastidieux ? Car là, ça ne l'est pas. On a très envie de savoir ce qui se passe dans la tête de chacun.
- La forme de ce roman m'a clairement donné du fil à retordre. J'ai dû trouver la voix de chacun. Puis bâtir l'histoire de manière que les prises de parole s'enchaînent bien : chaque personnage a sa propre quête, son point de vue, pourtant il faut que le tout forme un tableau cohérent. Et dans le même temps, ne pas donner trop d'informations pour maintenir le suspense, qu'on ne devine pas qui va l'emporter... J'ai eu l'impression d'écrire en étant à la fois au four et au moulin. Mais quand cela commence à prendre forme, le résultat est très satisfaisant !

interview de Flore Vesco pour l'Ecole des loisirs
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Je savais ce que cette maison contenait : un foyer éteint, une mère usée et froide, un père coléreux. Longtemps, j'avais cru que toutes les familles étaient ainsi. Et puis, au cœur de la forêt, j'avais découvert une mère attentive et toute dévouée, un père violemment affectueux, six drôles de filles effrontées. Et surtout, surtout, une cadette tant jolie. Têtue, taiseuse et solitaire. Une sage ogresse aux profonds yeux noirs, au sourire rare et pointu. La maison de mes parents ne m'était plus rien. C'était vers elle que je retournais. pg 211
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Il serait tellement dommage de te gâcher... tu es une belle opportunité de déranger ce monde où les riches se gavent de ce que produisent les pauvres. Jusqu'à présent, j'ai donné à des ogres les moyens de prendre leur revanche. Certes, c'était amusant... mais une ogresse ! Voilà qui est encore mieux. Les femmes ont un héritage de souffrances qui, à lui seul, justifierait qu'elles se mettent toutes à engloutir ceux qui les brident. Je voudrais faire de toi une jolie petite ogrionne, une belle enfant à pleines dents, qui avale les idiots qui croient lui barrer le chemin.
Malheureusement, tu es arrivée tête baissée, sans appétit aucun, bien trop sage. Je t'ai lancé des épreuves. J'espérais qu'en me désobéissant, qu'en volant un œuf, tu finirais par t'emparer du bœuf. J'ai tout fait pour te pousser dans la pente ! Mais rien. Me voilà donc à la dernière extrémité. Pucelle, veux-tu les bottes ?
Je fais oui de la tête. Elle pointe Poucet qui écoute notre conversation, terrorisé.
- Tu comprends, maintenant, n'est-ce pas ? dit-elle. Si Poucet est dans une cage, c'est pour ton repas à toi. Mange-le, et les bottes seront à toi. Sinon, je les détruis.
Elle me tend le couteau.
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- Et votre Perrault, il peut ranger sa plume délicate, qui s'offense de la chair et du sang. Qu'il ravale ses moralités, son désir d'éduquer les marmots et de recadrer les filles. Dans ma chanson, il y aura des larmes, de la bile, des méchancetés et des enfants crus. Ça ne vous apprendra rien du tout, qu'à trouiller. Mon récit ne sort pas d'un beau livre illustré, mais de mes boyaux : alors vous pensez bien qu'il ne fait pas joli sur le papier. pg 6
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En somme, nous n'avons plus besoin de semer des cailloux ou des coquilles : j'ai trouvé quelqu'un avec qui me perdre. (p.214)
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Selon notre bon roi, la faim est un délit. L'article 269 punit de trois à six mois de prison les gueux qui ne gagnent pas leur vie. C'est juste : quelle idée d'être un meurt-de-faim?
À moins d'être canonisé, cela s'entend. On adore saint François d'Assise et sainte Claire. Ils se privent béatement, pour se rapprocher de Dieu. Voilà qui est beau. Les parents qui se sacrifient pour leur progéniture, eux, sont pendables. (p.27)
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LE PÈRE

Je prends la parole au collet, ne vous déplaise. Si je ne l'attrape pas, jamais on ne me la donnera. Ce sont toujours les mêmes qu'on écoute : les rois soucieux, les reines en mal d'enfants, les princes en quête d'une épouse étonnamment spécifique. Parfois, oui, on veut bien s'intéresser à un pauvre, s'il est jeune et part à l'aventure. Mais les parents coincés dans leur chaumière, qui grattent la terre pour nourrir leurs enfants, et qu'on accable encore de taxes : eux n'ont pas voix au chapitre.
Comment est-ce que tout a commencé ? Fort simplement : par un « Ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants ». Sept, pour être précis. (p.8)
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Ces trois jeunes filles de la bonne société anglaise étaient d fort délicates créatures. Mrs Watkins pouvait être fière d'avoir produit ces jouvencelles aux fins cheveux blonds, à la mince ossature point trop tapissée de chair. Elle avait veillé sur leur taille étroite, leur avait appris à ne laisser échapper qu'un petit filet de voix. Il en allait des filles comme des bagages : moins elles prenaient de place, et plus elles seraient faciles à caser.
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