Citations de Gabrielle Staelens (30)
Ernest connaît l'inventaire dangereux de l'antre de son père. Il comptait les objets pour supporter les coups. Il souffrait moins. ça passait plus vite. Là- dedans, on l'a presque battu à mort pendant des années. On lui a fait manger des excréments, des cadavres de bestioles. Les seuls souvenirs qu'il possède ici sont maculés de sang, et les preuves y dorment encore.
"Je me souviens quand on était ados, sa mère l'engueulait tout le temps parce qu'elle laissait moisir ses fringues dans son sac de piscine... . Toutes les semaines, c'était la même rengaine : " Tu sais, Lydie me prend vraiment pour sa bonne, elle balance son sac dans la buanderie, et trois jours après, elle me réclame son maillot de bain ! J'ai décidé de ne plus lui faire, blablabla". Je me mets à rire, faudrait pas que X soit un maniaque du rangement ou pire un gars aussi bordélique qu'elle, sinon, on est bon pour appeler les bonnes femmes de l'émission à la télé, où elles arrivent avec une équipe pour tout ranger quand la baraque est déclarée zone sinistrée. "
Quitte à être un monstre, autant l'être avec classe, non?
On ne peut pas affirmer la préméditation, malgré la dislocation pointue. Un boucher? Un chasseur? Un toubib? Des tas de métiers correspondraient volontiers à cette dépersonnalisation.
Il tranche des morceaux de viande saignante dans son assiette avant d'y piquer sa fourchette, les yeux exorbités. Du jus rouge et brûlant gicle dans la porcelaine. Il se lèche les babines à l'odeur du mets.
Quand tu dépenses vingt- cinq mille dollars par mois, que tu peux acheter tout ce que tu désires, tes rêves s'effacent et les démons arrivent.
Thomas se faisait un sang d'encre. Sa petite amie, Claire était partie en vacances avec Léa, sa meilleure copine. Comme à chacun de leur voyage, il attendait patiemment qu'elles daignent appeler. Il savait très bien qu'elles profitaient de leurs escapades et que, parfois, elles ne parvenaient pas à téléphoner. Pas évident de garder son réseau à l'autre bout du monde ! Il avait donc l'habitude des longs silences, mais avec cette histoire de touristes démembrés, Thomas n'était pas du tout rassuré. Aux dernières nouvelles, elles avaient annoncé se trouver à Xochimilco, l'endroit même du massacre… Il y avait fort à parier qu'elles grimperaient forcément sur l'une de ses barques tôt ou tard, et il désirait simplement les entendre pour leur dire de faire attention…
- Donc, pour vous Dieu n'existe pas...
- Pas plus que le Père Noël.
- Ne le dites pas à ma mère, elle vous tuerait !
Elle rit. Je ne pus m'empêcher d'apporter les preuves d'une quelconque existence.
- Et les tables de la loi, dans ce cas, qui les a frappées?
- Un mythe, écrit par des hommes pour des hommes, un peu comme le règlement scolaire du lycée! Pour éviter les débordements, l'anarchie, le chaos... Pour contrôler la population.
- La Bible est une série d'histoires?
- Mickael, tu penses sincèrement que l'éclatement de la Tour de Babel est responsable de la multitude de langages sur la planète?
"Bilan de ma journée : j'ai parlé à cinq personnes depuis mon retour, et comme d'habitude, je n'ai pu parler à personne, puisqu’il me faut toujours les écouter et répondre à toutes leurs questions... Impossible de glisser mes impressions, mon avis, ou de raconter un événement, il faut toujours parler vite, de tout, très vite... De toute façon, je vois pas pourquoi j'aurais besoin de parler, hein... de raconter mon histoire débile avec Francis, après tout, ce type, je ne le reverrai jamais de ma vie, alors, à quoi bon ?"
Décider des silences
Sans doute un rêve qui se brise,
un peu son coeur qui se divise,
lorsque qu'elle à vidé sa valise,
Et lui, défroissé ses chemises...
Sans doute la flamme qui s'éteint,
d'avoir trop brûlée sous son sein,
Sans doute ce qui est beau a fuit
Elle danse encore, il l'oubli...
Décider des silences,
Déchirer tous les mots,
Soumettre sa méfiance,
Pour exiler ses maux...
Exprimer ses regrets,
Subir l'indécision,
Pleurer à l'imparfait,
Laissé à l'abandon...
Et Vouloir abattre les murs,
que donne l'indifférence,
S'habiller d'une
pour combattre une absence...
Sans doute un poids qui disparaît,
lorsque son sac est bien vidé,
Sans doute que la rancoeur en fait,
Cache toujours la vérité...
texte paru dans une publication de poésie "slam" en novembre 2007
la matinée est silencieuse, cela ne lui plaît pas du tout! Heureusement, il connaît le meilleur moyen pour entrer en contact avec les Autres quand ils décident de l'ignorer. Suffit d'appliquer la recette de maman. Sans hésiter, il se plante devant le miroir de la salle de bain, s'observe attentivement, grimace.
On ne peut pas traquer un assassin pour éviter de le devenir.
A l'instant même où il a enfourné sa première fourchette de joue de petite fille, Ernest a décrété que plus rien au monde ne le forcerait à traquer dans la forêt, à se rouler dans la boue, pour avaler du sanglier!
Il tranche des morceaux de viande saignante dans son assiette avant d'y piquer sa fourchette, les yeux exorbités. Du jus rouge et brûlant gicle dans la porcelaine. Il se lèche les babines à l'odeur du mets.
Ernest Frisch enfourne une première bouchée entre ses lèvres charnues et savoure. Il mastique lentement, c'est important pour la digestion, et puis, il compte bien profiter de cette sensation apaisante le plus longtemps possible. Le congélateur est vide !
Il va devoir repartir à la chasse avant que ses pulsions ne le reprennent. Avant que les hallucinations ne reviennent. Avant que les voix ne l'assaillent à nouveau. Car, lorsque le manque l'envahit, il perd complètement les pédales. S'il commet des erreurs, la viande abattue n'a pas ce parfum de perfection. La chair est dure et il faut la faire mijoter des heures pour l'attendrir. Il est obligé d'ajouter des épices et ça le désole !
Plus longtemps nous sommes l'otage du mal, plus vite nous devenons son complice.
Céder au mal peut rendre fou à lier ; lutter contre aussi.
Ecrire, c'est mettre en scène ses fantasmes les plus fous ou affronter ses peurs et ses cauchemars les plus terrifiants.
Ecrire c'est penser comme un autre qui n'existe pas et lui offrir une petite part de soi.
L'intimité, ce n'est pas un truc qui vous met des étoiles dans les prunelles et avec mon caractère de poney, pas évident de gérer un ascenseur émotionnel.
Il fallait un certain caractère pour oser y passer ses journées sans trembler. Les bruits de la nature alliés à la vision des poupées empalées, mutilées et pourries, étaient capables de rendre fou n’importe quel homme.