Citations de Genzaburô Yoshino (14)
Si tu te contentes de faire quelque chose parce qu'on t'a dit que c'était bien, ou parce que c'est cela que la société reconnaît comme critère pour mesurer la valeur d'un individu, jamais tu ne deviendras pleinement humain. L'important n'est pas comment te voit la société, ni comment te voient les autres, c'est que tu saches par toi-même ce qui fait la valeur d'un individu, que tu le saches intimement.
L’homme reste fondamentalement centré sur lu, pour réfléchir comme pour prendre des décisions. Tu t’en apercevra quand tu seras adulte, les personnes qui ont réussi à sortir d’un mode de pensée égoïste sont extrêmement rares. Dès que des questions d’intérêt entrent en jeu, en particulier, il est très difficile de se mettre soi-même à distance avant d’émettre un jugement. Seules quelques personnes éminemment remarquables s’avèrent capables de conserver une pensée « copernicienne » dans ce type de situation. La majorité des gens ne voient pas plus loin que le bout de leur nez, s’embrouillent dans des réflexions de courte vue, si bien que la globalité de la situation leur échappe et qu’ils s’arc-boute sur leurs petits avantages personnels. (Pages 24 et 25)
Cette question, Coper, nous devons nous la poser chaque fois que nous est présenté un héros. Les grands hommes, les héros sont des gens extraordinaires, d'accord. Ils possèdent des capacités supérieures aux individus normaux, ils sont capables de faire des choses dont le commun des mortels est incapable, c'est entendu.
De ce point de vue, ils peuvent certainement susciter notre admiration et nous leur tirons bien volontiers notre chapeau.
Mais une fois que nous les avons admirés, demandons-nous: au service de quoi ont-ils mis leurs extraordinaires talents ? Quelles choses extraordinaires ont-ils accomplies? Ont-ils seulement accompli quelque chose de grand?
Voilà la question qui mérite d'être posée. Car avec des capacités extraordinaires, on peut aussi réaliser le mal.
Dans la mesure où nous sommes des êtres humains, il nous arrive à tous de vivre des expériences tristes ou douloureuses. (...) C'est grâce à ces expériences malheureuses, pénibles, que nous apprenons ce qu'est vraiment la condition humaine.
Avant, on pensait que le soleil et les étoiles tournaient autour de la Terre, on le croyait simplement parce que c’est ce que l’on voyait. On le croyait aussi parce que c’était ce qu’enseignait l’Eglise chrétienne, que la Terre était le centre de l’univers. Et même, au-delà, l’homme s’est toujours considéré comme au centre des choses, c’est dans sa nature. (Page 23)
Réfléchis bien à ce mot, Coper ! C'est formidable ! Arigatai !
On l'emploie pour dire "je vous en suis reconnaissant" ou "cela mérite toute ma gratitude". Mais le sens originel de ce mot, c'est "le fait même que cette faveur se réalise est extraordinaire", ou "cette faveur ne tombe pas sous le sens", et c'est parce qu'elle ne tombe pas sous le sens qu'elle mérite notre gratitude. La formule a ensuite évolué pour donner la formule de politesse arigatô, merci. Mais si tu considères le monde dans son ensemble, quand tu vois la situation dont tu jouis actuellement, tu ne peux que dire "c'est formidable !" au plein sens du terme.
Malheureusement, tout comme l'homme ne peut rien connaître des vérités de l'univers tant qu'il se cramponne à l'idée que la Terre occupe le centre du monde, juger des choses selon un point de vue égoïste empêche de saisir les vérités de la société humaine.
Les vérités générales, ces gens-la ne les voient jamais.
Bien sûr, dans le langage quotidien, nous continuons à dire < le soleil se lève> et . Parce que cela ne porte pas à conséquence pour la vie de tous les jours.
Mais pour comprendre les grandes vérités de l'univers, il faut abandonner cette façon erronée de voir les choses. Eh bien, c'est la même chose pour comprendre les grandes lois de la société.
Chaque événement de notre vie est unique, rien ne se répète jamais... Autrement dit, c'est à nous de faire fleurir à chaque instant ce qu'il y a de beau dans notre cœur.
Cher Junichi,
Tout à l’heure dans le taxi, tu m'as dit :« Tu as raison, les hommes sont comme des molécules. »
Tu ne t'en es peut-etre pas rendu compte, mais tu avais vraiment l'air sérieux en disant cela. Et à cet instant tu étais extraordinairement beau.
Mais si ce n'était que cela, cela n'aurait pas eu de quoi m’ émouvoir particulièrement. C'est qu'il commence à réfléchir réellement aux choses! me suis-je dit, et ça, tu ne peux pas savoir à quel point cela a fait vibrer mon coeur.
Vivre comme un être humain, cela n’a de sens que si tous les hommes jusqu’au dernier vivent comme des êtres humains. Si certains sont laissés pour compte et vivent comme des animaux, alors l’humanité n’est qu’un mensonge. Tant que la société n’est pas équitable, elle n’est qu’un mensonge
Toutefois, souviens-toi, Coper, pour travailler à découvrir quelquechose quand tu seras au sommet de la science, et même tout simplement pour te hisser jusqu'à ce sommet, il y a une chose que tu dois absolument préserver : ne perds jamais, m'entends-tu, au grand jamais, cette curiosité de poursuivre jusqu'à leurs dernières conséquences tes pensées et tes réflexions quand tu te réveilles en pleine nuit.
Si tu te contentes de faire quelque chose parce qu’on t’a dit que c’était bien, ou parce que c’est cela que la société reconnaît comme critère pour mesurer la valeur d’un individu, bref, si tu contentes de faire comme on t’a dit de faire - écoute moi bien, Coper -, jamais tu ne deviendras un être pleinement humain.
Et ça c'est le point important, Coper !
Il faut toujours se méfier des choses évidentes. On croit qu'on a tout compris, que c'est tellement bête qu'il n'y a pas à y revenir, qu'on arrivera toujours à la même conclusion banale et cent fois acceptée.
Eh bien non !
Ça ne marche pas toujours comme ça, et parfois, ça vaut le coup de renverser les idées reçues.
Si tu triches avec toi-même, tu auras beau penser à des choses grandioses et impressionnantes, tu auras beau les affirmer avec force, ce ne seront que des mensonges.