Trois membres de l'Institut, affranchis des sottises chrétiennes et fort peu, jusqu'alors, amis du clergé, se sont montrés l'un après l'autre douloureusement soucieux du destin de l'Eglise. Vatican II les a peinés. Guéhenno confiait à Mauriac (le Bloc-Notes en fait foi) sa tristesse alarmée. Raymond Aron, juif incroyant et qui avait connu, en 68, un effroi sans nom, au point d'en vouloir furieusement à de Gaulle pour son allocution conciliante - et vaine - du 24 mai (ce général mué en ombre d'une ombre, en fantôme, en ectoplasme ! s'écriait notre homme pour qui l'usage de la force était l'unique et nécessaire recours à l'égard des trublions), Raymond Aron, dans son interview d'octobre recueillie par Alain Duhamel - un parfait ami politique -, gémissait sur cette église navrante, oublieuse (avec Mgr Marty, sans doute) de ses traditions conservatrices, et qui, disait-il, "s'interroge et parfois se renie". Le plus attendrissant fut M. Lévi-Strauss; certes, il avait cru devoir se déclarer publiquement pompidolien de choc ; certes, revêtir l'uniforme du Quai Conti avait été pour lui une béatitude, mais je ne m'attendais pas de sa part à cette déclaration que l'on a pu lire dans La Croix du 24 janvier 1980 : "Ce qui se passe dans l'Eglise depuis le dernier concile me trouble [etc.]." Assez comiques, non ? ces agnostiques tout à coup qui volent au secours de l'intégrisme.
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