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3.41/5 (sur 17 notes)

Nationalité : Guinée équatoriale
Né(e) : 1966
Biographie :

Juan Tomás Ávila Laurel est né en Guinée équatoriale, le seul pays africain hispanophone. En 2011, après une longue grève de la faim en protestation contre le régime d'Obiang, il s'exile à Barcelone.
Auteur de romans, poèmes et essais, il est également chroniqueur pour la presse.
Son précédent roman Arde el monte de noche a été traduit en anglais en 2014 et sélectionné pour l'Independent Foreign Fiction Prize l'année suivante. Sur le mont Gourougou va paraître simultanément au Royaume-Uni et en France.

Source : http://asphalte-editions.com/?page=catalogue&categorie=fichelivre&num=89
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Citations et extraits (21) Voir plus Ajouter une citation
Aux mères de ceux qui n'atteignent jamais leur but.
D'autres viendront , qui parleront de ces chemins
qu'à bout de force ils n'ont pu parcourir.
Ce qu'on ignore, c'est si cela servira de réconfort. (p.7)
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Nous sommes dans la forêt et nous faisons à manger pour tenir debout. Nous ramassons du bois, descendons jusqu’au quartier Farkhana acheter du poisson, ou montrer qu’on en achèterait bien ; ainsi, si nous croisons des âmes charitables, elles nous en donnent à force d’insistance. En tout cas, si elles nous en donnent, ce n’est jamais un morceau très charnu, plutôt les têtes ou les arêtes. La nuit, avant de dormir, il fait froid, encore plus froid que si nous étions sur les rives du fleuve Ruo, où je suis né, où j’ai vu naître tous ceux que j’ai laissés derrière moi en partant à la recherche d’autres fleuves et d’autres rives. Après manger, s’il y a de quoi, nous réchauffons nos mains, nous nous recroquevillons sur nos cartons, sous nos couvertures, et nous nous racontons des histoires. Alors je fais comme si je n’avais aucune histoire à raconter, comme si je n’avais rien à dire. En réalité, je sens que si je me mettais à parler, je ne m’arrêterais plus, et les gens se diraient que c’est une mauvaise habitude prise dans mon village, de ne pas laisser parler les autres ; s’ils entendaient ma voix défaillir, ils croiraient que je joue la comédie et cherche à les tromper. Alors je garde la bouche fermée et me contente d’écouter ceux qui ont la bonté de partager leur histoire. Il n’y avait pas, dans cette résidence temporaire où nous étions installés, de raisons de se réjouir, et toute personne capable de dépasser notre réalité immédiate pour nous sortir de notre quotidien était un héros. Oui, un véritable héros qui, ayant toutes les raisons de se plaindre du matin jusqu’à l’heure venue de mettre ses mains entre ses cuisses pour essayer de dormir, avait la force de raconter quelle avait été sa vie avant d’atterrir ici. Un type comme Peter, par exemple. Il portait une barbe à croire qu’il ne s’était jamais rasé. Dans son village, on l’appelait Ngambo, dit-il. Il racontait qu’il avait été porteur, mais ne disait ni de qui ni de quoi ; il était déjà très généreux de partager son histoire. Ngambo disait n’avoir jamais songé à quitter son pays, il s’y était résolu parce que son père avait été la victime d’une injustice. Chaque fois qu’il mentionnait son père, il se redressait pour qu’on entende bien les détails de son histoire, pour qu’on n’ait aucun doute sur le caractère extraordinaire de son géniteur. Sans chercher pourtant à trop en faire, il voulait simplement que rien ne nous échappe.
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En réalité, vivre dans le noir, c’est le faire en tournant le dos à l’histoire. Et c’est que je ne crois pas que personne puisse raconter ce qu’il fait dans le noir, parce qu’on ne saurait pas tous les détails de ce qu’il s’y passe. C’est comme de manger dans l’obscurité, on continue toujours d’avoir faim, parce qu’on ne maîtrise pas ce qu’il y a dans l’assiette. Je crois que l’obscurité, dans la vie d’une personne, c’est la partie plus sombre de la misère où elle vit.
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Il n’y avait, il n’y a, dans mon île qu’un seul cimetière, et c’est là qu’on enterre tout le monde. Avant de partir pour le cimetière, on appelle le prêtre, qui se présente avec ses habits officiels et assisté de ses enfants de chœur, deux, au moins, qui portent leurs cierges et aussi l’encensoir. Dans mon enfance, du temps de mes grands-parents, la procession de l’Eglise arrivait à la maison du mort et tout le monde ressortait avec le cercueil, que suivaient pratiquement tous les habitants de la ville. Et si ce n’était pas tous, je voyais de mes yeux que c’étaient beaucoup de gens, mais des gens qui n’étaient pas si proches du mort ni de sa famille. (….) tous les enfants des rues adjacentes au trajet du cortège étaient enfermés dans leurs maisons, et on fermait les fenêtres. On nous disait que si « l’air du mort », touchait les enfants, il les tuait, et il les emporterait comme il emportait celui que l’on portait pour l’enterrer. Etre touché par l’air du mort était la chose connue qui nous faisait le plus peur. Les enfants rouvraient la porte à l’appel de leur mère, ou de la première personne adulte de la maison qui leur disait d’ouvrir.
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Bonjour monsieur. On ne se connaît pas, mais je suis venu te voir car je dois t’expliquer ce qui se passe là-haut, tout près d’ici. Nous sommes environ cinq cents noirs, tous africains, et nous voulons vivre, tu comprends ? Nous voulons vivre. Et vivre, chez les Africains, est une affaire sérieuse, parce que c’est souvent très difficile, et beaucoup de gens y arrivent à peine. Nous nous trouvons dans un endroit qu’on appelle le Gourougou, nous sommes divisés e plusieurs groupes selon les langues, deux principalement : il y a ceux qui parlent français et ceux qui parlent anglais. Mais il y en a d’autres plus petits, qui rassemblent tous ceux qui parlent uniquement leur langue, celle de leur village. Et nous passons nos journées à jouer au football, très souvent avec des ballons plus petits qu’une grosse orange. Nous avons besoin de manger, tu comprends, monsieur ?
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Juan Tomás Ávila Laurel
Que les morts pesaient énormément plus que les vivants, c’était une chose que l’on savait bien. Et certains pensent que, ce qui pèse, c’est la tristesse, la douleur, l’immense obscurité des yeux fermés de celui qui gît dans la pirogue, dans ce cas concret. On traverse avec la mort un mur obscur et inconnu. On cesse d’être là. On s’abandonne au noir destin. On a un sommeil énormément plus profond que d’habitude. Et tout cela pèse. Pour beaucoup de personnes, les raisons de ce fait connu sont inconnues. Le mort pèse.
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Ils devaient agir comme s'ils étaient réellement fous, ne pas avoir honte de quémander à manger, et le faire dans une langue inconnue, oublier toute inhibition pour affronter la réalité.
On le comprend, cet homme qui aurait aimé perdre la raison. Tu es majeur, tu es noir, tu te retrouves sur un mont désert surveillé par des policiers marocains qui ne veulent pas de toi à cet endroit. Tu as beaucoup de trous à l'estomac, et les arbres du mont ne donnent pas de fruit, même pas amers. Il te faut descendre jusqu'aux lumières civilisées de la ville. Regardez, citadins, vous savez bien que nous sommes là puisque vous ne nous avez pas ouvert les portes de vos maisons et que le centre d'accueil est plein à craquer. Nous n'allons pas nous laisser mourir de faim juste pour satisfaire le chef de la police, alors nous sommes venus vous demander quelque chose à manger.
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…dans notre village, il y avait une maladie qui se soignait par l’urine, mais pas celle de n’importe qui sinon celle des enfants, et seulement la leur. On disait qu’on la donnait à boire à ceux qui étaient atteints de cette maladie. Alors, on pouvait voir les assistants du docteur qui soignait un de ces cas, parcourant les rues avec leurs bouteilles pour que les enfants les remplissent d’urine, autant qu’il en fallait. Seulement l’urine des purs,…(…) Eh bien, je crois maintenant que, si cette maladie se soignait vraiment grâce à l’urine, n’importe laquelle serait valable, que ce soit celle d’un enfant ou celle d’un adulte.
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Pourquoi les malheurs arrivent-il. Jamais il n’y aura de réponse. Les sacristains n’en avaient pas et, en ce temps-là, je croyais qu’ils savaient des choses sur tout. Jamais il n’y aura de réponse. Ce que les hommes savent quelquefois c’est de quelle façon une histoire a commencé, ou l’événement public qui a libéré la mauvaiseté d’une situation quelconque. Il y en a que cela console de connaître les premières causes apparentes. Ou ce dont ils croient que cela a déclenché une chose quelconque sur laquelle tout le monde s’interrogera par la suite.
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Ce n'était pas la première fois qu'un noir mourait en essayant d'atteindre la terre européenne, ou espagnole, mais cette fois-ci on pouvait affirmer qu'on leur avait tiré dessus. C'est ce dont j'avais besoin pour savoir que mes doutes étaient fondés. On dira ce qu'on voudra, mais nous pouvions affirmer qu'on les avait empêchés d'arriver jusqu'à la plage ; j'en étais convaincu, mais j'ai commencé à réfléchir. Et je me suis souvenu d'histoires africaines semblables à la nôtre. Si tu entres de force quelque part, disait-on souvent dans mon village, tu n'en sortiras peut-être pas entier. Si on le disait dans mon village, et que le dicton était connu dans le village voisin, et dans le suivant, d'un autre pays, ça ne pouvait pas être une vérité hasardeuse. Auparavant, je pensais qu'on nous chassait parce que nous n'avions pas de papiers, que nous prétendions entrer en Europe sans papiers. Mais comment pouvaient-ils s'attendre à ce que quiconque ait des papiers dans une traversée à la nage ? Dans quelle partie de son corps devrait-on ranger le supposé papier ? Dans des pays développés, on tuerait donc le premier venu pour n'avoir pas de papiers ? Bien sûr que non, ce n'était pas ça. Pour eux c'était juste un bon prétexte.
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