Incognito, ni vu ni connu,
J'avance masqué.
Mes prunelles sont les griffes de la lune.Spadassin des
gouttières, ma folie est une grâce.
L'imprévisible est ma seule discipline.
Même le cri des poètes n'affecte pas mon mystère.
Je ne le savais pas encore mais j'étais simplement amoureuse.
Les humains adorent tout compliquer. Ils ont particulièrement doués pour mélanger, confondre, dénaturer les évidences au point de convertir la plus vive clarté en opaques ténèbres.
Ils ont coutumes de poser des questions si tordues qu'ils ne comprennent plus eux-mêmes le sens quand ils s'efforcent d'y répondre. Ils poussent très loin cette disposition en matière de plaisirs amoureux. Ils se sont forgés toutes sortes de mythes biscornus, comme ceux de l'âme sœur, du couple parfait, des amants éternels, multipliant les recettes, les philtres, les sortilèges d'amour. Ils se sont rendus malades de désir et de culpabilité, au point que leur itinéraire sensuel ressemble d'avantage à un parcours de mort et de carnage qu'à un chemin de vie.
Ce trouble en fait de dangereux infirmes car ils compensent leur frustration chronique par une fureur de domination et une férocité insatiable. Déchirés entre vertu et luxure, trahison et fidélité, les bipèdes passent leur temps à porter sur leur âme un jugement moral. C'est là toute l'origine de leur folie. S'il me prenait l'amère fantaisie d'édifier une morale pour mes pattes ou mes oreilles, il me serait très vite impossible de bondir et les sons se brouilleraient dans mon crâne. Je ne pourrais plus ni détecter ni attraper les proies. Je périrais au bout de quelques jours. Voilà pourquoi la plupart des humains traînent une âme sexuellement atrophiée, mutilée.
L'amour n'est pas un problème à résoudre, c'est un plaisir à vivre. Chaque rencontre doit être une expérience nouvelle, surtout si c'est avec le même partenaire.
Souple, affuté, insinuant, rapide, il camoufle bien ses intentions qui sont impitoyables sous des dehors soyeux et des airs innocents.