Julie Bonnie remporte cette année le prix des P'tits Bouquineurs (8/12 ans), et
Karine Martins le prix des Bouquineurs en Seine (12 ans et +). Covid oblige, nous les avons rencontrées par écran interposé, et ce sont Priscilla
Borges et Elise Laurant qui ont relevé leurs impressions!
Personne n’est plus mort qu’un homme qui ne peut pas mourir. Je n’ai d’existence aux yeux de personne, je ne peux pas rester au même endroit très longtemps. Je n’ai pas d’attaches, pas de famille, pas d’amis… tout simplement pas de vie.
- Il est gelé ! s’affola Adèle. Aidez-moi à le porter devant la cheminée.
- Vu la quantité d’alcool dont il est imbibé, à votre place, Mademoiselle, j’éviterais de l’approcher trop près des flammes. On risque la combustion instantanée.
- Edmond ! Vous croyez vraiment que c’est le moment de plaisanter ?
Le majordome fit mine d’y réfléchir sérieusement.
- Il est inconscient et dans l’incapacité de répliquer. Ma foi, je trouve les circonstances optimales.
Un sourire éclaira la mine fatiguée du prêtre.
– À quoi doit-on votre retour ? demanda-t-il.
– La perspective de faire graver votre épitaphe : « Ci-gît un crétin parti seul combattre un esprit démoniaque avec une bande d’imbéciles. » Vous vous rendez compte dans quel guêpier nous allons nous jeter ? lança-t-il, changeant de sujet.
– Oui, mais pour une fois, on le fera de notre plein gré.
Gabriel leva les yeux vers la voûte étoilée et prit un air pensif.
– Notre épitaphe sera du plus bel effet : « Ci-gisent deux crétins, morts de leur plein gré. »
- Courir après les démons en espérant ne pas être rattrapé par les siens est une illusion, mon petit.
Personne n'est plus mort qu'un homme qui ne peut pas mourir. Je n'ai d'existence aux yeux de personne, je ne peux pas rester au même endroit très longtemps. Je n'ai pas d'attaches, pas de famille, pas d'amis... tout simplement pas de vie !
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Comment trois individus aussi différents avaient-ils pu en si peu de temps devenir si proches ? Chacun d’eux était plus préoccupé par le bien-être des deux autres que du sien propre. Pour le solitaire qu’il avait toujours été, ce constat était déroutant. Et pourtant si rassurant. Que ce fût le fruit du hasard, du destin ou l’œuvre d’une entité quelconque, il ressentit une brusque bouffée de gratitude pour les avoir placés tous les deux sur sa route.
-J’ignore ce qu'il y a de plus terrible : ne pas pouvoir mourir ou la solitude qu'impose l'immortalité
-Le plus douloureux, c'est de se l'entendre dire. Je devrais vous le faire regretter
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_ Je me suis toujours méfié des gens dont je ne saisis pas l'humour, déclara Voltz. Et Dieu fait incontestablement partie de cette catégorie.
Le domaine de Porte-Vent, fief de la famille Le Kerdaniel depuis des générations, était bien nommé : en s’engouffrant entre le manoir et ses dépendances, le vent marin émettait un chant lugubre.
- Essayer quoi ? d'aller frapper à toutes les portes du village en espérant qu'une bête d'une toise et demie avec une gueule de loup vienne t'ouvrir ? Tâche de rester en vie et de ne pas t'attirer de problèmes pendant ne serait-ce que vingt-quatre heures... Je t'ai retrouvée à moitié morte dans les bois il y a quelques jours. Hier, je t'ai ramassée inconsciente parce que tu invoques des esprits sans rien connaître à ce sujet. Ce n'est pas un jeu!
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