Citations de Lise Antunes Simoes (154)
Question à Lise :
C'est quoi, 10.000 Livres de rentes ?
Réponse :
https://www.liseantunessimoes.com/10000-livres-de-rentes/?msclkid=fe486e25cea811ecafc25ac17b9fd5a3
Les filles avaient l’habitude de gérer ce genre de situation, la plupart du temps en utilisant leur bouche, leurs mains et tout leur savoir-faire pour relancer la machine. C’était toujours un moment un peu délicat, car l’ego des hommes supportait mal cette faiblesse...
Elle visualisa sans peine le visage de la belle Anne, qu’elle avait si souvent admiré dans la galerie de portraits. Elle songea aussi à son nom, écrit sur la tombe de pierre polie près de la petite chapelle. Auparavant, lorsque la jeune femme avait tenté d’imaginer à quoi pouvait bien ressembler sa belle-mère, tant physiquement qu’au point de vue du caractère, elle s’était imaginée une seconde Lady Catherine, impérieuse et autoritaire. Mais le personnage qui se dessinait à présent était tout autre. Pouvait-on être une femme si vénérable et pourtant tacher ses gants comme une demoiselle maladroite ? Renverser du sable dans le casier où il était rangé plutôt que sur la lettre fraîchement encrée à laquelle il était destiné ? Égarer sa boîte de parfum sous une pile de papiers ? Ou collectionner les jolis cristaux et les fleurs séchées ?
Les scènes qu’elles choisissaient étaient toujours épouvantables. Drame du héros arraché à sa patrie par sens du devoir, vengeance des dieux, humiliation de l’amant rejeté, folie et mort qui rôdent, et beaucoup d’amours contrariées… Comme toutes les adolescentes de leur âge, Georgiana et Kitty étaient fascinées par le sombre et le tragique, et si Elizabeth s’en amusait, Darcy, lui, haussa plus d’une fois un sourcil dubitatif. Il ne prononça jamais une critique, mais il jugeait visiblement que d’innocentes demoiselles feraient mieux de traiter des sujets plus tendres. Par chance, les scènes étaient raccourcies, parfois même récrites, et ne duraient jamais plus que quelques minutes, sans quoi il aurait peut-être fini par y poser son veto.
Depuis quelques jours, les deux filles revisitaient Shakespeare. On avait eu droit à des tirades d’Othello, de Roméo et Juliette, de Titus Andronicus et de Macbeth – toutes de terribles tragédies. Ce soir, elles avaient annoncé Hamlet, ce qui ne promettait pas non plus de grandes réjouissances.
Les Fitzwilliam n’étaient pas une lignée aussi ancienne que ce que Lady Catherine aimait à le laisser croire.
Tout commença un peu plus d’un siècle auparavant avec un certain Joseph Fitzwilliam, fils de pasteur. Après des études brillantes, il fit une carrière remarquable en politique, qui le mena au plus près du pouvoir et lui permit de se faire anoblir. Il devint baron. Mais alors que ce titre était transmis à son fils aîné, puis aux aînés de celui-ci, c’est par la lignée de son quatrième fils que vint le véritable prestige. L’un des descendants, devenu lieutenant-colonel, combattit aux côtés du roi durant la bataille de Dettingen. On ignore précisément quels furent ses exploits, mais il se fit assez remarquer pour s’attirer la faveur royale : l’homme revint au pays avec tout à la fois une jambe abîmée qui le handicaperait le restant de sa vie et un titre de comte dont sa famille n’avait pas fini de s’enorgueillir.
Il s’agissait là du premier comte Fitzwilliam. L’oncle de Darcy, qui arrivait aujourd’hui à Pemberley, n’était que le troisième de ce nom.
Elle avait fêté ses dix-sept ans peu de temps auparavant et elle affichait en public les manières caractéristiques des demoiselles de son âge : polie, effacée, baissant les yeux devant le regard des hommes et se tenant le plus souvent dans les environs immédiats de sa mère. Elle était le genre de tourterelle qu’on couvait avec soin et qu’on conduisait, vierge et naïve, jusqu’au mariage avantageux qui ferait la fierté de la famille.
Quelque part, je les comprends, ces filles. C’est vrai que c’est tentant. Ils en ont, de l’argent, eux ! Et s’ils viennent chez nous, c’est bien pour le dépenser, alors pourquoi ne pas en profiter, après tout ?
Qu’y a-t-il de plus beau qu’une femme qui porte un enfant ? Sans le ventre de nos femmes, le monde n’existerait pas…
Drôle d’orgueil. On dirait qu’il ne s’aime pas pour lui-même. Il s’aime par ce que lui renvoient les autres. C’est un effet de miroir.
Leur corps était leur outil de travail et elles en prenaient grand soin, se passant entre elles leurs astuces pour supporter les intrusions permanentes des clients. Elles confectionnaient elles-mêmes des alcools, des tisanes, des teintures ou des mixtures aussi bien pour l’hygiène générale du corps que pour celle de leur sexe. Entre remèdes de bonne femme et expérience personnelle, les irritations, boutons et menues infections étaient le plus souvent traités sans souci.
C’était un cap difficile à franchir que de s’adapter à la vie de prostituée. Faire le deuil de son propre corps, apprendre à se réfugier dans sa tête pour ne pas se laisser meurtrir par les hommes qui passaient les uns derrière les autres, certains moins tendres que d’autres.
Ah… La vie, tu sais… On ne choisit pas toujours.
On n’a pas besoin d’être très futée pour blanchir du linge ou laver le sol…
Un violon, aussi beau soit-il, n’avait d’importance que par le son qu’il produisait. Les violonistes le savaient bien, eux qui se laissaient rarement éblouir par la beauté d’un instrument, préférant en essayer plusieurs pour chercher la combinaison idéale : l’instrument, l’archet, et l’homme.
Ça fait dix-sept ans que je vis dans cette ville et je n’ai encore rien vu du reste du monde. Je veux sortir d’ici et voir ce qui se fait ailleurs. Sinon, comment pourrais-je savoir si je suis au bon endroit, si j’aime la vie que je mène ? Il faut que je puisse comparer, essayer autre chose, et après je choisirai et je m’installerai.
Ah, ces jeunesses, maugréa-t-elle. Ça veut tout découvrir de la vie, mais ça ne sait pas respecter les règles.
J’irai voir ce qu’il y a dans les livres. Tous ces paysages, ces animaux bizarres, tous ces peuples qu’on ne connaît pas… Les gens croient tout savoir, ils parlent avec assurance, comme s’ils avaient tout compris de la vie, ils ne sont jamais sortis de leur petite ville. Ils croisent une ou deux personnes un peu plus renommées qu’eux et ça y est, ils sont satisfaits, ils ont l’impression d’être importants.
Drôle d’orgueil. On dirait qu’il ne s’aime pas pour lui-même. Il s’aime par ce que lui renvoient les autres. C’est un effet de miroir.
Émile, tout aussi inconscient de son talent que de l’énergie qu’il dégageait, ne tirait aucune véritable fierté des œuvres qu’il réalisait.
On n’est pas faites en bois ! Si l’on nous demande d’être sans arrêt aimables, agréables, et de donner l’impression qu’on prend un plaisir fou au lit, il faut bien que de temps en temps ça nous arrive pour de vrai, non ?