Lou Everly

Prologue 2 :

Blake

«… Ça fait deux jours. Seulement deux jours que Violet est partie et j’ai pourtant l’impression que ça fait une éternité. Que pendant ces deux journées, ma vie s’est mise en pause et mon cœur a pris congé.

En rentrant du Donut Time, je m’attendais à ce que Violet soit aussi de retour, mais au lieu de la retrouver, elle, je suis tombé sur un mot qu’elle avait adressé à mon père et à Rachel, les informant de son départ. Au début, je n’y ai pas cru. Je ne pouvais pas y croire. Mais lorsque je me suis précipité à l’étage et que j’ai découvert le bureau, complètement vide, la réalité est venue me frapper comme une pluie glaçante soudaine.

Elle était partie. … »

Il a décrété qu’un an, c’était largement suffisant pour faire mon deuil. Comme si mon chagrin avait une putain de date d’expiration.

Chapitre 4 :
«… Encore un mot de travers et il signe son arrêt de mort.
— Tiens, prends cette bière, poursuit-il en la lui tendant. Tu dois être habituée à te consoler avec ça.
Le coup d’envoi est lancé. Je m’approche d’eux, contenant ma colère du mieux possible, et prends le bras de Lucy pour l’attirer vers moi. Sans que je m’y attende, elle se libère d’un geste brusque, sèche ses larmes du revers de la main, puis elle quitte le salon. Célian a déjà repris sa conversation avec la sangsue qui le colle depuis le début de la soirée et semble ne pas du tout se soucier du tsunami émotionnel qu’il vient de provoquer chez une adolescente psychologiquement fragile et hypersensible.
— Connard, lâché-je, les dents serrées.
Le connard en question lève la tête vers moi pour me fixer d’un drôle d’air. Ses yeux noirs ressemblent à deux feux dévorants.
— Excuse-moi ?
— Tu m’as bien entendue, mais je vais me faire un plaisir de te le répéter : connard.
Le silence retombe, telle une pluie glaciale. Tout le monde s’est figé pour écouter la réponse de Célian. Ceux qui avaient la tête penchée sur leur téléphone l’ont relevée, tandis que ceux qui discutaient se sont tus pour écouter. Célian jette un œil autour de lui, et dès qu’il comprend que toute l’attention est portée sur nous, je le sens fulminer de l’intérieur.
— Ta copine n’est pas mieux que moi.
Mon regard fait la navette entre Célian et la fille qui est assise à ses côtés.
— Oh, d’accord, j’ai compris ! Tu essaies de te donner une bonne image devant elle. Et je parie même que je suis en train de faire foirer ton prochain coup, c’est ça ?
Je me penche vers la fille et lui dis, assez fort pour que Célian m’entende :
— Tu as vu la grande blonde qui est partie en pleurant ? Tu vas te retrouver dans le même état si tu ne décampes pas vite d’ici. À ta place, j’éviterais les hommes dans son genre. Si on peut appeler ça un homme, ajouté-je en le regardant bien droit dans les yeux.
La fille murmure un petit « désolée » à Célian avant de s’éclipser. Il a l’air complètement abasourdi, et je profite de ce moment de faiblesse pour enfoncer le clou.
— C’était facile, dis-je avec un sourire satisfait. Je pensais que tu dirais quelque chose pour te défendre, mais il semblerait que tu n’aies aucun sens de la repartie. En plus d’être totalement insignifiant.
Sans lui donner l’occasion de me répondre, je tourne les talons mais à peine ai-je fait deux mètres que je reviens sur mes pas. Il fronce les sourcils lorsque je me penche vers lui, et plus encore quand je lui arrache sa bière des mains.
— Et même au bord du coma éthylique, Lucy vaudra toujours mieux que toi. Santé.
Je lève la bouteille en lui souriant, puis bois une gorgée avant de partir pour de bon...»

Chapitre 1 :

Violet

«… L’espace d’une seconde, je me demande où il a bien pu passer la nuit après que je l’ai chassé. Et la seconde d’après, je m’en fiche. Sans doute qu’il doit avoir des plans cul éparpillés dans tout Londres.

– J’ai pas la journée ! râle-t-il, ce qui me fait accélérer.

Je fouille au fond de ma valise avec l’espoir que mon sweat-shirt beige soit dans celle-ci, et bingo ! il y est. Je me dépêche de l’enfiler, craignant que Blake ne s’impatiente et ne se retourne trop tôt.

– C’est bon.

Il pivote vers moi tandis que je me redresse en époussetant mon short.

– J’ai un deal à te proposer.

Intriguée, je relève lentement la tête et plante mes yeux dans les siens. Son sourire vaguement blagueur vissé aux lèvres et son regard scrutateur ne me disent rien qui vaille.

– Et si on partageait ma chambre ? Tu n’as pas l’air très chaude pour bouger dans le bureau ou sur le canapé, moi non plus, mais comme je n’ai pas envie de me bagarrer avec toi, je suis prêt à faire des concessions. Surtout que tu as déjà pris tes marques. Ça sent la meuf partout, ici.

– Tu veux dire que tu serais d’accord pour dormir sur le tapis et me prêter ton lit ?

En tout cas, il est hors de question que j’accepte, mais je suis curieuse de savoir jusqu’où il peut pousser les concessions.

– Mon lit est assez grand pour accueillir deux personnes.

C’est bien ce que je pensais.

– Attention, mon offre ne va pas durer éternellement, m’avertit-il en se mordillant la lèvre.

– La réponse paraît plutôt évidente, non ? dis-je en commençant à rassembler toutes mes affaires. Je choisis le bureau.

Je retourne alors dans la salle de bains, la tête haute, les épaules rejetées en arrière. Avec le plus de dignité possible, je prends mes produits de maquillage sur la vasque, ceux qui ont échappé aux mains destructrices de Blake, et les place dans mes valises au moment où le tatoué éclate de rire dans mon dos. Je fais comme si je n’entendais rien et referme tout.

– Évidemment ! Rassure-toi, je ne m’attendais pas à un coup de folie venant de ta part. Tu as l’air chiante à souhait.

Je serre fort les mâchoires, me retenant à grand-peine de le descendre à mon tour. Je déteste la façon qu’il a de me juger, comme s’il savait qui je suis. …»

Chapitre 1 :

Violet

«… – T’étais en train de me mater, là ?

J’ignore volontairement sa question et lui réponds, sèchement :

– Je suis Violet. Tes parents m’ont engagée comme jeune fille au pair pour m’occuper de ta petite sœur.

– Rachel n’est pas ma mère. Et Rosie n’est pas ma sœur. Pigé ?

Je secoue la tête de haut en bas pour lui montrer que j’ai compris.

– Et donc toi, tu es la boniche, c’est ça ? continue-t-il.

– La jeune fille au pair, corrigé-je, toujours de ma voix la plus hostile.

L’Anglais ricane, creusant une fossette sur chacune de ses joues.

– Laisse-moi deviner… Américaine, hein ?

– Californienne, spécifié-je.

– Ouais, je me disais bien aussi… Blonde, bronzée, plutôt bien roulée. (Il penche la tête sur le côté pour me reluquer et je croise les bras sur ma poitrine dans un réflexe de protection.) Un vrai cliché sur pattes. Je parie qu’à l’école tu étais la capitaine de ton équipe de cheerleading et que tout le monde t’adulait. Et à la maison, tu étais la fille à papa par excellence ? Puis, lasse de ce bonheur, tu es partie pour fuir ta petite vie parfaite. Mais tu aurais pu choisir mieux que boniche. Pour mon père, en plus.

J’ai envie de lui répondre que lui aussi est un cliché ambulant ! Le parfait stéréotype de l’Anglais tatoué, hautain et arrogant, accro à la bière qui pense tout savoir sur tout. Mais il ne sait rien. Il croit m’avoir cernée, mais ce n’est pas le cas. Piquée au vif, je me mords la lèvre pour garder toute remarque acerbe pour moi. Je ne suis pas venue ici pour me faire des ennemis. …»

Le tordu que je suis ne peut s'empêcher de se sentir attiré par sa détresse. Paradoxalement, j'aime les gens comme moi, ceux qui sont ravagés de l'intérieur, mais qui font comme si tout allait bien.

"- Tu t'es servie de lui comme d'une barre de pole dance, réplique-t-elle vivement. Comment il peut garder les idées claires après ça ?"

Chapitre 6 :

«… Oui, et d’ailleurs, comment se fait-il qu’il me parle après tout ce que je lui ai dit ? Comme Leila, je pensais qu’il allait m’en vouloir à mort, au point de me dévisager dans les couloirs du lycée et de balancer une montagne de saloperies à mon sujet. C’est étrange. Mais ce qui l’est encore plus, c’est la façon dont il vient de m’appeler.


[Reine de glace ?
C’est quoi, ce surnom débile ?]

[Tous les mecs t’appellent
la reine des râteaux au lycée.
Moi, je préfère reine de glace,
ça sonne mieux. Puis, ça me donne
surtout un peu plus d’espoir.]

Je dois lire ce SMS une bonne dizaine de fois car mon cerveau refuse de croire à ce que lui disent mes yeux. Ma gorge se bloque. Je n’aime pas ça. Pas du tout, même. Je jette mon téléphone sur l’oreiller, comme s’il était contaminé et pars dans la cuisine pour prendre mon petit déjeuner.
C’est la première et la dernière fois que je réponds à Célian Walsh...»

Prologue 1 :

Violet

«… Ça fait deux jours. Deux jours que j’ai atterri sur le sol américain et que je n’ai pas adressé un seul mot à Blake. Deux jours sans répondre à ses innombrables appels, deux jours à essayer de prétendre qu’il n’a jamais existé. Ce n’est pas facile, mais lui dire la vérité le serait encore moins.

Deux interminables jours passés à me questionner silencieusement sur ce que je dois faire.

Je n’ai toujours pas fait mon choix, alors que j’ai bien conscience que dans ma situation, chaque minute compte. Mais c’est justement là tout le problème. Je suis terrifiée à l’idée de prendre une décision qui, je le sais, sera définitive et sans retour. Et en plus du stress que tout cela me procure, je dois de nouveau affronter ma vieille ennemie, la solitude, et le vide intérieur, ce bon vieux monstre qui ne me laisse pas une seconde de répit. …»

Blake :

"Tu dois connaître l’effort pour pouvoir vivre. Si les obstacles, les difficultés et les embûches n’existaient pas, on ne pourrait pas être aussi fort que ce que l’on est. Toi est moi on ne pourrais pas voler "