Interview de Luisa Etxenike en espagnol, sous-titré en anglais.
« Même le souvenir ne conserve pas les sensations. » (p. 168)
J’aurais dû lui répondre que garder en mémoire ce n’est pas se souvenir, que ce qu’on trouve après avoir longuement fouiller dans le débarras du passé, ce n’est pas un souvenir.
Le souvenir existe sans effort.
On va vers sa mémoire, poussé par un objet, une odeur, une atmosphère, une rencontre imprévue.
Le souvenir se présente à toi, te poursuit.
Le souvenir ne surgit pas, il demeure, persiste. il s’impose sans que tu le veuilles n’importe quand n’importe où.
La mémoire relève uniquement du passé. Le souvenir appartient surtout au présent. Il influe sur lui et l’interprète. La mémoire est mobile, le souvenir statique.
On voyait qu'elle était très âgée et en même temps il y avait quelque chose de neuf en elle. On avait l'impression, comment dire, qu'elle avait eu une mise à jour. Comme ces vieux ordinateurs qui ont une carte mère d'un modèle beaucoup plus récent. Elle portait un tailleur clair, très élégant, et plusieurs bagues, seulement à la main gauche.
On ne peut mourir qu'au bout d'une vie comprise.
Amarrer le passé au présent, peu importe comment. Le presser dans le présent.
Voilà pourquoi un grand vin a toujours besoin de paroles neuves, inespérées, pour s'expliquer.
« Le village est tout près maintenant. Mais je conduis sans me presser. Justement parce que je suis anxieux, à l’affût. Au milieu de deux histoires, de deux époques qui m’appartiennent, comme dans le remous fécond d’une embouchure. » (p. 11)
« Je devais découvrir à tout prix le passage menant à l’intimité de ma mère ; et une fois à l’intérieur, trouver son point faible, le fil lâche sur lequel tirer. Jusqu’à la défaire. » (p. 19)
« Ce que je veux dire, c’est que raconter, ça change tout. On résume le souvenir, on le transforme en un point de vue. On l’affaiblit. On le réduit à une simple version des faits. » (p. 178)
Tu vois quand tu me dis "je sais", tu me parles d'une idée, pas d'une sensation. Les sensations n'ont rien à voir avec le savoir, elles se vivent.