Citations de Maude Veilleux (16)
Tu en as donc ben
des journées de rechange
pour remettre à demain
le fun.
je ne suis jamais la bonne version
de la personne qu'il faut être
La vraie pauvreté, c'est l'absence de sortie de secours.
Elle s'y retrouvait chaque soir, ne devenait rien d'autre que la fille sans son frère, que ses parents fatigués n'embrassaient pas, une enfant seule parmi les objets des autres, dépossédée d'elle-même. Elle priait un dieu qui ne l'écoutait pas, qui ne répondait jamais.
ta photo est quelque part dans mon google photo
stocke entre trois mille selfies de ma face
quand je te cherche
je fais juste me regarder
Les clients ne se pressent pas
pour venir acheter
des recueils de poésie
Ils ont des sacs sur roulettes
et prennent plutôt des sudokus.
Faire un roman de soi. Faire de soi un roman pour se donner un peu de sens.
Était-ce hypocrite de ma part de prétendre vivre ça pour l’écrire, de tout ramener au roman, de subordonner le désir à l’écriture?
Nous avions une vie sexuelle active, encore agréable. Assez divertissante. Nous pensions passer notre vie ensemble. On se disait qu’il fallait utiliser nos corps, en profiter pendant qu’il était encore temps. Et, qu’est-ce que ça représenterait quelques amants sur une vie passée ensemble?
La case du mercredi. Nous nous voyions surtout ce jour-là. Je terminais ma semaine de travail, lui la commençait. C’était la seule journée où ni lui ni moi n’avions à travailler le lendemain matin.
Le jeudi, je rentrais à la maison. Je déjeunais avec mon mari. Nous parlions de nos aventures. Je me préparais une carafe de thé. Je m’assoyais devant mon ordinateur et je rédigeais un compte-rendu de la veille. Ensuite, je pouvais vaquer à d’autres occupations.
Le roman commençait à tourner en rond. Les gestes devenaient répétitifs. Cet ordre des choses que l’on fait pour se rapprocher; les baisers, les accolades, les langues dans le cou, les mains sur les fesses, les vêtements qu’on enlève, les caresses, les doigts, les bouches, les mamelons. Il y avait la violence qui escaladait, mais même là ce n’était pas assez. Il n’y avait pas encore de sentiments, pas d’attachements, pas de drames en vue. Que du sexe et quelques claques.
Cette histoire n’avait du sens que lorsque je commençais à l’écrire. Si je passais une semaine sans rédiger, je me croyais amoureuse, au bord du divorce. Il fallait que je ramène mon expérience à la littérature. Quand je terminais un bon paragraphe, peu importait ma peine, mon manque, ma culpabilité. Il y avait le texte. Le texte salvateur. Celui par lequel tout existe, même moi. Il y avait beaucoup de cela dans ce projet.
J’avais remarqué que lors de mes crises d’angoisse j’avais le réflexe d’aller valider mon existence sur Facebook. J’avais une trace de moi, des photos, un certain nombre d’amis classés par catégorie, j’avais des intérêts, des discussions. C’était très rassurant de se sentir présent dans le monde. J’ai une fiche, je suis. En parallèle, je pouvais ainsi me dire : j’ai un livre, j’existe. Cela validait mes douleurs, les rendaient nécessaires.
Elle rêvait du ventre plein, l'imaginait jusqu'à ne plus savoir s'il viendrait bientôt ou jamais, jusqu'à confondre les gargouillis de ses intestins avec des grouillements de foetus.
Elle voulait graver des lendemains sans solitude, s'assurer d'une présence jusqu'à gober l'autre pour qu'il ne la quitte jamais.
Je m'ennuie déjà. L'absence, c'est comme la mort.