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Citations de Ocean Vuong (328)


Il faut que tu trouves un moyen Little Dog, as-tu dit dans mes cheveux. Il le faut parce que je n'ai pas l'anglais pour t'aider. Je ne peux rien dire pour les arrêter. Toi, trouve un moyen. Trouve un moyen ou bien ne me parle plus jamais de ça, compris ?" Tu t'es dégagée. "Il faut que tu sois un vrai garçon, que tu sois fort. Il faut que tu t'imposes sinon ils vont continuer. T'en as plein le bide, de l'anglais." Tu as posé ta paume sur mon ventre, murmurant presque :" Faut que tu l'utilises, O.K. ?
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Désormais âgée de vingt-huit ans, elle a donné naissance à une fille qu'elle enveloppe dans un morceau de ciel volé à une belle journée.
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Légende américaine

Donc j’étais en bagnole
avec mon vieux. Le jour envolé
à part la brume cobalt
qui se refermait sur nous.
On était en route pour tuer
notre chienne, Susan. Enfin, on devait
l’emmener à la clinique
pour la faire piquer, un
meurtre ou peut-être
qu’ils voulaient dire la planter
en terre — même si je savais que Susan
serait brûlée dans
l’incinérateur
à l’arrière. Flocons
de fumée, petits caniches
fantômes. Où est-ce que je voulais
en venir ? Ah oui — la bagnole,
la pluie, la légende du bonheur
& de la peine. Mon vieux
& moi, la Ford assez grande
pour qu’on ne se touche
jamais. & peut-être que
j’ai voulu prendre le virage
trop serré. & l’engin s’est retourné
comme une loi nouvelle, à 130. Peut-être
que je voulais, enfin, le sentir
contre moi — &
ça a marché. Tandis que les couleurs tournoyaient
à travers le pare-brise, le fracas
du métal déchaîné
sur nos épaules, la brusque
chaleur de l’humidité
partout, il s’est écrasé
sur moi &
on s’est enlacés
pour la première fois
depuis des décennies. C’était parfait
& mal, comme de l’argent
qui brûle. La peau
de son cou si tendre, son
after-shave curieusement
estival. Ça a duré une seconde
à peine mais
il souriait, ses dents déjà
à moitié disparues, comme si quelqu’un
les avait effacées pour laisser place
à quelque chose de plus vrai. Couche
ça sur le papier, fils, a-t-il dit
un soir, après m’avoir raconté
pourquoi il a fait ce qu’il a fait
de sa vie, complètement torché
au Hennessy. On était assis
à la table de la cuisine avant qu’il aille pointer
à l’usine de chaussettes. Ses yeux : gouttes de pluie
dans un cauchemar. Je l’ai touché, puis
j’ai lâché. La voiture a cessé
de rouler, on est restés la tête en bas
pendant que ça coulait. Vapeur
ou souffle. J’ai fait
ce que n’importe quel garçon ferait
après avoir obtenu exactement
ce qu’il voulait : j’ai embrassé
mon père. Il a souri
je crois. Ses pupilles
ailleurs. J’ai tâtonné derrière, déverrouillé
la cage. La chienne
est sortie, a reniflé
mon vieux, encore tiède, puis couru
vers les arbres, vers son deuxième
avenir. J’ai laissé l’épave derrière moi
jusqu’à ce que les lieues deviennent
des lustres et la piste
une cité, jusqu’à ce que mon visage
devienne ce visage & que la pluie
lave l’essence
sur mes doigts. J’ai trouvé
une cabine au cœur
du poème & t’ai appelée
en PCV pour raconter tout ça
sachant que ça ne ferait aucune
différence, seulement
davantage. Alors hello, salut, le sang
dans mes mains
est maintenant dans
le monde. Les mots, nous disent
les prophètes, ne détruisent
rien qu’ils ne puissent
reconstruire. Je l’ai fait pour enlacer
mon père, pour libérer
ma chienne. C’est une vieille histoire, Maman,
n’importe qui peut la raconter.
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Est-ce que c’est ça, l’art ? Être touché en croyant que ce que l’on ressent nous appartient, alors qu’en fin de compte, c’est quelqu’un d’autre qui, par son désir, nous atteint ?
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Je recommence.
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J'ai observé les étoiles, les bribes de phosphorescences bleutées, et me suis demandé qui pouvait bien trouver la nuit noire.
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Je suppose que ce que je veux dire, c'est que parfois je ne sais pas ce que ou qui nous sommes. Certains jours je me sens comme un être humain, d'autres davantage comme un son. Je touche le monde mais ce n'est pas moi, c'est un écho de celui que j'étais.
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La mémoire est un choix. Tu as dit ça un jour, en me tournant le dos, comme si c’était une divinité qui parlait.
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Depuis tout ce temps je me disais que nous étions nés de la guerre - mais je me trompais, Maman. Nous somme nés de la beauté.
Que nul ne nous confonde avec le fruit de la violence - mais cette violence a beau avoir traversé le fruit, elle n'a pas réussi à le gâter.
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On riait en sachant que la joie arracherait les sutures de nos lèvres. 
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Dans la brèche.

Je m'arrête dans le champ et coupe le moteur.

c'est simple: je ne sais juste pas
comment aimer un homme

tendrement. La tendresse
est une chose dans laquelle il faut

frapper. Des lucioles entrelacées à travers l'air saphiréen.
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TÉLÉMAQUE

Comme tout bon fils, je tire mon père
hors de l’eau, par les cheveux,

sur le sable blanc, ses jointures creusant un sentier
que les vagues s’empressent d’effacer. Car la ville

au-delà de la rive n’est plus
là où nous l’avons laissée. Car la cathédrale

bombardée est désormais une cathédrale
faite d’arbres. Je m’agenouille à ses côtés

pour voir jusqu’où je peux m’enfoncer. Sais-tu qui je suis,
Ba ? Mais la réponse ne vient jamais. La réponse

est le trou de balle dans son dos, débordant
d’eau de mer. Il est tellement immobile

qu’il pourrait être le père de quiconque, repêché
comme une bouteille verte échouée

aux pieds d’un garçon, remplie d’une année
qu’il n’a jamais touchée. Je touche

ses oreilles. Inutile. Je le retourne.
Pour lui faire face. La cathédrale

dans ses yeux noirs de mer. Ce visage
aucunement mien, que je porterai pourtant

quand j’embrasserai tous mes amants en leur souhaitant bonne nuit :
comme je scelle les lèvres de mon père

avec les miennes, et entreprends
mon fidèle travail de noyade.
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Toute liberté est relative - tu le sais trop bien - et parfois, ce n'est pas de la liberté du tout, mais simplement la cage qui s'élargit et s'éloigne de toi, les barreaux rendus abstraits par la distance mais toujours présents.
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De même que la neige recouvre les détails de la ville, ils diront que nous n'avons jamais existé, que notre survie était un mythe. Mais ils se trompent. Toi et moi, nous étions réels. On riait en sachant que la joie arracherait les sutures de nos lèvres.
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« Tu n’es pas un monstre », ai-je dit. Mais je mentais. Ce que je voulais dire en réalité, c’est qu’être un monstre ce n’est pas si terrible. De la racine latine monstrum, messager divin des catastrophes, qui a évolué en ancien français pour désigner un animal aux innombrables origines : centaure, griffon, satyre. Être un monstre, c’est être un signal hybride, un phare : à la fois refuge et avertissement.
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Mais pourquoi le langage de la créativité ne pourrait-il être celui de la régénération ? (p. 211)
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Mais mon doute est partout, Maman. Même quand je sais qu'une chose est vraie jusqu'au bout des ongles, je crains de voir le savoir se dissoudre, je crains qu'il ne perde sa réalité, bien que l'aie écrit. (...) De même que je ne sais pas comment te décrire : blanche, asiatique, orpheline, américaine, mère ? (p. 83)
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Parce que je suis ton fils, ce que je sais du travail, je le sais pareillement de la perte. Et ce que sais des deux, je le sais de tes mains. Je n'ai jamais senti leur souplesse d'autrefois : tes paumes déjà calleuses et pleines de cloques bien avant ma naissance, puis encore abîmées par trente ans de travail à l'usine et dans les salons de manucure. Tes mains sont affreuses- et je déteste qu'elles incarnent le naufrage et le solde d'un rêve. (...)
J'aime et je déteste tes mains usées pour tout ce qu'elles ne seront jamais. (p. 100-101)
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Parce que la liberté, paraît-il, n’est rien d’autre que la distance entre le chasseur et sa proie.
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Les macaques sont capables de douter d'eux-mêmes, capables d'introspection, des traits de caractère qu'on croyait autrefois exclusivement réservés aux humains. certaines espèces ont montré des comportements indiquant le recours au jugement, à la créativité, et même au langage. Ils sont capables de se remémorer des images du passé et de les appliquer à un problème actuel à résoudre. En d'autres termes, les macaques se servent de la mémoire pour survivre. (p. 60)
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