Je suis tellement amoureux d'elle que c'en est douloureux. Cette force qui m'etreint le cœur, qui le gonflé à chaque fois que j'effleure sa peau. Personne ne pourra jamais me retirer ce sentiment, à la fois effrayant et rassurant.
L'hiver est enfin là. Debout, devant l'une des deux baies vitrées de mon appartement, je regarde la petite couche de givre qui recouvre le fer forgé de la balustrade du balcon. Bien que le ciel soit bleu et que le soleil bas berce la ville de ses rayons timides, rien ne fond. L'air est encore trop froid.
Trois échecs amoureux. Vous n'avez pas peur que votre compagnon ne soit effrayé et prenne ses jambes à son cou ?
J'ai beaucoup pleuré. Cette fin de relation, je l'ai vécue comme un échec, car même si je n'avais jamais envisagé passer ma vie avec Lucas avant de m’engager devant le sosie du King, je n'avais jamais pensé à le quitter parce que le lycée touchait à sa fin. Il n'était pas du même avis.
Les bouddhistes disent que pour être heureux, il faut accepter l'impermanence des choses. Accepter que tout puisse prendre fin. La vie comme l'amour. En acceptant que rien ne nous appartient, qu'on n'a aucune emprise sur rien, on vit mieux les disparitions.
- Tu t'es déjà sentie vivante au point d'avoir l'impression de percevoir les battements de ton cœur comme si tu le tenais au creux de ta main ? Tu as déjà respiré et constaté que les odeurs étaient amplifiées ? Tu as déjà perçu ton sang couler dans tes veines ?
- Wahou, c'est à ce point-la ?
- Peu importe ce que tu penses, Aglaée, ce que j'ai ressenti dans les bras de ce mec, je ne l'avais jamais vécu. Il a réveillé mes sens. Je dois savoir si ça peut se reproduire.
- T'es dans la merde, j'ai que ça à dire.
- Pourquoi ?
- Parce que t'es déjà mordue. Et qu'à partir de maintenant, tout ce que je peux faire, c'est me préparer à te ramasser quand il t'aura brisée.
Mon doigt est toujours suspendu dans l’air. Il ne tient qu’à moi de changer de vie. De trouver celle qui me fera sortir de ma coquille.
Ce n’est pas grand-chose. Je dois juste appuyer sur l’écran. Ce n’est pas insurmontable. C’est facile. Je fais ça depuis que les écrans tactiles existent. Pourtant, je ne m’y résous pas.
Des perles de sueur commencent à se former à la racine de mes cheveux. Ma respiration s’accélère.
Ce n’est qu’un curseur de rien du tout. Pourtant, j’ai l’impression qu’il va m’exposer aux yeux du monde. Je connais le concept d’Alchimie. Ma photo n’apparaîtra pas tout de suite. En tant que modérateur, j’ai toujours conservé mon anonymat. Mais faire passer ce petit rectangle rouge au vert, c’est accepter de prendre le risque que quelqu’un débloque cette photo. C'est accepter que quelqu'un que je ne connais pas entre un peu plus dans mon intimité. Qu'il découvre mes faiblesses. Mes nombreuses faiblesses.
C'est aussi m'exposer au jugement des autres. Leur remettre les clés de mon estime. Celle que je peine chaque jour à construire.
Un jour, l’amour frappera à ta porte et tu risques de le rater, parce que tu refuses de t’ouvrir.
Tu n’admets pas l’erreur. Que ce soit celles des autres, ou la tienne. Sauf qu’échouer, c’est pas une tare. Rater quelque chose, ça arrive. Ce sont des accidents de la vie. On se casse tous la gueule et pas qu’une fois. Ce qui compte, c’est de se relever.
- Je ne sais pas si je dois rire ou pleurer quand j’entends tes compliments.
- Pourquoi ?
- On dirait que tu tires tes phrases d’un mauvais guide de drague.