Étrange paradoxe de la langue française qui fait parler les morts dans l'instant présent et relègue les vivants au passé.
Une fois que c'est dit, je m'autorise quelques larmes, et puis je reprends ma philosophie de vie. Et j'apprends.
Je réalise la distance qui s’installe subrepticement entre nous et le monde extérieur.
Certaines personnes peuvent nous y aider, mais c’est à nous-mêmes de faire l’effort, d’avoir envie d’être bien, et de l’être, quelles que soient les circonstances.
Je suis, nous sommes, transparents d'émotions.
Le papa :
Aujourd’hui, je teste la technique des bonshommes allumettes que ma fille a proposée sur son blog. Elle permet de se libérer d’émotions négatives en coupant les liens d’attachement toxiques, établis avec des personnes ou des situations. C’est vraiment très rapide à faire (5 à 10 minutes), et accessible à TOUS (il faut dessiner des bonshommes allumettes).
Je le fais avec un exemple de ma vie quotidienne dont la pensée m’obsède : je ne peux rien faire contre sa maladie et ça me ruine le moral. Si je suis incapable de la soigner physiquement alors je dois me détacher de cette mission et cesser de me préoccuper de sa santé. Sur les conseils de Laure-Anne, je dessine donc, sur une feuille en format paysage, un rond, deux traits pour les jambes, deux autres pour les bras, et une tête grossière. Un bonhomme allumette en somme, qui me représente à gauche de la feuille. A droite, je dessine un deuxième bonhomme allumette, qui représente mon obsession à vouloir la guérir. Entre les deux, je trace des traits qui les relient et dont je voudrais m’affranchir.
Puis je trace un trait vertical entre les deux et déchire la feuille pour séparer définitivement ces deux bonshommes allumettes, moi et mon obsession à soigner la maladie contre laquelle je ne peux rien. Puis je brûle le bonhomme « obsession ».
Peu à peu, acceptant mon incapacité de la soigner, je me libère de ce fardeau et deviens plus disponible pour écouter les choses positives de l'esprit. Je la vois progresser de jour en jour et me surprends à progresser à mon tour. En me détachant des obstacles, de l’état de sa santé, je me rapproche d’elle, de ce qui est essentiel pour nous deux. Étrange paradoxe.
On reprend souvent des mots du champ lexical de la guerre, plein de violence et puis d’incertitude sur la fin. La victoire ou la défaite. Mais quelqu’un qui meurt d’un cancer n’a pas forcément « perdu » . Et quelqu’un qui y survit n’a pas forcément « gagné ».
Laure-Anne :
Cancer. Voilà. Le mot fatidique vient d’être prononcé. Je suis sortie de là bien assommée (sans déc’!). Les infirmières me proposent une consultation avec la psychologue sophrologue de la clinique. Pas de refus ma foi, parce que là, ça tangue sacrément là-haut…
J’ai découvert ce jour-là l’EFT, Emotional Freedom Technique. Une technique de libération des émotions qui se fait en mettant des mots sur ces émotions tout en stimulant des points d’acupuncture. J’ai également récupéré un CD de relaxation. Je conseille fortement ces techniques. Pour ma part, elles m’ont aidé à rester aussi calme que possible dans ces moments difficiles, à gérer mon stress, à réussir à dormir. Les tester une première fois avec une sophrologue pour les comprendre, puis les reproduire du mieux qu’on peut. Je les ai reproduites autant que possible avant l’opération, afin de les avoir intégrées au maximum pour la suite...
La petite puce de mer sautait à n’en plus finir. Après chaque saut, elle retombait sur le sable sec puis glissait, impassible, jusqu'au bas de la pente. La tête baissée, protégée par ses longs cheveux noirs soudés par le sel des embruns, Germaine la regardait, perplexe, lutter indéfiniment.
Assise au fond d'un cratère creusé par l'explosion d'une bombe américaine quelques jours plus tôt, la jeune femme balançait son corps de droite à gauche dans un rythme lent et régulier. Elle ne voulait plus lutter comme cette puce, ni sortir du trou, mais s'y enfoncer profondément pour disparaître, se fondre dans le sable comme une praire à la marée descendante.
La sensation du sable sec et mouvant qui l'enrobait avec douceur calmait sa souffrance, un peu. Germaine était au fond du gouffre.