Les amis de septembre
La tête vide
une boule de verre
(est-ce l'année qui recommence ?)
L'oiseau regarde
un nuage de plumes
s'envole.
Mais qu'est-ce que ça change
aux larmes froides du dimanche ?
La lune danse
tous volets clos
les feuilles sont folles.
La lumière s'éteint sous les paupières
un chien court dans la nuit
vêtue de roses
après le dernier autobus.
L'été s'est endormi sur les façades.
À petits pas voici les amis de septembre.
Mes amis de l'inaccessible
I. M.
Serge Michenaud (1923-1973)
et Roger Kowalki (1934-1975)
Mes amis de l'inaccessible
au front voilé,
quelle mémoire de l'été dans les collines
modula cette voix du vent
qui brisait le miroir des pierres
au battement de l'eau,
cœur trop fidèle au songe dérisoire
de l'invisible éternité ?
Les pas de l'ami
I. M. Gilbert Dru (1920-1944)
Il a dit : je lève mon verre
à l'aurore qui va surgir
des ténèbres de cette guerre.
Nous danserons dans la lumière
et verrons des roses s'ouvrir
aux lèvres de nos cavalières.
Il est parti. Nul ne savait
que l'abattrait une rafale
et que son sang, comme une étoile,
ce matin-là, le conduirait
vers le ciel auquel il croyait.
Maintenant , dans la nuit d'hiver
où la neige au-dessus des tombes
fait voltiger mille colombes,
je revois le grave sourire
et j'écoute s'épanouir
les pas de l'ami qui s'éloigne.
Amis lointains, souvenez-vous de moi
Amis lointains, souvenez-vous de moi,
quand vous achèterez la perle du Royaume
et fêterez la drachme retrouvée.
Balayez la maison de la cave au grenier ;
mettez de l'huile dans vos lampes
et remplissez de froment vos boisseaux,
pour qu'Élie voie la table prête,
lorsqu'il descendra de son char.
En vérité, Matthieu, le collecteur d'impôts,
a déjà fait ses comptes.
Amis lointains, souvenez-vous de moi,
à l'heure obscure où je devrai franchir,
seul et nu,
le trou de l'aiguille.