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Critiques de Serge Legrand-Vall (51)
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La part du requin

Désir d’évasion, de dépaysement : que diriez-vous d’une belle immersion livresque au cœur de la Polynésie ? Les Marquises ne manquent pas d’attrait, jugez plutôt :



“Frémissante sous la brûlure du soleil, l’île épanouissait les fleurs de ses buissons et de ses futaies, les fruits juteux qui faisaient ployer les branches de ses arbres, aux racines rafraîchies de ruisseaux qui dévalaient en bondissant de ses hauts plateaux.”



En cette année 1842 sept tribus se partagent Nukuhiva, la plus grande île volcanique de l’archipel. D’incessantes luttes tribales rythment depuis des lustres la vie insulaire et malheur aux adversaires capturés vivants, l’anthropophagie est une coutume ancestrale. Corps recouverts de peintures, permissivité sexuelle mais aussi obéissance aveugle aux injonctions des dieux font également partie des particularismes locaux.



Alban, un ancien marin déserteur, vit depuis vingt-cinq ans au sein de la tribu Tai’oa. Feu son épouse Vaiana lui a donné deux enfants aujourd’hui jeunes adultes, la belle Hina et son frère cadet Heetai. Initiés par leur père à la langue française, ces deux métis pétillants de vie sont les personnages principaux du roman “La part du requin” publié début 2015 aux éditions Elytis.

Hina et Heetai ne se doutent pas que l'insouciance de leurs jeunes années bientôt sera mise à mal par l’arrivée au large de Nukuhiva de “La Reine blanche”, un navire de guerre aux impressionnantes rangées de sabords à canons entrouverts.



Serge Legrand-Vall, auteur bordelais, s’est livré à un minutieux travail d'ethnologue et son érudition concernant cette période charnière de l'Histoire marquisienne impressionne. Sa passion pour la civilisation polynésienne est manifeste et se retrouve dans la qualité de son écriture, particulièrement élégante. L'intrigue mêlant réalité et fiction est constamment agrémentée d'anecdotes surprenantes voire cocasses. Un roman qui tout à la fois divertit et interpelle.



“La part du requin” ou comment l’Etat français dans son délire impérialiste, dans sa soif de conquêtes, se livrait naguère à d’insensés ethnocides !
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La rive sombre de l'Ebre

La guerre d'Espagne est une tragédie qui a précédé le cataclysme de la Seconde guerre mondiale en servant de laboratoire aux puissances totalitaires allemande et italienne.

Cette guerre civile est au coeur de ce puissant et émouvant récit.

Puissant par l'évocation du courage des combattants républicains, qu'ils soient espagnols ou étrangers des Brigades internationales, contre la machine de guerre franquiste.

Emouvant par l'exaltation des sentiments, notamment ceux concernant les liens familiaux.



Antoine en 1964, d'origine catalane, jeune journaliste, vient de perdre sa mère. Submergé de chagrin, il va en Catalogne sur les traces de l'enfance et la jeunesse de sa mère. Je ne dévoilerai pas le restant de l'intrigue. Je garantis que chacun des futurs lecteurs de ce roman sera bouleversé à sa lecture.



La trame historique et politique est d'un réalisme glaçant en ce qui concerne le franquisme et ses pratiques. Le drame des réfugiés espagnols après la défaite républicaine est également abordé avec beaucoup d'humanité. Après avoir dû passer les Pyrénées dans des conditions très difficiles, ils ont été "accueillis" ignominieusement par les autorités françaises de la Troisième république. Ils ont été traités comme des criminels et internés dans des camps aux conditions de vie très difficiles...lesquels camps serviront à partir de 1940 à interner les Juifs et les opposants au nazisme fuyant l'Allemagne dominée par Hitler que le régime de Vichy, dans son extrême servilité, livrera à l'occupant...

Pour illustrer la "générosité" française de l'époque, impossible de ne pas citer ce passage révélateur :

mais alors l'accueil...Comme si on était des prisonniers ennemis, de la pire espèce.



"Mais à l'arrivée, on est tombés de haut...continua Manolo. Qu'ils aient rien prévu, rien préparé côté français, passe encore, Les gendarmes français ont commencé par séparer les hommes des femmes sans ménagement. Et Merced qui pleurait t qui me demandait quand on se reverrait...et puis ils nous ont pris tout ce que nous avions sur nous, l'argent espagnol, le couteau que j'avais dans la poche, ma montre, même mon tabac.

Et les coups de crosse avec ça, les insultes. Comme si la seule chose qu'ils voulaient, c'était nous humilier. On a été parqués comme du bétail dans une cour de ferme, sans nourriture, sans eau, dans la boue, sous la pluie et la neige...Les blessés mourraient. Etre maltraités comme ça dans un pays qu'on croyait ami, c'était à peine croyable".



Un très beau livre vraiment.
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Reconquista

Je viens de refermer Reconquista, qui m'a accompagné durant trois jours de lecture. Je suis allé vers lui pour la guerre d' Espagne; je l'y ai trouvée, avec force et réalisme, sans concession. Mais au-delà, c'est une grande humanité et une belle reconquête intérieure que je retiendrai. Ce Mateu qui renaît à lui-même dans les montagnes a quelque chose de Pablo, L'Espagnol, de Bernard Clavel. Un grand roman.
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La rive sombre de l'Ebre

Fan de la culture espagnole, j'ai été très contente de recevoir cet ouvrage.

Quelle histoire ! Si bien ficelée, j'ai trouvé l'écriture très fluide, douce et en même temps forte.

Les personnages sont tous très attachants. On se lie facilement d'amitié avec Antoine mais aussi avec les autres personnes de son entourage.

Sa mère, laisse très rapidement une vague de chaleur bien qu'elle soit morte et ai donné vie sous la neige.

C'est par elle et pour elle que se lie et de délie les dits et les secrets de sa famille.

Des rencontres, des adieux, une aventure épique et une quête d'identité très poétique.

Je suis sûre qu'en relisant l'histoire, on peut y déceler d'autres subtilités invisibles à la première lecture.
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Un oubli sans nom

Peut-on réunifier des fragments de son existence restés longtemps disjoints et étrangers l’un à l’autre ?

C’est à cette question que tente de répondre Serge Legrand-Vall dans son dernier roman Un oubli sans nom. Suzanne Hamel, personnage principal du roman, vit en Normandie ; elle y coule une vie heureuse, ses parents sont libraires et l’entourent de toute leur affection. Nous sommes au mitan des années soixante-dix. Les amateurs de pop music écoutent Leonard Cohen, se grisent aux compositions grandioses d’Emerson, Lake et Palmer, et lisent Jack Kerouac, l’un des membres de la Beat Generation.

Ils lisent Actuel, Libération, ou accessoirement René Dumont, un essayiste écologiste peu pris au sérieux par ses lecteurs d’alors. Pourtant, Suzanne souffre car elle sait qu’elle a été adoptée, qu’elle est une enfant de l’Assistance Publique. Qui était-elle avant ? Quelles étaient l’identité, les vies des membres de sa première famille ?

En progressant à pas très lents, en éclairant graduellement toutes les interrogations qui habitent Suzanne Hamel, Serge Legrand-Vall nous livre une belle radiographie, celle des étapes de la recherche de réunification d’une vie. Suzanne se pose, bien sûr, des questions sur son propre ressenti : « Avais-je du regret de ce qui s’était passé avant ? Je savais tourner le dos à un brouillon de vie, où tout sûrement n’était pas raté. Mais il était temps de me détacher de la Suzanne que j’avais été jusque-là. Puisque j’étais celle qui avait survécu. Qui n’avait plus d’illusions et savait ne pouvoir faire confiance à personne. »

C’est le sentiment d’appartenance qui préoccupe Suzanne, lorsque sa recherche débute vraiment. Elle parvient à une synthèse fragile, qui est peut-être un aboutissement : « Que signifie appartenir ? j’appartiens à la famille Hamel (…) ce patronyme qui n’était pas le mien m’appartient maintenant (…) Mais n’appartiendrais-je pas aussi (…) à ces bourgs et villages caillouteux, (…) à une histoire enfuie et pourtant enfouie en moi ? »

Cette quête de ses premières racines passe par Perpignan, Céret, l’île de Formentera en Catalogne. Suzanne va rencontrer des jeunes qui tentent de vivre l’amour libre, de partager tout en communauté. Ils sont représentatifs des idéaux utopiques de cette période, riche en tentatives de ce type. Les révélations successives concernant le passé de Suzanne sont dévoilées : avant son adoption, Suzanne s’appelait Suzanne Lluch, patronyme catalan. Au service de l’état-civil de la mairie de Perpignan, l’employé indique à Suzanne l’identité de sa mère : Raquel Lluch. Nous ne dévoilerons pas le dénouement final de ce beau roman, belle illustration des pouvoirs de la volonté humaine pour intégrer toutes les phases d’une vie et se réconcilier avec soi-même. Il y a dans ce roman une évocation de la guerre civile espagnole, comme dans les précédents romans La rive sombre de l’Èbre et Reconquista. C’est un fil conducteur dans son œuvre romanesque qui éclaire, à la fin du roman, les origines de Suzanne, enfin en possession de sa vérité.





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Un oubli sans nom

Un oubli sans nom de Serge Legrand Vall, publié aux éditions in8

On écoute beaucoup la bande son des années 70 dans ce roman : paroles et musiques rebelles, voix off prégnantes, collectives où l’intime partagé dans la sensualité trouve sa place... Sans nostalgie aucune, ces réminiscences joyeuses sont de nature à séduire des générations de lecteurs le plus souvent interpellés autour de cette époque, davantage par le cinéma et les arts visuels que par l’écriture...

Mais justement l’écriture de Serge Legrand-Vall et de son héroïne, résiste, et de belle manière... robinsonne.

Au commencement, un naufrage : l’amnésie, qui occulte une naissance et les cinq premières années d’une vie, un nom, un paysage, frappés d’interdit à la suite d’une adoption.

Elle est une île oubliée, sans nom, une page blanche, une identité à écrire, à conquérir envers et contre tous. Un thriller, où des indices affleurent, une lettre redoublée : LL , un mot : Céret, un nom insulaire : Las ILLAS, ce village où elle avait été placée dans son enfance, pour que remonte enfin à la lumière, LLuch le nom de sa famille.

L’aventure commencée en stop sur la route à la manière de Kerouac la conduit vers un col frontalier en terre espagnole, un lieu de passage multi-séculaire qui devient prétexte à inverser et remonter le temps. Suzanne explore in situ l’atlas historique qui avait bercé sa mémoire adolescente et devient dès lors l’archéologue de sa propre vie .

La qualité et l’étrangeté de ce roman au rythme haletant, tient à l’étonnant contraste entre une écriture maîtrisée visuelle, naturelle, fluide parfois distanciée et une quête existentielle, intime, longue et douloureuse, à l’issue incertaine, celle des aléas de la vie même. Une vérité qui se conjugue avec la liberté.

“Un roman « mémoire » fascinant à plus d’un titre... qui révèle tout à la

fois l’intime et le social - presque oublié des années 70 - dans les décors

de rêve et cependant familiers des cols frontaliers catalans et de l’île de

Formentera, hantés par les séquelles tragiques le plus souvent

dissimulées de l’histoire franquiste.”

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La part du requin

L'histoire en elle-même est un prétexte à la description de la société marquisienne à Nuku Hiva au milieu de XIXe, au moment de l'annexion par les Français. On peut supposer que cette description est documentée puisque l'auteur à séjourné aux Marquises. Cette société marquisienne est fascinante ! Avec des positions très particulières sur l'amour, la mort, la vie.

Cette lecture est donc passionnante, et alimente le mythe, et mon rêve (qui ne se réalisera sans doute jamais) de connaitre ces îles paradisiaques. Ou pas... Les Marquisiens étaient cannibales... le tabou ultime pour nous ! Et ils se faisaient des vêtements avec les cheveux de leurs ennemis tués et mangés.

Cela m'a donné aussi envie de lire "Taïpi" d'Herman Melville qui relate son voyage à Nuku Hiva à la même époque. Et les récits de voyage de l'amiral Dupetit-Thouars qui annexa Nuku Hiva.

Une lecture qui en entraîne d'autres, comme des poupées russes, j'adore !
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Reconquista

Reconquista est un roman bouleversant sur la vie d'un réfugié espagnol qui tente de redonner un sens à son existence à travers une opération militaire diligentée des deux cotés de la frontière pyrénéenne.

Il existe en fait deux romans en un : d'une part, nous découvrons "la vie d'avant" du héros (Mateu) à Barcelone et de l'autre, nous suivons les déambulations du soldat avant, pendant et après le combat dans le val d'Aran.

Les deux parties restent très équilibrées tout au long du roman et l'alternance du mode narratif (entre le "je" et le "il") permet au lecteur de bien cerner le caractère et le tempérament du héros, mais surtout les raisons pour lesquelles il se trouve dans les Pyrénées à l'occasion de cette "reconquête".

Le climat et les paysages de montagne sont très bien racontés et donnent ainsi un vrai socle à ce roman empreint de mélancolie mais aussi d'un espoir qui naît petit à petit. Il est même intéressant de disposer d'une carte de la région à portée de main pour suivre les errances de Mateu.

La lecture de ce livre achevée, je me demande même si le mot "Reconquista" ne va pas plus loin que la simple référence historique pour désigner aussi la lente et difficile renaissance du héros. Comme si la violence et la douleur représentaient des passages obligés pour accéder à une certaine sérénité et paix intérieure...















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Reconquista

A la lecture de ce roman, le plaisir que j’en ai tiré, est resté comme un événement marquant dans ma mémoire.

En effet, « Reconquista » exprime de manière intense les grands moments et émotions de la guerre d’Espagne qui s’entrelacent dans ce beau texte : l'enthousiasme révolutionnaire de la période « républicaine » ainsi que la douleur liée à la poussée du « camp nationaliste » arrivant comme une sinistre vague.

On suit durant la lecture de ce livre enthousiasmant, Mateu, personnage complexe mais aussi extrêmement attachant. Lors de son évolution tout au long de « Reconquista », on est submergés par la tristesse de ce qui advient, mais aussi par la beauté incomparable des paysages où se poursuit cette errance.

Un superbe roman. Au terme de sa lecture, on a conscience d’en savoir beaucoup plus sur cette période, un peu comme si on l’avait vécue et qu’elle avait laissé en vous sa trace indélébile.

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La rive sombre de l'Ebre

« De ce côté » c’est la France, l’Ariège, pays d’accueil des grands parents et de la mère d’Antoine, fuyant les troupes franquistes en 1938. Le père d’Antoine resté sur le front n’en reviendra pas. De ce père biologique, Antoine ne connaît que le portrait et la détermination à combattre l’oppresseur. De l’Espagne, il ne sait « que la tristesse ». On ne parle pas de l’ « avant » dans sa famille afin de pouvoir reconstruire sa vie ici.

La mort prématurée de la mère d’Antoine, va libérer la parole familiale. La découverte de lettres de ce père inconnu va inciter Antoine à franchir la barrière pyrénéenne, à passer « De l’autre côté », à la recherche de l’histoire paternelle et de ses racines. Il en découvrira bien plus que ce qu’il était venu chercher…



Ce roman court et raconté simplement, m’a très facilement entraîné à la suite d’Antoine dans la découverte de son histoire familiale intrinsèquement liée à celle du peuple espagnol sous Franco. L’intrigue démarre lentement et va crescendo ; le rythme s’accélère au fil des découvertes d’Antoine. Le climat lourd de non-dit et d’interdits de ce village de l’Ebre, les révélations inattendues et les actions qui en découlent donnent parfois le sentiment d’être au cœur d’une intrigue policière et nous tiennent en haleine jusqu’au dénouement.



A travers l’histoire d’Antoine, l’auteur aborde des sujets qui m’ont touchés : l’exil, la quête d’identité, la filiation (biologique ou non), le poids du secret familial, l’importance de la mémoire, qu’elle soit collective, familiale ou individuelle. Il interroge sur la capacité des individus à se construire lorsqu’une partie de leur histoire leur échappe. Antoine est du côté de la vie…la fin très belle en est tout un symbole.

L’auteur rend également un bel hommage aux combattants Républicains tombés pour leurs idéaux, ainsi qu’aux réfugiés pour qui une certaine forme d’oubli a souvent été nécessaire pour se reconstruire.



J’ai apprécié la pudeur de ce roman : l’auteur ne s’épanche pas sur les sentiments de ses personnages. Ceux-ci transparaissent au détour d’un paysage, d’un geste, du souffle du vent, d’une odeur, des paroles interdites de La Santa Espina, offrant de beaux moments de lecture, des passages inspirés. Les sens pour entrebâiller la porte des émotions.

Ce roman se regarde, se sent et s’écoute autant qu’il se lit.

A découvrir.

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Un oubli sans nom

Si l'on posait ce livre devant moi avec le défi de deviner son auteur, je n'hésiterais une seconde : je le sais, c'est Serge Legrand-Vall. Je reconnais immédiatement son écriture fluide, harmonieuse, riche en goûts, sons, sensations, couleurs et senteurs, à tel point que le récit se fait film et le lecteur... spectateur !

Dans "un oubli sans nom", je passe un cran : de spectatrice, je deviens actrice : je me glisse aisément dans la peau de Suzanne, l'héroïne, puisque le narrateur personnage principal me donne accès à son intériorité. Je suis Suzanne et d’emblée, dès les premières lignes, je ressens le "froid de Novembre", "la fumée âcre de la cigarette qui me brûle la gorge". (P9)

Tout au long du récit, je vais vibrer au rythme des émotions de Suzanne, au cours d'une dure quête identitaire.

J'ai 17 ans. Enfant adoptée, je veux faire la lumière sur cette partie de moi-même (jusqu'à mes 5 ans) que je ne connais pas, remonter à mes sources "d'avant l'orphelinat", combler cet "oubli sans nom", être enfin "un tout" et non juste une partie de moi-même.

Une dure quête, oui, qui va m'emmener de Normandie à Formentera en passant par les Pyrénées dans les années 70... Car elles sont bien là, les années 70, avec leur musique, leur presse, leurs auteurs et leurs idéaux !

Une dure quête qui me fera aller d'aventure en aventure, au fil des indices difficilement gagnés, et qui forcera même une omerta datant de la guerre d'Espagne.

Certes, je connaîtrai mains tendues, amour et amitié, mais je passerai aussi par toutes sortes d'affres, incertitudes et traumatismes.

Quoiqu'il m'en coûte, je ne lâcherai jamais rien... Persévérance ? Acharnement ? Courage ? Rien ne pourra me détourner de ma quête.



Dernière page : je peux me libérer de l’emprise de ce livre poignant qui m'a passionnée, happée au point de me faire tout oublier. Je l'ai dévoré, mais je l'ai dévoré trop vite... J'ai sûrement manqué de beaux passages... Heureusement, je vais pouvoir le relire, tranquillement, sans précipitation, maintenant que je connais la fin : et quelle fin !!!
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Un oubli sans nom

J’aime la manière dont Serge Legrand-Vall a construit, écrit ce roman. L’histoire de Suzanne, jeune fille de 17 ans, à la recherche de ses origines, une longue et intense quête familiale qui entremêle la mouvance des années 70, la traversée d’une époque pleine de rêves, de liberté, ponctuée par des textes de chansons très bien choisis ( belle résonance ) , une narration qui alterne entre le «je» et le «tu» pour mieux révéler l’intime chez Suzanne, jusqu’au délicat choix des épigraphes (citations d’auteurs.)

Tout le cheminement de Suzanne, comme un voyage initiatique de la Normandie au Pyrénées Orientales puis des Pyrénées Orientales à l’île de Formentera qui ramène au drame espagnol du franquisme parait s’assembler comme les pièces d’un grand puzzle ( une énigme à résoudre… ).

On avance avec Suzanne, on veut en connaitre la suite, jusqu’à une très belle fin...

"Un oubli sans nom" est une belle oeuvre romanesque, sincère, émouvante, avec une belle écriture ,riche, fluide... un très beau roman que j’ai lu avec beaucoup de plaisir .

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Reconquista

Le terme de Reconquista fait généralement référence à la période immédiatement postérieure à 1492, date-clé de l’histoire de la péninsule ibérique qui borne les débuts de la reconquête des territoires conquis par les Musulmans et leur expulsion d’Espagne .Dans ce roman, Serge Legrand-Vall nous incite à porter nos regards vers une autre Reconquista, cette opération militaire menée en 1944 par des maquisards espagnols, issus des rangs du camp républicain , dans le Val D’Aran , région frontalière de la France .Mateu Canalis, l’un des membres de cette expédition , prend part aux combats mais la campagne tourne court :son bataillon est pris dans une embuscade, et il doit rebrousser chemin vers la frontière française .

Le roman s’articule principalement autour de la personnalité de Mateu Canalis, un policier soucieux de bien accomplir son métier, un homme de gauche mais « d’une gauche raisonnable », un fêtard alcoolique, en proie à la tentation permanente de la séduction .La technique narrative est de voir cet homme évoluer dans les années 36-37-38 à Barcelone , celles de la Guerre civile , des combats entre troupes franquistes et républicaines, celles de l’Utopie révolutionnaire ; et les années 44-45 , celles de la libération de la France et de la tentative de reconquête militaire de cette région du Val d’Aran , qui aurait dû être le prélude à une libération de la dictature fasciste de Franco.

Pourtant , en dépit de ses failles dans sa conduite personnelle, nous nous attachons à Mateu, et nous comprenons et partageons ses interrogations .Ainsi touche-t-il du doigt la différence existant entre la justice et l’ordre dans un constat désabusé : « J’ai passé plus de temps à courir après les anarchistes, dans leurs repaires du Raval on de Poble sec où ils noud filaient souvent entre les doigts, pour les coffrer à la prison Modelo, qu’à inquiéter les patrons .Une bonne façon de découvrir la différence entre ordre et justice. »

Cet homme , marqué par l’ambivalence, est aussi attiré par l’utopie , la réalisation d’idéaux révolutionnaires, même s’il est conscient du long délai nécessaire à leur atteinte et à leur réalisation .Il tombe amoureux d’Esperança , une femme éprise de ces idéaux , qui le convainc presque de partager ses idées .Mais au-delà de l’idéologie, c’est son exemplarité qui séduit Mateu et déclenche son amour pour cette femme .Pourtant , Mateu devient complice d’un événement peu commenté de la guerre d’Espagne : l’élimination systématique , sur ordre du NKVD de Staline , des opposants à sa ligne en Espagne , parmi lesquels les militants de la CNT et du POUM, syndicat anarchiste , et organisation politique d’extrême-gauche . C’est le début de la désillusion, des remises en cause de ses convictions : « L’époque de toute la gauche unie contre le fascisme était révolue ; tout comme celle où la presse anarchiste réclamait que le conflit idéologique entre les staliniens et leurs opposants reste mesuré. Les naïfs de mon espèce avaient réalisé avec beaucoup de retard qu’il s’agissait d’une lutte à mort. »

Peu de temps avant son départ de l’Ariège, Mateu est hébergé par Adrien et Jeanne, sa fille institutrice. Ces derniers lui laissent le souvenir d’une France républicaine, résistante, bien disposée à l’égard du réfugié espagnol auquel Mateu s’assimile. Une France bien plus accueillante que celle des années trente, qui avait laissé de biens mauvais souvenirs aux réfugiés espagnols parqués dans des camps d’internement.



Esperança décède sur une barricade dans Barcelone en proie au combat. Mateu finit par emmener Montse, une fille issue d’une liaison avec une autre femme d’extraction bourgeoise, Remei, vers les Antilles françaises, dans l’intention de rejoindre Cuba, où un membre de sa famille a servi durant la guerre d’Indépendance de l’ïle.

Serge Legrand-Vall réussit à nous restituer la dimension humaine de Mateu, ses doutes, ses erreurs, sa propension éthylique, son besoin final de cohérence, ses amours : Esperança, Remei, Jeanne. Il nous introduit, aussi, dans l’une des périodes les plus sombres et les plus controversées de la Guerre civile : cette liquidation des militants de l’extrême-gauche, et cet épisode moins connu de cette tentative d’intrusion militaire en 1944. Deux mérites essentiels de ce roman très réussi dans son atteinte à l’humanité de ses personnages.

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La part du requin

Bonjour,

J’ai ressenti cette même impression de tranquillité et d’apesanteur que dans les deux autres romans de cet auteur. Il s’agit d’un sentiment bien personnel et qui définirait en quelque sorte un premier avis général.

Sur le fond, j’ai toujours apprécié l’idée de voyage, d’évasion, de découverte et en même temps cette idée qu’on peut en apprendre toujours plus sur soi-même. Donc le thème un peu « à la croisée des mondes » me parle beaucoup et c’est ce que j’ai apprécié en lisant ce roman. Surtout que l’histoire des îles Marquises reste assez méconnue et je trouve positif de mettre la lumière sur ces iles et leur culture ancestrale (je suis fan de géographie!). Serge Legrand-Vall romance parfaitement ce moment historique et essentiel de ce petit bout de Pacifique. Donc bravo !

J’ai eu aussi plusieurs rappels littéraires au fil des pages en pensant successivement à Rouge Brésil de Jean-Christophe Rufin, à Paul et Virginie de Bernardin de Saint-Pierre et à l’œuvre du poète Saint-John Perse. On retrouve beaucoup de poésies dans le récit avec une omniprésente description du concept de Nature et de sa beauté (quel fragile équilibre !). Chacun des mots est pesé, sous-pesé et justement positionné à l’endroit où il doit se situer. Je me suis fait la remarque lorsque l'auteur utilise à deux ou trois reprises le verbe « écoper » ou quand est précisé, au milieu du récit, que le requin se sert de sa nageoire « caudale ». Le style et le vocabulaire sont riches et très diversifiés. Il y a un bel équilibre entre les descriptions et les dialogues, ce qui permet au lecteur de rester « concentré ».

Je recommande donc vivement la lecture de ce roman !
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La rive sombre de l'Ebre

Sensibilité et impressions partagées au fil de la lecture: les Pyrénées , la bourgade espagnole , la vie des gens de part et d'autre des cimes, la neige, cocon cotonneux entre mère et fils ... le pull tricoté à la main de l'étudiant arrivant en ville, l'enterrement simplement , la 4L .... Le décor est plein de finesse .

Et puis, viennent des questions profondes sur la guerre, celle-ci, les autres, toujours ravageuses jusqu'aux générations qui suivent, "secrets de famille", le silence toujours, incontournable silence ! p.68 "Qu'est-ce que ça va t'apporter?" "Tout ça est fini et enterré". Ces mots qui sont un appel au questionnement !

La paternité est merveilleusement décrite, tous ces pères pour Antoine ! le héros (Antonio), l'ouvrier (Émile), le charcutier totalement intégré (Manolo), le grand-père Lluis, et .. ??? Voici une maman aimante qui a su laisser de la place aux pères !

Les passages les plus durs sont pleins de pudeur.

Et l'édition est très belle .
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La rive sombre de l'Ebre

Une recherche d'un père, une recherche de son histoire et voilà que la boite à secrets de famille s'ouvre. Elle nous entraîne en Espagne à une époque trouble. Le rythme est soutenu et ne nous donne pas envie d'interrompre la lecture : Aller jusqu'au bout, aller au delà de cette ambiance lourde de non dit de ce village catalan pour comprendre...

très bon moment de lecture !!
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Un oubli sans nom

En quête d'identité

La guerre d'Espagne n'a pas fini de nous interroger sur la part de mystère des femmes et des hommes de part et d'autre des Pyrénées. Cette chaîne de montagnes qui ressemble à une feuille de fougère pour reprendre la formule d'Elisée Reclus, est davantage un lieu de passage qu'un barrage entre les deux peuples espagnol et français. Un roman, Un oubli sans nom de Serge Legrand-Vall publié aux éditions in8, aborde la question des enfants adoptés, ceux descendants de la première et deuxième générations des républicains espagnols.

Observons la couverture, vous avez combien je suis attaché au graphisme, aux photographies qui traduisent le texte, invitent à la lecture. En l'espèce, deux femmes revêtues de grandes robes noires avec un fichu sur la tête, une figure de notre Méditerranée. Elles sont de dos et marchent en se tenant la main, une belle image qui trouvera écho dans le livre, vous lirez. Face à elles, avance une jeune femme blonde, moderne, les yeux baissés comme éblouie par le soleil ou à la recherche d'un mystère. Vous lirez encore.

Les enfants adoptés, même choyés dans leur nouvelle famille, ont toujours ce doute, cette volonté de savoir. Ils sont en recherche d'identité. C'est le cas de Suzanne, née dans les Pyrénées-Orientales, adoptée par une famille normande. Français moyens, pas idiots, une vie familiale classique. Ils lui offrent tout ce qu'ils peuvent et elle ne leur en veut pas. Nous sommes dans les années 70, la jeunesse est bouillonnante. Kerouac, Leonard Cohen, tout est possible, y compris de traverser la France pour se retrouver dans ces paysages qui accueillirent dans la souffrance les réfugiés espagnols. Qui l'a confiée à l'Assistance publique ? Quel est son vrai nom ? Quel est ce village pyrénéen dont elle a un vague souvenir ?

A la recherche de son village, de sa famille, elle se découvre dans une aventure affective, intellectuelle, sexuelle, il lui faut remonter le temps. Nous, cela nous permet de découvrir les communautés libertaires et leurs complexités politiques, écolos avant l'heure.

Vous goûterez sans doute l'émotion du chemin, celle des retrouvailles. Pourtant retrouvera-t-elle ses parents ? Cette quête se poursuivra aux Baléares sous la dictature franquiste, plus particulièrement sur l'île de Formentera. Les atrocités de la répression, les fusillades sont évoquées à voix basse par les habitants, inavouables secrets ! Forte d'une reconstitution toujours imparfaite bien sûr, mais qui éclaire cependant Suzanne. Celle-ci revient en France et vous achèverez la lecture d'un livre qui est tout sauf mièvre et à l'eau de rose. Comme la vie !

Francis Pian. Émission “Au fil des pages”, Radio libertaire, 10 mai 2023

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Un oubli sans nom

Dans sa quête, Serge Legrand-Vall lève délicatement le voile sur le passé des personnages secondaires que Suzanne rencontre. Il y a un bel équilibre au niveau de l'intrigue, du contexte socio- politico-historique. Les thèmes de l'abandon,  des effets délétères de la dictature sur la capacité des personnes à mettre des mots sur les événements et leurs souffrances profondes sont mis en lumière.

 C'est un roman poignant et s'il se déroule dans les années 70, il interroge les thèmes universels du tabou, du silence, de l'impossibilité de penser, de la mémoire et du refoulement, du traumatisme,  de la sexualité,  des rivalités familiales, de la créativité, de l'amour et de l'amitié. 

La richesse des thèmes abordés laisse néanmoins place à l'expression de la vitalité de Suzanne, personnage ô combien attachant,  vibrante de sensibilité et d'intelligence.

Son courage et sa persévérance lui permettent de réécrire  une tranche d'histoire, la sienne et celle de ses ancêtres. C'est donc à travers le lien à l'autre,  les rencontres , les mains tendues , l'humanité que vont se tisser petit à petit les fils de la reconstruction identitaire de Suzanne.

 La description de l'environnement, de la nature est si précise et sensuelle que les sens du lecteur sont en éveil.  La musicalité du roman est chaleureuse et la possibilité de se référer à la liste des morceaux : "un oubli sans nom" sur YouTube est précieuse.

Un roman poignant et cinématographique que l'on garde auprès de soi avec la joie de se dire qu'on pourra le relire.
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La rive sombre de l'Ebre

Un très bon roman qui a, dans un contexte tragique, la gaieté et l'énergie de ses jeunes protagonistes. Si la guerre civile espagnole commence à avoir été racontée de nombreuses fois, ce n'est pas le cas de l'Espagne franquiste des années soixante, dans laquelle nous plonge cette histoire. Le climat délétère de ce pays replié sur lui-même où la Guardia Civil et la religion font encore régner la terreur imprègne l'atmosphère de ce roman. Mais sous la vivacité de son héros, un jeune ariégeois à la recherche de ses racines, ce village au bord de l'Ebre, va voir resurgir le passé et l'espoir de sa jeunesse.
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Reconquista

J'ai beaucoup apprécié ce roman, son histoire très documentée, son personnage et surtout cette double narration qui rend son texte et son personnage encore plus vivant...

Pour moi un bon livre est un livre qu'on a du mal à quitter,

à peine refermé , on a déjà envie de le retrouver, de se replonger dedans...

J'ai trouvé cela avec "Reconquista", un vrai plaisir de lecture, une belle écriture et une belle histoire sensible... J'aime à penser qu'Il y a sûrement une partie de l'auteur dans ce livre...



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