intervenants : Pap NDIAYE, directeur général duPalais de la Porte Dorée - Musée national de l'histoire de l'Immigration, Catherine COQUERY-VIDROVITCH, professeure émérite à l'Université Paris Diderot
Modération : Yasmine YOUSSI, rédactrice en chef Culture au journal Télérama
Une enfance clandestine pour échapper aux persécutions antisémites des nazis et de leurs sbires. Une vie consacrée aux « terres africaines » dont elle a remonté le fil de l'histoire pour l'inscrire dans celle du monde, révélant au passage la réalité coloniale. Pionnière en la matière, Catherine Coquery-Vidrovitch a tant à raconter. Ce qu'elle fera ici en dialogue avec Pap Ndiaye, auteur d'une préface accompagnant la publication des discours de l'afro-américaine Sojourner Truth (1797-1883), fille d'esclaves, abolitionniste et militante du droit de vote des femmes.
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la femme. Nous avons été tellement rabaissées que personne ne pensait que nous pourrions relever la tête ; mais à présent nous avons été piétinées assez longtemps ; nous allons nous relever et me voici. Je me disais, quand je voyais des femmes lutter pour leurs droits, je me disais quelle différence entre aujourd’hui et autrefois ! Je n’ai que quelques minutes pour vous parler ; mais autrefois, les rois de la terre étaient disposés à écouter une femme. Il y avait un roi dans le vieux temps, dans les Écritures ; à l’époque, on avait l’air de penser que les rois de la terre tueraient une femme si elle venait en leur présence ; mais la reine Esther 2 s’avança parce qu’elle était opprimée, et elle estimait qu’on lui faisait un grand tort, et elle dit : “Je porterai ma plainte devant le roi ou je mourrai.” Le roi des États-Unis serait-il plus grand, ou plus m
Les femmes veulent leurs droits, comme Esther. Elle voulait seulement exposer ses droits. Et lui était si généreux qu’il lui a dit : “Je te donnerai la moitié de mon royaume”, sans attendre qu’elle le demande, tant il était généreux avec elle. Mais les femmes ne réclament pas la moitié d’un royaume : elles réclament leurs droits et elles ne les obtiennent pas. Quand elles se lèvent pour les demander, est-ce qu’on n’entend pas les fils siffler sur leurs mères comme des serpents, parce qu’elles réclament leurs droits ; et peuvent-elles demander moins ?
Ils ont obtenu leur liberté – quelle chance formidable de voir l’esclavage détruit en partie ; pas complètement. Je veux qu’il soit détruit jusqu’à la racine. Alors vraiment nous serons tous libres. J’estime que, si je dois répondre pour les actions accomplies par mon propre corps tout comme un homme, j’ai le droit d’avoir autant qu’un homme. On fait beaucoup de raffut autour du fait que les hommes de couleur obtiennent leurs droits, mais pas un mot sur les femmes de On fait beaucoup de raffut autour du fait que les hommes de couleur obtiennent leurs droits, mais pas un mot sur les femmes de couleur ; et si les hommes de couleur obtiennent leurs droits alors que les femmes de couleur n’obtiennent pas les leurs, vous verrez que les hommes de couleur seront les maîtres des femmes, et ça n’ira pas mieux qu’avant. Je suis donc d’avis de faire avancer les choses pendant que tout est encore en ébullition ; parce que si on attend que l’agitation soit retombée, il nous faudra beaucoup de temps pour remettre les choses en route. Les femmes blanches sont beaucoup plus malignes, et elles savent plus de choses que les femmes de couleur, alors que les femmes de couleur ne savent quasi rien.
Les enfants, dit-elle, qui vous a fait la peau blanche ? N’était-ce pas Dieu ? Qui a fait la mienne noire ? N’était-ce pas le même Dieu ? Suis-je donc à blâmer parce que ma peau est noire ? N’est-ce pas faire un reproche à notre Créateur que de mépriser une partie de ses enfants parce qu’il lui a plu de leur donner une peau noire ? Il en va bien ainsi, mes enfants ; et vos professeurs devraient vous le dire et si possible éradiquer de votre esprit le grand péché du préjugé contre la couleur. Alors que les professeurs de l’école du dimanche connaissent ce grand péché, alors que non seulement ils n’enseignent pas à leurs élèves que c’est un péché, mais qu’ils y tombent trop souvent eux-mêmes, comment peuvent-ils espérer que Dieu les bénisse, eux ou les enfants ? Dieu n’aime-t-il pas les enfants de couleur autant que les enfants blancs ? Et n’est-ce pas le même Sauveur qui est mort pour sauver les uns et les autres ? Si c’est la vérité, les enfants blancs doivent savoir que s’ils vont au Ciel, ils doivent y aller sans le préjugé contre la couleur, parce qu’au Ciel les Noirs et les Blancs sont unis dans l’amour de Jésus.
Sisters, it ain't clear what you be after. If women want any rights more than they've got, why don't they just take'em, and not be talking about it?
I want to know what has become of the love I ought to have for my children? I did have love for them but what has become of it, I cannot tell you. I have had two husbands yet I never possessed one of my own. I have had five children and never could take any one of them up and say "my child" or "my children", unless it was when no one could see me.
Je vois que certains d’entre vous ont l’âme d’une oie, et d’autres ont une âme de serpent. Je me sens chez moi ici. Je viens à vous, citoyens de New York – je suppose que c’est ce que vous êtes. Je suis une citoyenne de l’État de New York ; je suis née ici et j’ai été esclave dans l’État de New York ; et à présent, je suis une bonne citoyenne de cet État. Je suis née ici, et je peux vous dire que je m’y sens chez moi. J’ai été ici et là, un peu partout, pour regarder et observer, et je connais aussi deux ou trois petites choses sur les droits de la femme. Je suis venue parler des droits de la femme, et je veux jeter ces petites choses dans le débat pour que ça continue à bouger. Je sais que ça fait un drôle d’effet et que ça donne la chair de poule de voir une femme de couleur se lever pour vous parler de différentes choses et des droits de la femme.
And how came Jesus to the world? Through God who created him and the woman who bore him. Man, where was your part?
Most of our color have been taught to stand in fear of the white man from their earliest infancy, to work as soon as they could walk, and call "master" before they scarce could lisp the name of mother.
(Maria W. Stewart)
Je veux que les femmes obtiennent leurs droits. Devant les tribunaux, les femmes n’ont aucun droit, aucune voix ; personne ne vient parler pour elles. Je souhaite que les femmes aient leur voix là-bas au milieu des chicaneurs. Si ce n’est pas un endroit qui convient aux femmes, alors il ne convient pas non plus aux hommes. J’ai plus de quatre-vingts ans ; il est temps que je m’en aille. J’ai été quarante ans esclave et quarante ans libre, et je suis prête à rester ici quarante ans de plus pour avoir l’égalité des droits pour tous.
Quand j’étais esclave, je haïssais les Blancs. Ma mère me dit, quand j’allais être vendue et emmenée loin d’elle : “Je veux te dire ces choses que tu sauras toujours que je t’ai dites, car il y aura beaucoup de choses qui te seront dites quand j’aurai laissé cette vie pour entrer dans le monde à venir.” Et dites-vous tous, car il y a ici une grande assemblée, que quand je sortirai de cette existence, vous saurez ce que vous aurez entendu de la bouche de la vieille Sojourner Truth.