On arrête.
Précisément pour ne pas laisser se terminer notre histoire, tenter de respirer à nouveau, sentir l’air emplir mes poumons dévastés, mon cœur anéanti, contrecarrer l’absence par l’absence, le silence par le silence, le manque par le manque, le vide par le vide, le rien par le rien ou le tout peut-être, un ailleurs, d’autres parfums d’autres lumières d’autres couleurs le soleil le vent la langue la distance, une tentative d’être au monde sans elle, hors d’elle, hors d’elle et de moi qui suis elle.
Extrait, Page 30 : Elle nageait au large, moulée dans une combinaison et un bonnet de bain noirs, silhouette lointaine dans la bruine dont la vue, bizarrement, me troubla. Je venais de terminer une série de brasses et reprenais mon souffle. Ses mouvements étaient précis, maîtrisés, lents, sensuels, mélange de force et de douceur d’où se dégageait une énergie sinon palpable, en tout cas magnétique. D’emblée j’eus envie de toucher son corps, m’y coller, m’y fondre, disparaître à l’intérieur. Je ne m’explique toujours pas cette attraction immédiate, et qui n’a jamais cessé depuis. Tout ce que je sais c’est que je l’ai aimée instantanément, que je voulais soudain être le corps intriguant, mouvant, aérien, à la fois lourd et en apesanteur, mon propre corps aimanté, happé par cette créature aquatique et volatile, sans que j’en comprenne le phénomène et encore moins le pourquoi.