Citations de Yasmine Djebel (24)
Et un jour, tu es apparue et tu as soufflé sur ma tente. Tu as mis à nu mes blessures les plus profondes. Tu m'as obligé à affronter des sentiments que j'avais décidé d'enterrer. Tu m'as fait comprendre à quel point ma vie n'avait aucun sens. Et surtout, à quel point je désire rester à tes côtés...
Vous m'avez tous tourné le dos en criant à une malédiction. Des livres, tu dis? Je les échange sans hésiter contre une mère pour panser mes plaies.
- [...] Maintenant raconte-moi, petit fantôme, comment tu t'es retrouvé ici ?
La gorge de Sirem se serra.
- Par ma faute. Uniquement par ma faute.
- Mmm. Derrière chaque faute réside une action, et à la fin, c'est une vie que l'on a vécue. Et crois-moi, la mienne, je l'ai bien vécue.
Sirem lança un regard à Tanit qui trépignait sur son épaule.
- Mais le but de la Capitale est d'unir le peuple de la Constellation en promouvant ses valeurs et le partage du savoir, objecta-t-elle au souvenir de son travail au Jardin.
- Les valeurs et le savoir de qui, au juste ? Une belle excuse pour uniformiser les cités et s'assurer qu'aucune d'elles ne se démarque trop, la contredit Hicham. La cité d'Argent a refusé de se plier à la tyrannie du roi, et tout le monde sait comment elle a fini !
Le couturier se servit un verre d'eau, les mains tremblantes de colère. Sirem ne savait plus quoi penser. C'était à cela que travaillait Ziri ? Elle se remémora tous les manuscrits détruits, car non conforme au classement de la future université. La véritable mission du Jardin était-elle d'imposer une vision unique du monde et ainsi garantir la domination d'Ithri sur les autres cités ?
Tout ce qui est perdu n'est pas voué à être retrouvé… (...) Mais tout ce qui disparaît n'est pas forcément perdu.
Réfléchis, Sirem : à quoi bon rassembler tous ces livres, si c'est pour ne tirer aucune leçon de notre histoire ?
Apprends à être ta propre lumière, Kamil, pour que rien ni personne ne puisse te plonger dans l'obscurité.
Surtout ne prononce pas mon nom, ni le tien ni un autre. Et quand ils s'interrogeront, ne réponds à aucune de leurs questions. Mais ne t'avise pas de rester silencieuse ! Ainsi, ils sauront que tu viens de ma part.
Intimidé par son examen, le sorcier baissa légèrement la tête et la flamme se mit à vaciller, révélant son arcade fendue. Une trace de sang séché luisait dans la nuit, l'écaille d'une plaie qui marquerait son visage à jamais. Une chape de plomb s'abattit sur les épaules de Sirem. Combien de personnes devraient encore payer pour lui avoir fait confiance ? Non, elle ne le permettrait pas. Elle ne le supporterait plus.
Elle se releva et tourna le dos à la mer.
- Apprends à être ta propre lumière, Kamil, pour que rien ni personne ne puisse te plonger dans l'obscurité.
Les yeux secs, Sirem rejoignit la grotte et s'enfouit sous sa couverture.
Un écho déformé retentit parmi les ombres.
"Pour aimer, il faudrait déjà être en vie", souffla la voix de Yidir.
- Je quitterai ce taudis, que les Astres m'en soient témoins.
- Je sais.
Jamais Tanit n'abandonnerait. Jamais elle ne céderait. Pour Sirem, cette certitude formait le plus solide des remparts.
À celui qui a emmêlé les fils avec ses mains de les dénouer avec ses dents.
Si tu poursuis ta quête, par trois fois tu retrouveras ce que tu as perdu ; une flamme brûlera pour toi dans un écrin de cuivre; un esprit brillant et une lame oubliée empêcheront tes fantômes de crier victoire. Ainsi l'éclat d'une reine renaîtra grâce au nom d'une étoile...
À ces derniers mots, Sirem sentit les serres du faucon s'enfoncer dans son épaule.
Mais, méfie-toi, mon enfant !
La voyante posa deux yeux troubles sur Sirem. Méfie-toi des combats de fumée, autrement, seule la mort triomphera à la lumière de l'Astre trahi !
Une fois sa tirade finie, les yeux de Dalila se révulsèrent et elle s'effondra sur place. Anouar se précipita vers elle. La vieille femme le rassura en tapotant une main tremblante sur son bras. Sirem, horrifiée, ne bougea pas d'un pouce. Que venait-il de se passer ? Le chef des nomades tourna la tête vers la tasse renversée. Une traînée noire s'était imprégnée dans le tapis.
- Ton ennemi est plus redoutable que je le pensais, souffla-t-il.
Quel ennemi ? Sirem interrogea du regard la voyante, mais celle-ci semblait au bord de la conscience. À cet instant, elle comprit deux choses : la première, c'était qu'elle n'obtiendrait plus rien de la vieille femme ; et la seconde, que Tanit était loin de lui avoir révélé la vérité.
- La différence, Sirem, c’est qu’à présent j’ai la certitude que même si elle continue à faucher les étoiles, elle ne pourra jamais dépouiller le ciel.
Ma tenue est ridicule, tu ne trouves pas ? lança- t-elle. Mes parents me l'ont cousue avant de quitter Qamar. Enfant, j'avais une santé fragile, et ils étaient persuadés que je ne survivrais pas à l'exode. Leur plus grande peur, c'était que je meure sur le trajet, sans sépulture ni tunique mortuaire. Que mon esprit, trop faible, soit incapable de rejoindre les Astres et qu'il reste coincé dans un petit cadavre pourrissant sur les routes. Ces symboles étaient censés me protéger de ce destin funeste.
Sirem se rencogna dans sa chaise, le regard dans le vague. C'était la première fois qu'elle se confiait à ce sujet.
- Finalement ce sont eux qui n'ont pas survécu. Notre boutique a brûlé la nuit même de notre départ. J'ai réussi à m'enfuir et à atteindre Afra avec un autre groupe de réfugiés. Là-bas, je n'ai eu personne vers qui me tourner. Qui aurait voulu d'une bouche supplémentaire à nourrir ? Aucun exilé de la cité d'Argent ne pouvait se permettre ce luxe. Sans parler des rumeurs qui couraient à mon sujet ! Les gens marmonnaient dans mon dos - marmonnent toujours d'ailleurs - qu'en voulant tromper la mort, j'avais causé celle de mes parents...
Kamil parut se raidir à sa remarque, mais n'objecta pas. Elle continua :
- J'ai eu la chance de trouver Nora sur mon chemin, et c'est elle qui m'a conduite chez Ziri, le mari de sa défunte sœur. Ils m'ont élevée tous les deux et je n'ai jamais manqué de rien. Malgré mon statut, Ziri a remué ciel et terre pour que j'apprenne à lire...
Sirem s'interrompit. Ses mots devenaient douloureux - et elle savait cette sensation sans lien avec l'état de sa gorge -. Kamil ne s'offusqua pas de son silence, attendant patiemment qu'elle reprenne. Ce qu'elle fit :
- Parfois, je me demande si ces deux-là ne m'ont pas recueilli plus par défi que par simple bonté !
Un rire sans joie lui échappa. pg 197
04 pencha la tête de côté et Hoàng Mai sentit un nouveau sentiment l'envahir pour cette étrange créature, cet enfant curieux. Une tendresse qu'elle n'aurait jamais cru pouvoir ressentir à l'égard d'une machine. (84)
même si elle continue à faucher les étoiles, elle ne réussira jamais à dépouiller le ciel.
Dangereuse, incontrôlable, renégate... Il existait beaucoup de mots en ce monde pour décrire Aïcha, et tous pouvaient se résumer en un seul : quoiqu'il advienne, elle resterait aux yeux de ce monde la Medjnouna, la Possédée. (124)
Ensuite, nous devrons partir. Les réponses à mes questions ne se trouvent pas ici.
A celui qui a emmêlé les fils avec ses mains de les dénoués avec ses dents
On ne soupçonnera jamais assez les belles surprises qu'un brin d'audace peut nous réserver