La seule frontière qui sépare les enfants c'est la tendresse que certains ont connue, les autres pas. Ici comme ailleurs, à Marseille comme à Anvers, Bangkok ou Bogotà la seule chose qui compte est l'amour que nous avons reçu , et peut-être un jour, un livre.
Extrait du récit : Le voyage immobile, de René Frégni
Je suis arrivé à l'armée avec un mois de retard. Déserteur ! On me jeta dans le cachot d'une forteresse militaire. Dès le deuxième jour l'aumônier de la prison m'apporta ce que je lui demandais, des lunettes à peu près à ma vue, et un livre. Ce livre s'appelait Colline son auteur Jean Giono. En quelques minutes j'oubliai le poids des murs, la saleté de mes deux couvertures. C'était l'histoire d'un vieil homme qui va mourir au milieu des collines. Il voit des serpents qui sortent de ses doigts, un chat noir traverse la place d'un village, une fontaine s'arrête de couler. Bref, presque rien et cependant toute mon enfance entrait dans ma cellule.
Grâce à ce premier livre qui fait entrer la lumière au plus profond de ma solitude, j'allais entamer le grand voyage immobile au pays de mots....
Il me fallut vingt ans pour écrire un premier roman.
On me demanda alors d'aller partager cette passion pour les mots avec une poignée de détenus des Baumettes. Après cinq ans passés derrière des murs et des barreaux tout homme se met à ressembler, à penser à un mur. Ceux qui s'arment un jour d'un stylo sont sauvés. Par les passages secrets que dessine l'encre ils retrouvent les voies qui mènent à la beauté, aux couleurs du monde.
extrait du récit "Le voyage immobile", de René Frégni
Les écrivains de la Somme, s'ils n'ont pas tous été inspirés par le terroir parce qu'ils l'ont quitté ou l'ont renié, en possédent souvent cet esprit gaillard que décrit Michelet, que l'on peut définir comme une gaité libre et qui semble être un des traits dominants du charme picard.
Pourquoi écrire en picard, pourquoi le ire, pourquoi y prendre tant de plaisir ? [...] Par souci d'exprimer les choses autrement, avec des mots dont le sens s'adapte à la perfection dans la construction d'une pensée qui n'est pas la même que celle qu'exprime le français, ajoutant sa malice, sa critique, son sentiment propre, sa différence. Par plaisir, surtout, d'entendre, de transcrire ou de transmettre la musique des mots, musique propre au parler d'une communauté qui partage la même histoire, les mêmes souvenirs, les mêmes paysages, les mêmes tâches, les mêmes fêtes, les mêmes blessures, les mêmes passions.
Le matin vint. Ceux qui auront vu les aubes de la guerre, après les nuits employées à combattre ou consumées dans la sanglante besogne des ambulances, ceux-là connaîtront une des plus grandes laideurs et une des plus grandes tristesses du monde.
Pour ma part, je n'oublierai jamais cette lumière avare et verte, cet aspect découragé des lampes et des visages, cette odeur suffocante des hommes envahis par la pourriture, ce frisson du froid matinal, pareil au dernier souffle glacé de la nuit dans les frondaisons engourdies des grands arbres. Georges Duhamel
l'étranger entra il paraissait encore plus vieux et plus misérable que Misère, et n'avait pour se vêtir qu'un sarrau bleu en haillons.
asseyez vous, mon brave homme, dit Misère. Vous êtes bien mal tombé, mais j'ai encore de quoi vous réchauffer.
Elle mît au feu sa dernière bûche et donna au vieillard trois morceaux de pain et une poire qui lui restaient...le poirier de la misère
... et tu auras une idée du département du Nor, que j'ai traversé dans presque toute sa longueur... pont de rochers, pont de montagnes, pas le plus petit lac ; c'est un pays plat, uniforme mais il rachète ce défaut par la richesse de sa culture et l'abondance de sa végétation.
Il pleut sur Nantes
Donne-moi la main
Le ciel de Nantes
Rend mon cœur chagrin.
Barbara, Nantes.