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Critiques de Éric Cherrière (148)
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Gamine Guerrière Sauvage

En introduction des trois parties qui composent le roman, un chapitre court mais édifiant nous met en présence de la narratrice Maud que l'on devine être la « gamine guerrière sauvage ». Les sentences émises par son grand-père, lors de l'enterrement auquel il l'a emmenée, leçons de vie qu'il n'a pas su faire entrer dans la tête du père de Maud ne seront pas oubliées par celle-ci et rythmeront en quelque sorte sa vie.

« La vie, c'est comme la guerre, ma petite Maud, les seuls vainqueurs sont ceux qui survivent. »

« N'oublie pas, ma petite Maud : il n'y a ni bonnes ni mauvaises armes. Au bout du compte, une seule chose importe. Rendre les coups. »

Maud est née le 11 septembre 2001, une date restée dans toutes les mémoires. Elle vit à Tulle dont elle connaît le passé historique : le massacre du 9 juin 1944 et les quatre-vingt-dix-neuf pendus. Son père, ex-champion d'athlétisme est employé à la Fabrique d'armes. Sa mère, ex championne de bodybuilding est agent de sécurité au centre commercial et donne des cours à l'Athéna Fitness club chaque vendredi soir pour arrondir les fins de mois. Son frère Alban, qu'elle adore, plus jeune qu'elle d'un an fait du cross, coaché par son père. Il se bat du mieux qu'il peut, contre ses adversaires, « contre lui-même et contre le poids que font peser sur ses épaules les échecs de notre père ».

Maud a une main morte, la main droite, tranchée au niveau du poignet et porte une prothèse : sujet tabou à la maison, aucune réponse à ses questions.

Très intelligente, elle tente de trouver sur Internet les réponses refusées par ses parents sur l'origine de ses blessures et voyage depuis des années, la nuit, dans la nasse des réseaux. « Grâce à des logiciels aussi performants qu'illégaux, je suis passée reine dans l'art d'être intraçable ».

il faut ajouter l'octroi de sa Majesté la reine de Norvège à son arrière-grand-père Alban de la concession d'une parcelle de 1 kilomètre carré sur l'inlandsis de l'Antarctique en remerciement « d'inestimables services rendus au royaume et au peuple de Norvège, au péril de sa vie, au sacrifice de ses mains ».

Cette quasi double vie, celle vécue au sein de cette famille certes modeste mais aimante et l'autre, celle vécue via les réseaux sociaux qui compense les manques aurait pu continuer ainsi, si un événement ou plutôt un délit mineur commis par l'un des membres de la famille n'était pas venu les jeter dans la précarité et donner à Maud la presque obligation pour elle d'intervenir pour les sortir de la misère. Cet élément déclencheur sera la source d'un bouleversement complet et irréversible dans les habitudes de vie de la famille.

À eux seuls, les trois mots qui composent le titre : Gamine Guerrière Sauvage décrivent absolument bien cette Maud confrontée au monde et superbement représentée sur la couverture du livre. Quel portrait magnifique et vivant de cette enfant du siècle nous a brossé Éric Cherrière, cet auteur déjà primé ou nominé pour d'autres romans et également réalisateur-scénariste !

Il montre comment une enfant blessée et trompée par la société peut se rebeller et devenir une véritable guerrière pour faire face aux inégalités sociales, s'affranchir des codes sociaux et du déterminisme social, pour pouvoir vivre libre. Il décrypte très bien l'engrenage dans lequel un être peut tomber avec la quasi impossibilité de retour en arrière.

C'est avec beaucoup de crédibilité qu'il révèle le rôle immense que peuvent jouer les réseaux sociaux dans la vie des jeunes d'aujourd'hui et le pouvoir que peuvent arriver à détenir ces surdoués de l'informatique s'ils deviennent hackers.

Il n'oublie pas de mentionner les marchands d'armes, les paradis fiscaux et ce double rôle que peuvent jouer certains politiques ou personnages importants paradant avec une façade très humaniste derrière laquelle se cache un tout autre visage où l'argent se révèle être leur seule préoccupation.

Avec ce thriller, Éric Cherrière nous embarque dans un grand périple, nous emmenant jusqu'à la Cour pénale internationale de la Haye non sans nous avoir fait rêver à ces étendues glacées de l'Antarctique. Une tension et une angoisse latente sont présentes dès le début et ne feront que s'amplifier pour atteindre de grands sommets… Néanmoins, l'amitié et l'amour tout aussi présents, sans oublier le franc-parler savoureux du grand-père, une fine poésie et une touche de merveilleux, nous permettent de supporter l'enchaînement des situations jusqu'à un dénouement plutôt imprévu.

C'est un roman très fort, très contemporain, politique et social mais avant tout un roman psychologique très maîtrisé qui m'a enthousiasmé par son originalité et qui pose brillamment la question du déterminisme social. C'est également un récit qui interpelle violemment.

Si j'ai pu découvrir ce brillant auteur et ce thriller passionnant, c'est grâce aux éditions Plon et à Babelio que je remercie très sincèrement pour m'avoir donné cette chance d'être sélectionnée pour intégrer les experts polar de ces mêmes éditions.


Lien : http://notre-jardin-des-livr..
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Gamine Guerrière Sauvage

Retenu pour faire partie de l'équipe des " experts polars des Editions Plon ", qu'il me soit permis de remercier chaleureusement ces mêmes Editions et toute l'équipe de Babelio qui m'ont fait un grand honneur en m'accordant leur pleine confiance .



Reçus hier , deux volumes ont pris place parmi "les anciens " de ma PAL et ,

" contrat de confiance oblige " vont " griller " la politesse à tout le monde . du reste , c'est déjà fait pour le premier d'entre eux, " Gamine guerrière sauvage " . A peine reçu, déjà lu ....Et oui , pas moyen de le lâcher....Au moins , pas d'atermoiements pour la note .....



Tout d'abord , une très belle présentation avec une superbe couverture à rabats et une illustration plutôt féline d'un visage qu'on identifiera rapidement comme étant celui de l'héroïne, Maud , visage dont le regard fascinant semble donner rendez- vous à ceux et celles qui , d'aventure , se hasarderaient sur son territoire ...Les marques sur le visage et les " mots " du titre ne peuvent qu'inciter à une certaine réserve, gardez - le bien en mémoire...et ce " Gamine guerrière sauvage " vous le comprendrez mieux très rapidement .



La famille de Maud , c'est une tribu disparate , cinq personnages souvent en contradiction , en conflit , tous " marqués " mais qui savent toujours se rallier sous la bannière d'un amour familial peu commun . Celle qui " rayonne " , qui éclabousse le roman par son intelligence , son refus de l'uniformité, des conventions , de la soumission , de l'ordre social établi, c'est elle , c'est Maud . Née le 11 septembre 2001 , l'actualité lui a déjà volé sa naissance et un événement qu'on lui tait , un événement " tabou " lui a volé une main .

.Personnage complexe , Maud " tire les ficelles " de l'intrigue brutalement , violemment , sans pitié. Elle vit avec son père, sa mère et son frère Alban...Une vie pas forcément " glamour " qui en abattrait plus d'un...plus d'une .



Et puis , il y a le grand - père, 75 ans , personnage tutélaire, marqué par les événements du passé, toujours bougon mais toujours respectueux et doté d'un immense sens de la justice et de l'honneur . Une sorte de Totem indéboulonnable et vénéré, un très beau personnage .



C'est toute cette tribu qui va évoluer sous nos yeux , qui va refuser, par force ou raison, tout ce que la décence rend obligatoire , qui va " plonger de Charybe en Scylla " dans un monde qui , au contraire , aspire à l'uniformité , même si elle se drape d'injustice .



Ce roman est noir , très noir et le chemin parcouru entre Corrèze, Norvège et autres régions est long , sans moment de respiration , sans moment de vraie douceur . Ça commence avec une tension latente mais supportable puis ça monte , ça monte , ça monte en intensité jusqu'à la toute dernière ligne qui....Vous verrez bien ...



Pour moi , ce roman est une réussite pour un auteur que je ne connaissais pas mais qui , d'après des avis babeliotes convergents , a déjà fait ses preuves et conquis de nombreux amateurs du genre .



Son style est travaillé, clair , précis et fait vivre avec le même bonheur les scènes qu'elles soient tragiques , drôles ( très rares ...) ou dramatiques. Ses mots font vivre tous les sentiments , les attitudes , font se rejoindre la poésie et la dramaturgie , et les dialogues , loin d'être trop nombreux sont insérés à bon escient pour expliciter au mieux toutes les situations . Et puis , en " lançant " Maud en ado révoltée à l'extrême dans une société figée , l'auteur nous envoie des tonnes de sujets de réflexion , des interrogations qui ne peuvent que titiller notre moi intime . C'est fort .



Voilà mon ressenti . J'avoue que je suis ravi de la découverte de cet auteur limousin que ...je ne connaissais pas , pardon à lui . Je lui promets de rattraper rapidement mon retard et j'espère pouvoir le rencontrer un jour prochain sur un salon , pourquoi pas à Brive en novembre ? Ce serait vraiment bien , ça voudrait dire .....



En attendant , prudence , Maud et la Covid , elles sont redoutables et ...ce n'est peut - être pas fini .
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Gamine Guerrière Sauvage

J’ai entendu beaucoup de bien de ce livre. Merci à @sylviedoc qui m’a donné envie de lire ce roman suite à son retour endiablé.



Ce roman est l’histoire d’une adolescente française de seize ans, Maud. Amputée de sa main droite (le mystère planera longtemps sur l’origine de cette amputation), Maud est douée d’une intelligence hors pair. Aux côtés de ses parents et de son frère Alban, elle développe une maturité impressionnante. Son père, ex champion d’athlétisme a tout d’un raté, sa mère bodybuildée et agent de sécurité pour une entreprise de conserves ne relève pas davantage le niveau. Pas très folichon tout ça.



Un drame va survenir et plonger cette famille dans la précarité. Maud va se découvrir sauvage et guerrière et protéger sa famille. Elle se souvient d’une phrase de son grand père à sept ans lors de l’enterrement d’un ennemi. « Dans la vie, Maud, une seule chose importe. Rendre les coups ».



Cette phrase elle va en faire son créneau et mettre son intelligence et combativité au service de ses proches.

Elle découvrira petit à petit l’histoire de son arrière grand père qui semble avoir légué à Maud plus encore que de la combativité…



J’ai aimé le portrait de cette adolescente, son caractère, sa débrouillardise, son franc parler, son côté altruiste et empathique pour plus misérable qu’elle.



Je déplore néanmoins certaines longueurs où, question de goût, l’histoire autour de son arrière grand père ne m’a pas passionnée. J’aurai de loin préféré que toute l’histoire se concentre sur Maud.



L’écriture quant à elle est sobre, fluide et percutante. Elle va droit au but avec certains passages extrêmement visuels. J’aime d’ailleurs de plus en plus ces histoires qui se lisent comme on regarde un film de Tarantino. On en prend pleins les yeux. Et même avec un livre, on peut aussi s’en mettre pleins les yeux. C’est le cas avec Gamine guerrière sauvage.
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Mon coeur restera de glace

En 1918, Lucien Faure, maire et boulanger d’un petit village de Corrèze, se voit accablé du deuil de son fils et de ses petits-fils : le premier a été porté disparu au front, l’aîné de ses petits-enfants en est revenu gravement estropié, et le plus jeune, enfui au plus profond de la forêt proche, n’a jamais plus été revu. Vingt-six ans plus tard, en 1944, un convoi allemand traverse la même forêt et disparaît à son tour… Ce n’est qu’en 2020, lorsqu’au seuil de la mort un criminel de guerre allemand décide enfin de raconter son passé, que le mystère de Corrèze s’éclaircit…





Indéniablement, l’histoire est bien menée, ménageant suspense et surprises, dans un style narratif fluide, vivant et extrêmement visuel. Tordue à souhait, l’intrigue surprendra sans doute tous ses lecteurs, peut-être un peu trop d’ailleurs : à force d’intrications, l’ensemble en perd sa vraisemblance et se transforme en une fable d’une extrême violence que ne renierait pas Quentin Tarantino.





Guerre rime avec violence me direz-vous, et l’on sait les horreurs aussi bien des tranchées que des forfaits commis sur les civils, mais rien ici ne vient voiler la confrontation directe avec l’atrocité, celle des exécutions sommaires sous la pression nazie, ainsi que celle dictée par la folie à l’état pur. Certains aspects de l’histoire m’ont évoqué le film Le vieux fusil, mais la vengeance déborde ici dans un délire sans fin, où il devient impossible de discerner ami ou ennemi : le Mal est universel, ce sont les circonstances qui vous y poussent ou vous en préservent, quel que soit le camp.





A défaut de l’avoir de glace, c’est le coeur bien accroché qu’il vous faudra aborder ce roman qui interroge sur la barbarie dont sont capables les hommes : pour ma part, sa violence sans fard me l’a laissé au bord des lèvres.


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Mon coeur restera de glace

C'est après avoir découvert le très beau " Gamine Guerriére Sauvage " que j'ai voulu en savoir un peu plus sur Eric Cherrière , un auteur qui , je l'avoue m'avait vraiment conquis .

Heureux hasard , la parution , dans le même temps , en poche , de " Mon coeur restera de glace " , un précédent opus qui , si j'en crois les notes attribuées par les amis et amies babeliotes , avait déjà reçu un accueil suffisamment favorable pour attiser ma curiosité....

Ma librairie favorite ...et l'objet , dés notre première rencontre a tout pour me plaire . J'adore cette couverture mystérieuse, floue , sur laquelle une masse de conifères embrumés se mirent dans les eaux opaques d'un lac . Un monde menaçant, trouble , un peu " glaçant " , il faut bien l'avouer , une impression de " malaise " portée à son paroxysme par le titre et par une disposition centrale de lettres noires , en milieu de couverture . Sobriété , efficacité aussi , tant je suis certain que , comme moi , vous la fixerez longtemps après avoir tourné la dernière page et que vous apprécierez mieux encore la dextérité du concepteur à créer une " atmosphère " avant même de découvrir les premiers mots de l'intrigue. J'ai toujours soutenu l'idée que , pour moi , la couverture jouait un grand rôle , en voici une belle ..." illustration " .

Bon , comme il n'est tout de même pas conseillé de ne " partir "qu'avec la couverture , voyons la quatrième . Là , mes chers amis et amies , qu'est- ce que je fais ? Je vous la recopie ou je vous laisse la découvrir à la librairie ?

J'ai choisi , vous êtes suffisamment " grands " pour savoir si ce livre vous plaira ou non et puis , je le sais bien , vous n'attendez que ça, " faire un saut " chez votre libraire préfèré , surtout un jeudi , jour de parution des nouveautés. Là, avouez- le , je suis fort , hein ....

Tout de même , je vous donne quelques éléments, trois dates , 1918, 1994 , 2020 . le coeur d'une forêt de sapins au fin fond de la Corrèze. Une unité de soldats allemands . Des photos ,. Des arbres peints .Un secret et l'heure de révélations terribles ....

Pas plus , vous n'en saurez pas plus , j'assume .

Cependant , je me dois de vous dire que vous tenez entre les mains un roman noir , un " sacré " roman noir , un roman " sacrément " noir. Certaines descriptions sont dures , difficiles , cruelles et se " marient " avec une extraordinaire poésie qui nimbe une nature omniprésente , aussi belle, aussi sublime qu'angoissante , oppressante , menaçante.....

L'écriture fait le " lien" entre l'homme et la nature et il faut se montrer particulièrement attentif pour suivre les méandres de la pensée de l'auteur .Le bougre , il sait où il va , il connaît le chemin , il sait tordre les mots , les phrases , il sait nous mener où il veut , soumis , impuissants à renoncer , à quitter cet endroit aussi fascinant que dangereux . Par contre , si vous vous éloignez trop de lui ....Personnellement , j'ai adoré ce roman et je le conseille aux " amateurs du genre " , sans aucune hésitation. Par contre , je connais l'aversion de certains amis pour la violence ( ...surtout des amies du reste , à qui j'adresse un amical clin d'oeil ) et donc....

La grande richesse de la littérature, c'est son éclectisme , sa tolérance . La littérature offre et s'offre à tous . A nous d'y tracer un chemin et de refuser de tous suivre le même . Je pénètre dans la forêt , que ceux qui veulent m'accompagner le fassent , quant à ceux qui veulent suivre d'autres voies , on se retrouve un peu plus loin , promis . Allez , bonne route et ...à très bientôt .
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Gamine Guerrière Sauvage

Une famille de loosers ? Le père, convaincu qu'il n'a pas su réaliser les espoirs de son père, travaille à la fabrique d'arme, et arrondi ses fins de mois avec de petits trafics qui lui vaudront prison et licenciement. Alban, le fils, reproduit le schéma du père : élève moyen, pas assez doué pour devenir champion en athlétisme. La mère, ancienne championne de bodybuilding, végète comme vigile dans un centre commercial, complétant avec quelques piges dans le club de fitness de sa copine Marie.

Et puis il y a Maud, la fille. Amputée très jeune de la main droite, élève brillante, elle a appris à surfer sur le dark net dès la préadolescence. Quand son père est incarcéré, sa colère contre la société enfle, et elle décide de se venger...



Eric Cherrière écrit ici le roman de la colère, celle des adolescents à l'encontre d'une société qu'ils ne comprennent pas, qui ne les écoute pas... Parents socialement déchus, mis au ban de la société, que reste t'il à ces enfants, quels moyens d'expression ?

Avec Maud, ce sont le calcul et la violence qui vont tracer la route de l'avenir. La force de cet exutoire est telle qu'elle entraîne le frère et les parents derrière elle. Seul le grand-père saura garder un recul qui lui évitera d'être emporté.

Les deux paragraphes précédents pourraient laisser penser que le roman est dur, sans tendresse. Il n'en est rien ! Il y a beaucoup d'humanité chez les proches de Maud ; il y en a beaucoup en elle, mais elle l'ignore. Et à la fin, c'est bien l'amour et le lien familial qui permettront d'éviter le pire...

Roman singulier, que je qualifierai de "noir", où la morale finit, de justesse, par l'emporter. Ecrit d'une plume alerte, bien rythmé, dans un style très accessible sans tomber dans la facilité, c'est une roman qui aurait pu être classé en catégorie "ado" ou "jeunes adultes".



Merci à Babelio et aux éditions Plon de m'avoir permis de découvrir ce livre et son auteur.
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Toucher le noir

Après Écouter le noir et Regarder le noir, Toucher le noir est un nouveau recueil de nouvelles sous la direction d'Yvan Fauth.

Je ne sais pas si c'est parce que le toucher est un sens moins développé chez moi que les autres sens, mais cette lecture m'a plutôt déçu.

Je n'ai pas retrouvé le rythme et le dynamisme des précédents opus. Pourtant, les auteurs ont trouvé des idées originales, parfois même très astucieuses, pour illustrer le thème ; mais cela ne m'a pas suffi...



- J'ai beaucoup aimé : No smoking de Michaël Mention

- J'ai bien aimé : Retour de soirée de Valentin Musso ; Doigts d'honneur de Danielle Thiéry ; Une main en or de Jacques Saussey ; Zeru Zeru d Maud Mayera ;

- J'ai moins aimé : Signé de Benoît Philippon ; 8118. Endroit de Franck Thilliez et Laurent Scalese

- Je n'ai pas aimé : 8118. Envers de Franck Thilliez et Laurent Scalese ; L'ange de la vallée de Solène Bakowski ; Mer Carnage de Éric Cherrière ; L'ombre de la proie de Ghislain Gilberti.


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Gamine Guerrière Sauvage

Je découvre Eric Cherrière avec ce roman, et quelle belle découverte ! Je ne suis pas prête de l'oublier cette "Gamine Guerrière Sauvage", un personnage à la moralité certes élastique, mais comme on la comprend à certains moments (pas toujours, quand même !).

L'histoire s'ouvre sur un enterrement. Maud, 7 ans, accompagne son grand-père, et il va profiter de cet instant pour lui inculquer les bases de la vie, selon lui : " La vie, c'est comme la guerre, ma petite Maud, les seuls vainqueurs sont ceux qui survivent". Ou bien encore : " N'oublie pas, ma petite Maud : il n'y a ni bonnes ni mauvaises armes. Au bout du compte, une seule chose importe. Rendre les coups." Ces conseils avisés ne seront pas oubliés...

Dans la première partie, nous retrouvons Maud à 15 ans. Elle vit à Tulle, au sein d'une famille très soudée, Maman est une ancienne body-buildeuse au corps superbe mais au visage ingrat, Papa aurait voulu être une star de l'athlétisme, mais hélas ses jambes ont flanché au mauvais moment, c'est donc sur son fils Alban qu'il reporte ses espoirs déçus. Ils bossent dur tous les deux, elle comme vigile dans un supermarché, et donne des cours en extra à L'Athéna Fitness Club pour arrondir les fins de mois, lui à la Fab, la fabrique d'armes. Maud est une excellente élève, un an d'avance au compteur, elle se retrouve dans la même classe qu'Alban, 16 ans, qui par contre est à la traîne niveau scolaire. Ils sont très proches tous les deux, même s'ils semblent très différents au premier abord. Le tableau familial ne serait pas complet sans le grand-père, aux idées bien arrêtées sur le capitalisme et ses méfaits.

Seules particularités de Maud : elle est née le 11 septembre 2001, date de sinistre mémoire, et, pour une raison encore mystérieuse, sa main droite est tranchée au niveau du poignet. N'ayant pas beaucoup d'amis dans la vie réelle, elle s'en fait via les réseaux sociaux, où elle navigue avec une aisance insolente, au point d'être capable de pirater tous les renseignements qui pourraient lui être utiles. Ce petit talent va se révéler crucial dans la suite de l'histoire...

L'existence de cette famille apparemment simple et sans histoire va chavirer brutalement, par la faute de Klaus Barbie. Cela vous semble étrange, que vient faire un criminel nazi dans cette histoire ? Je ne vous le dirai pas !

Sachez juste qu'à partir de là, la Gamine va se muer en Guerrière, et devant l'injustice de cette société qui vous enfonce pour une erreur de parcours, elle ira très loin, aussi bien géographiquement qu'en brisant les barrières morales, et elle entraînera toute la tribu avec elle. Puisque la Justice a failli, elle va d'abord chercher à s'y substituer à sa façon, mais cela ne lui suffira pas. Son histoire familiale lui fera croiser un être maléfique, qui la fascinera et la transformera en Sauvage.

Bien mystérieux tout ça ! Mais quand on lit le roman, les faits s'enchaînent très naturellement, jusqu'à ce moment où l'on se dit : "Non, là quand même, c'est trop !" On la comprend, Maud, ce n'est pas juste tout ça, mais peut-on cautionner... ? Pas moi en tout cas, mais ne perdons pas de vue que nous sommes dans une fiction, ce qui autorise certains "débordements". Maud a sa propre moralité, qui n'est pas celle de tout le monde, il n'empêche que j'ai été assez admirative devant sa détermination et sa débrouillardise. Les parents et le frangin à côté font bien pâle figure, on se demande d'où Maud tire ses gènes ! Peut-être de cet arrière-grand-père du côté maternel qui par sa bravoure a hérité d'un kilomètre carré de terre en Arctique ?

Le grand-père paternel est la figure attachante de l'histoire, c'est autour de lui que tous se retrouvent pour les bons moments. On a envie de le protéger, c'est d'ailleurs ce que Maud fera, en lui épargnant la vérité sur ses agissements. Quelques personnages secondaires apparaissent ça et là, le copain Raphaël, sa mère Marie patronne de l'Athéna Fitness Club, un membre de la Cour Pénale Internationale de la Haye interpellé par Maud, et le dirigeant d'un "think tank" norvégien, dont le grand-père a bien connu le propre ascendant de Maud. Ils ont tous leur utilité dans le récit, mais excepté Raphaël, aucun ne suscite la sympathie ! On croisera aussi les amis très particuliers que Maud s'est fait par le biais d'internet, des victimes de guerres, des meurtris de la vie qui font paraître sa propre mutilation presque insignifiante en comparaison.

Toute l'histoire est relatée par Maud, on n'a donc que son point de vue. Cela pourra gêner certains lecteurs, personnellement ça n'a pas été mon cas, puisque tout le roman est centré sur elle.

J'ai vraiment beaucoup aimé ce roman, et je remercie sincèrement Babelio ainsi que les éditions Plon qui m'ont fait l'honneur de me sélectionner comme "expert polar", ce qui me ravit comme vous l'imaginez sans peine ! Grâce à eux j'ai découvert un nouvel auteur dont je vais me procurer dès que possible "Mon coeur restera de glace".



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Mon coeur restera de glace

«  La folie humaine prend des formes inattendues, le diable n'est le serviteur de personne: Cette jouissance du mal que l'on donne » ..



C'est l'histoire d'un certain Lucien Faure, boulanger de son état et maire d'un petit village de Haute Corrèze .

En 1918 Il perd son fils et ses petits - fils, le premier disparu au front , l'ainé de ses petits- fils revenu très abimé , le plus jeune enfoui au plus profond de cette forêt de chasseurs, épaisse , vivante et ténébreuse ( Les bois et les secrets enfouis ) , n'a jamais été revu.



En 1944, un convoi allemand traversant la même forêt disparaît aussi.



En 2020, seulement , un ancien criminel de guerre allemand est sur le point de révéler la vérité , le passé s'éclaircira - t- il?



Va t - il révéler les secrets de cette forêt qui ébranlera les existences et bien des certitudes , bien des familles aussi?



La trame narrative révèle trois histoires parallèles : 1918, 1944, 2020, et parvient à lever doucement , de manière progressive, les mystères au coeur de cette forêt multiple , sombre et dense, merveilleusement décrite.



Les scènes durant les deux conflits sont davantage des instantanés mettant en avant des personnages «  ordinaires » que le «  sang » va lier jusqu'à ce qu'il ne reste qu'un témoin du côté allemand .



Suspense et surprise: le décor en forêt est magnifiquement visuel, chaque page tournée offre un contraste saisissant entre la poésie insolente des lieux et l'atrocité des actions des hommes , livrés à de bas instincts primaires, le «  Croque-mitaine » , figure du mal absolu hante cette forêt .



Tordue à souhait , cette fable, plutôt un conte naturaliste, traite de l'horreur de la guerre , interroge sur la barbarie à visage humain, confrontant le lecteur à l'atrocité des exactions et exécutions sommaires, celle dictée par la folie à l'état pur .

Le Mal est Universel, ça se lit avec attention, émotion contenue , réflexion, questions....douleur .....

Comment appréhender une telle réalité cruelle ? Cette histoire dense, âpre , absorbante qui empêche de respirer parfois tellement elle bouscule, chahute, horrifie, glace, questionne sur notre propre humanité ?



Les personnages sont finement décrits , l'écriture sublime, travaillée au petit point, ciselée, révèle aussi le beau à l'envers du malheur , couvre un siècle de guerres fratricides

L'auteur en décrivant la noirceur , les horreurs auxquelles l'homme peut s'adonner dessine la trame commune à la guerre et la mémoire de guerre .



Il faut avoir le coeur bien accroché pour lire jusqu'au bout ce roman noir , court, puissant , bouleversant , sombre , strié de lumière parfois, brutal mais d'une vraie beauté stylistique !

Cet écho de la guerre en fait une lecture difficile , douloureuse mais nécessaire !

«  Invisible et silencieuse , l'ombre se propage de sapin en sapin , emportant avec elle un vieux fusil de chasse.

«  Ces hommes - là qui se disent adieu se haïssent autant qu'ils s'aiment , comme s'ils avaient besoin de se raccrocher à quelque chose d'autre que des montagnes d'enfants morts »....



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Toucher le noir

« Toucher le noir » est un recueil de nouvelles. Elles sont au nombre de 10 et écrites par des grands noms de la littérature noire francophone. Il s’agit du troisième tome d’une série consacrée aux 5 sens. Je n’ai pas encore lu les deux premiers mais ce troisième m’a enthousiasmée et je ne manquerai donc pas de corriger ce petit impair.



Les nouvelles ne sont pas un genre littéraire que je connais beaucoup. Il suffit de parcourir mon blog pour constater que je lis que rarement des recueils. Pourtant, lorsque je me laisse tenter, j’en ressors ravie et jamais déçue.



Il est courant de penser que parce qu’il s’agit de nouvelles, on risque de ne pas accrocher ou de ne pas s’immerger complètement dans l’histoire. Or, c’est faux, car dans ce recueil précisément, je n’en ai pas trouvé de moins « bonnes » ou pour lesquelles j’aurais eu l’impression d’un sentiment d’inachevé.



Chacune est l’exemple parfait de l’univers singulier de chacun des auteurs. Afin de ne pas faire de jaloux parmi les auteurs, je ne dirai pas laquelle j’ai préféré. Non, en fait, c’est faux, c’est tout simplement parce que je les ai toutes aimées.



J’ai trouvé que le thème du « toucher le noir » est parfaitement respecté et c’est hyper intéressant de constater comment chacun des 10 auteurs se l’accapare et le développe.



Si vous ne connaissez pas l’un ou l’autre des écrivains qui sont présents dans ce recueil, cela pourrait vous offrir un très bon avant-goût de ce qu’ils produisent et vous donnerait très certainement l’envie de découvrir leurs bouquins personnels.



Voilà plusieurs raisons qui, j’espère, vous feront envie de découvrir le noir, sous toutes ses formes.
Lien : https://www.musemaniasbooks...
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Gamine Guerrière Sauvage

Après avoir beaucoup apprécié « Jeu de peaux » d’Anouk Shutterberg dans le cadre du club des experts du polar des Editions Plon en compagnie de Babelio, j’ai tenté « Gamine guerrière sauvage » d’Eric Cherrière.



Ce ne fût pas une lecture désagréable ou contraignante loin de là, car une fois plongée dedans, le livre m’a plu. Mais en même temps, et je dois avouer que c’est d’ailleurs bien dommage, deux éléments m’ont « dérangée » dans ce livre.



La première concerne en quelques sortes les invraisemblances. Alors oui, je sais, on est dans un livre, on peut en jouer. Je pense d’ailleurs avoir l’esprit assez ouvert, il suffit de regarder mes choix éclectiques en matière de littérature. Mais certains détails comme au sujet de l’Antarctique ou de la Cour Pénale Internationale « faisaient trop gros » et donnaient au livre un côté burlesque qu’il m’était parfois malaisé d’apprécier. Une fois que je commence à lever les yeux au ciel, cela induit un souci à ma lecture.



Ensuite, la seconde chose relevée et quand même assez conséquente pour que je la mentionne est que je n’ai pas apprécié le personnage de Maud, issue d’une famille que l’on pourrait facilement qualifiée de losers. Autant durant la première partie du livre, j’ai trouvé son personnage assez intéressant, autant dans la seconde, je l’ai trouvée détestable.



Attention, c’est peut-être quelque chose de voulu de la part de l’auteur et c’est pourquoi je ne dénigre pas la qualité du livre! L’empathie que j’avais pu éprouver pour elle s’est -finalement – bien vite envolée. Par contre, j’ai trouvé le personnage du grand-père profondément attachant. Je pense qu’il faut prendre ces personnages comme ils viennent avec un certain second degré.



Écrit à la première personne du singulier, c’est comme si Maud elle-même nous narrait son histoire. Comme je l’ai déjà fait remarquer dans l’une de mes chroniques pour un autre livre, je trouve que cela permet une meilleure immersion du lecteur dans le récit.



Comme vous l’aurez compris, malgré deux points mitigés, cela n’en est pas une mauvaise lecture pour autant que je vais m’empresser d’oublier. J’ai, malgré tout, passé un bon moment de lecture et vous invite à vous forger votre propre opinion puisqu’il ne s’agit que de mon humble avis.



Voilà que l’aventure des experts du polar en compagnie des Editions Plon et Babelio se poursuit et je la trouve hyper intéressante par les livres proposés. Déjà deux lectures fort bien différentes mais par lesquelles je me suis laissée porter.
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Toucher le noir

Troisième recueil de nouvelles noires sur les 5 Sens, orchestré par Yvan Fauth qui m’a fait connaître et apprécier les nouvelles ! Il faut dire que ma première lecture a été “Regarder les voitures s’envoler” d’Olivier Norek, traumatisante et inoubliable !! Oui, oui !



Dans ce volume 10 nouvelles pour 11 auteurs, dont un duo qui fonctionne plutôt bien ! Je reprends ma première façon de noter, par nouvelle et avec la première idée ou impression que j’ai eue.



“8118 Envers” - Frank Tilliez et Laurent Scalèse : Le Destin !! 5*



“Retour de soirée” - Valentin Musso : Et paf, retour de bâton ! 5*



“L’ange de la vallée” - Solène Bakowski : Je n’ai pas compris où se trouve “le toucher” 3*



“Signé” - Benoît Philippon : Manque de peau !! 4*



“Mer Carnage” – Eric Charrière : J’ai trouvé la fin un peu “légère” 3*



“No Smoking” – Michael Mention : Excellent ! 5*



“Doigts d’honneur” - Danielle Thiéry : La musique adoucit les mœurs ! Ha ha ha ! 4*



“L’ombre de la proie” – Ghislain Gilberti : Surprise ! 5*



“Une main en or” – Jacques Saussey : Donne-moi ta main et prends la mienne... ! 4*



“Zeru Zeru” – Maud Mayeras : J’ai été émue car histoire trop proche de la réalité. 4*



Bravo à tous les auteurs de s’être pliés à l’exercice imposé, ce qui n’est jamais simple, en particulier à celui-ci que j’ai trouvé ardu et merci d’avoir autant d’imagination !



#Toucherlenoir #NetGalleyFrance



Challenge PLUMES FEMININES 2021

Challenge MAUVAIS GENRE 2021
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Toucher le noir

Même si j’en ressors moins convaincu que par les deux précédents opus, « Toucher le noir » m’a offert un bon moment de détente.

J’ai aimé découvrir à travers ces nouvelles quelques plumes qui m’étaient jusque-là inconnues.

J’ai particulièrement aimé le texte de Valentin Musso, qui nous pour un « Retour de soirée », nous offre une expérience inattendue dans un restaurant plongée dans une obscurité totale. Tout est dit en peu de pages c’est à la fois glaçant et assez drôle, pour peu que l’on apprécie l’humour, Noir, bien sûr.

Merci à NetGalley et aux Editions Belfond.

#Toucherlenoir #NetGalleyFrance



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Mon coeur restera de glace

s rencontré en 2015 au festival du film policier de Baune pour son long métrage "Cruel "mais il revient en force en cette année 2020 .



Il a finalisé il y a peu ," Ni dieux ni maitres, un film d'aventures médiéval qui devrait arriver sur nos écrans au cours de l'année, et surtout il a publié un formidable roman "Mon coeur restera de glace", qui vient de sortir chez Belfond et qu'il viendra défendre dans un mois à Quais du polar.



Ce roman traite de l'horreur de la guerre et de la barbarie à visage humain, mais sous la forme d'un conte poétique et naturaliste qui se déroule au fond d'une foret sombre et dense de Haute Corrèze.En jouant sur trois temporalités différentes : 1918, 1944 et 2020, et sur un personnage de légende, le Croquemitaine, figure du mal par excellence hante cette forêt qui traque les soldats allemands, Eric Cherrière fait de son récit une sorte de film très visuel qui joue avec les montages et les temporalités sur plusieurs générations .



Usant de la métaphore poétique pour contrer le réalisme le plus cru , "Mon coeur restera de glace " a la grande originalité de tisser en fonction de ces trois histoires parralèles et sa mécanique narrative parvient à lever progressivement les mystères qui lient ces trois récits entre eux.



"Régénéré à l'idée de combattre un véritable ennemi, Papa Von Wissen donne l'ordre de continuer et voit Stolker porter la main sur son coeur, là où il range ses photos de famille .Là où il se réfugiait pour pouvoir éxécuter les ordres dans les villages de Bilérorussie. Un territoire ou rien ne l'atteint, sauf un avant."



De quelle sauvagerie sont capables les hommes? Inspiré par le livre de Christopher Browning "des hommes ordinaires", Eric Cherrière tente de sonder l'animalité qui se cache derrière le soldat le plus lambda pour arriver au crime le plus barbare.



Gardant sa part de mystère à la fin de la lecture, "Mon coeur restera de glace " raconte la fabrique des bourreaux mais le fait non pas de manière frontale, mais avec la poésie et le sens de la mépahorie qui réussisent à nous tenir à distance et en même temps à nous forcer l'admiration.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Toucher le noir



De retour chez elle après une soirée mémorable, Ashley emmena Aksil directement dans sa chambre, sans plus tergiverser.

C'était vraiment magique ce second rendez-vous. Elle n'avait jamais rencontré de garçon aussi épatant. Il était non seulement beau mais également raffiné, cultivé, altruiste et généreux.

Aksil était pompier, il sauvait tous les jours des vies humaines en mettant en péril sa propre existence. Et hier soir il l'avait emmenée à la soupe populaire où elle l'a aidé à donner un repas décent aux trop nombreux sans abris, qui toujours les remerciait d'un sourire ou d'un simple signe de tête. C'était gratifiant. A ses côtés elle devenait meilleure.

Sans attendre, leurs corps brûlant d'un ardent désir, ils s'embrassèrent avec fougue.

Leur raison disparut progressivement au profit d'une passion dévorante et déjà de premiers vêtements tombèrent au sol. Ils n'étaient plus guidés que par l'envie de nouvelles sensations, à la découverte de leurs corps respectifs, totalement enivrés.

Aksil humait le parfum d'Ashley, effleurait sa peau d'une incroyable douceur. Rien que ce contact lui donnait déjà le vertige.

Peau d'ébène contre peau d'albâtre, le yin et le yang prêts à se retrouver et à unir leurs courbes pour ne plus faire qu'un.

Ashley gardait les yeux ouverts, admirant le torse musclé de son amant couvert de fines gouttes de sueur. Elle massa ses épaules puis s'attarda sur son torse couleur charbon, toucha ensuite ses abdos parfaitement dessinés et tout aussi noirs avant de descendre lentement encore et de se saisir ...



***



Il n'en fallut pas davantage pour donner à Yvan Fauth la nausée. Il a lu quelques nouvelles d'auteurs amateurs souhaitant figurer dans le troisième volet de nouvelles réservées à l'exploration des cinq sens version macabre et meurtrière.

Le titre sera toucher le noir, pas toucher un noir et encore moins coucher avec un black.

C'est ainsi que mon manuscrit partit à la poubelle.

Même s'il sera bien question d'hommes noirs dans la terrible nouvelle Zeru Zeru de Maud Mayeras qui dénonce des pratiques toujours en cours dans l'Afrique d'aujourd'hui. Comme un conte d'une inimaginable cruauté. A part que ça n'a rien d'une simple fable.



Je trouve que très peu d'auteurs ont respecté le thème du recueil. Le sens du toucher, sans recopier l'intégralité du dictionnaire, c'est tout ce que peut ressentir notre épiderme. Les températures, le contact d'un mur rugueux, d'un livre écrit en braille. Une pression exercée ou encore la distinction des formes. Tout ce à quoi est sensible notre vaste système nerveux : sensations de douleur, de picotements, plaisir sexuel, en résumé toutes ces informations qui remontent de notre peau jusqu'à notre cerveau.

Ici, il est davantage question de dons artistiques et plusieurs auteurs ont même détourné le sujet en écrivant mot pour mot "toucher le noir" comme ils auraient pu rédiger "étreindre les ténèbres".

Comme pour se justifier et dire que les règles du jeu ont bien été respectées.

Je trouve dommage d'imposer désormais des sujets à chaque publication de recueil, mais même si l'imagination des auteurs peut s'en retrouver bridée il faut admettre que c'est également intéressant de voir toutes les directions insoupçonnées qu'une même thématique peut parfois prendre.



Franck Thilliez et Laurent Scalese ont en tout cas joué le jeu. Ce n'est pas leur première collaboration puisqu'en 2013 ils avaient déjà publié "L'encre et le sang" aux éditions Pocket.

Ils ouvrent ce recueil avec "8118 - envers" et le clôturent avec "8118 - endroit". Vous ne serez pas sans remarquer que le chiffre choisi peut aussi bien se lire à l'envers comme à l'endroit.

Alors non, il ne s'agit pas de deux nouvelles complémentaires ( encore que ) mais d'un texte qu'on vous propose de lire en commençant par le début, ou par la fin. Leur histoire nous projette quelques années dans le futur aux Etats Unis, pays plus que jamais sous la pression du lobbying des armes à feu. Même si certains romans se sont déjà prêtés à ce genre d'exercice, c'est la première fois que je lis une nouvelle respectant tous les codes du genre ( jusqu'à la chute ) dans ce format. Impossible de parler du don d'un des principaux personnages sans gâcher la fin d'un des textes, mais on est tout à fait dans le sujet.

Un peu déroutant au départ, on peut rapidement se raccrocher au fil conducteur de chaque partie mais c'est avant tout par l'originalité de sa construction que se démarque cette histoire.



Solène Bakowski, auteure des géniaux Miracle Une bonne intention, a également assuré sa part du contrat avec "L'ange de la vallée" qui présente de nombreux degrés de lecture. Dans un monde imaginaire, une fillette va redonner progressivement foi aux habitants victimes de la sécheresse annihilant leur récolte.

Telle une sainte, un messie, elle possède notamment le don de guérison. D'un simple toucher.

Mais que représentent l'innocence et la bienveillance dans un monde perverti par la cupidité et le profit ?

Les miracles ont-ils un prix ?



Ghislain Gilberti nous offre quant à lui une nouvelle à tiroirs avec L'ombre de la proie. Qui fait automatiquement penser à Une nuit en enfer. Il joue avec les genres, avec les codes, entraînant à trois reprises le lecteur dans une nouvelle direction insoupçonnée. Pourtant, dès les premières lignes, l'ambiance malsaine semble posée. Un pédophile suit une gamine, la petite Alice, repérant la moindre de ses habitudes quotidiennes en attendant le bon jour pour agir. Mais lui même est surveillé par une milice armée et prête à intervenir quand il passera à la vitesse supérieure. Mais qui est réellement la proie dans ce jeu du chat et de la souris ? Quant au Noir, il sera bel et bien touché. Au sens propre.



Benoît Philippon, Danielle Théry et Jacques Saussey ont privilégié l'art pour illustrer la notion de toucher. Le tatouage, la musique, et le dessin. Trois disciplines qui demandent pour être reconnues du savoir-faire, du travail, du talent. Des mains seront écrabouillées, torturées, coupées ( par exemple une femme poursuivie en danger de mort coupe son avant-bras et le jette à ses chasseurs pour avoir une chance d'échapper à son sort funeste au début de la nouvelle de Benoît Philippon ) mais si les mains symbolisent le sens du toucher, ce n'est pas le cas du don artistique.

Rien à signaler sur le texte de Danielle Thery, il s'agit ni plus ni moins de résoudre une affaire policière, celle du meurtre d'un jeune pianiste quelques jours avant un concours primordial.

Des mains en or de Jacques Saussey m'a d'abord plu avec son pacte entre un directeur de pénitentier sans scrupules et un prisonnier surdoué en dessin. Mais le récit traîne un peu en longueur et finit un peu en pétard mouillé. Avec une impression de déjà vu comparé aux textes que le joaillier avait déjà rédigé pour les recueils Santé ! et Dons.

J'ai beaucoup aimé en revanche Signé de Benoît Philippon, histoire dans laquelle les premières oeuvres d'art de Marcy, artiste underground dont la popularité n'a fait que croître, valent des millions. Les peaux des personnes qu'elle a tatouées sont vendues à prix d'or sur le darknet. Son plus grand fan, le plus grand collectionneur ce ces peaux écorchées, organisera un tête à tête avec avec son idole. Beaucoup de tension mais aussi énormément d'humour dans ce texte plaisant.



Beaucoup d'humour et de tension également dans la longue nouvelle de Michaël Mention pour qui le noir est le pétrole. Il choisit comme contexte un ascenseur en panne de la plus grande firme pétrolière des Etats Unis en 1971 ( la Alpha Oil compagnie ) dans laquelle deux hommes enfermés vont devoir discuter. On les suit minute par minute comme un étrange couple qui n'a rien de commun mais qui pourtant n'est pas réuni ce soir là juste par hasard, le tout dans un contexte historique particulier.

Mais là encore je cherche encore le sens du toucher dans un texte qui n'est pas inintéressant mais qui souffre de quelques longueurs.



Un peu d'écologie également avec Eric Cherrière et sa Mer Carnage. Pas grand chose à voir avec le toucher là non plus, si on excepte la sensation de frôler une âme des plus noires lors d'une intervention chirurgicale du cerveau. Cependant, la nouvelle demeure une réussite en mettant en comparaison et en lien deux crimes atroces reliés de bien des façons. Un assassinat des plus horribles où une famille périt sous les coups d'un sociopathe assez fou pour extraire un foetus du ventre de sa mère et le poser dans un berceau. Et un fabricant de plastique, seul survivant de cette tragédie qui a mis tout son coeur à développer l'entreprise de son père jusqu'à avoir des entreprises implantées partout dans le monde. Et le pollueur, l'un des acteur du septième continent, va enfin avoir la chance de se venger de l'homme qui lui a tout pris.

Des années après un meurtre aussi odieux un pardon est-il encore possible ?

Le bien, le mal, tous les repères sont faussés dans ce texte qui part un peu dans tous les sens mais qui m'a plu.



Quant au texte proposé par Valentin Musso, il commence de façon extrêmement surprenante avec le retour de soirée d'un couple qui discute en voiture, un retour qui ne va pas tout à fait bien se passer. L'auteur met en avant trois des cinq sens : la vue, le goût et le toucher. Cette fameuse soirée s'est en effet déroulée dans un restaurant où on mange en aveugle, devinant les aliments par leurs formes et leurs saveurs.

Si on peut deviner la chute assez rapidement, l'idée de départ n'en demeure pas moins originale.





Je ne peux pas vraiment dire que beaucoup de nouvelles m'ont vraiment fait vibrer, mais aucune ne m'a déplu non plus. C'est très rare d'ailleurs quand je lis autant d'auteurs différents à la suite de ne pas faire le grand écart.

Mon léger regret, je l'ai déjà évoqué. On sent quand même les nouvelles commandées aux auteurs pour l'occasion et tous n'ont pas joué le jeu, ou n'ont pas eu l'inspiration nécessaire et se sont rattrapés aux branches pour coller vaguement au titre du recueil ( et même pas à son sujet ). Le toucher n'était pas non plus le sens le plus facile à exploiter.



***



Après l'amour, Iksal s'endormit entre les bras d'Ashley. Elle le contempla longuement, la lueur de la pleine lune illuminant sa chambre. Il avait l'air si fragile ainsi lové contre elle.

La fatigue finit par s'emparer d'elle à son tour et elle embrassa ses lèvres tout doucement, ressentant encore des frissons de plaisir.

Elle se promit de tout faire pour que dure leur relation, persuadée qu'elle était enfin tombé sur l'homme qui saurait prendre soin d'elle.

D'atroces bruits de craquements la firent se réveiller deux heures plus tard. Ils provenaient de son nouvel amour qui la serrait toujours contre elle, mais beaucoup plus fort, avec des bras désormais tordus.

Elle sentit ses griffes se planter dans son dos et hurla quand elle vit son visage, ses yeux rouges qui la fixaient, sa gueule dont les dents lui arrachèrent la carotide en un seul coup de mâchoire.

La dernière chose qu'elle sentit, du bout des doigts, fut la douce fourrure d'Iksal.





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Gamine Guerrière Sauvage

Maud a 15 ans.

Maud est une ado rebelle.

Enfin, c'est dans cette catégorie qu'on pourrait la ranger à la lecture de Gamine guerrière sauvage d'Éric Cherrière.

Un jour, elle décide de prendre sa famille en main (au singulier. Si vous voulez en savoir plus, direction votre libraire préféré), pour le meilleur et pour le pire.

Sa famille ?

Un père, qui doit avoir le Q I d'un crustacé au vue des conneries qu'il fait et qui les mettent en danger.

Une mère bodybuildée, qui fréquente sans doute le même coquillage et qui ne risque pas de rattraper les erreurs de son mari.

Un frère, qui suit aveuglément sa soeur.

Et un grand-père, dont la faucille et le marteau de la révolution prolétarienne sont les emblèmes.

Maud a un petit côté Lisbeth Salander (mais si, vous savez, l'héroïne de la série Millénium), les tatouages et la violence en moins.

Enfin, la violence, elle sait s'en servir, mais elle délègue.

Sous la plume efficace de l'auteur, la jeune fille, au dessus de laquelle plane l'ombre d'un arrière-grand-père au passé trouble, va entraîner ses proches et le lecteur avec eux, dans une incroyable et périlleuse croisade qui les conduira jusqu'en Norvège, avec même un passage par le Tribunal Pénal International.

Si cette partie là m'a un peu dérouté, c'est aussi parce que Cherrière fait bien son boulot. On est dans la tête d'une adolescente, ne l'oublions pas. Malgré sa maturité et son sens des réalités, il arrive que Maud retrouve une certaine naïveté qui pourrait lui coûter cher.

D'ailleurs, sa guerre fera des victimes, on ne fait pas d'omelette sans casser d'oeufs...

Vous cherchez un roman addictif avec un personnage qui vous fascine, vous agace ou vous émeut ?

Ça s'appelle Gamine guerrière sauvage, c'est l'histoire d'une fille qui rêve de changer les choses, qui rêve de changer le monde et qui est prête à tout...











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Toucher le noir

Un recueil de nouvelle autour du polar, quoi de plus basique. Mais quand les nouvelles tournent autour des cinq sens, avec un sens par recueil, le concept a de quoi attirer l'attention. Je n'avais pas lu les 2 précédents opus (Écouter le noir et Regarder le noir), mais j'ai plongé avec envie dans ce livre.

La sélection proposée est vraiment variée et vient de grands noms du polar, comme d'auteurs plus confidentiels, qui offrent une variation sur le toucher, survolant toutes les nuances du noir, de l'enquête de police au thriller domestique en passant par un peu de fantastique.

J'ai vraiment pris beaucoup de plaisir à découvrir ses nouvelles vraiment passionnantes à lire. Chaque auteur offre une histoire vraiment originale plus ou moins proche du thème, mais toujours intéressante à lire.

Et maintenant, je suis vraiment curieuse de découvrir les tomes déjà parus, mais aussi ceux à venir.
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Mon coeur restera de glace

Le devoir de mémoire. Un sujet plus complexe qu’il n’y paraît, jusqu’où peut-on aller pour creuser les tréfonds de l’Histoire.



1918, 1944, 2020. Un passé pas si lointain, quelques rares témoins encore présents d’une époque, la seconde, dont les liens sont indéfectiblement liés au début du siècle et au siècle nouveau. Les traces sont là, il faut arriver à les suivre.



Mon cœur restera de glace n’est pourtant pas un livre de guerre, pas au sens premier. L’histoire se déroule en trois temps, mais les scènes durant les deux conflits sont davantage des instantanés qui mettent en avant des individus ordinaires, que le sang va lier à travers le temps. Jusqu’à ce qu’il ne reste qu’un témoin, du côté allemand, dont on attend qu’il raconte. La grandeur de l’Histoire n’est en fait que la combinaison de petites histoires.



Voilà un récit court mais percutant, sombre mais strié de rais de lumières (qui font tout aussi mal, à leur manière), brutal mais d’une vraie beauté stylistique.



Ce roman est une arme à deux coups. Métaphoriquement, le premier vous frappe au cœur à travers un récit qui ne peut laisser insensible. Le second vous touche à la tête, tant l’écriture est ciselée, travaillée. Émotions et réflexions.



Voilà un livre qui n’est pas facile à appréhender. Pas le genre qu’on peut lire en pensant à autre chose. Il mérite investissement et attention pour apprivoiser cette écriture subtile et parfois violente.



Eric Cherrière est écrivain, réalisateur et scénariste (Grand Prix du festival de Cognac pour le film « Cruel »). Un talent protéiforme, très personnel, original. Une approche poétique dans la manière de donner de la force aux émotions par le pouvoir de mots choisis, par le soin apporté au style.



Et c’est bien cette écriture si travaillée qui rend ce roman inclassable. L’histoire est forte (certaines scènes sont vraiment dures), les personnages tout autant, et c’est cette plume ambitieuse qui rend la lecture singulière.



On pourrait croire, avant de le lire, que le roman est bien court. Mais au final il est très bien ainsi. La puissance de ces mots n’a pas besoin de davantage d’espace, et la profondeur de la forêt où se déroule une partie du récit vous happe en quelques pages. Ambiance.



Il est question de transmission, de ceux qui gardent une part d’humanité ou au contraire retournent vers leur animalité, quel que soit le camp.



Si vous êtes à la recherche d’un roman à l’écriture soignée et à la construction atypique, mises au service d’âpres émotions, votre cœur ne devrait pas rester de glace à la lecture du nouveau livre d’Eric Cherrière.
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Gamine Guerrière Sauvage

Il y a les livres d’histoires. Et puis ceux de personnages. Je classe ce roman d’Eric Cherrière clairement dans la seconde catégorie.



Non pas qu’il n’ait rien à raconter, bien au contraire ! Mais ce sont vraiment les protagonistes qui sont mis en première ligne. Le récit sert avant tout les personnages et non le contraire. Avec un fond qui se dévoile peu à peu.



Voilà un titre de roman qui plante à la fois le décor ainsi que le caractère de Maud, 15 ans, très intelligente, asociale. L’écrivain dresse le portrait de cette adolescente certes différente, mais que rien ne prédisposait à être mise en lumière dans une société qui se noie sous l’uniformité.



C’est un peu l’âge de tous les espoirs et de tous les dangers, là où on se construit. L’âge où on pense déjà tout comprendre, tout maîtriser. Où tout change, selon le terreau dans lequel pousse cette adolescence.



Le livre est l’histoire de cette quête de repères, de cette construction sur des fondations branlantes sur lesquelles Maud plante ses piquets.



Avec ces trois mots-titres, le futur lecteur pourrait vite s’imaginer qu’elle vit dans une famille dysfonctionnelle, comme on en voit tant, sans amour. Ce n’est pas le cas, son environnement est certes singulier et précaire, mais ils sont comme les cinq doigts d’une main (ce qui ne les empêchent pas de s’entrechoquer régulièrement). Ce père, cette mère, ce frère et ce grand-père sont tous très différents les uns des autres, mais l’affection qui les lie, aussi atypique soit-il, reste une force pour Maud.



Oui, clairement une histoire de personnages (au pluriel).



Cette famille qui vit de peu, survit un peu, avait tout pour passer inaperçue. La misère quotidienne n’est pas vendeuse. C’était sans compter sur Maud, son caractère trempé et sa curiosité. Et ses idées insensées pour sortir du marasme. L’aventure dans laquelle elle va embarquer les siens va les sortir de l’ordinaire pour les plonger dans l’extraordinaire. Au risque qu’ils se brûlent tous les ailes.



A une époque où la bien-pensance, le conformisme deviennent de plus en plus la norme et donne des lignes jaunes à ne pas dépasser, le roman raconte un espace de liberté créé de toutes pièces. Quitte à ce que la frontière entre bien et mal soit totalement brouillée.



Le roman d’Eric Cherrière est amoral. Rien n’est jamais tout blanc ou tout noir, surtout pas quand l’adolescence se construit, encore moins quand on a une personnalité aussi vive. Excessive même.



C’est tout le sel de cette histoire noire, qui donne une intrigue étonnante, choquante parfois, attachante assurément aussi.



Le livre est construit en trois parties. Chacune plus surprenante que la précédente. La dernière plongera le lecteur dans une horreur (tout sauf factice) qui dépasse très largement les pérégrinations d’une jeune fille.



Les préoccupations de l’auteur se retrouvent là, comme dans son précédent roman, Mon cœur restera de glace. Dans ce livre passé, il contait certaines atrocités en pleine deuxième guerre mondiale. Dans ce nouveau roman, l’inhumanité est actuelle. Certains passages donnent des frissons, emportés par une écriture formidable, qui sait autant sublimer le quotidien que raconter l’ineffable.



Avec ses mots, souvent pleins de poésie noire, l’écrivain magnifie les émotions, avec autant de dureté que de subtilité, sans avoir peur de heurter.



Gamine, Guerrière, Sauvage, trois mots qui résument un tempérament. Loin du béni-oui-oui, dans un monde où trouver ses valeurs devient de plus en plus délicat voire illusoire.



Eric Cherrière signe un roman unique, ancré dans notre société, au plus près des émotions, même les plus dures et les plus ambivalentes. Le genre de livre à la personnalité marquée qui pousse à la réflexion tout en se lisant avec les tripes. Et qui reste, au final, gravé quelque part.
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Toucher le noir

Un recueil de nouvelles, c'est comme un ballotin de pralines : on ne sait pas sur quoi on va tomber.



La renommée du chocolatier ne fait pas tout, vous pourriez très bien tomber sur une praline dont le goût ne vous plait pas, même si l'artisan y a mis tout son cœur, toute sa science et qu'il a adoré le goût de sa création.



Ces pralines littéraires avaient toutes un goût de reviens-y !



Cette addiction est la même qu'avec la boîte de chocolat, le ballotin de pralines : vous vous jurez que c'est la dernière, qu'ensuite, vous arrêterez jusqu'à demain matin et puis, bizarrement, vous vous dites que vous en prendriez bien une dernière pour la route, puis une autre...



Avant de pousser plus loin ce recueil et d'aller enfin au lit afin de savoir vous lever demain matin.



8118 est la nouvelle qui ouvre le bal, la première praline qui vous explose en bouche et vous donne envie de replonger pour ressentir ce même effet avec les suivantes. Raconter l'histoire à rebours était une riche idée. C'était diabolique ! (5/5)



Le Retour de Soirée était comme j'aime les nouvelles : inattendue, celle qui vous tacle, qui vous fait ouvrir la bouche, béate de surprise. Putain, Valentin Musso m'a scotché au canapé. C'était machiavélique ! (5/5)



L'ange de la Vallée (de Solène Bakowski) qui, en plus de nous offrir un voyage dans le temps, nous a plongé dans l'obscurantisme, la folie religieuse, dans les pulsions humaines les plus abjectes, dans la cupidité, la recherche du profit à tout prix. J'ai fermé les yeux quelques instants à la fin de la lecture tellement j'avais été secouée. C'était horrifique ! (5/5)



Signé de Benoît Philippon nous fera toucher l'art du bout des doigts tout en nous mettant le cœur au bord des lèvres. Le film "Le tatoué" était drôle, sa nouvelle, par contre, ne l'est pas du tout. Elle est bien noire et retorse, comme je les aime. Parce que pour marquer durablement les lecteurs, un twist final est toujours ce qui marche le mieux. C'était sadique ! (5/5)



Mer Carnage d’Éric Cherrière m'a un peu moins emballée. La vengeance est un plat qui se mange froid et pour se venger, l'Homme est prêt à traverser tout. Finalement, c'est à se demander qui est le plus monstre des deux entre le vengeur ou le coupable. Je pencherais pour le vengeur qui ne réfléchit à rien et qui pourrait priver bien des gens du talent de celui qu'il veut abattre. C'était trop classique. (3/5)



No smoking de Michael Mention est la plus longue des nouvelles. Même sans sa signature, on reconnaît entre mille la patte de l'auteur qui va nous entraîner dans un huis-clos entre deux personnages coincés dans un ascenseur. ♫ Deux étrangers qui se rencontrent ♪ Dans l'ascenseur déjà le désir monte ♪... Le désir de fumer(en 1971, il était, hélas, permis de fumer partout). Désir de s'énerver sur cette panne... Leur échange verbal sera des plus intéressants et une fois de plus, j'ai été mise au sol violemment. C'était magnifique ! (5/5)



Doigts d'honneur de Danielle Thiéry nous prouve que l'on peut faire du policier avec peu de pages, que l'on peut parler de la noirceur de l'Homme sans que cela fasse l'épaisseur d'un pavé et qu'avec peu, on peut faire beaucoup. La musique n'adoucit pas les mœurs, sans doute adoucit-elle les meurtres. C'était la musique, oui la musique ♫ (4/5)



L'ombre de la proie de Ghislain Gilberti avait un goût de nouvelle fantastique. J'ai apprécié le récit, le final que je n'ai absolument pas vu venir, mais il m'aura manqué les émotions durant la lecture de son récit. Je n'ai pas vibré comme avec les autres, ni comme l'auteur a déjà su me faire vibrer dans ses romans. C'était vampirique. (3,5/5)



Une main en or de Jacques Saussey ressemble à une nouvelle tout ce qu'il y a de plus normale, au début. Une prison, une envie d'évasion... On s'évade et puis là, tu te prends l'équivalent d'une porte de prison dans la gueule. C'était clinique. (4/5)



Zeru Zeru de Maud Mayeras nous entraînera dans un village africain où ont lieu des pratiques d'un autre âge, mais qui ont toujours court de nos jours. Son histoire est terriblement noire, horrible, inhumaine, violente. C'était tragique ! (4/5)



Et on terminera avec 8118 à nouveau, la première nouvelle auto-reverse, comme nos bons vieux lecteurs de K7 audio du siècle dernier.



L'art de la nouvelle n'est pas facile, mais une fois de plus, les auteurs ont réussi le challenge sans que l'on ait une sensation de trop peu à la fin de notre lecture.


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