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Citations de Étienne Klein (508)


Il arrive qu'un chercheur comprenne des choses auxquelles, pourtant, il ne parvient pas à croire. Comme si la raison pouvait ne pas approuver ce que l'intellect pur parfois produit.
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D'une façon générale, nous nous montrons beaucoup plus prompts à évaluer les conséquences de nos actions plutôt que celles de nos inactions.
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J'aime mettre mes pas dans ceux des pionniers.Passant par les mêmes endroits qu'eux, j'ai l'impression que mon corps traverse la rémanence de leur spectre.
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« Taille : 1,68 m. Visage allongé, grands yeux vifs, cheveux noirs, teint mat. Pardessus gris fer, chapeau marron foncé. » C’est ainsi qu’est sobrement décrit Ettore Majorana, physicien de génie âgé de trente et un ans, dans une note du ministère de l’Intérieur italien envoyée à toutes les polices : datée du 31 mars 1938, elle marque l’ouverture des recherches pour retrouver le jeune Sicilien, « avec la plus grande discrétion vis-à-vis de l’intéressé », porté disparu quelques jours plus tôt.Le 25 mars 1938, à 22h30 précises, Majorana quitte Naples à bord du paquebot-poste qui effectue la liaison avec Palerme. Quelques heures auparavant, il a adressé une lettre à son ami Antonio Carelli, directeur de l’Institut de physique de Naples, pour lui annoncer « une décision désormais inéluctable » : la vie en général et la sienne en particulier sont inutiles. La lettre se termine sur ces mots ambigus : « De vous tous [ses collègues de l’Institut] je conserverai un affectueux souvenir au moins jusqu’à 11 heures ce soir, et, si cela est possible, même après. » Et si cela est possible… Majorana croit-il pouvoir emporter dans la mort comme une mémoire de ses proches ou bien se pressent-il encore capable de ne pas renoncer à ce monde ?
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Paul Adrien Maurice Dirac fut un grand taiseux. Un presque mutique. Un champion olympique de laconisme. À son sujet, les anecdotes abondent. Elles vont toutes dans le même sens.
En 1931, en séjour à l’université du Wisconsin, Dirac mit un jeune journaliste au bord de la crise de nerfs en répondant ainsi à ses questions :
« Professeur Dirac, j’ai remarqué que vous aviez beaucoup d’initiales devant votre nom de famille : P, A, et M. Ont-elles une signification particulière ?
Non.
Vous voulez dire que je peux les interpréter à ma guise ?
Oui.Par exemple, si je disais que les lettres P, A et M signifient Poincaré, Aloysius et Mussolini, cela vous irait ?
Oui.
Pouvez-vous me donner des nouvelles de vos recherches ?
Non.
Qu’est-ce que vous aimez le plus en Amérique ?
Les pommes de terre.
Allez-vous au cinéma ?
Oui.
Quand ?
En 1920.
– ? »
Après un long silence :
« Peut-être aussi en 1930.»
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En ce premier automne du XXe siècle, Albert Einstein a tout juste vingt-deux ans et il se retrouve sur le carreau. Ce jeune homme au visage pâle et plein, aux yeux noirs et souriants, à la bouche gourmande ornée d’une fine moustache, a perdu sa sérénité. Voilà plus d’une année qu’il a obtenu le diplôme d’ingénieur de la prestigieuse École polytechnique de Zurich – le Polytechnicum, en abrégé – au terme d’un parcours atypique (rebelle à toute discipline imposée, il a quitté le lycée de Munich à seize ans) et avec des notes plus qu’honorables. Il a envoyé de multiples lettres, certaines à l’étranger, mais il ne parvient toujours pas à décrocher le poste universitaire qui lui permettrait de se consacrer à la recherche. C’est pourtant ce qu’il souhaite viscéralement.
Hermann Einstein, son père, est un ingénieur autodidacte qui s’est installé à Pavie, en Italie, où il dirige une petite usine électrochimique. Ses affaires périclitent, et les difficultés financières s’accumulent lentement mais sûrement. Pis, il vient de tomber malade. Le jeune diplômé ne peut donc plus se contenter de donner des cours particuliers de physique ou de mathématiques. Il doit absolument trouver un travail stable et convenablement rémunéré s’il veut pouvoir se lancer sereinement dans ce qui sera – il le sait depuis l’adolescence – la quête de toute sa vie : comprendre la réalité objective, le monde réel, véritable, de ses plus petits constituants au cosmos.
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À la fin des années 1930, la physique théorique apparaissait de plus en plus comme une construction formelle surplombant le langage, en principe impossible à transmettre hors du petit cercle des initiés. Pourtant, un jeune physicien du nom de George Gamow (prononcer Gam-off) entreprit de présenter au public les acquis révolutionnaires de la physique quantique et de la relativité, sans jamais laisser le lyrisme déborder sur les terres de la raison. Non, voulut-il démontrer, toute bardée de mathématiques qu’elle est, la physique ne vise pas l’éradication des mots. Comme toutes les entreprises humaines, elle exige une narration passant par la langue de tous les jours, un processus de diffusion qui la transporte par-delà son cercle d’origine. Il y a même urgence à réveiller la Belle au bois dormant. Mais comment procéder ? En trouvant des astuces, des détours, des analogies permettant de verbaliser – de baliser par le verbe – l’étrangeté de ses concepts. Il ne s’agit pas de photographier la physique, mais de la traduire, de la re-transcrire. Le « truc » de Gamow ? Mettre en scène les concepts, jouer avec, les sortir de leur contexte, les faire évoluer à l’air libre, dans la vie de tous les jours, plutôt qu’essayer de les expliquer d’une façon lourdement, tristement didactique.
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Certaines révolutions sont lentes et ne font pas couler de sang. Au cours des années 1920, la physique a connu une telle révolution, un bouleversement pacifique qui a concerné le seul monde des idées : les physiciens ont alors compris que les atomes, ces petits grains de matière découverts quelques années plus tôt, ne sont pas des objets ordinaires. Leur comportement n’obéissant pas aux lois de la physique habituelle, il a fallu en mettre au jour de nouvelles. Cette entreprise a obligé les scientifiques à abandonner, parfois dans la douleur, souvent dans l’ivresse, quelques-uns des principes les mieux ancrés de la physique classique. D’illustres credos se virent alors contestés pour la première fois. En l’espace de quelques années, le monde est devenu méconnaissable. Et les physiciens ont dû inventer une nouvelle physique, la physique quantique, celle de l’infiniment petit.
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Une telle continuité sémantique en dépit des métamorphoses du signifié interroge : provient-elle de ce que les concepts physiques fondamentaux sont toujours solidaires de catégories plus générales de la pensée qui, elles, ne varieraient quasiment pas ? Ou bien de jeux de langage peu évolutifs qui orienteraient systématiquement nos façons de dire, par conséquent de réfléchir ? (p. 165).
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Étienne Klein
Questionnaire de Proust
Un sujet sur lequel vous avez récemment changé d’avis? La plage. Finalement, c’est pas mal.

Ce que vous vous dites en regardant les étoiles? Il y en a tellement que je me demande comment le ciel nocturne peut être si noir. Mais j’ai la réponse!

Votre randonnée préférée? Courmayeur-Chamonix, en passant par Champex.

Dans une machine à voyager dans le temps, vous iriez où? Au conseil Solvay de 1927 à Bruxelles, pour écouter Einstein et Bohr se disputant à propos de la mécanique quantique.

Un remède à la mélancolie? La mélancolie elle-même. Elle finit vite par me lasser.

Vous écoutez quoi, en ce moment? Quelque chose des (ou sur) les Rolling Stones.

Votre dernier cauchemar? Je randonnais dans la Beauce. Pas la moindre montée…

Un plaisir coupable? Un bon verre de rhum. Mais est-ce coupable?

Complétez l’expression «heureux comme…» Une particule dans sa couche de masse.

«Le monde d’après», avec ou sans guillemets? Avec.

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Étienne Klein
3
Quel lien faites-vous entre la montagne et la philosophie?
Pas de lien direct, mais je me souviens d’un article de philosophie faisant état d’une corrélation entre le genre de paysage que l’on aime et le type de philosophie vers lequel on se sent porté. L’auteur constatait que les amateurs d’alpages, qui apprécient les formes douces et arrondies, étaient plutôt nietzschéens. A l’opposé, ceux qui aiment les arêtes effilées, se plaisent dans les espaces minéraux de la haute montagne, sans aucune végétation, seraient plutôt kantiens: eux s’inscrivent dans une exigence de pureté conceptuelle analogue à celle qu’Emmanuel Kant développe dans Critique de la raison pure. Reste que, l’âge venant, les kantiens peuvent verser peu à peu dans la pente d’un certain nietzschéisme. Souvenez-vous des dernières lignes des Conquérants de l’inutile de Lionel Terray: «Si vraiment aucune pierre, aucun sérac, aucune crevasse ne m’attend quelque part dans le monde pour arrêter ma course, un jour viendra, où, vieux et las, je saurai trouver la paix parmi les animaux et les fleurs»…
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Étienne Klein
2

Vous avez beaucoup travaillé sur le temps, qui semble à la fois distendu et contracté depuis un an. En quoi la notion du temps a-t-elle été bouleversée par la pandémie, et pourquoi?

Durant le confinement imposé par la pandémie, l’interruption brutale de la plupart de nos routines a modifié notre perception du monde et de son rythme d’évolution. En temps ordinaire, nous nous sentons constamment décalés par rapport à je ne sais quelle dynamique vraie qu’aurait en propre la réalité: nous avons toujours l’impression de manquer quelque chose de la course que le monde fait avec lui-même, de stagner dans un retard à la fois culpabilisateur et impossible à combler. Mais pendant la pause à grande échelle que nous avons vécue, nous sommes en quelque sorte devenus «synchrones» avec le monde. Pour une fois, il ne nous devançait pas. L’histoire s’était apparemment mise en hibernation.

Le confinement nous a ainsi offert la possibilité de rebattre les cartes en matière de dynamique existentielle. Il serait intéressant d’observer si, en cette période de réclusion quasi générale, ceux qui avaient auparavant les vies les plus trépidantes se sont plus ennuyés que ceux dont les existences étaient plus tranquilles. Ou si, au contraire, ils ont apprécié l’occasion qui leur a été donnée là de creuser à l’intérieur d’eux-mêmes, de découvrir leur rythme propre, de pratiquer une sorte d’«alpinisme de l’âme». Cela permettrait de savoir ce qui détermine les cadences de nos vies en temps normal: est-ce seulement une affaire de tempérament individuel? Ou plutôt de circonstances et d’obligations qui nous pousseraient à épouser malgré nous de faux rythmes?

La pandémie a encore accentué la donne: nous croulons aujourd’hui sous les informations contradictoires. Comment «faire société» dans un tel contexte?

La réponse est rendue difficile par la numérisation: dès lors qu’il est connecté, l’individu peut désormais façonner son propre accès au monde depuis son smartphone et, en retour, être façonné par les contenus qu’il reçoit en permanence par les réseaux sociaux. Il bâtit une sorte de monde sur mesure, de «chez-soi idéologique», en choisissant les communautés qui lui correspondent le mieux. Certaines des communautés susceptibles de lui convenir peuvent même lui être proposées, voire imposées, par des algorithmes d’intelligence artificielle, ce qui peut l’influencer jusque dans ses croyances les plus profondes par le biais des interactions numériques. Se mettent ainsi en place ce que Tocqueville appelait des «petites sociétés», ayant des convictions et des pensées très homogènes, chacune choisissant sa cause: ces sortes de clans ne sont nullement des lieux de réflexions ou de débats contradictoires comme les salons du XVIIIe siècle, mais les chambres d’écho des pensées collectives de groupes particuliers.

Notre éditorial: Du monde d’après, nous n’avons encore rien vu

Dès lors, il ne semble plus nécessaire que les citoyens s’accordent par un «contrat social», au sens de Jean-Jacques Rousseau, ni même sur les fondements de la coexistence commune. Ni qu’ils s’approprient les valeurs et les idéaux qu’incarnent les institutions républicaines, dès lors que d’autres valeurs peuvent régir leur communauté numérique. Se met ainsi en place une individualisation du contrat social, c’est-à-dire une sorte de primauté du soi connecté ou de la communauté virtuelle sur l’ordre politique, si bien que le subjectif et le spontané en viennent à l’emporter sur le social.

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Étienne Klein
Le Temps: Quel est le rôle d’un philosophe des sciences dans la période que nous traversons actuellement?

Etienne Klein: Si vous m’aviez posé la question avant la pandémie, je vous aurais dit que le philosophe des sciences tente de définir ce que sont les sciences, d’identifier ce qui les démarque des autres démarches de connaissance, de repérer les implications philosophiques des découvertes scientifiques, etc. En ce qui me concerne, je me plais à poser des questions naïves. Constatant que les philosophes parlent du temps, que les physiciens en parlent aussi, je me demande: parlent-ils de la même chose? Si la réponse est non, pourquoi utilise-t-on le même mot? Si la réponse est oui, disent-ils les mêmes choses à propos du temps? Mais la pandémie a quelque peu changé la donne à mes yeux…

Pourquoi?
J’ai été perturbé par la mise en scène de la science et de la recherche scientifique dans certains médias. Une opportunité quasi historique nous était, là, donnée d’expliquer au grand public, en temps réel, jour après jour, la méthodologie scientifique: ses tâtonnements, ses avancées, ses multiples biais, ses succès, mais aussi en quoi consistent un effet placebo, un bon usage des statistiques, la différence entre une corrélation et une relation de cause à effet… Au lieu de la saisir, certains ont préféré mettre en scène une interminable foire d’empoigne entre ego ayant souvent atteint une certaine surdimension. Je crains qu’une partie du public se soit ainsi laissé abuser, et considère désormais que la science est une simple affaire d’opinions qui s’affrontent sans jamais converger.
Je le crains d’autant plus qu’aujourd’hui, la tendance à avoir un avis non éclairé sur tout, et à le répandre largement, semble gagner en puissance grâce aux réseaux sociaux. Dans son sillage, elle distille l’idée que la science ne relève que d’une croyance parmi d’autres. Elle serait en somme une sorte d’Eglise émettant des publications comme les papes des bulles, que les non-croyants ont tout loisir non seulement de contester, mais aussi de mitrailler de commentaires à l’emporte-pièce. Ce spectacle m’a poussé à intervenir publiquement. J’ai écrit un petit essai: Le Goût du vrai. Il ne contient que des banalités, mais par les temps qui courent, les idées plates prennent un certain relief…
Cette mise en scène du discours scientifique a-t-elle, selon vous, évolué sur les douze derniers mois?

Oui, et c’est ce qui me rend optimiste. L’arrogance des uns et des autres a progressivement baissé d’un ton. C’est la manifestation de l’effet dit «Dunning-Kruger», qui s’articule en un double paradoxe: d’une part, pour mesurer son incompétence, il faut être… compétent, d’autre part, l’ignorance rend plus sûr de soi que la connaissance. Durant la pandémie, nous avons vu se déployer en temps réel la dynamique typique de cet effet: à mesure que nous nous sommes informés, nous avons fini par comprendre que l’affaire était plus complexe que nous ne l’avions soupçonné. Aujourd’hui, (presque) tout le monde a saisi que cette pandémie est une affaire diablement compliquée. Du coup, l’arrogance se porte un peu moins bien qu’il y a quelques mois, sauf dans les réseaux spécialement dessinés pour lui prêter main-forte.

La science semble à la fois connaître un âge d’or et une défiance historiques. Comment l’expliquez-vous?

Nombreux sont ceux, en effet, qui doutent de la parole des scientifiques, d’autant que ces derniers se sont souvent contredits. Mais il me semble que nous commençons à pressentir qu’à la fin, c’est la recherche qui aura le dernier mot. Du moins est-il permis de l’espérer. En effet, c’est seulement grâce à elle qu’on finit par savoir ce qu’il en est de telle ou telle question qui avait provoqué, par excès d’impatience, des controverses aussi intenses que stériles. Songeons aux vaccins, qui pourraient bien nous tirer d’affaire, bien plus en tout cas que tel ou tel médicament promu un temps de façon inconsidérée. On n’a guère entendu dans les médias les chercheurs qui, au prix d’un dur labeur, les ont conçus et mis au point. Signe, sans doute, que compétence et expertise s’accommodent aisément de la discrétion…

Nombreux sont ceux qui doutent de la parole des scientifiques, d’autant que ces derniers se sont souvent contredits. Mais il me semble que nous commençons à pressentir qu’à la fin, c’est la recherche qui aura le dernier mot.
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" Pour mesurer son incompétence , il faut être ... compètent !
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(22%) Pour être tout à fait franc, je ne connais pas de définition précise de la science, car la science n’est pas une. Les sciences diffèrent entre elles par leurs objets, leurs moyens, leurs méthodologies. Toutefois, qu’il s’agisse de la physique théorique, de la médecine ou de la sociologie, toutes répondent à cette caractérisation, certes imparfaite car autoréférente, mais utile : les sciences progressent par l’organisation collective des controverses scientifiques. Elles ne sont pas affaire de proclamations individuelles ni de communiqués autopromotionnels. Pour reprendre les mots de Karl Popper, elles procèdent de « la coopération amicalement hostile des citoyens de la communauté du savoir ». Tout résultat scientifique passe d’abord sous les fourches caudines des « pairs », donnant matière à interprétations, à discussions, voire à d’homériques engueulades. Bien sûr, cela ne met pas à l’abri d’éventuelles erreurs plus ou moins persistantes, mais c’est grâce à cette épreuve liminaire que la science peut finalement prétendre avoir fait parler, de façon à peu près claire, un bout du réel.
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Cette question, c'est celle de l'origine : d'où venons-nous ? Et d'abord, d'où vient qu'il y a un univers et non pas rien ? Tout cela pourrait nous laisser indifférents (...).
En réalité, c'est tout le contraire qui se passe : la question de l'origine de l'univers nous passionne. Nous avons beau savoir qu'elle relève du mystère le plus profond, cela n'empêche : dès qu'un discours prétend nous éclairer sur elle, nous tendons l'oreille comme si nous espérions encore pouvoir entendre l'écho du tout premier signal.

Certains nous parlent de création ex nihilo, expression fort curieuse puisqu'elle suggère qu'un méli-mélo de néant et d'être aurait déclenché l'univers. Mais par quel mécanisme le néant pourrait-il avoir cessé d'être le néant ? On ne se bouscule guère pour le dire.
D'autres expliquent qu'au tout début il y avait ceci ou cela. Mais un début qui fait suite à quelque chose qui l'a précédé, est-ce vraiment le début ?
D'autres encore évoquent un cause première, c'est-à-dire une cause qui serait elle-même dépourvue de cause. Mais quel sens pouvait bien avoir le mot cause quand rien n'existait encore ?
D'autres enfin nous parlent du chaos primordial comme s'ils s'y sentaient chez eux. Du coup leurs propos ne sont jamais très ordonnés et pour cause...
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Mais voyager dans le temps, est-ce voyager dans le passé ou plutôt dans le futur ?

Voyager dans le passé suppose que le passé existe encore, ce qui peut se concevoir, mais aussi se discuter. Le passé est-il encore vraiment là, et si oui, où est-il ? Et s'il est quelque part, nous est-il accessible ? Transposées dans le champs de la littérature, ces questions reviennent à se demander où placer le curseur sur une règle dont les deux extrémités représentent, pour l'une, les œuvres de Scott Fitzgerald, pour l' autre, celles de Marcel Proust. Le premier considérait que le passé n'est nulle part, que chaque instant à peine vécu tombe dans un gouffre sans fond, bref que les bonheurs enfouis sont perdus à jamais, et tout cela est forcément déchirant ; l'impossibilité d'un recours ou d'un retour au passé est d'ailleurs la marque la plus tragique de la détresse ordinaire de l'homme.
Proust prétend au contraire qu'on peut partir à la recherche du temps perdu et des bonheurs passés grâce à un travail de purification de la mémoire.
[...]
Si c'est dans le futur qu'on souhaite voyager, même problème : l'avenir est-il déjà là, quelque part à attendre sagement que nous le rejoignons, ou bien n'existe-t-il pas encore ? Dans cette dernière hypothèse, voyager dans le futur serait prendre le risque d'atterrir dans le néant... Et oui, pour voyager dans le temps en toute sécurité, il faudrait pouvoir s'assurer que le passé ou le futur existent en même temps que le présent, c'est-à-dire que tous les moments du temps cohabitent quelque part. Or, la conception ordinaire du temps exclut que des instants différents, ou des moments qui ne se chevauchent pas puissent coexister ensemble...
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(...) j'aime (ô combien) traverser les frontières, établir des connexions entre ce qu'elles séparent le plus souvent de façon abusive : la physique et la philosophie, la vie et l'œuvre, les équations et le langage ordinaire, les idées et le tempérament, l'intelligence et les émotions. Longtemps, j'ai craint que ce mélange des genres, peu respectueux des critères académiques, me soit reproché de façon plus ou moins directe. Mais aujourd'hui, je n'éprouve plus aucune peur de ce genre, car je sais d'expérience que les randonnées aux interfaces et les excursions entre sciences et culture sont le meilleur moyen - peut-être le seul - de donner du goût à la physique.
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Dans toutes les sciences, l'avènement d'une théorie nouvelle fait toujours, progressivement, paraître bizarre la théorie détrônée tandis que cette nouvelle théorie, qui semblait initialement bizarre, devient plus "ordinaire". (p.121)
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Paul (Ehrenfest) retiendra la leçon et adoptera cette méthode lorsqu'il deviendra lui-même professeur. Apprendre, cela doit se faire dans la joie et la gaieté. Et sans hâte. Car lorsqu'elle se précipite, la pensée n'est plus disponible pour la clarté. Il appartient donc au professeur de susciter chez ses élèves une sorte d'enthousiasme calme, sans crispation musculaire ou mentale, qui s'appuie sur la discussion réfléchie de ce qui est avancé.
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